dans la presse canadienne
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[center]Les mères stressées ont moins de garçons[/center]
Mathieu Perreault
La Presse
Les femmes ont moins de garçons durant les périodes sombres comme les récessions, les guerres et les famines, selon une nouvelle étude californienne. Pour une population de la taille du Québec, le nombre de naissances de garçons peut diminuer de plusieurs milliers par année.
Les épidémiologistes de l'Université de Californie à Berkeley ont analysé des données suédoises allant de 1751 à 1912. Le rapport garçon/fille variait entre 102 à 106 garçons pour 100 filles. Mais les garçons qui naissaient durant les périodes sombres de l'histoire de la Suède vivaient plus longtemps que ceux qui naissaient durant les périodes fastes.
«Nous avons fait cette analyse pour voir si les mères ont un rôle à jouer dans le choix du sexe de leur enfant», explique Ralph Catalano, l'auteur principal de l'étude publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences. «Il semble que oui. Dans les périodes difficiles, le corps des mères hausse le standard de viabilité du foetus. Cela élimine davantage de garçons, qui forment des foetus plus fragiles.»
Il naît davantage de garçons que de filles parce qu'ils sont plus susceptibles de mourir en bas âge, à cause de la même fragilité que celle des foetus mâles, et de mourir de mort violente, par exemple à la guerre ou dans une bataille de rue. L'avantage des garçons à la conception s'effrite donc ainsi, de sorte que le nombre d'hommes et de femmes a tendance à s'égaler.
Dans les pays occidentaux comme le Canada, il naît depuis quelques années environ 105 garçons pour 100 filles. Dans les pays asiatiques où les garçons sont plus prisés que les filles, comme la Chine ou l'Inde, l'écart augmente à cause de l'avortement sélectif et de l'infanticide, atteignant 120 garçons pour 100 filles dans certaines régions de l'Inde.
Chez quelques espèces animales, ce rapport change beaucoup plus que chez l'humain. «Il y a des espèces d'oiseaux qui peuvent diminuer le nombre de naissances mâles de 80 % en l'espace d'une seule génération, quand les temps sont difficiles, dit M. Catalano. Dans ces espèces, on peut dire que les mères choisissent vraiment le sexe de leurs enfants.»
L'épidémiologiste californien évoque aussi la susceptibilité particulière des hommes au stress. «Les foetus mâles sont plus sensibles aux hormones libérées par le stress, comme le cortisol. À l'âge adulte, les hommes sont aussi affectés par le stress d'une manière différente des femmes. L'effet sur la libido est plus prononcé. On peut aussi penser au taux de suicide plus élevé chez les jeunes hommes.»
Selon M. Catalano, le rapport garçons-filles pourrait être utilisé pour surveiller l'état de stress de la population. «Je pense que les variations de ce rapport peuvent indiquer l'apparition de facteurs de stress particuliers, comme des nouvelles maladies qui frappent particulièrement les femmes enceintes. On pourrait détecter de manière précoce ces maladies en suivant le rapport de garçons et de filles dans les fausses couches.»
Il existe aussi des mécanismes permettant d'éliminer les foetus de filles. «Il existe certaines indications que les foetus de filles sont plus prédisposés à l'hépatite B, dit M. Catalano. La prédisposition à l'hépatite B serait une manière pour le corps des mères de diminuer les naissances de filles dans les temps de prospérité, ou peut-être même dans les cultures où les garçons sont plus prisés que les filles.»