la psychiatrie en France

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par Crockette » 04 Fév 2005, 22:46

Myriam David est décédée la semaine dernière, on perd encore une grande dame de la psychanalyse...
Crockette
 

Message par iko » 17 Fév 2005, 02:20

Voici une lettre qui accompagne une pétition d’une équipe psychiatrie qui est en train de se faire « mettre au pas » par la montée du comportementalisme dans la psychiatrie publique.

Certains sur ce fil penseront que c’est peut-être mieux ainsi, surtout que le style un peu ampoulé de l’explication du travail des équipes peut être agaçant.

Néanmoins ce qui se passe à l’heure actuelle est grave et les comportementalistes, je le répète, ont une logique d’exclusion des plus malades qui est à l’opposé de celle des fondateurs du secteur psychiatrique. Leur devise (ces fondateurs) se résume à : Si une équipe est capable de s’occuper des patients les plus gravement régressés, elle n’aura aucun problème avec les moins malades.C’est une position éthique !

C'est vrai que, ces dernières années, elle n'a guère été suivi par l'immense majorité des psychiatres soit-disant analystes et "de secteur" , mais ce n'est pas une raison, au contraire, pour continuer à la défendre. Ce n'est pas parce que Pol Pot s'est revendiqué du communisme que je jette à l'eau le communisme.

C'est même une partie de ces soit-disant analystes qui a inventé le concept de "thérapie brève" pour pouvoir se donner un argument pour se débarasser des patients. Si vous lisez bien le rapport de l'INSERM tant discuté sur ce forum ces derniers jours, les thérapies analytiques retenues sont les "thérapies brèves"... Tant pis pour leur inventeurs ! En effet le rapport de l'INSERM essaie de comparer des thérapies de courtes durées. Je crois inférieures à six mois...
Je ne me sens pas concerné par ses critiques...
Excusez-moi encore, surtout Shadoko, de ne pas avoir le temps de vous en dire plus aujourd'hui (cf fil sur la schizophrénie).


a écrit :
Chers collègues,

Nous avons dans le Val-de-Marne un malheureux exemple de l'obstination belliqueuse d'une équipée pharmaco-épidémio-génético-comportementaliste à asseoir leur diktat et ce faisant éradiquer la clinique psychanalytique des CMP. A la tête de la l'équipée, le Professeur Rouillon (chercheur en psychiatrie génétique et épidémiologique à l'INSERM Unité 513), chef de secteur attaché à l'hôpital Albert Chenevier de Créteil, qui après avoir mis au pas une partie du secteur psychiatrique du département, sévit à la cellule d'appui scientifique de la DGS au ministère. Pour continuer le travail d'éradication il a nommé le Professeur Leboyer (chercheur en psychiatrie génétique et épidémiologique à l'INSERM Unité 513) qui assure son intérim et détient les trois secteurs de Boissy-Saint-Léger, Maisons-Alfort et Créteil.

Malgré l'hégémonie des théories et des pratiques préconisées par Monsieur Rouillon en intra-hospitalier, quelques irréductibles défenseurs d'une clinique à l'écoute du sujet ont réussi à survivre dans les CMP de Maisons-Alfort et Boissy-Saint-Léger, dans une co-existence somme toute plutôt respectueuse. Ce respect était largement dû  à une particularité peu courante : la gestion de ces deux CMP est confiée à une association (APSI) depuis 1972, qui en assura leur création et leur fonctionnement. Cette gestion associative, reconduite en 1989, a garanti une relative autonomie de pensée et de recrutement.

Or depuis le mois de mai dernier, cette gestion est remise en cause. Le professeur Leboyer a fait savoir dans les couloirs qu'elle compte réclamer le déconventionnement des deux CMP pour une reprise en gestion directe par l'AP-HP. Cela suppose de demander au Préfet de dénoncer l'actuelle convention liant le département à l'association. Un déconventionnement, qu'est-ce que cela signifie ? Ça signifie "une meilleure fluidité des moyens et des personnels" nous disent les administrateurs de l'intra. On traduit : intervention dans les pratiques et casse des équipes, la prescription de pratiques d'abattage et les conditions déplorables de reclassement obligeront la plupart à démissionner. Bref, le déconventionnement signifie des centaines de patients sur le carreau à cause du départ obligé de leurs médecins, infirmiers, thérapeutes qui avaient recueilli leur confiance grâce à une écoute attentive et particularisée, qui avaient tissé des liens privilégiés avec les partenaires locaux, qui avaient garanti la continuité des soins en ambulatoire depuis 32 ans à leurs patients, pour beaucoup psychotiques, qui ont pu alors continuer à vivre hors l'hôpital.

