Cette discussion s'est finalement terminée (provisoirement ?) après de houleux échanges entre l'auteur Vincent Fleury et un intervenant qui a conclu sur son propre blog.
a écrit :VF, end point
May 14th, 2007 by oldcola
Les meilleures choses ont une fin. Je me suis pas mal amusé avec Vincent Fleury et sa théorie vaseuse à souhait, mais il y a des sujets tout aussi amusants qui ont l’avantage d’être intéressantes en plus.
Un petit récapitulatif sur la théorie, VF et des réflexions sur le mode de fonctionnement du fil de discussion.
Par analogie : VF croit avoir réinventé le fil à couper le beurre. Il vient de se rendre compte que quand le fil est tendu il peut être décrit par une équation de droite, que sa longueur peut être plus ou moins grande et que lors du déplacement dans une belle motte il peut tracer un plan, si bien sûr il est manipulé en “sorte de”.
Le raisonnement est basé sur une série d’approximations qui sont acceptables pour bâtir un modèle descriptif des mouvements globaux observés lors de la gastrulation. Inacceptables pour décrire vraiment la gastrulation; les cellules ne sont pas moyennes, surtout lors d’un processus de différentiation, les chimotactismes qui sont à l’origine de leurs mouvements sont particuliers à chaque type cellulaire, la composition du système varie avec le temps à cause du profil d’expression génique au cours du phénomène.
Même les brisures de symétrie qu’il évoque comme le Saint Graal à la base de sa théorie sont présentes dès le stade zygote (unicellulaire), ce qu’il ne peut pas ne pas connaître, mais il l’ignore, soit inconsciemment, soit, pire, consciemment, pour ne pas foutre en l’air son édifice (j’ai du mal à le soupçonner de malhonnêteté, mais il est bien connu combien je suis mauvais juge des caractères) .
On peut se contenter de rigoler doucement, ou être affligé quand son incompréhension du système qu’il traite, et son aversion des gradients chimiques en prime, l’amènent à considérer que les gradients morphogéniques, largement connus et décrits, se comportent comme des gradients présents dans un fluide, faisant l’approximation du fait qu’ils sont portés par des éléments cellulaires, capables de les générer et de les entretenir, peut-être même de les reformer lors qu’ils sont perturbés expérimentalement (trou dans la gastrula), ou admettre des modifications majeures quand les effecteurs ad hoc les redéfinissent (altération de concentrations locales de facteurs de croissance). Ou on peut être affligé et rigoler doucement aussi.
A force d’approximations et sans tenir compte des causes qui déterminent le mode de développement d’un organisme, il conclue que les formes préexistent et les génotypes ne font que les révéler. Si on parlait de sculpture sous l’angle de l’Art la discussion serait purement philosophique et j’entendrais que le fil à couper la motte de beurre, en la sculptant, ne fait que révéler une forme latente, soit-elle la Vénus de Milo. Mais comme il parle de biologie du développement et qui extrapole pour parler de l’évolution des espèces, il m’est difficile de ne pas tiquer.
Pour VF, l’information génétique est au mieux le révélateur de formes latentes, suivant un processus qui n’est certes pas mystique mais largement mystérieux, et soigneusement évité lors des échanges, rien dans son approche n’expliquant pourquoi tous les animaux ne se ressemblent pas.
Tour à tour, VF se plaint qu’il ne puisse pas publier sa théorie dans une revue scientifique, ou clame l’avoir déjà publiée et de recevoir les félicitations de ces collègues. En fait, ce qui est publié sont ses modélisations, qui sont astucieuses et intéressantes. Pas sa théorie. M’est avis que sa théorie est impubliable ailleurs que dans un livre grand public pour une raison simple : il affiche une méconnaissance de la théorie de l’évolution des espèces qu’il souhaite critiquer au moins à deux niveaux (mais deux de trop de toute façon) :
Il confond allègrement “développement individuel” et “évolution d’espèce” faisant l’approximation de tout ce qui n’est pas l’individu, oubliant le contexte même du développement et son évolution de l’oeuf de poulet à l’utérus des mammifères et les processus d’établissement des espèces à partir des mutants.
Il sépare apparition des variants d’une espèce par accumulation des mutations et sélection par le milieu, osant dire que s’il ne fait pas la séparation le problème est trop complexe et qu’il ne souhaite pas le traiter ! Ce qui ne l’empêche nullement de pontifier sur la faiblesse du darwinisme.
