Revue de presse de l'extreme-gauche

Message par Barnabé » 20 Juin 2003, 14:58

Par les diverses interventions sur ce forum on a une bonne idée des positions de LO, de la LCR et de CPS sur le mouvement contre les projets gouvernementaux.
Pour info voici un aperçu (non exaustif) des positions de groupes trotsytes que l'on peut trouver sur le net:

-La riposte (section française du Comité pour une internationale marxiste lié à socialist appeal en GB et qui milite en france comme tendance du PC):
texte daté du 5 juin
CITATION
Après le 3 juin : il faut d'urgence généraliser la grève !

 

Contrairement à ce que suggère le gouvernement, la journée du 3 juin confirme une nouvelle fois que la jeunesse et les salariés français sont prêts à se battre massivement contre les différentes réformes élaborées par Fillon et son équipe. Les conclusions hâtives qu'inspire au gouvernement la baisse du nombre de gréviste à la RATP, à la SNCF ou ailleurs (par rapport au 13 mai), relèvent davantage de la stratégie de démoralisation que de l'analyse ». Dans la mesure où des centaines de milliers de salariés se posent tous les jours la question d'entrer dans la grève, de la reconduire ou de la reprendre, la situation comporte nécessairement des fluctuations. Mais le mouvement demeure puissant, tout comme le soutien de l'opinion publique. Par ailleurs, il s'élargit à de nouvelles entreprises du secteur privé, ce qui est une preuve supplémentaire du potentiel de mobilisation.  

Ceci dit, il faut aussi regarder les choses en face : si les direction syndicales ne font pas tout ce qui est en leur pouvoir pour élargir la grève à tous les secteurs de l'économie, le mouvement court le risque de s'épuiser. Certes, en jurant qu'il ne touchera pas un cheveu du texte sur les retraites, Fillon tente de décourager les salariés qui luttent ou veulent lutter, et il ne fait pas de doute que cette réforme peut être bloquée par le mouvement social et syndical. Mais l'arrogance de Fillon a une autre base, très concrète : la crise dans laquelle l'économie mondiale est en train de sombrer signifie que les capitalistes français -dont les profits sont menacés- exercent une pression implacable sur le gouvernement pour qu'il aille jusqu'au bout de son attaque. Autrement dit, à la « fermeté » du gouvernement et de la classe capitaliste, nous devons opposer la riposte la plus large et la plus puissante possible.  

Aux nombreux appels à la généralisation qu'on entend dans les manifs, Bernard Thibault et les autres répondent par la stratégie dite de « riposte graduée ». En un mot, il s'agit de « monter en puissance » en fonction des réactions du gouvernement aux différentes mobilisations. Immédiatement, une question se pose : quels sont les « paliers » de la montée en puissance ? Et quel en est le rythme ?  

Car si cette stratégie consiste à faire durer un mouvement de grève partielle pendant des semaines, l'inconvénient en est évident : les salariés qui entrent dans la grève risquent de croiser des salariés qui, après des semaines de grève, se découragent ou veulent reprendre leur souffle, de sorte que le mouvement tend à stagner et s'user. En outre, en ce qui concerne le rythme, Thibault s'en tient au calendrier du gouvernement, lequel s'étale sur plusieurs semaines. La formule d'une « riposte graduée » veut dire, en fin de compte : « Messieurs les capitalistes, c'est toujours à vous de tirer les premiers ! »  

Ceci-dit, dans la réalité, les directions confédérales ont en général été mises devant le fait accompli des grèves, et élaborent a posteriori des stratégies leur permettant de justifier leur inaction. La « riposte graduée » est une expression suffisamment vague pour coller à différents niveaux de mobilisation. Thibault cherche à donner l'impression de diriger un mouvement qui est en fait essentiellement organisé, sur les lieux de travail, par des salariés et des militants syndicaux qui n'ont pas le temps ni les moyens de se consacrer à sa généralisation coordonnée.

Pour justifier son refus d'organiser une grève générale, même de 24 heures, Thibault a trouvé une formule simple : « un grève générale ne se déclenche pas en appuyant sur un bouton ». Nul ne contestera l'évidence. Mais elle risque de laisser sur leur faim les travailleurs qui sont en grève depuis des semaines et qui attendent des directions syndicales qu'elles entraînent au plus vite de nouvelles couches de travailleurs dans le mouvement. S'il suffisait d'appuyer sur un bouton pour déclencher une grève générale, le capitalisme aurait été renversé depuis longtemps. Mais en l'absence d'un tel bouton, les organisations syndicales disposent d'un enracinement social suffisamment large pour essayer de pousser les travailleurs à la lutte. C'est même pour ça qu'elles ont été fondées. La question se ramène dès lors au potentiel de mobilisation, à la volonté des travailleurs de se battre.  

Il ne s'agit pas, à ce stade, d'en appeler à une grève générale illimitée, comme le font les organisations d'« extrême gauche », dont « la révolution pour demain matin ! » est le mot d'ordre préféré. Dans leur enthousiasme, ces organisations glissent toujours sur le même petit détail : la réalité. Par contre, une grève générale de 24 heures de tous les salariés -qui sont tous concernés par les projets de réforme- permettrait d'élargir considérablement le front de lutte, renforcerait le moral des travailleurs en grève depuis longtemps, et ne manquerait pas d'entraîner de nouvelles couches de salariés dans le mouvement de grève illimitée. Voilà le type de « montée en puissance » qui conviendrait à la réalité de la situation.  

Cette grève de 24 heures serait-elle un succès ? On ne peut jamais l'affirmer avec une certitude absolue : en la matière, les boules de cristal font autant défaut que les boutons déclencheurs de grève. Mais tout l'indique - et non seulement les récentes mobilisations en France, mais tout le contexte international. L'exemple des puissantes grèves générales en Italie, en Espagne, en Autriche et dans d'autres pays européens, viennent renforcer le diagnostic : après des années de privation et de recul, les salariés accueillent les nouvelles contre-réformes en tirant la sonnette d'alarme. Une période de lutte majeure vient de s'ouvrir, en France et à l'échelle internationale.  

A la recherche des négociations perdues  

En 2002, Chirac a fait campagne - suivi de près, il est vrai, par Jospin - sur sa réforme des retraites. Ce projet était alors plus vague qu'aujourd'hui, mais il en conserve exactement la logique : diminution des pensions et/ou augmentation du temps de travail. Voilà qui aurait normalement dû être clair, d'entrée de jeu, pour un secrétaire général de la CGT. Mais non : dès la formation du gouvernement Raffarin, Thibault nous a fait part de sa généreuse bienveillance à l'égard de la nouvelle équipe de droite : « on verra », nous disait-il en substance.  

