a écrit :
Le mardi 12 juin 2007
[center]L'ecstasy nuit à la mémoire[/center]
Mathieu Perreault
L’ecstasy endommage la mémoire des mots, mais pas celle des images, selon une nouvelle étude néerlandaise.
«Normalement, au début de la vingtaine, il ne devrait pas y avoir de détérioration de la mémoire langagière», indique Thelma Schilt, neuropsychologue à l’Université d’Amsterdam, qui publie son étude cette semaine dans la revue Archives of General Psychiatry.
«Nos résultats sont donc particulièrement inquiétants. L’effet est modeste, il ne dépasse pas les variations naturelles dans la population. Mais la moyenne de notre échantillon n’avait pris que trois comprimés d’ecstasy durant les trois ans du suivi. Ce n’est pas une forte consommation.»
La neuropsychologue a choisi 160 jeunes au début de la vingtaine qui n’avaient jamais pris d’ecstasy mais envisageaient d’essayer. Ils ont passé des tests de mémoire. À la fin de l’expérience, elle a refait les tests et comparé les résultats des 65 cobayes qui avaient essayé l’ecstasy et des 96 qui n’en avaient pas pris. Détail intéressant, dès le départ, les participants qui ont concrétisé leur projet d’essayer l’ecstasy fumaient plus de cigarettes et de cannabis que les autres.
«Nous avons voulu éviter une critique fréquente des études sur les drogues, explique-t-elle en entrevue téléphonique. Il est possible que les gens qui sont tentés par les drogues soient aussi plus susceptibles d’avoir des problèmes cognitifs ou de connaître d’autres expériences néfastes sur le plan cognitif. Notre approche limite le risque de tels facteurs confondants.»
Après avoir étudié une liste de 15 mots, les participants devaient en redire le plus grand nombre. Au départ, le résultat était légèrement inférieur à 14 mots. À la fin, les usagers d’ecstasy ne se souvenaient plus que de 13 mots, contre un peu plus de 14 pour les autres. Faute d’un assez grand nombre de gros consommateurs, Mme Schilt n’a pas pu voir d’effet de dose, mais son expérience clinique personnelle la pousse à croire que plus on prend de l’ecstasy, plus on aura des problèmes de mémoire. Elle fera maintenant une expérience pour détecter s’il y a accumulation des déficits cognitifs chez les gens qui ont pris plus de 250 comprimés dans leur vie.
Pourquoi seuls les mots sont-ils touchés, et pas les images? «Peut-être l’ecstasy agit-elle davantage dans l’hippocampe et le lobe frontal, les zones du cerveau liées au langage. Ce sont aussi des zones importantes dans l’action de la sérotonine et de la dopamine, deux substances sur lesquelles les drogues agissent souvent.»