(AFP a écrit :Manifestation dimanche contre les expulsions locatives à Paris
PARIS (AFP) - Plusieurs milliers de personnes - 1.200 selon la police, 5.000 pour les organisateurs - participaient dimanche à Paris à une manifestation organisée pour s'opposer à la reprise des expulsions locatives, à l'initiative du DAL et de différentes associations.
Les expulsions, interdites pendant la période hivernale, peuvent reprendre à compter du 16 mars.
Les manifestants, qui entonnaient des slogans comme "un logement pour tous, halte aux expulsions", sont partis de la place de la République (XIe) pour se diriger vers l'église Saint Augustin (VIIIe), en passant par les grands boulevards.
Deux candidats à l'élection présidentielle étaient présents dans les rangs des manifestants: Arlette Laguiller (Lutte ouvrière) et Olivier Besancenot (Ligue communiste révolutionnaire).
Mme Laguiller a jugé "indigne qu'une loi sur le logement opposable soit votée et que l'on commence à expulser des gens à partir du 16 mars". "La loi ne règle rien si l'Etat ne prend pas en charge un grand service public du logement avec construction massive de logements et réquisition de logements vacants", a-t-elle ajouté.
"Le vrai droit au logement, c'est pas d'expulsion", a de son côté déclaré M. Besancenot qui a ajouté: "la seule expulsion locative qui ne me fera pas pleurer, c'est celle de Jacques Chirac", dans une allusion ironique à l'allocution du président de la République dimanche soir.
A l'occasion de ce défilé, trois femmes racontent comment elles ont été expulsées de leur logement avec leur famille, des exemples de situations souvent inextricables voire ubuesques.
Certaines ont trouvé refuge dans l'immeuble parisien de la rue de la Banque (IIe arrondissement), rebaptisé "ministère de la crise du logement" et occupé à l'initiative des associations DAL, Jeudi Noir et Macaq. Les habitants de cet immeuble sont sous le coup d'un arrêté d'expulsion qui peut être théoriquement appliqué à compter du 16 mars, fin de la trêve hivernale.
. Hafida S., 48 ans, gardienne d'immeuble de nationalité algérienne, a deux enfants âgés de 10 et 21 ans, tous deux scolarisés. "J'ai été expulsée le 27 septembre, la propriétaire voulait reprendre l'appartement pour sa fille. J'ai remis les clés au commissariat en partant et ils ont blindé la porte quelques jours après ! Mais depuis, il n'y a personne à l'intérieur...", détaille Hafida, qui logeait depuis 1995 dans cet appartement du 19e arrondissement, 32 m2 avec des fuites, des fenêtres défectueuses, pour un loyer de 750 euros, "toujours réglé".
Après avoir été hébergée chez une amie - "nous étions 6 personnes dans 25 m2" - elle se trouve confrontée au refus de la mairie de les reloger tous "parce qu'un des mes fils est majeur, mais il est étudiant !", s'étonne-t-elle.
. Néné D., 26 ans, mère célibataire de deux fillettes, l'une de 10 ans asthmatique, l'autre de 14 mois atteinte d'une malformation cardiaque et en attente d'une opération chirurgicale. "J'ai été expulsée le 19 septembre. Les policiers m'ont parlé d'une lettre me prévenant mais je n'ai jamais rien reçu", narre cette jeune Malienne. Victime d'une escroquerie au faux bail pour un logement situé dans le 20e arrondissement, elle ne pouvait savoir qu'une procédure d'expulsion visait le précédent locataire, à qui les courriers étaient adressés.
"On a dormi avec mes filles dans des cages d'escaliers... On ne doit pas expulser des familles sans droit au logement derrière ! J'ai vu une assistante sociale qui m'a dit que je devais trouver moi-même un logement pour avoir des aides mais comment je pouvais faire avec mes filles ?", s'emporte-t-elle.
. Renata, 40 ans, mariée et mère de deux enfants scolarisés. Après avoir été locataires d'une chambre d'hôtel payée par l'Aide sociale à l'enfance, "nous avons été dans une pièce de 9m2, sans électricité, sans eau et sans fenêtre. Mon mari est diabétique, mes enfants font leur devoirs à la bougie, je suis inquiète pour eux", énumère cette Polonaise d'une petite voix, qui recevait des quittance d'hôtel de son propriétaire.
Quand la famille a tenté de pousuivre le propriétaire pour faire installer l'électricité et a alerté les services sociaux, l'ASE a arrêté ses versements et le "marchand de sommeil" a poursuivi la famille, l'assignant en expulsion pour "occupation sans titre".