On a vu. Mais fort des promesses gouvernementales en matière de négociation et de communication, les dirigeants syndicaux se sont  immédiatement posés en « négociateurs ». Dès l'arrivée au gouvernement de la clique chiraquienne, Chérèque, Thibault et Blondel, qui ne pouvaient faire semblant d'ignorer la régression sociale que contenaient les projets du gouvernement, ont « exigé » des négociations - notamment en organisant, ici et là, de grandes manifestations nationales. Quelle a alors été l'attitude du gouvernement ? Remettre à plus tard les discussions officielles avec les syndicats tout en continuant de mener une bataille acharnée, notamment dans les grands médias, pour populariser leur réforme. Bien sûr, cela a déclanché un tollé du côté des directions syndicales, qui, avec le temps, ont donné de plus en plus de voix pour réclamer des négociations.  

La valeur de cette stratégie peut se mesurer à la durée des sacro-saintes négociations : 24 heures, c'est-à-dire le temps qu'il a fallu au gouvernement pour « négocier » la trahison du mouvement avec les dirigeants de la CFDT. A présent, Fillon et Raffarin proclament que la « phase » des négociations est terminée.  

Que penser, dès lors, des promesses gouvernementales en matière de négociation ? Simplement qu'il s'agit d'une man½uvre destinée à retarder la mobilisation et à fournir un prétexte aux directions syndicales pour ne rien faire. Ce scénario était particulièrement flagrant dans le cas de la CFDT. Chérèque - qui, des mois durant, a poussé les plus vibrants appels aux négociations - était tellement prêt à capituler qu'il a été pris de panique devant l'ampleur des mobilisations du 13 mai, si bien qu'il a signé plus vite que prévu. Drôle de logique syndicale : plus grande est la mobilisation, plus vite on signe des miettes de concessions !  

A présent, qu'est-ce que les directions syndicales demandent au gouvernement ? On vous le donne en mille : des négociations. Pour négocier quoi, face à un gouvernement qui dit et qui répète qu'il ne changera rien ? « Cela dépend des mobilisations », nous répondent-elles. Mais qu'est-ce qui est fait pour mobiliser ? On connaît la réponse : une « riposte graduelle - en fonction des réponses du gouvernement aux mobilisations. La boucle est bouclée : l'appel à négocier sert essentiellement à couvrir les silences et l'inactivité des directions syndicales.  

Négocier n'est bien sûr pas un problème en soi, et fait partie de la réalité des luttes. Mais la négociation, par delà les talents individuels des négociateurs, avalise normalement un rapport de force entre les deux parties en lutte. En l'occurrence, plus la grève se développe, et plus la CGT arrive en force pour négocier. La première condition de toute négociation, c'est donc de mobiliser au maximum.  

Mais par ailleurs, dans le cas précis, que faudrait-il négocier ? Une réforme qui aille dans le même sens mais de façon moins douloureuse ? Ce n'est pas ce qu'on entend dans les cortèges CGT, qui souvent réclament 37,5 annuités pour tous, soit un mieux par rapport à la situation actuelle. L'ambiguïté est flagrante lorsque Thibault déclare vouloir négocier une « meilleure réforme », sans préciser si ce sera pour obtenir mieux ou moins bien que la situation actuelle. Le mot d'ordre : « pour une autre réforme », laisse sous silence une question fondamentale, qui dans la conscience de la masse des travailleurs prime sur tout « système de financement alternatif » : y aura-t-il ou non régression ? Sur ce point, nous devrions être sans ambiguïté : il faut s'opposer ouvertement à toute régression.  

Quel programme politique contre la droite ?  

Ce qu'il faut, c'est d'abord la pleine puissance d'une riposte syndicale contre l'agression du gouvernement. Mais il faut aussi, d'urgence, que le mouvement socialiste et communiste se concentre à nouveau sur la question de son programme, c'est-à-dire sur l'alternative politique aux projets rétrogrades du gouvernement Raffarin et de la classe dont ce dernier s'efforce avec acharnement de défendre les intérêts.  

Sous la pression du mouvement, les directions nationales du PS et du PC ont ressorti leur calculette et nous présentent des « réformes alternatives » à celle proposée par Fillon. Quelques points de CSG par ci, un nouvel impôt patronal par là - et tout rentre dans l'ordre. Les choses n'étaient pas été aussi claires à la veille des élections de 2002, Jospin ayant même approuvé publiquement le principe de 42 annuités de cotisation. Enfin, admettons qu'une cure d'opposition ait vraiment redonné le sens des luttes aux dirigeants de la gauche. Il faut cependant être clair : ce ne sont pas quelques trouvailles techniques dans le labyrinthe de la fiscalité qui feront l'affaire.  

La lutte des salariés contre la classe dirigeante doit reposer sur programme politique à la hauteur de la situation. Mai 68 est là pour nous le rappeler : aucune lutte, même exceptionnellement puissante, ne peut déboucher sur une victoire définitive tant qu'elle n'appuie pas le programme d'une rupture révolutionnaire avec l'ordre social et économique du capitalisme. Cette rupture signifie avant tout l'expropriation et la socialisation des principaux leviers de notre économie - banques, industrie, distribution et services - lesquels sont aussi les principaux leviers de la classe dominante.  

Sans cesser de lutter contre les attaques de la droite et pour la défense du niveau de vie de la jeunesse et des salariés, le mouvement communiste et socialiste doit mener un travail d'explication incessant pour convaincre le plus grand nombre de travailleurs de la nécessité de se saisir des rênes de l'économie. Une fois que nous auront arrachées les immenses ressources productives des mains de la classe de privilégiés qui en usent et abusent, nous pourrons les utiliser et les développer dans le cadre d'une planification rationnelle qui se fixera comme objectif, non plus la réalisation du meilleur profit, mais la satisfaction des besoins de la masse de la population. [/quote]

- Gauche Révolutionnaire (section française du CWI publiant L'égalité)

CITATION
Le seul moyen de battre Raffarin :
la grève générale reconductible,
secteurs privé et public
C'est à nous de la construire,
tous ensemble !


Tract du 05 Juin 2003



Le gouvernement a annoncé la couleur depuis plusieurs semaines : il ne bougera pas. Au mieux, il essaie d'embobiner tout le monde en reculant de quelques mois l'adoption des mesures comme la décentralisation. Mais en septembre ou maintenant, leurs attaques on les refuse ! La combine consiste à compter sur l'essoufflement des secteurs déjà en grève et sur le fait que les autres n'ont que des grèves d'une journée.

Les succès des journées de grève commune, celui de la manifestation du 25 mai démontrent que le potentiel est là. A nous de le transformer en arme véritablement capable de battre ce gouvernement. Si celui-ci commence à chercher des moyens détournés pour calmer le mouvement, c'est parce qu'il craint une lutte d'ensemble, continuons jusqu'au retrait total des plans du gouvernement !