Alors pourquoi déconventionner ? Les motifs évoqués sont aussi surprenants que fallacieux :

- manque de dynamisme de la gestion associative (alors qu'un des CMP venait de permettre la création d'un CATTP !!!)

- impossibilité pour le médecin-chef d’exercer sa responsabilité médicale (médecin-chef qui malgré les invitation n'a daigné mettre le pied dans les deux CMP!!!)

- complexité des problèmes administratifs liés à la gestion associative

- homogénéisation du parc informatique.

Ce dernier argument nous a semblé saugrenu. C'est oublier que la question informatique est primordiale pour le Professeur Leboyer. En effet, il faut savoir que le service du professeur Rouillon-Leboyer se veut être à la pointe de la recherche en psychiatrie génétique, épidémiologique et pharmacologique, et compte bien devenir LE centre de référence en matière de "troubles bipolaires". Il faut savoir aussi que le financement des recherches se fait au prorata des populations incluses dans les protocoles. Dès lors la main basse sur les CMP permettrait d'enfler les protocoles de quelques centaines de candidats et donc d'accroître les financements. D'où l'importance de l'homogénéisation du parc, pour le transfert des données, la circulation des logiciels et la systématisation des essais cliniques.

Voilà ce que propose le Professeur Leboyer : transformer les patients en chiffres, les files actives en cohortes. Cette habitude est déjà bien répandue dans l’un des CMP où travaillent des praticiens de l'intra. Un nombre préoccupant de patients sont diagnostiqués "bipolaires" et traités par la même molécule. Dans ce contexte de "dé-sujetisation", et de "cobayisation" on ne s'étonne pas que la seule technique thérapeutique autre que le médicament soit les TCC, très utilisées par ces praticiens, l'une et l'autre ayant pourtant prouvé leurs limites, notamment en termes de risque de passage à l'acte suicidaire. Mais l'on pourra toujours dire que c'est à cause de la dureté du siècle. Ô Dame Science et Recherche, quand tu nous tiens…

Finie la co-existence respectueuse, l'AP-HP veut s'emparer du secteur de psychiatrie, domaine où elle n'a pas d'expérience. La DDASS est d'accord, à condition qu'il n'y ait aucun licenciement à financer. Alors le Professeur Leboyer s'est mise à clamer que cela serait merveilleux d'être enfin réunis. Depuis Mai dernier, toute l'association (4 CMP, 13 CMPP, 3 établissements et services regroupant près de 300 salariés) est en lutte pour dénoncer les méfaits d'un déconventionnement à la DDASS, aux élus locaux, députés et sénateurs, aux médias. Le 11 octobre, l'AP-HP saisit officiellement le Préfet, seule personne habilitée à rompre la convention.

Depuis 8 mois, nous nous expliquons, nous rencontrons fonctionnaires DDASS et HP-HP dont la langue de bois, le mensonge et la mauvaise foi laissent pantois. Ils sont demeurés parfaitement sourds à la clinique du quotidien et au risque pris pour les patients. Nous organisons assemblées générales, réunions d'information et rassemblements pour alerter les pouvoirs politiques, syndicats et presse sur ce que signifie vraiment l'extension de l'empire Rouillon-Leboyer pour nos patients et nous affirmons l'importance de préserver et de transmettre une clinique qui fasse sa place au sujet aussi malades et dangereux soient-il. Nous rencontrons les élus locaux, maires, députés, conseillers généraux, sénateurs qui eux ont vite saisi où se situait le bien de leurs administrés. Leur mobilisation a permis de geler le processus de déconventionnement jusqu'à ce jour, mais rien n'est encore gagné.



Nous avons créé un collectif de défense. Notre prochaine réunion aura lieu le lundi 14 février à 20:30 au siège social de l'APSI (Sucy-en-brie)



Le 1er février 2005,

Claire Blain, déléguée du personnel à l'APSI
Dernière minute : Nous venons d'apprendre la signature du déconventionnement. La journaliste du Monde qui enquête sur cette affaire l'a appris de la bouche du Préfet. Un Préfet sur le départ qui n'a à aucun moment pris le soin de nous consulter !...

iko
 
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Message par Wapi » 20 Fév 2005, 13:53

le malaise dans la psychiatrie existe depuis bien plus longtemps de le drame de Pau.

