Ferry, hier à Rodez, c'est fait bombardé d'exemplaires de son livre par plusieurs milliers de profs en grève.
Voici les récits de la presse...
CITATION (La Dépêche du Midi) | ||||
AVEYRON - Les manifestants sont venus de toute la région à Rodez, où leur ministre participait au débat national sur l'Ecole 4.000 pour chahuter Luc Ferry Comme prévu par les organisations syndicales, 4.000 enseignants venus de toute l'académie, et au-delà, se sont rassemblés, ce jeudi à Rodez, où se tenait le débat national sur l'Ecole de Luc Ferry, sur le thème: « Ecole et aménagement du territoire ». Massés sur la place de la mairie hier après-midi, les manifestants ont rendu à leurs auteurs, les ministres Ferry et Darcos, quelques centaines d'exemplaires de l'ouvrage « Lettre à tous ceux qui aiment l'école ». Des livres utilisés comme des projectiles contre les forces de l'ordre mobilisées par les services de l'Etat pour tenir la foule en respect. Un succès, pour l'intersyndicale qui estimait, dès le matin, avoir remporté une première victoire symbolique. Informé de la mobilisation des personnels de l'Education nationale, Xavier Darcos avait préféré annuler sa visite au lycée Monteil. Du débat assez creux qui s'est tenu à Rodez, on retiendra surtout le message adressé par les ministres aux participants - des cadres de l'administration départementale de l'Education nationale et des élus proches de l'UMP - en faveur de la réforme de la loi de décentralisation et de ses vertus. Suspectant la machine UMpiste d'avoir verrouillé le débat, organisé après un déjeuner politique servi à des élus triés sur le volet, plusieurs représentants de l'opposition, Martin Malvy, président du Conseil régional notamment, ont décliné l'invitation lancée par le député Yves Censi. La manifestation s'est disloquée vers 16 h 30, mais en Aveyron, comme dans 70 départements, les enseignants ont adopté le principe d'une grève reconductible. -------------------------------------------------------------------------------- La table ronde sur « l'Ecole et l'aménagement du territoire », hier à la mairie de Rodez, n'a souvent été qu'un défonçage de portes ouvertes Tout ça pour ça... Voici comment les communicants du ministère de l'Education on cru pouvoir gommer des mémoires le calamiteux lancement du grand débat national sur l'Ecole organisé à Amiens: en donnant officiellement le coup d'envoi, ce jeudi à Rodez, du même exercice de prospective scolaire dont le second démarrage n'a pas connu plus de réussite que le premier. 4.000 manifestants venus de toute l'académie, quelques centaines d'exemplaires du livre ministériel utilisés comme projectiles lancés sur les gendarmes mobiles ont accueilli la délégation parisienne. Introduits dans l'hôtel de ville par une porte dérobée, Luc Ferry et Xavier Darcos, en pénétrant dans la salle du conseil municipal où se tenait la table ronde, ont fait s'interrompre brutalement les discussions et peser un silence de mort. Comme si les invités, triés sur le volet parmi les amis politiques et les cadres de l'administration départementale et régionale de l'Education nationale, avaient craint une réprimande des ministres chahutés par la foule. Devant eux, Yves Censi, l'organisateur du séjour des deux ministres en Aveyron, agonise. Tétanisé par la tournure qu'a pris l'événement, le jeune député UMP se réfugie sur son fauteuil en attendant que l'orage passe et que les slogans des manifestants se fracassent aux portes closes de l'hémicycle municipal. « MERCI POUR VOTRE ACCUEIL CHALEUREUX » Vociférations au dehors, malaise silencieux au dedans... Philosophe, Luc Ferry remerciera les participants au débat national sur l'Ecole pour leur « accueil chaleureux ». La discussion peut commencer, sur le thème de « l'Ecole et l'aménagement du territoire ». De toute évidence, il s'agit, pour le ministre de la Jeunesse, de l'Education nationale et de la recherche, et son délégué à l'Enseignement scolaire, de prêcher, sans doute devant un public convaincu, la bonne parole de la réforme de la loi de décentralisation selon Jean-Pierre Raffarin. « Les informations les plus folles circulent à ce propos », indique Luc Ferry, qui dément « la fermeture des écoles maternelles, la suppression de la médecine scolaire, des conseillers d'orientation ou des psychologues scolaires. Je comprends pourquoi les colporteurs de rumeurs refusent le débat et le contact avec les représentants du gouvernement. Ils ne veulent pas prendre le risque d'exploser en plein vol », a suggéré le ministre. Des élus de gauche, comme Martin Malvy notamment, ont décliné l'invitation, suspectant une opération politique verrouillée par l'UMP. Pas un enseignant en exercice non plus, Luc Ferry ayant considéré très opportunément que les cadres de l'administration, inspecteurs de l'Education nationale, inspecteur d'académie, rectrice, « ont été et sont des enseignants... ». Tandis que le représentant de l'artisanat remerciera « Monsieur Yves Censi pour son invitation au débat », Marc Censi, dans la salle, lèvera