Des exemples à suivre



Dans plusieurs endroits, des salariés du secteur privés sont entrés massivement dans la lutte. A Marseille, les journée de grève sont interprofessionnelles, privé/public, à l'appel de la plupart des syndicats du département.

C'est la voie à suivre, il n'y a qu'un mouvement tous ensemble qui permettra de battre ce gouvernement. Le problème, c'est comment le construire. Car les dirigeants nationaux des syndicats ont déjà annoncé qu'ils ne ferait pas plus que d'appeler à étendre la lutte sans appeler à la grève générale. La grève générale n'est pas un simple slogan, elle est à construire, par nous même !


Construire réellement la grève générale



Pour certains salariés, les salaires sont si bas que cette question est aussi importante que celle des retraites. Dans l'éducation nationale, pions et emploi jeunes sont pour l'instant toujours licenciés. Des revendications comme le maintien de ces personnels doivent faire partie des plate-formes de revendication.

Dans de nombreuses entreprises, l'attaque sur les retraites vient en plus de nombreux problèmes : licenciements, dégradation des conditions de travail (souvent dues aux lois Aubry qui ont instauré la flexibilité, le gel des salaires). Les réalités sont différentes d'un lieu de travail à un autre. Pour pouvoir mobiliser, amener à la compréhension qu'entrer en grève est nécessaire, cela demande donc beaucoup d'explications (ainsi les ouvriers d'Alstom ont participé à une assemblée étudiante à Lille), de discussions, de matériel (tract etc.) qui permette réellement de mobiliser et convaincre les salariés du privé. C'est le cas notamment de la déclaration de plusieurs syndicats CGT et SUD d'entreprises de la chimie et de la métallurgie (Grande Paroisse, Renault, Aventis).

Développer le travail en commun entre différentes professions est le meilleur moyen d'avancer vers le tous ensemble. Ainsi, les personnels de l'éducation en grève du secteur de Cléon et les membres de la CGT Renault-Cléon ont rédigé en commun un tract appelant à mobiliser ensemble. Celui-ci est désormais distribué sur plusieurs autres entreprises, c'est ainsi concrètement, qu'on s'opposera à la propagande gouvernementale qui veut opposer public et privé, et qu'on avancera vers la grève générale.


On ne s'arrête pas avant le retrait total des mesures Raffarin !



Ce gouvernement va continuer son discours de fermeté. Partout en Europe (Suède, Portugal, Italie...), les retraites sont attaquées. En Autriche, il y a une nouvelle journée de grève le 03 juin. Les travailleurs de toute l'Europe comptent sur les traditions de lutte qu'il y a en France pour prouver qu'il n'y a pas de fatalité. Les capitalistes de toute l'Union européenne demandent à Raffarin de ne pas céder pour pouvoir faire passer leurs propres plans.

La crise économique actuelle a aggravé la concurrence entre les différentes multinationales qui exigent désormais de la part des gouvernements des mesures leur promettant de nouveaux capitaux, sur le dos des travailleurs bien sur ! C'est pour cela que la bataille contre Raffarin ne se gagnera pas en se limitant à des manifestations, et qu'il n'y aura pas de répit pour les travailleurs tant que nous serons sous le capitalisme. Pour gagner, il faut bloquer leur économie. Sans les travailleurs, le pays ne tourne pas. Si nous travaillons en commun avec des secteurs aussi divers que les routiers, les travailleurs du commerce, les cheminots, on peut co-organiser des actions de grève ou de blocage de grosses entreprises du transport par exemple.


Pour une lutte organisée démocratiquement, par les grévistes eux-même !



Pour pouvoir arriver à organiser cela, il faut que la grève soit massive et déterminée, donc la plus démocratique et la mieux organisée possible. Les assemblées générales de grévistes, qui existent déjà dans l'éducation, doivent encore se développer, se former dans d'autres secteurs, et prendre des décisions, en lien avec les syndicats, s'assurer de l'application de celles-ci. Pour mieux se coordonner, les AG communes doivent également se multiplier mais on doit également en renforcer le fonctionnement et arriver à une véritable structuration nationale du mouvement. Toute élection de représentant, de présidence etc. doit se faire sur la base de revendications claires, et d'orientation réellement débattues et adoptées. En élisant ainsi, sur la base d'un mandat précis, les représentants de divers secteurs, il est possible de créer un mouvement puissant et structuré.

C'est une des principales conditions nécessaire pour obtenir le retrait intégral des plans Raffarin-Ferry-Fillon, et pour empêcher que les opposant de dernière minute (comme le PS qui essaie de faire oublier son orientation libérale), ou des dirigeants syndicaux qui veulent à tout pris conserver leur place de partenaire privilégiés du gouvernement tentent de récupérer le mouvement. Le gouvernement n'a qu'une peur, c'est que les secteurs privé et publics comprennent leur force et s'unissent. En refusant en bloc les mesures de Raffarin, nous pouvons construire cette unité. C'est aux patrons de payer pour les retraites, c'est autour de cela qu'il faut se battre !



La nécessité d'une alternative au capitalisme



Si cette grève est révélatrice de quelque chose, c'est bien que ce système, ses institutions, ne correspond aux aspirations de l'immense majorité de la population. Les travailleurs à qui l'on demande toujours plus de concessions, les jeunes à qui on refuse une éducation de qualité car avec 3 millions de chômeurs les capitalistes ne jugent pas nécessaire de continuer à financer des études qualifiées: ce système sacrifie tout à la loi du profit.

Les élections présidentielles l'an dernier avait montré ce rejet (abstention importante, pas un candidat au dessus de 20%...) mais avait réussi à masquer cela en prétextant du danger Le Pen pour élire Chirac. Dans ce faux duel que Chirac était sûr de gagner, nous avons appelé à voter blanc car dès cette époque le plus important était de se préparer à lutter contre un gouvernement Chirac qui allait user de son score électoral pour attaquer les travailleurs.

Si nous réussissons à construire la grève générale alors nous aurons les moyens d'infliger une défaite à ce gouvernement mais également aux capitalistes. Il faudra utiliser cette victoire pour construire une organisation pour les travailleurs et les jeunes car sinon, un autre gouvernement reviendra à la charge. C'est dans la grève actuelle que peuvent être posées les bases d'un nouveau parti qui soit un outil pour les luttes et contre le capitalisme. Un parti qui se batte pour un système où l'économie est organisée par les travailleurs eux-mêmes pour la satisfaction des besoins de tous et non d'une poignée de grands patrons et d'actionnaires.

C'est pour cela que nous luttons. Les militants de la Gauche révolutionnaire sont activement impliqués dans la grève depuis plusieurs semaines, participent aux différentes tentatives d'élargissement, et ne font partie des délégation de leur secteur que s'ils sont dûment mandatés.

