pour répondre aux saloperies réactionnaires de Testard et des curés qui veulent interdire le diagnostic préimplantatoire des embryons et remettre ainsi en cause le droit à l'avortement thérapeutique sous prétexte que les paents en profiteraient pour faire de l'eugenisme et exiger des enfants parfaits, voila un point de vue d'Israël Nisand professeur de gynécologie obstétrique au CHU de Strasbourg.
je rappelle également pour ceux qui y ont assité la conference du professeur Viville à la fete de LO.
dans le Monde:
a écrit :
[center]Le choix légitime des parents [/center]
par Israël Nisand
LE MONDE | 19.10.06 |
Le diagnostic préimplantatoire (DPI) autorisé et pratiqué en France depuis 1999 pour une centaine de couples chaque année dans 3 centres agréés (Clamart, Strasbourg, et Montpellier) est accusé par Jacques Testart (Le Monde du 14 octobre) de conduire à un "Homo geneticus" universel. L'information du public, qui éprouve des difficultés à suivre la complexité des procédures médicales est fondamentale et indispensable car chacun doit pouvoir juger en conscience de l'utilité de ces pratiques médicales, mais aussi de leur licéité, à la lueur de ses propres valeurs. La qualification à la légère de "pratique eugénique" à propos du DPI, loin d'éclairer les enjeux éthiques, ne fait qu'ajouter à la confusion : le débat éthique ne peut se résumer à la manipulation de slogans ni à l'échange imprécatoire de comparaisons fausses, voire injurieuses, faites pour assimiler cette médecine facultative au service de tous aux dérives de la médecine nazie.
La France, au travers de la loi bioéthique de 1994, a fait le choix de confier l'analyse des maladies de l'enfant à naître à 47 centres pluridisciplinaires composés de spécialistes reconnus pour leurs compétences en médecine foetale. Ces centres de diagnostic prénatal ont pour mission de vérifier que la maladie est particulièrement grave et de surcroît incurable. Sans cette attestation, aucun médecin ne peut procéder à l'interruption médicale de la grossesse.
Les procédures décisionnelles de ces centres de diagnostic prénatal sont complexes et fort élaborées. La douleur et la souffrance des parents qui demandent un tel geste sont si destructrices que, souvent, la préoccupation des médecins qui participent à la discussion est de savoir comment les parents vont survivre à un tel désastre. La double culpabilité - celle d'avoir conçu un enfant mal formé et celle de demander l'arrêt de la grossesse - peut ruiner l'équilibre des parents, et cela au long cours. Ce n'est en effet pas comparable d'arrêter une grossesse non désirée et d'interrompre la grossesse d'un enfant désiré, aimé, fantasmé, et souvent déjà nommé, mais qui est trop malade pour qu'on puisse le guérir.
Chaque année, près de 6 000 couples effectuent un tel choix dans la douleur et la solitude, malgré l'aide des psychiatres et des psychologues. C'est leur faire grand mépris que de dire, ou même d'accepter, que soit dit à leur sujet qu'ils sont à la recherche de "l'enfant parfait". Si cette notion existe, c'est uniquement dans la tête de qui ne connaît pas le drame des familles, et tout particulièrement celui des femmes qui portent en elles un enfant qui va mourir.
Le DPI a été conçu et développé pour éviter l'avortement chaque fois que c'est possible, c'est-à-dire chaque fois que l'anomalie génétique est prévisible avant même la grossesse. Quand un couple sait qu'il transmet une maladie génétique parce qu'il a un enfant malade et/ou qu'il a déjà connu le parcours destructeur de l'interruption d'une grossesse désirée, la réitération peut devenir strictement impossible. Pour ces couples, avant que le DPI ne soit disponible en France, la solution était de s'abstenir d'avoir un autre enfant ou de risquer à nouveau pour son futur enfant l'interruption médicale de grossesse.
Les règles d'acceptation du DPI sont les mêmes que celles qui prévalent pour le diagnostic prénatal, et les centres de diagnostic prénatal sont en charge de l'analyse des dossiers avant qu'un DPI ne puisse être réalisé. Il faut que la maladie transmise ait une particulière gravité et qu'elle soit incurable. Mais il y a une nuance dans l'appréciation, car ici il ne s'agit plus d'interrompre une grossesse déjà évolutive, mais de ne pas faire débuter une grossesse d'un enfant qui serait plus tard atteint de la maladie grave en question. Cette nuance déplace légèrement le contexte de l'analyse.
En effet, une maladie génique qui entraîne un cancer digestif avant la puberté avec une haute probabilité et impose de retirer progressivement l'intestin par morceaux pour finir le plus souvent par un cancer généralisé peut être considérée par les parents, mais aussi par les médecins, comme une maladie d'une particulière gravité, incurable au moment du diagnostic. Et, si c'est possible et souhaité par les parents, le DPI peut alors être accepté pour des parents qui simplement espèrent, comme tous les parents, grâce à la médecine, ne pas imposer à leur enfant le parcours inéluctable d'une maladie qu'ils connaissent et redoutent et la mort prématurée pour anomalie génétique qu'ils ont eux-mêmes transmise.
Ce qui n'existe pas en France, c'est d'avoir recours à cette technique sophistiquée pour un simple choix du sexe. Tout simplement parce que c'est interdit par la loi et que les centres français ont une totale transparence de fonctionnement et publient régulièrement ce pour quoi ils mettent en oeuvre le DPI.
Ce qui n'existera pas, c'est la sélection d'embryons "ayant les meilleures promesses de QI". Et ceux qui manipulent l'information scientifique le savent parfaitement. L'intelligence est si multifactorielle et se résume si peu à la juxtaposition de tel ou tel gène que personne (hormis dans les mauvais romans de science-fiction) n'imagine un jour rendre un enfant plus intelligent autrement qu'en l'aimant et en l'instruisant.
Les décisions des centres ne sont pas arbitraires car le cadre général de la loi fixe un guide dont les professionnels ne s'affranchissent pas. On pourrait tout au plus souhaiter que les médecins ne soient pas seuls devant des décisions d'une telle portée, la vie ou la mort d'un enfant, et que la société leur adjoigne des "non-médecins" pour participer chaque semaine à la difficile analyse au cas par cas.
Et si, demain, un nouveau gène de l'autisme était découvert, il y a fort à parier que des parents déjà éprouvés gravement par la naissance d'un enfant malade demanderaient au DPI de leur éviter une interruption médicale de grossesse supplémentaire. Qui mieux que les parents peut prendre ce type de décision ? Accuser les décisions de mise en oeuvre du DPI d'être arbitraires, c'est en fait refuser aux parents la liberté d'un choix que la France leur a donné il y a plus de trente ans en acceptant le développement du diagnostic prénatal. Ce ne sont pas les médecins qui estiment qu'"une vie ne vaut pas la peine d'être vécue". Ce sont les parents qui, seuls, ont cette légitimité. Et la société aurait bien tort de vouloir se substituer à eux pour des décisions d'une telle gravité qu'ils seront seuls à assumer ultérieurement.
Oui à l'encadrement rigoureux et vigilant du DPI par la loi (et par l'Agence de la biomédecine, qui doit contrôler le respect de la loi), mais aussi et surtout du diagnostic prénatal, où se pressent les vrais problèmes éthiques, car les décisions portent sur la mort prénatale d'un être vivant et aimé.
[center]Non à l'interdiction du DPI au motif que l'on pourrait en détourner l'usage.[/center]
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Israël Nisand est professeur de gynécologie obstétrique au CHU de Strasbourg.