par alex » 12 Oct 2004, 11:35
Ca continue à l'AFP, j'apprécie particulièrement la revendication de la titularisation des salariés par leurs collègues moins précaires.
Sous pression, la direction de l'AFP se met à négocier
Le vote d'une nouvelle grève, hier, a mis le président Eveno sur la sellette.
Par Olivier COSTEMALLE
mardi 12 octobre 2004
Bertrand Eveno misait sur l'essoufflement du conflit qui agite l'Agence France-Presse depuis une dizaine de jours. Mais, hier matin, le président de l'AFP a dû se rendre à l'évidence : contrairement à ses espérances, la tension n'était pas retombée après le week-end. Du coup, il a annoncé dans l'après-midi plusieurs concessions et invité l'intersyndicale à négocier. Les discussions se poursuivaient hier soir tard.
Eveno n'avait guère d'autre choix. En l'espace de quelques jours, il a été successivement la cible d'une motion de défiance (adoptée par 92,85 % des voix), d'un premier arrêt de travail de 12 heures, puis d'un autre, de 33 heures. Juste avant le début des négociations, hier, le personnel de l'AFP, très déterminé, s'était prononcé par un nouveau vote pour une grève de 48 heures du «fil» (service) français, jusqu'à demain matin 11 heures.
Union syndicale. Détonateur de ce brusque accès de fièvre dans une maison qui n'en avait plus connu depuis un an : l'attribution de «primes secrètes», d'un montant total de 65 000 euros, au directeur du service photo et à son adjoint. Alors que l'AFP est soumise à une très stricte politique d'austérité, la révélation de ces bonus attribués de façon discrétionnaire par le président de l'agence a mis le feu aux poudres. Bertrand Eveno a justifié sa décision en expliquant que les deux cadres du service photo avaient remporté un contrat vital pour l'entreprise.
Mais les syndicats, unis pour la première fois depuis longtemps, réclament la restitution de ces primes, la transparence sur les bonus attribués par le passé et l'arrêt de cette pratique. Autre revendication : la titularisation d'une trentaine de personnes, employées en contrat à durée déterminée alors qu'elles occupent des postes permanents.
Au début du conflit, Bertrand Eveno avait refusé de céder sur la question des primes attribuées à la direction, tout en indiquant qu'il «comprenait l'émotion et les interrogations» des salariés sur ce point. Et il avait indiqué que les embauches ne pourraient se faire que très progressivement, en fonction de l'avancement du plan de départs volontaires ouvert aux salariés de plus de 57 ans.
Changement de tonalité hier soir. Devant les chefs de service, puis devant l'intersyndicale, Eveno annonce qu'il met fin au système des «bonus» discrétionnaires attribués aux directeurs pour revenir à «des mécanismes classiques» et «transparents», promet-il de primes de fonction. Répondant partiellement à une revendication des salariés, il rend publique la liste des 27 directeurs ayant touché des bonus depuis 2001. Bertrand Eveno donne aussi des informations sur le montant global des primes versées.
Embauches demandées. Les négociations butaient encore hier soir sur les embauches. Les syndicats en demandent vingt avant la fin de l'année, tandis que la direction en propose quinze.
Quelle que soit l'issue des discussions, le président de l'AFP se retrouve aujourd'hui dans une situation délicate. L'Etat, qui dispose de plusieurs sièges au conseil d'administration, a tellement confiance dans sa gestion qu'il a imposé à ses côtés un conseiller à la Cour des comptes, Pierre Louette, au poste de «directeur général gestion». Le contrat d'objectifs et de moyens signé entre l'AFP et l'Etat encadre strictement les dépenses, en particulier la masse salariale.
Déficit de 76 millions. En dépit de ces mesures d'austérité, la situation financière de l'AFP reste préoccupante. Son endettement cumulé s'élève à 76 millions d'euros selon les syndicats, et le chiffre d'affaires attendu à la fin de l'année est en retrait sur les prévisions budgétaires. Les pertes nettes, bien que moins lourdes que les années précédentes, s'élèvent encore à 3 millions d'euros à la fin juin. De leur côté, certains journalistes de l'Agence France-Presse ont commencé à recenser «les errements stratégiques» du président, dont ils dénoncent «l'absence de projet».
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