Le mouvement actuel peut permettre à des dizaines de milliers de jeunes et de travailleurs de reprendre confiance dans leurs capacités à lutter, à changer les choses. Cela fait partie des pas nécessaire pour reconstruire un parti qui défende réellement les intérêts des travailleurs, des jeunes, des chômeurs ou des retraités, qu'ils soient français ou immigrés, hommes ou femme. [/quote]

-Groupe socialiste internationaliste (section française de la LIT)

CITATION
"Grève générale jusqu'à satisfaction !"
Lever tous les obstacles.

Depuis plus de deux mois, les enseignants sont en grève contre la décentralisation et le projet de "réforme" des retraites. Dès le 1er février, l'ensemble de la fonction publique a fait clairement connaître sa détermination, contre les projets Raffarin-Fillon-Ferry-Delevoye, par des grèves et des manifestations massives dont, les plus importantes, celles des 13, 19, 25 et 27 mai.
Pour leur part, les travailleurs du secteur privé sont de plus en plus nombreux dans les cortèges. Ainsi, lors du gigantesque défilé de Paris le 25 mai, a-t-on pu voir les banderoles d'Alstom, Bouygues, Dassault, Euro-Disney, etc., ou encore les délégations des employés de restaurants Mac Donald's ou Frog en grève, essentiellement de jeunes en contrats précaires. Un premier obstacle, celui de la division entre travailleurs du privé et fonctionnaires, commence à être surmonté. Mais pour imposer le recul du gouvernement, des obstacles clairement identifiés subsistent.

Une campagne acharnée de division

Tous les soirs, cherchant sans grand succès à les opposer aux enseignants en grève, le journal de France 2 prend parents et élèves en otage, écoliers, lycéens, étudiants.

Alors que la grève se poursuit à la SNCF et à la RATP, le lendemain du 13 mai, G. De Robien, ministre des transports, menace d'instaurer un service minimum antigrève, tandis que Le Pen appelle au licenciement, pur et simple, des grévistes du secteur des transports.

Pour sa part, le clone "républicain" de Le Pen, A. Madelin, commet, lui, un livre préconisant sa solution de toujours en matière de retraite et de santé, à savoir: la "responsabilité individuelle", les assurances privées et les fonds de pension; un texte qui reprend, en fait, tous les dogmes ultra-libéraux au service de la haute finance, toutes les recettes ayant fait faillite aux USA en Angleterre et ailleurs, mais qu'importe. De plus, agités par les uns ou par les autres, ces épouvantails ont pour fonction de nous faire croire que le projet du gouvernement est, somme toute, modéré.

Au soir du 25 mai, F. Fillon s'est lancé dans une brutale tentative d'opposer public et privé. Dans le même temps, les présidents des entreprises publiques, SNCF, RATP, La Poste, faisant tout pour désamorcer une situation explosive, lançaient une campagne de désinformation pour expliquer à leurs personnels... qu'ils ne sont pas concernés par cette réforme, que leurs régimes ne sont pas remis en cause Or, comme tout le monde le sait, les régimes spéciaux sont la cible privilégiée du gouvernement depuis des mois !

Le 27 mai, un comité interministériel s'est réuni sur la décentralisation. Le but avoué de cette réunion, à la demande d'une partie de l'UMP, est de casser la mobilisation des enseignants, en reportant cette partie du dossier à plus tard, si nécessaire. Mais après deux mois de grève, disons-le tout net, seul le retrait pur et simple du projet est à l'ordre du jour, et le discours de J.-P. Raffarin, passant sa pommade dans le dos des enseignants, n'a convaincu personne et surtout pas les intéressés.

Le 28 mai, le conseil des ministres a entériné le projet de loi sur les retraites qui va être déposé au parlement en juin. A l'occasion de ce conseil, J. Chirac s'est exprimé pour insister sur la nécessité de cette "réforme". Rappelons qu'il l'avait déjà fait en 1999, lors de la traditionnelle interview du 14 juillet,: "Je crois qu'il est urgent d'engager cette réforme. Je ferai simplement deux observations. La première, c'est que, notamment à ce titre, il est essentiel de créer une épargne retraite, qui s'ajoute à la retraite normale, pour ceux qui le désirent, et surtout qui permettrait à la France de reprendre le contrôle de ses grandes entreprises. Vous avez vu ce qu'il s'est passé à Alcatel. En 24 heures, les retraités californiens ont tout d'un coup décidé qu'ils quittaient Alcatel, et Alcatel a perdu 40% de sa valeur." (C'est nous qui soulignons, NDR). Le reste de la déclaration était à l'avenant et, depuis, Chirac n'a pas changé d'orientation.

Un enjeu à l'échelle du continent

En effet, au sommet européen de Barcelone en 2002, Jospin et Chirac s'étaient engagés conjointement à mettre en place des fonds de pension, tout comme le gouvernement autrichien, ou comme Aznar pour l'Espagne, Berlusconi pour l'Italie, ou Schröder pour l'Allemagne, qui poursuit son "agenda social", ou encore Blair qui continue son dynamitage du NHS en Angleterre (Service National de Santé).

Le projet français, donc, s'inscrit bien dans le cadre d'une offensive à l'échelle européenne contre la protection sociale (retraites et santé), l'éducation nationale et d'autres services publics, pour les privatiser ou les soumettre aux impératifs du capital (comme c'est le cas des universités par le biais des ECTS). En France, cette privatisation passe par l'éclatement préalable des services publics, via la décentralisation.

Tout cela, en France, en Allemagne, en Espagne, en Italie, en Grande-Bretagne, en Autriche (dans ce dernier pays, 500 000 manifestants récemment, un record depuis la Seconde guerre mondiale), les travailleurs et la jeunesse l'ont bien compris. Cependant, les bureaucraties syndicales et politiques persistent à ne pas vouloir comprendre.

En effet, dans un tel contexte, on aurait pu s'attendre à ce que la CES (Confédération européenne des syndicats) appelle l'ensemble des travailleurs d'Europe au combat contre cette remise en cause généralisée : cela aurait été la moindre des choses pour une organisation syndicale digne de ce nom. Au contraire, ayant participé à l'élaboration de la politique de l'Union Européenne contre les travailleurs (depuis le Conseil économique et social européen), la CES s'acharne dans une entreprise de division, empêchant toute jonction entre les travailleurs des différents pays : les luttes doivent rester nationales, pour ne pas remettre en cause l'édifice d' "une économie ouverte dans laquelle le marché est libre", selon les termes du traité de Maastricht...

De son côté, en s'employant à fermer toute perspective politique,
la défunte "gauche plurielle" soutient objectivement Raffarin.