Pour justifier le choix de “De l’oeuf à l’Eternité” il se réclame de ces grands incompris par la science mainstream qui peuvent se passer de la critique a priori de leurs pairs, incapables de comprendre leur percée. Se garantissant ainsi une bulle intellectuelle qui pourra le préserver de la désillusion, comme elle semble le préserver des foudres de ses pairs, pour l’instant. Même les flatteries d’un Jean Staune, qui voit en VF un moyen simple pour déverser son “non-sens” sous couvert de respectabilité scientifique, ne semblent pas l’inquiéter, malgré le fait qu’il reconnaît en lui un spiritualiste, avec le quel il n’a rien de commun, mais au moulin du quel il veut bien apporter de l’eau pour disposer d’un public complaisant, quelles que soient les motivations de la complaisance.
La façon de discuter de VF est particulière et mérite d’être détaillée, non pas pour l’attaquer personnellement, mais pour faire le parallèle avec cette catégorie de scientifiques à théories grand public qui ne trouvent généralement pas le chemin des publications scientifiques.
Pour couper court à une discussion, qui n’en était pas une, j’ai abruptement proposé, publiquement, une évaluation de sa théorie par un groupe d’experts constitué de personnes proposées par lui et moi, fifty-fifty. Il aurait pu simplement décliner la proposition et envoyer aux calendes grecques la publication de sa théorie dans une revue scientifique (ce qui était ma première proposition). Il a préféré crier à la cabale (orchestrée par qui et pour quelle raison on ne le saura peut-être jamais), me traiter de méchant, se sentir vexé quand on l’a traité de “parano” par la suite, ajouter qu’il se sent “avili” à discuter avec moi et finir par me traiter d’andouille parce que j’ose lui demander de façon récurrente de répondre à certaines questions qu’il évite soigneusement.
Au lieu de profiter de la confrontation pour affiner sa présentation, il s’enferme derrière un mantra qu’il considère être la réponse à tout et que si l’on ne comprend pas on n’est pas digne de discuter avec lui. Quelles que soient ses qualités en tant que scientifique il est évident qu’il ne peut s’adresser qu’à un public complaisant ou crier au harcèlement (ajoutant qu’il n’aime pas les polémiques) essayant de défendre le “purement physique”. Je crois que le pire est qu’il se comporte de la sorte en croyant que c’est le bon comportement.
VF se doit aujourd’hui de se croire génial et au dessus de la foule des pauvres biologistes qui se trompent au sujet de la théorie de l’évolution, il se doit de réfuter le déterminisme génétique qui depuis Mendel se renforce de plus en plus, pour ne pas imploser en tant que personnalité; surtout.
Reste à savoir à quoi les modèles et la théorie de VF pourraient être utiles. Il faut distinguer le côté pratique, d’application, puis l’apport “fondamental”.
Je n’ai pas l’expertise qui puisse vraiment critiquer le côté pratique. Je ne vois pas non plus d’application à des modèles phénoménologiques qui ne peuvent s’accrocher aux connaissances disponibles. Je suis certain que les collègues de VF qui ont une approche plus ancrée à la réalité aboutiront à des application et qu’il restera au bord du chemin à regarder le train de l’histoire passer sans lui et son équipe.
Sur le plan fondamental l’apport est largement plus tenu. Ses extrapolations illégitimes sont certes amusantes, mais clairement une perte de temps et source de confusion dans l’esprit de certains. Ceux qui en profiteront au mieux sont les gens qui font la promotion des pseudo-sciences, l’exemple de première ligne étant des formations comme l’UIP et Jean Staune. JS s’en est déjà servi pour les confs de l’UIP et pour son livre. Il l’usera jusqu’à la corde et lui fera une réputation pas enviable qu’il ne mérite peut-être pas; mais il était prévenu par les participant au forum de SLT qu’il allait être teinté par l’expérience.
La biologie de l’évolution, n’ayant rien à voir avec la théorie de VF, n’en bénéficiera ni n’en pâtira pas, si ce n’est en perte de temps pour expliquer pourquoi elle n’est pas concernée.
Néanmoins VF représente un danger (connaissant sa susceptibilité je préviens que ce n’est qu’un danger mineur, quasiment insignifiant), celui de boucher momentanément la vue et de faire perdre du temps à des personnes qui auraient investi leur temps de réflexion sur des hypothèses/approches plus pragmatiques et mieux bâties. Sa toxicité n’est due qu’à la compétition pour le temps de cerveau libre investi à l’élaboration de modèles du développement qui tiennent compte de la réalité (bio[logique] et physique).