(ap 20h30 15h30 heure locale a écrit :Grève générale en Guadeloupe: les négociations se poursuivent, la grogne gagne la Martinique
La grève générale qui paralyse la Guadeloupe depuis près de trois semaines s'est poursuivie vendredi. Le seul dépôt pétrolier de l'île a été bloqué sur fond de reprise des négociations pour tenter de sortir de la crise, alors que la grogne commence à toucher la Martinique.
A la préfecture de Basse-Terre, en Guadeloupe, des négociations quadripartites, rassemblant des représentants de l'Etat, du patronat, du comité LKP (organisateur de la grève) et des collectivités locales, ont débuté jeudi. Elles portent notamment sur un relèvement des bas salaires.
Evoquant une "base de départ de 2%" d'augmentation salariale dans les négociations, le président PS du conseil régional de Guadeloupe, Victorin Lurel, a estimé vendredi qu'il faudrait plusieurs jours pour sortir de la crise. "Il faudra au moins lundi à mardi, avant d'en sortir tout à fait", a-t-il affirmé sur France Info, demandant aux pouvoirs publics de "lâcher un peu de lest". "Ils ont peur d'une contagion à tout l'Outre-Mer. La Martinique est entrée en action", a-t-il observé.
Il a estimé que le secrétaire d'Etat à l'Outre-mer Yves Jégo, arrivé le week-end dernier en Guadeloupe, faisait "dans la médiation". "Il joue de son influence et ses pouvoirs en place, c'est bien son rôle, mais il n'y a pas d'argent frais, il recycle ce qui a été annoncé à Paris", a-t-il déploré, avant d'ajouter: "Sur le coeur même de la négociation, à savoir les 200 euros d'augmentation pour les bas salaires, et singulièrement le SMIC, on n'a pas abouti".
Dans un entretien publié sur "Le Point.fr", Yves Jégo a affirmé que le gouvernement allait "proposer pour les 37.000 allocataires de l'allocation logement d'aligner cette allocation sur la métropole. Cela représentera, par famille, une baisse de 50 euros des charges sur le logement". "C'est une mesure de pouvoir d'achat très conséquente", a-t-il déclaré.
Concernant la Martinique, il a souligné qu'il était "en liaison heure par heure avec le préfet" qui a engagé des négociations avec les syndicats réclamant une amélioration des conditions de vie et de travail. "Nous allons apporter à la Martinique les mêmes réponses qu'à la Guadeloupe (...) Les réponses que le gouvernement apporte en Guadeloupe, il les apporte dans les autres départements d'outre-mer", a-t-il assuré.
Mercredi, Yves Jégo avait annoncé que les prix de 100 produits de consommation courante allaient baisser de 10%, dans soixante supermarchés et hypermarchés de Guadeloupe. Il avait également espéré la réouverture des stations-service, suite à un accord conclu avec les gérants, mais le blocage se poursuivait vendredi.
"Le ministre communique un peu vite" et "a sous-estimé la capacité de mobilisation", a observé M. Lurel, affirmant que les stations-service restaient bloquées par "des salariés affiliés à un syndicat de l'UGTG, l'Union générale des travailleurs de Guadeloupe".
Par ailleurs, le président de la région Guadeloupe a déploré le fait que Nicolas Sarkozy n'ait pas évoqué la situation en Guadeloupe lors de l'émission "Face à la crise" jeudi soir. "On était blessés, très blessés même", a-t-il commenté. "C'est grave, c'est plus qu'un oubli, ça frise le mépris, ou pour ne pas être discourtois, une indifférence".
"Le président délègue son ministre ici sans moyens", a-t-il poursuivi. "Pour éviter d'informer comme il convient l'opinion publique nationale, on en fait l'économie, on en fait l'impasse, ce n'est pas bien", a-t-il déclaré.
Jean-Luc Lubin, secrétaire général de l'Union des entreprises MEDEF Guadeloupe, a estimé que ces négociations avançaient "timidement dans un contexte qui ne nous convient pas". "Les stations-service sont bloquées, l'économie est exsangue. On a perdu trois semaines de chiffre d'affaires", a-t-il expliqué par téléphone à l'Associated Press. "L'Etat ne fait pas son boulot", a-t-il ajouté, en reprochant aux pouvoirs publics de ne rien faire pour empêcher la paralysie de l'île.
Le LKP ("Liyannaj kont pwofitasyon", Mouvement contre l'exploitation outrancière), un collectif de syndicats, partis et associations qui a lancé le mouvement de grève, réclame notamment "un relèvement immédiat et conséquent d'au moins 200 euros des bas salaires, des retraites et des minima sociaux afin de relancer le pouvoir d'achat, de soutenir la consommation des produits guadeloupéens et plus généralement la demande". Il réclame aussi "le relèvement immédiat du SMIC, des salaires du secteur privé, des traitements de la fonction publique, du minimum vieillesse, des minima sociaux".
Dans un communiqué, Lutte Ouvrière (LO) salue "le combat des classes populaires de Guadeloupe révoltées par les hausses de prix insupportables". Nathalie Arthaud et Arlette Laguiller, de LO, se félicitent également "de l'ampleur prise dès ses débuts par la grève générale en Martinique qui met en tête de ses objectifs une augmentation de 300 euros. AP