Ni le PS ni le PC ne défendent la retraite par répartition ; ni le PS ni le PC n'exigent 37,5 années de cotisations pour tous ; PS et PC sont avec le gouvernement pour la décentralisation.
Le PS, lui, ne recule devant rien : tout en affirmant que la réforme est nécessaire, il demande le retrait du projet Fillon et, à cet effet, il a même signé un texte commun avec les Verts et le groupuscule bourgeois des radicaux de gauche Le PS voudrait-il faire oublier que le gouvernement Jospin a préparé patiemment le terrain à une telle réforme et que le projet Fillon n'est qu'une variante de ce que Jospin aurait appliqué s'il avait été élu en 2002? Pour preuve, il suffit de rappeler qu'à l'occasion du dernier congrès de ce parti (du 16 au 18 mai), aucune des motions préparatoires n'a mis en avant l'exigence de 37,5 années de cotisations pour tous.
En passant, la présence de B. Thibault au congrès du PS, en tant qu'invité (ovationné !), n'a fait que souligner l'ambiguïté du positionnement de bien des responsables de la CGT.

Par la voix de sa secrétaire nationale, le PCF, qui a participé jusqu'au bout au gouvernement Chirac-Jospin, appelle le gouvernement à reprendre le dossier à zéro et à ouvrir de "véritables négociations". Or, quand il n'y a rien à négocier et que la rue exige le retrait pur et simple des projets Ferry et Fillon, appeler à négocier signifie, objectivement, désorganiser le mouvement en cours, pour mieux l'enterrer ensuite.

Les directions syndicales ont le dos au mur

Contrairement à ce qu'escomptait le gouvernement, la signature d'un accord avec la CFDT et la CFE-CGC au soir du 16 mai n'a pas brisé le "front syndical" cimenté par la mobilisation des travailleurs. De nombreuses structures de la CFDT ont désavoué cette signature et appelé à poursuivre le mouvement : au contraire, la signature à radicalisé la mobilisation et clarifié les mots d'ordre. Désormais, le retrait est une exigence générale de même que monte celle de l'abrogation de la loi Balladur de 1993 (qui a porté à 40 ans les retraites du secteur privé) : 37,5 ans de cotisation maximum, une pension à 75% minimum du salaire, retraite à 60 ans pour tous, voilà ce qu'on entend maintenant dans les manifestations.

D'une simple opposition au projet, le mouvement est passé aux revendications et exigences "en positif". La question du financement des retraites fait surgir dans les manifestations des slogans réclamant que les patrons paient, que les salaires soient augmentés et que des emplois fixes, non précaires, soient créés, le non-remplacement des fonctionnaires partant à la retraite est mis ouvertement en cause. Il est indéniable : c'est toute la politique du gouvernement qui est contestée. Par là, objectivement, c'est l'existence même du gouvernement qui est mise en cause.

D'où l'empressement de B. Thibault, de la CGT, à reconnaître que "ce n'est pas la rue qui gouverne" (dixit Raffarin), d'où ses demandes répétées d'ouverture de "véritables négociations" D'où, aussi, M. Blondel déclarant, à la manifestation du 25, qu'appeler à la grève générale, c'est appeler à l'insurrection et au renversement du gouvernement, ce qui n'est pas le but de FO... Cependant, pressés par leurs bases, les deux leaders syndicaux laissaient, en parole au moins, toute latitude à leurs organisations pour décider de la suite du mouvement.

A cette ligne démobilisatrice "des grandes confédérations", seule l'US-G10 (Sud et autres) fait exception, qui a appelé ouvertement - et très tôt - à la grève générale reconductible.

Néanmoins, il n'est pas une organisation syndicale où la discussion n'est pas structurée par la question de la grève générale jusqu'à satisfaction, soit pour l'éviter, soit pour l'appeler. Quant aux bureaucrates, même le terme de "grève générale" leur fait peur. Aussi, l'appel à une grève "nationale et interprofessionnelle" le 3 juin sonne à la fois comme un aveu et comme une ultime tentative des directions syndicales : d'une part, l'aveu d'être poussées inéluctablement vers la grève générale ; d'autre part, l'ultime tentative pour faire rentrer, dès le lendemain, les travailleurs dans les rangs. Pour les travailleurs, le 3 juin, c'est l'obstacle à franchir : faire de la grève générale une réalité.

L'alternative politique reste à construire

La question du gouvernement, de l'issue politique, pèse naturellement sur la réflexion de chaque travailleur . Mais il ne s'agit pas de changer un Premier ministre ou un ministre par un autre, cela ne réglerait pas le problème. Ce qui est au centre de la bataille, le préalable incontournable, c'est le retrait définitif des projets Fillon-Ferry-Delevoy. Les comités de grève, qui ont déjà commencé à apparaître ici et là, peuvent apporter un début de réponse à cette question.

Dès le départ, ce mouvement a montré une maturité et une détermination supérieures à celui de 1995. La question de la grève générale s'est posée de façon évidente et même, de fait, celle du gouvernement. Alors, il nous faut réfléchir à l'organisation de la grève générale, à la généralisation des comités de grève, à leur centralisation aux niveaux locaux (commune, département) et au niveau national, par un comité central de grève.

Mais il est évident que si la classe ouvrière disposait d'un parti ouvrier révolutionnaire indépendant, les freins que constituent les directions du PCF et du PS, comme ceux imposés par les directions syndicales bureaucratiques, auraient volé depuis longtemps en éclats.

Paris, Le 29 mai 2003
[/quote]

-La commune (section française de l'UIT)