timidement le doigt: « Je peux intervenir? Tout ça me paraît si bien organisé... ». Depuis le début il est vrai, l'animateur a choisi à qui il brandirait le micro, pour alimenter une réflexion se résumant, pour l'essentiel, à un défonçage de portes ouvertes sur les difficultés de l'école en milieu rural et la solution des réseaux, le déficit d'image de l'enseignement professionnel ou encore sur les vertus de la proximité justifiant le transfert de compétences de l'Etat vers les collectivités locales. Au résultat de cette journée plus prolifique en slogans humiliants qu'en vraies bonnes idées, Luc ferry et Xavier Darcos sont peut-être secrètement convenus qu'ils auraient été plus avisés de rester rue de Grenelle... Lionel LAPARADE. -------------------------------------------------------------------------------- Entre 3.000 et 5.000 manifestants attendaient les ministres place de la mairie. Ce jeudi, aux alentours de 14 heures, la tension monte d'un cran. En provenance du jardin public via les places d'Armes et de la Cité et après avoir emprunté les rues Briand et Oustry, les manifestants envahissent l'espace laissé libre autour de l'hôtel de ville de Rodez. Très vite, 3.000 personnes selon la police, 5.000 d'après les organisateurs, se massent derrière la double rangée de barrières disposées en arc de cercle. Le face-à-face avec les deux escadrons de gendarmes mobiles débute sous les huées. Rapidement, trois jeunes femmes particulièrement motivées se mettent à secouer les obstacles métalliques, imitées aussitôt en cela par l'avant-garde de la foule. Sous une bronca qui monte de minute en minute, la pression fait reculer le cordon de sécurité qui appelle des renforts. Sur le flanc gauche, le maigre rempart est enfoncé sous l'oeil préoccupé des responsables des forces de l'ordre. En appui, les bataillons plus en arrière optent pour le tir tendu de la « Lettre à tous ceux qui aiment l'école ». Souvent dédicacés, parfois barbouillés de formules à l'emporte-pièce, les livres du ministre-philosophe volent bas. Les gendarmes casqués n'esquivent même pas les projectiles qui, par dizaines, jonchent peu à peu le sol. « LIBEREZ BOVE, ENFERMEZ FERRY » La sarabande des slogans débute sur un très prisé « Ferry-Fillon, démission » mais la consigne donnée de ne pas aller à l'affrontement est respectée et, de part et d'autre, chacun campe sur ses positions. Dans le no man's land d'un à deux mètres de large qui sépare le bleu marine et noir des bariolés, s'entassent les ouvrages, les tomates, quelques éclats d'oeufs frais, du papier toilette et un cercueil plus vrai que nature. La plaque qui l'accompagne annonce: « Ici reposent les services publics ». Preuve de l'esprit de « concorde » qui s'installe doucement entre les militaires et les enseignants, le symbole macabre est déposé sans encombre ou presque au pied des rangers. On déplore cependant encore quelques jets sporadiques d'objets divers mais la majorité préfère user de la voix afin de dire haut et fort son mécontentement. Pour autant, Luc Ferry, Xavier Darcos et les officiels les plus capés n'ont guère le loisir d'écouter le florilège de formules scandées avec enthousiasme. Peu après 14 heures, le cortège des VIP s'est, en effet, faufilé, à pied, jusqu'à l'entrée latérale qui relie les locaux de la police municipale au grand hall de la mairie. Sous bonne garde et entourés d'une nuée de caméras et de micros, les deux ministres échappent aux interpellations et exhortations toujours correctes, enseignants obligent. « Grève générale jusqu'au retrait total », « Demain on continue, aujourd'hui on est dans la rue » sont repris en choeur, d'autres préférant un sobre « Ferry en vacances », un local « Libérez Bové, enfermez Ferry », un pécuniaire « De l'argent, il y en a dans les caisses du patronat ». Le sens de la rime est de mise avec « Darcos, vient parler aux ATOSS »... Côté banderoles, l'imagination est aussi au pouvoir. Le classique « Raffarin à la retraite, vite » côtoie le plus subtil « 1881, loi Ferry: éducation pour tous. 2003, loi Ferry: inégalités pour tous ». Vers 16 heures et sous un soleil à peine plus tiède que les esprits, les premiers groupes quittent la place de la mairie pour un tour de ville d'honneur avant de mettre le cap sur le foirail, direction « la maison ». Ceux qui viennent de loin sont plus prompts à quitter le champ de bataille. A 16 h 30, l'ordre de dislocation est donné dans le calme et seule une poignée de profs et de surveillants ruthénois fait encore le pied de grue. « Nous gardons nos forces pour la suite », confie un syndicaliste. Une demi-heure plus tard, dans l'indifférence générale, les mesures prévues pour exfiltrer les deux membres du gouvernement sont appliquées à la lettre. La chevelure brune du locataire de la rue de Grenelle surgit carrefour Saint-Etienne et l'homme s'engouffre dans la berline qui l'attend. Trois ou quatre enseignants en vadrouille l'aperçoivent et le sifflent... Marc DEJEAN. [/quote]
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