Face à la crise, Airbus choisit la manière forte...

Face à la crise, Airbus choisit la manière forte...

Message par Proculte » 01 Juil 2020, 12:55

...et envisage de supprimer 15.000 postes

Face à la crise, Airbus choisit la manière forte et envisage de supprimer 15.000 postes

« L’ampleur et la profondeur de la crise due au Covid-19 » poussent le groupe européen à tailler dans ses effectifs, presque exclusivement au sein de la branche aviation commerciale.

Le Monde, Par Guy Dutheil

Airbus a choisi la manière forte. A l’occasion d’un conseil économique et social européen (CESE) ordinaire, mardi 30 juin, suivi le même jour, d’un CESE extraordinaire, la direction de l’avionneur a annoncé un plan de départs de grande ampleur. Au total, le groupe, présidé par Guillaume Faury, veut supprimer environ 15 000 postes d’ici l’été 2021. Une saignée encore plus importante que celle effectuée en 2007 à l’occasion du plan de restructuration baptisé « Power 8 », qui prévoyait déjà 10 000 suppressions de postes.

Cette fois, au dire de M. Faury, c’est « l’ampleur et la profondeur de la crise due au Covid-19 » qui poussent Airbus à tailler dans ses effectifs. Les coupes interviendront presque exclusivement au sein de la branche aviation commerciale, qui emploie 81 000 personnes sur les 135 000 salariés de l’entreprise.

Airbus prévoit de supprimer 5 000 postes en France, 5 100 en Allemagne, 1 700 au Royaume-Uni, 900 en Espagne et 1 300 sur les autres sites dans le reste du monde, notamment en Chine et aux Etats-Unis, où l’avionneur européen a installé des usines d’assemblage. Enfin, ces réductions d’effectifs incluent un peu plus de 900 suppressions de postes déjà décidées chez Premium Aerotec, une filiale du groupe en Allemagne.

Ces 15 000 suppressions de postes « sont la plus grosse réduction d’effectifs à laquelle Airbus a jamais procédé », a reconnu le PDG. Selon lui, le groupe ne pouvait s’y soustraire alors que « 40 % de [son] activité a disparu ». Fin avril, le rival américain Boeing avait déjà annoncé 16 000 suppressions de postes, soit 10 % de ses effectifs.

« Plan d’adaptation »

Ces coupes claires sont la deuxième étape du plan d’adaptation mis en place par Airbus depuis le début de la crise. Depuis mars, l’avionneur avait pris des mesures de court terme « pour protéger l’entreprise », telles que « l’utilisation massive du chômage partiel ». Airbus avait aussi sécurisé une ligne de crédit de 15 milliards d’euros et renoncé à verser des dividendes aux actionnaires.

Mardi, la direction n’a pas détaillé les modalités de son « plan d’adaptation ». Elles devaient être présentées aux organisations syndicales, pays par pays, mercredi 1er juillet, puis, site par site, jeudi 2 juillet. Le PDG a déjà indiqué que les dispositifs de retraite anticipée et les plans de départs volontaires seront utilisés. A l’occasion de cette seconde étape de son plan d’adaptation, la direction va négocier avec les syndicats des mesures additionnelles. L’objectif d’Airbus est de parvenir à conclure des accords de compétitivité qui pourraient inclure de la modération salariale, mais aussi l’abandon de jours de congé ou de journées de RTT. Pour l’instant, aucune fermeture de site n’est à l’étude.

En revanche, la direction se dit « incapable aujourd’hui de prendre l’engagement » de ne pas procéder à des licenciements secs. Pour les syndicats, l’annonce de départs contraints serait un chiffon rouge. « Nous ne voulons pas de licenciements, pas de mesures contraignantes », prévient Jean-François Knepper, délégué Force ouvrière (FO). Même son de cloche à la CGT, qui déclare qu’elle « refusera toute annonce de licenciements secs ». L’ampleur des suppressions de postes effraie jusqu’au gouvernement. Bercy juge « excessif » le plan de réduction d’effectifs d’Airbus. Au ministère de l’économie et des finances, on souhaite que l’avionneur réduise « au maximum les départs contraints ». Pour les éviter, le délégué FO invite la direction à « s’asseoir à la table des négociations pour discuter, y compris des mesures de réductions de temps de travail et d’activité ».

En pratique, ces suppressions de postes ne sont pas les premières, M. Knepper rappelle que « les intérimaires ont perdu leurs emplois par milliers depuis le mois de mars ». Pour le dirigeant syndical, « Airbus a les moyens de traiter socialement cette crise ». Il soupçonne la direction d’avoir « la tentation de profiter de la crise pour prendre des mesures structurelles », comme les réductions d’effectifs.

« Conserver les compétences »

M. Knepper souligne qu’Airbus va bénéficier du plan d’aide à la filière aéronautique de 15 milliards d’euros du gouvernement, auquel s’ajoute « 1,5 milliard d’euros pour la recherche et le développement ». En outre, le groupe, comme toute la filière aéronautique, devrait profiter de la reconduction du dispositif de chômage partiel qui pourrait être étendu jusqu’à vingt-quatre mois. Pour le délégué FO, tout cet arsenal d’aides « doit obliger Airbus à garder le sens de la mesure ». Si FO veut négocier, la CGT prend une posture plus contestataire. Elle appelle à « une journée d’action le 9 juillet ».