CITATION
Editorial
Sous les grèves, la crise politique

juin 2003, par Daniel Petri




  Depuis le 13 mai, la situation est claire. L'heure est à la grève générale, sur fond de manifestations monstres, de grèves de masse.
   Les sondages ne peuvent édulcorer la réalité : 65% des personnes interrogées déclaraient soutenir la manifestation pour la défense des retraites et contre le projet de l'actuel gouvernement ; 74% des sondés voyaient dans ce défilé « le signe d'un conflit appelé à durer » (sondage CSA-Le Parisien, 25 mai).
   Pourtant, ce gouvernement donne l'impression de tenir bon face à la vague qui déferle (« Ce n'est pas la rue qui gouverne », avait prévenu Raffarin). Or, cette attitude « ferme mais pas fermée » ne parvient pas à bout de ce qu'il est convenu d'appeler la « crise sociale » et, bien qu'il ne parvienne pas à la désamorcer, ce gouvernement semble déterminé à aller jusqu'au bout. Où est donc le problème ?
   Cette « détermination », le gouvernement ne la puise pas en lui-même. Pour preuve, la dérisoire « contre-manif » du 25 mai, à 300 devant l'Hôtel de Ville à Paris, ou encore la timidité avec laquelle quelques élus UMP arpentent les marchés en quête de l'hypothétique badaud qui voudra bien se brûler les doigts en signant une pétition pour sauver l'avenir... de ce gouvernement. Alors, encore une fois, d'où vient cette « fermeté » gouvernementale ?
   Dans son édition du 28 mai, Le Monde nous donne un élément de réponse : « Retraites : la CGT cherche toujours à négocier et doit contenir des militants prêts à une grève dure ». Bien entendu, il ne s'agit pas de la CGT en tant que telle mais de sa direction confédérale.
   Autre éclairage, celui qu'apporte J. Julliard, chroniqueur très « CFDT » du Nouvel Obs : « Les habiletés du gouvernement n'auront servi à rien. Elles n'auront pas empêché la tendance à la globalisation des grèves qui parfois déborde les dirigeants syndicaux eux-mêmes. On sent bien, par exemple, que la CGT ne désire pas une épreuve de force au finish avec le pouvoir (...). Bernard Thibault ne réclame plus le retrait pur et simple du projet gouvernemental : pour le moment, il se contente de demander une re-négociation. Non que les amendements obtenus par la CFDT, qui portent notamment sur les petits revenus, soient négligeables, mais la CGT avait besoin d'une mesure symbolique, du genre taxation du capital, pour accepter le projet ou convaincre une base de plus en plus radicalisée de faire la part du feu. » Dans la même livraison du Nouvel Obs (29 mai-4 juin), M. Croissandeau note : « La CGT, elle, déplore que ses efforts pour éteindre le feu dans les transports, le 13 mai dernier, ne se soient soldés que par une petite nuit de discussion d'une dizaine d'heures au total ». Eh non, il n'y a pas eu de « Grenelle des retraites » ce soir-là !
   Déterminé ou non, on ne voit pas pourquoi ce gouvernement céderait d'un seul coup, quand les directions syndicales le supplient de négocier ou « signent » carrément, à l'instar d'un Chérèque, ou quand, à la façon d'un Blondel, ils se dressent contre la grève générale en s'exclamant : « Elle est de nature politique, insurrectionnelle ! » (Le Monde, 28 mai 2003.)
   Déterminé, le gouvernement ? Dans Le Monde du 29 mai, C. Guélaud fait plus qu'en douter. Jugeant « déconcertante » la méthode Raffarin, elle conclut : « Le gouvernement n'a aucun scénario de sortie de crise ». Pendant ce temps-là, le député UMP Dupont-Aignan presse le gouvernement de décréter un moratoire sur la décentralisation des personnels non-enseignants de l'Education nationale, emboîtant ainsi le pas à Juppé. Ces gens-là craignent le développement ultérieur des événements...
   Le 5 juin 1936, devant le développement des grèves en France, Trotsky écrivait : « Les masses ouvrières sont en train de créer, par leur action directe, une situation révolutionnaire. » Cela y ressemble, non ? A cette étape de leur résistance, les salariés se saisissent de leurs organisations syndicales et exigent que leurs dirigeants rompent avec le gouvernement. Maintenant !

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-publié sur le world socialist web site (CIQI)

CITATION
France: des millions rejoignent la grève d'une journée pour la défense des retraites.
Par une équipe de reporters du WSWS
13 juin 2003


Les fonctionnaires français, rejoints par des salariés de certains secteurs du privé ont perturbé ou stoppé les transports en commun, le service de la poste et d'autres services de base lors d'une grève massive d'une journée le 10 juin. La grève, la troisième de ce genre en un mois, fut appelée pour coïncider avec l'ouverture des débats à l'assemblée nationale sur le projet de loi du gouvernement visant à réduire radicalement la retraite de millions de salariés.

Ce projet signifierait, pour les fonctionnaires, l'allongement de la durée de la vie active à 40 années avant de pouvoir prendre sa retraite, et non 37,5 comme c'est le cas maintenant. Après 2008 cela s'allongerait encore à 42 ans. L'impact sur les retraites est estimé à une réduction de 30 % ou plus.

La mobilisation de mardi était appelée par toutes les plus importantes fédérations syndicales à l'exception de la CFDT (Confédération française démocratique du travail), qui a signé l'avant-projet de réforme sur les retraites préparée par le gouvernement de centre droit du président Jacques Chirac et du premier ministre Jean-Pierre Raffarin. La CFDT est traditionnellement liée à l'aile droite du Parti socialiste. La CGT (Confédération générale du travail) qui entretient depuis longtemps des liens avec le Parti communiste et FO (Force ouvrière) qui est lié au Parti socialiste s'opposent officiellement au projet gouvernemental.

Des salariés de la poste, des cheminots, des employés de banque, des salariés des télécommunication, des infirmiers, des enseignants, des salariés du gaz et de l'électricité, de la justice, de la défense et des douanes ont rejoint la grève nationale. Des policiers aussi participèrent à la mobilisation.

La circulation à Paris était quasiment paralysée, et des bouchons de plusieurs kilomètres s'étendaient à l'entrée de la capitale du fait de l'impact de la grève des transports. Les transports urbains furent perturbés dans bien d'autres villes aussi, petites et grandes, dont Marseille, où ce fut presque un blocage total. Le transport aérien interne fut aussi très réduit.

Dans de nombreuses villes, les ordures ne sont pas ramassées depuis plusieurs jours. De nombreux journaux ne sont pas parus et des chaînes de télévision ont été perturbées.

Plus de 30 % d'enseignants du primaire et du secondaire ont participé à la grève. Les salariés de l'Education sont le fer de lance du mouvement de grève car ils lutent aussi contre des réductions de personnel et le projet de transfert de 110 000 personnels non enseignants du service public d'éducation aux collectivités territoriales. Des milliers d'enseignants, rejoints par des cheminots et des salariés d'autres secteurs, sont en grève reconductible depuis un mois, et certains même depuis début mars.

Quelques 200 000 personnes ont manifesté à Paris et Marseille, bien que les estimations de la police et des syndicats soient très différentes. Quelques 50 villes ont vu des manifestations de plus de 5 000 personnes avec 50 000 à Toulouse, Clermont-Ferrand, Grenoble, Montpellier et Rouen. Il y eut 8 000 personnes à Amiens.

L'immense cortège de Paris alla de la Place de la Bastille à la Place de la Concorde. Il y avait des gens de tous âges, de lycéens et d'étudiants à un large éventail de salariés des secteurs publics et privés. Les contingents les plus grands étaient constitués d'enseignants, mais de nombreux salariés des impôts, d'EDF-GDF (électricité et gaz de France) et d'autres secteurs encore étaient bien représentés. De grands groupes défilaient derrière les banderoles et drapeaux de la FSU (fédération enseignante majoritaire), la CGT et d'autres syndicats.

Malgré les perturbations causées par les grèves, les fonctionnaires jouissent du soutien massif de la population. Un sondage publié le 7 juin par le Figaro annonçait que 66 % des personnes interrogées soutenaient ou avaient de la sympathie pour les grévistes.

