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Le mécanisme d’Anticythère, le high tech de l’antiquité grecque [/center]

Un fragment du mécanisme d’Anticythère et une reconstitution d’une partie des rouages.
(Jo Marchant, Nature) (Antikythera Mechanism Research Project)
Capable de suivre les mouvements de la Lune et du Soleil, de prédire les éclipses ou encore de reproduire l’orbite irrégulière de la Lune, le mécanisme d’Anticythère était encore plus complexe qu’on ne pensait, selon une nouvelle étude publiée aujourd’hui dans la revue Nature. Cette horloge astronomique aurait été conçue en Grèce entre 150 et 100 avant JC. Il s’agit du plus vieux mécanisme à engrenages connu, demeuré sans égal jusqu’au Moyen-âge.
Déchiffrer le mécanisme d’Anticythère n’est pas une mince affaire. En 1900 des plongeurs remontent vases, statues, bijoux et poteries d’une épave datée de 65 av. JC, échouée au large de l’île grecque d’Anticythère. Au milieu de ce trésor, une pièce de bois et de bronze corrodé passe presque inaperçue. Ce n’est qu’en 1902 qu’un archéologue remarque les roues dentées. Il a ensuite fallu attendre le début des années 70 pour le que chercheur britannique Derek de Solla Price et le physicien grec Charalampos Karakalos passent le mécanisme aux rayons X et fournissent une première vue détaillée des engrenages. Un autre chercheur britannique, Michael Wright, a consacré beaucoup de son temps à comprendre et à reconstruire la machine.
Mike Edmunds, astrophysicien, et Tony Freeth, mathématicien, avaient l’idée de réaliser un documentaire sur cet exceptionnel mécanisme. Entraînés par leur sujet, ils ont recruté d’autres chercheurs et ont eu recours à la tomographie assistée par ordinateur pour mieux percer les secrets de l’horloge. Ils présentent cette semaine leurs travaux lors d’un colloque à Athènes.
Leur reconstitution virtuelle a notamment permis de découvrir un petit mécanisme reproduisant les variations du mouvement de la Lune autour de la Terre. Il s’agit de deux petites roues, situées l’une au-dessus de l’autre mais légèrement décalées. La roue du dessous entraîne celle du dessus grâce à une pointe engagée dans une rainure. Comme les deux ne sont pas centrées, le mouvement de la roue du dessus accélère ou ralentit, imitant les variations du mouvement de la Lune.
Ces variations avaient été décrites par Hipparque, astronome et mathématicien grec de génie qui vécu en grande partie sur l’île de Rhodes, d’où pourrait provenir le mécanisme d’Anticythère. Edmunds et Freeth suggèrent que l’horloge astronomique y a été conçue par les disciples d’Hipparque. Les secrets de sa fabrication ont semble-t-il sombré avec elle au fond de la Méditerranée. Curieusement, aucune machine similaire n’a été construite pendant des siècles, jusqu’aux premières horloges astronomiques au 14ème siècle en Europe. Une énigme pour l’histoire des sciences.
Cécile Dumas
(30/11/06)