Pour Thierry Baril, directeur monde des ressources humaines de l’avionneur européen, « il faut regarder la vérité de la situation, l’ensemble du plan d’aide de l’Etat n’est pas pour Airbus ». L’objectif de la direction est « de préserver l’avenir d’Airbus », se défend également Guillaume Faury.

Selon ses prévisions, le groupe n’entrevoit pas de début de reprise de l’activité avant deux ans. Ce retour à meilleure fortune devrait d’abord bénéficier à l’activité moyen-courrier de l’avionneur. En revanche, la reprise sera plus longue à venir pour le long-courrier. Pas avant « quatre à cinq ans », précise M. Baril. Une période qui ne sera pas couverte pas le dispositif de chômage partiel de longue durée.

A terme, Airbus, qui souhaite pourtant « conserver les compétences », pourrait donc procéder à des licenciements au sein de son activité long-courrier. La production des gros-porteurs A350 et A330 Neo a déjà été fortement réduite. Il ne sort plus chaque mois que six A350 et deux A330 Neo contre 40 exemplaires de la famille des A320, le best-seller de l’avionneur.

Chez FO, M. Knepper estime néanmoins qu’Airbus devrait mieux se sortir de la crise que Boeing. A l’en croire, l’avionneur européen dispose « d’une fenêtre de tir » pour conforter son leadership mondial sur l’aéronautique. « Le Boeing 737 MAX est au tapis et les Chinois ne sont pas encore des concurrents », explique-t-il.

7 600 postes menacés chez Air France

Secoué par la crise due au Covid-19, le groupe Air France compte supprimer 7 600 postes, dont un millier dans sa filiale régionale Hop !, a indiqué mercredi 1er juillet le secrétaire d’Etat chargé des transports interrogé sur BFM-TV et RMC, Jean-Baptiste Djebbari. A propos de ces chiffres révélés mardi par des sources syndicales, M. Djebbari a précisé que l’ampleur de cette restructuration envisagée d’ici à 2022 et qui sera présentée le 3 juillet dépendrait « beaucoup à la fois des dispositifs d’entreprise et de la reprise du trafic ». « Nous avons demandé à la direction d’Air France d’avoir le moins de départs contraints possible, d’avoir recours, évidemment là aussi, aux départs volontaires », a-t-il souligné. Les compagnies rivales d’Air France ont également annoncé des plans massifs de suppressions d’emplois : 22 000 chez Lufthansa, 12 000 chez British Airways ou encore 10 000 pour l’américain Delta Air Lines.
Proculte
 
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Re: Face à la crise, Airbus choisit la manière forte...

Message par Plestin » 02 Juil 2020, 04:45

Il s'y ajoute tous les licenciements et les attaques chez les sous-traitants, comme on peut en avoir un aperçu dans cet article de LO (partie en gras) :

Airbus : une déclaration de guerre aux travailleurs
01 Juillet 2020

Le « plan d’adaptation » concocté par la direction d’Airbus est tombé : 15 000 suppressions de postes dans l’ensemble du groupe, dont 5 000 en France, 6 000 en Allemagne, 900 en Espagne, 1 700 au Royaume-Uni et 1 300 répartis dans les sites d’autres pays.

Malgré les 15 milliards promis à la filière aéronautique, le PDG Faury justifie ce coup de hache dans les effectifs en affirmant : « Il est essentiel de retrouver rapidement notre équilibre industriel et financier, afin de pouvoir répondre à ce qui va se passer ensuite. » En clair : pour préserver les profits actuels et futurs des actionnaires, c’est aux travailleurs qu’il veut faire payer la note. Et si la direction assure qu’elle fera le maximum pour limiter l’impact de son plan, elle explique aussi ne pouvoir exclure les « mesures forcées », c’est-à-dire les licenciements secs.

Le gouvernement estime excessif le nombre de suppressions d’emplois. On va sans doute assister à une pseudo-négociation pour réduire légèrement le nombre des victimes. Mais, quelle que soit l’issue de ces marchandages, c’est une déclaration de guerre aux travailleurs.

Cette nouvelle attaque fait suite à celles subies par les travailleurs de la sous-traitance. Après Derichebourg, où un accord de performance collective, qui consiste à baisser les salaires, vient d’être imposé, le patron de Blanc Aéro à Villefranche-de-Rouergue veut en faire autant. Chez Expléo, c’est la même épée de Damoclès. Daher vient de préciser ses attaques contre les travailleurs : suppression de 1 300 postes en CDI et non-renouvellement de la grande majorité des 1 400 contrats d’intérimaires. La direction de Sogéclair vient quant à elle d’annoncer des suppressions d’emplois qui pourraient toucher 245 travailleurs. Les travailleurs d’Aubert et Duval, à Pamiers, viennent d’apprendre qu’Eramet, leur maison mère, envisage de se débarrasser de leur entreprise. Safran pourrait la racheter mais, dans ces opérations, quelles garanties pour les travailleurs ?

Des dizaines de milliers de travailleurs de l’aéronautique sont visés par cette attaque. Qu’ils soient salariés d’Airbus ou de l’un de ses sous-traitants, en emplois précaires ou embauchés, ils ne pourront s’y opposer qu’en faisant front commun.
Plestin
 
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