Tout en soutenant officiellement la grève, les directions de la CGT et de FO ont travaillé assidûment à en limiter la portée et à décapiter une mobilisation plus généralisée qui poserait un défi politique direct au gouvernement Chirac-Raffarin. La coalition de centre-droit a une large majorité de députés à l'Assemblée nationale, et le premier ministre Raffarin a maintes fois déclaré qu'il entend bien faire adopter son projet de loi.

Néanmoins, la position des syndicats c'est que le mouvement d'opposition n'est pas « politique » et ne tient absolument pas à renverser le gouvernement. Son objectif, d'après les dirigeants syndicaux est de simplement faire pression sur le gouvernement pour lui faire soit abandonner son projet de réforme soit l'amender.

Les partis politiques d'opposition parlementaire de la Gauche plurielle, conduits par le Parti socialiste et le Parti communiste ont gardé leur distance par rapport au mouvement de grèves et de protestations. Des personnalités marquantes du Parti socialiste, dont l'ancien premier ministre Michel Rocard ont ouvertement déclaré leur soutien au projet de loi du gouvernement.

L'évènement clé de mardi fut la rencontre des ministres concernés par l'éducation et des syndicats enseignants, mise en place pour anticiper toute perturbation du baccalauréat, examen que doivent passer les élèves du secondaire désirant poursuivre des études universitaires. Plus de 600 000 lycéens étaient attendus pour commencer leurs examens le 12 juin par l'épreuve écrite de philosophie. De nombreux enseignants grévistes espéraient perturber les examens pour augmenter la pression exercée sur le gouvernement.

Le 10 juin, lors de l'assemblée départementale des quelques 400 salariés de l'éducation grévistes de la Somme, où se trouve Amiens, la principale discussion a tourné sur les moyens les plus efficaces d'organiser des piquets de grève des centres d'examen et d'empêcher le bon déroulement de l'examen.

Une déclaration affichée sur le site web du Snes, principal syndicat des enseignants du second degré et le plus grand syndicat de la FSU, a provoqué beaucoup de colère. La déclaration répudiait un article du Monde disant que le Snes envisageait de lancer un mot d'ordre de grève pour le 12 juin.

Le résultat de la réunion du 10 juin entre les ministres de l'éducation et les syndicats fut un accord conclu entre le ministre de l'intérieur, chargé des collectivités territoriales et de la décentralisation, qui accepta de laisser les 20 000 médecins scolaires, conseillers d'orientation et assistants sociaux dans le giron du service public d'éducation en échange d'une déclaration publique des syndicats garantissant qu'il n'y aurait pas de perturbation du baccalauréat.

La déclaration dit: "Soucieuse de l'intérêt des jeunes, les organisations syndicales réaffirment leur opposition à toute forme de boycott, de blocage ou d'action de nature à nuire au bon déroulement des examens. » Quant au ministre de l'éducation nationale, Luc Ferry, il a réaffirmé l'intention du gouvernement de transférer des dizaines de milliers de salariés de l'éducation (les personnels techniques et ouvriers) aux collectivités locales lorsqu'il a dit : « Les projets de réforme n'ont en aucune façon été retirés. »

Des équipes de sympathisants du WSWS ont distribué lors des manifestations à Paris et Amiens des milliers de tracts de la Déclaration du World Socialist Web Site du 24 mai, remise à jour, « Une stratégie politique pour la défense des retraites en France. »
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Déclaration du comité de rédaction du World Socialist Web Site

Les manifestations du 25 mai seront le temps fort d'un mouvement de masse grandissant contre les attaques du gouvernement français. Des millions de salariés feront preuve de leur détermination à se battre contre une attaque sans précédent contre leurs retraites et les services publics de base.

L'offensive du gouvernement porte sur trois points : la réforme des retraites qui réduira de 30 à 50 pourcent les pensions, le transfert de 110 000 postes de l'Education nationale aux régions ainsi que la suppression de 25 000 postes dans le service public de l'éducation, et la réduction draconienne des dépenses de santé, notamment pour les personnes âgées.

Les réformes proposées par le Président Jacques Chirac et le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin représentent une attaque fondamentale contre la structure toute entière des avantages de l'état-providence mis en place après la seconde guerre mondiale. Les salariés sont confrontés à une lutte non pas contre tel ou tel politicien ou proposition mais contre le gouvernement Chirac-Raffarin lui-même et l'élite capitaliste qu'il représente.

Ce mouvement engagé dans la lutte contre ces attaques doit être élargi et approfondi afin de mobiliser activement salariés des secteurs privé et public, retraités ainsi qu'étudiants et jeunes, salariés immigrés et de souche. Néanmoins pour que ce mouvement parvienne à ses fins, il doit être guidé par une compréhension lucide des forces motrices qui sous-tendent ces attaques et une stratégie politique entièrement élaborée basée sur cette compréhension.

Il est nécessaire de dire les choses telles qu'elles sont. L'agitation militante ni même la grève
ne parviendront à elles seules à préserver les emplois et les conditions de vie de la classe ouvrière face à la détermination de l'élite dirigeante à démanteler tous les acquis sociaux hérités du passé. Il s'agit ici d'une lutte politique opposant une classe ­ la grande masse des salariés ­ contre son opposé ­ l'élite industrielle et financière et la couche la plus riche et la plus privilégiée de la population. Cette lutte provient d'une crise mondiale du système capitaliste qui a déjà produit la violente éruption de l'impérialisme américain en Afghanistan et en Iraq, le conflit ouvert entre Washington et ses alliés apparents en Europe, une attaque massive sur les droits démocratiques dans tous les pays, et une récession qui s'intensifie et menace de sombrer en déflation mondiale et dépression.

Le plus grand tort est fait par tous ceux ­ bureaucrates syndicaux, politiciens, opportunistes de la soi-disant extrême-gauche ­ qui nient le caractère politique de cette lutte. Disons les choses telles qu'elles sont : la classe ouvrière est confrontée à une lutte dont l'objectif conscient doit être non pas de faire pression ou de faire reculer le gouvernement Chirac-Raffarin, ou même de le remplacer par un autre gouvernement bourgeois des partis de la Gauche officielle, mais plutôt de prendre le pouvoir politique entre ses propres mains. C'est seulement de cette façon que les salariés peuvent réorganiser la vie économique suivant des principes authentiquement démocratiques et égalitaires, de façon à ce que les ressources produites par les salariés puissent être développées et distribuées pour subvenir à leurs besoins.

Le fossé grandissant entre riches et pauvres et les attaques contre les services publics ne sont pas propres à la France. Les salariés du monde entier sont confrontés aux mêmes attaques fondamentales. Aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, la polarisation des richesses a été poussée encore plus loin. De Reagan à Bush et de Thatcher à Blair le niveau de vie des salariés ne cesse de baisser tandis que les riches amassent des fortunes toujours plus grandes.

En Europe, le Chancelier allemand Gerhard Schröder a déclenché les attaques les plus importantes que l'on ait jamais vues contre le système de sécurité sociale allemand avec son « Agenda 2010 ». Schröder, dirigeant du SPD, équivalent du Parti socialiste français, procède à des attaques similaires à celles de Chirac et Raffarin.

Le problème est mondial. Tout comme dans les autre pays, le gouvernement Chirac-Raffarin et l'élite du grand capital qui se tient derrière lui, essayent de faire payer à la classe ouvrière la crise mondiale de l'économie. C'est seulement sur la base d'une stratégie visant à unir la classe ouvrière par delà toutes les frontières nationales et en tant que force politique indépendante de la société bourgeoise que les salariés pourront lutter pour prendre le pouvoir et résoudre cette crise dans l'intérêt de la grande majorité.

Le combat pour cette perspective requiert avant tout la rupture avec les vieux partis discrédités de la Gauche et la construction d'un nouveau parti politique sur la base d'un programme socialiste et internationaliste.

Les expériences politiques les plus importantes vécues par les salariés ces 35 dernières années démontrent la futilité des luttes qui restent dans les limites d'une perspective nationale et consistent à faire pression syndicalement sur l'Establishment industriel et politique. En mai juin 68 il y avait 10 millions de salariés engagés dans une lutte politique contre le gouvernement de Charles de Gaulle et la Cinquième république elle-même. Le Parti communiste et le syndicat CGT effectuèrent une trahison historique en refusant de faire tomber le régime gaulliste et en appelant, au contraire, à mettre fin au mouvement de grève en échange de quelques concessions dérisoires. De Gaulle et Georges Pompidou, après lui, eurent tôt fait de rogner ces gains dans les années qui suivirent.

Entre-temps il y eut de nombreux mouvements sociaux de masse contre les divers gouvernements "de Gauche" présidés par François Mitterrand. Ils s'achevèrent tous par des arrangements concoctés par la direction syndicale qui laissaient en place les attaques fondamentales : fermeture de l'industrie sidérurgique au début des années 80, accélération de la production et licenciements dans l'industrie automobile deux ans plus tard, pour ne donner que deux exemples.

Finalement, la grève massive des fonctionnaires en novembre-décembre 95 mit le gouvernement d'Alain Juppé au bord de l'effondrement. Les syndicats acceptèrent cependant un arrangement qui laissa en place non seulement les attaques de Juppé contre la sécurité sociale mais aussi celles perpétrées en 93 par l'ancien Premier ministre Edouard Balladur contre les retraites des salariés du privé. L'allongement, pour les salariés du secteur privé, de la période de cotisation de 37.5 à 40 années est utilisé à présent pour justifier l'allongement identique, pour le secteur public, de la période de cotisation.

Le bilan de cette politique qui se limite à faire pression et qui est poursuivie par les partis politique de Gauche et par les syndicats est un bilan de trahison et de défaite. Chaque concession faite par ces dirigeants conduit à de nouvelles concessions. Les salariés ont vu leur niveau et conditions de vie se dégrader ces trente dernières années. Maintenant Chirac propose de s'attaquer à leur retraite, à l'éducation et à la sécurité sociale.

Ce sont les bureaucraties du mouvement ouvrier, qui ont depuis longtemps fait leur temps, qui sont l'obstacle majeur à la lutte: le Parti Socialiste, le Parti Communiste et les appareils syndicaux. Ils sont rejoints par ces organisations opportunistes qui les protègent et détournent toute critique à leur égard : la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR) d'Alain Krivine, Lutte Ouvrière (LO) d'Arlette Laguiller et le Parti des Travailleurs (PT) de Pierre Lambert.

Dans la lutte actuelle, il n'y en a pas un parmi eux qui ose dire la vérité. Mis à part quelques discours de circonstance à leur récent congrès, le Parti Socialiste a refusé de lever le plus petit doigt contre les mesures de Raffarin.

Le gouvernement de la Gauche Plurielle (PS,PCF et Verts) de Lionel Jospin, arrivé au pouvoir après la réforme des retraites de Balladur et les attaques de Juppé contre les services publics, n'a pas abrogé une seule de ces mesures durant ses cinq années au pouvoir. Pas un syndicat ne s'est élevé contre cette trahison.

C'est la politique anti-ouvrière du gouvernement Jospin qui a ouvert la voie au vote massif pour le fasciste Le Pen au premier tour des élections présidentielles de 2002. La réaction du Parti Socialiste et du Parti Communiste fut de faire campagne pour que Chirac soit élu président. Ils s'opposèrent à toute lutte pour avancer une alternative politique ouvrière aux partis de la Droite bourgeoise. Ils portent de ce fait la responsabilité politique de toutes les mesures anti- ouvrières que Chirac a prises depuis.

Tous les partis de la Gauche officielle continuent à prétendre que les problèmes soulevés par l'offensive de Chirac et Raffarin peuvent se résoudre en faisant pression sur le gouvernement. Le Parti Communiste dit avoir « fait ses calculs », et qu'il est possible de résoudre la question des retraites. La LCR déclare qu'il « est possible de financer les retraites ». LO dit que « tous ensemble on peut faire reculer le gouvernement ».

Non seulement ils désarment politiquement la classe ouvrière, mais ils fournissent aussi un écran de fumée pour que les syndicats dispersent et fassent avorter la lutte afin d'éviter une confrontation avec le gouvernement.

La traîtrise de la bureaucratie syndicale a déjà été démontrée par la décision de la direction de la CFDT d'accepter la proposition du gouvernement sur les retraites. Pour sa part, Bernard Thibault a écarté tout mouvement de grève jusqu'après le 28 mai, jour de l'examen de la réforme au Conseil des ministres. Il a complètement désavoué la grève des salariés des transports urbains parisiens, RATP, qui a perturbé les transports dans la capitale.

Marc Blondel, dirigeant de Force Ouvrière démontre en des termes on ne peut plus clairs la détermination des dirigeants syndicaux à éviter une lutte politique avec le gouvernement. Dans un entretien récent où on lui demandait s'il avait l'intention d'appeler à une grève générale, il répondit : « Non Cette notion de grève générale prend toujours un tour politique. Je ne me bats pas contre Raffarin mais contre la réforme des retraites de Fillon » [le ministre des affaires sociales].

Laissant prévoir son intention d'annuler toute lutte, il dit à l'Agence France Presse le 19 mai : « J'ai le sentiment que nous sommes dans la dernière semaine de l'expression syndicale à partir du 25 et au-delà, le problème va devenir un combat entre la majorité et l'opposition, ce n'est pas mon problème. »

Les salariés français doivent s'unir avec les salariés à échelle internationale dans une lutte basée sur un programme commun qui impose la propriété sociale des forces productives de base et la redistribution des richesses sous le contrôle démocratique de la classe ouvrière. Cela nécessite la construction d'un nouveau parti international ouvrier qui lutte pour une perspective socialiste.




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Barnabé
 
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