Une intervention de Lucien Bonnafé à ce sujet en 1999.

a écrit :


                                      Propos sur le malaise - Lucien Bonnafé


Merci. C'est bien d'avoir parlé de la résistance à l'obscurantisme. On ne saurait mieux dire. D'autant moins que nous sommes ici entre résistants et je pense tout particulièrement à notre journée de samedi, tu te souviens Jean Oury, à Saint Alban, quand il s'agissait de faire une sorte d'intervention testamentaire, de clôture en tant que parrain de l'institution en question, j'ai dit que j'allais leur faire une révélation c'est de leur lire un texte d'un maître à penser qui m'est très cher, et qui s'appelle Arthur Rimbaud. Alors j'ai pensé que l'on devait continuer aujourd'hui sur la lancée. Le texte d'Arthur Rimbaud qui est profondément méconnu est celui-ci:

"Car Je est un autre Si les vieux imbéciles n 'avaient pas trouvé du moi que la signification fausse, nous n 'aurions pas à balayer ces millions de squelettes qui, depuis un temps infini, ont accumulé les produits de leur intelligence borgnesse, en s'en clamant les auteurs. (Dans correspondance, Lettre à Paul Demeny).

Tout le monde évoque volontiers le "Je est un autre", mais très peu savent le sens que l'on peut tirer de la réflexion, lors-que l'on se met à se demander ce que cela peut bien vouloir dire ce "Je est un autre ", quand on en creuse indéfiniment le sens et en particulier, ce que ça peut bien vouloir dire au sens de résistance. car c'est bien de résistance qu'il s'agit.

J'ai essayé de trouver parmi les matériaux qui sont à ma disposition quelques références comme ça et, celle que je sou-mets tout de suite à votre réflexion, c'est celle-ci, suivez mon regard: "sur les esprits supérieurs ou dominateurs chicaniers sur tout injuste partage, corps et âmes, individus et société, ondes et corpuscules, singulier et pluriel, inné et acquis, esprit littéraire et esprit scientifique, travail manuel et travail intellectuel, intra et extra-hospitalier dans nos maisons etc etc.... "

J'ai dit que je parlerai très librement comme ça, pourquoi j'ai dit injuste partage. J'ai dit injuste partage en écho à un texte qui m'a profondément ému, autour d'Henri Lefebvre, mon cher ami le philosophe décédé il y a quelques années, dans les derniers travaux communs que nous avons poursuivis autour de lui, j'ai contribué à un travail sur le contrat de citoyenneté dans lequel ça n'étonnera pas ceux qui me connaissent, que j'ai choisi de traiter l'enfant citoyen. J'ai traiter l'enfant citoyen et c'est là que je suis arrivé à cette conclusion que je vous livre, moi qui ne suis pas tellement amateur de slogans mais qui, quand il le faut peuvent dire des choses qui peuvent percuter: "Il y a chez trop d'enfants, un Copernic assassiné".

De façon à démonter ce qui dans la formation actuelle du sujet humain, l'empêche de devenir un découvreur et un inventeur. Et alors, ce qui est intéressant dans l'anecdote que je vous raconte en passant, c'est que mon copain Lucien Espagno, homme de Sciences par excellence, il y en a qui connaisse bien ça parmi vous, les surdoués de l'enseignement secondaire qui se mettent à passer tous les examens de toutes les grandes écoles, etc., qui réussissent partout les grands scientifiques, donc Lucien Espagno est devenu un Centralien et il s'est mis à se préoccuper beaucoup de la formation de la personnalité avec ce point d'impact très méconnu et très étonnant qui est le bon usage de l'informatique. Et Lucien Espagno écrit le texte qui est jumelé avec le mien sur le droit au savoir. C'est lui qui a dit injuste partage. C'est lui qui a dit qu'il était lui-même un résistant, qui a dit injuste partage entre culture littéraire et scientifique. Or cette injustice, qui se traduit partout, et qui fait que nous vivons dans un monde dans lequel, pour vous donner une des conclusions ordinaires de mes réflexions ordinaires, cela m'a amené à diagnostiquer et à décrire la plus épidémique des maladies contemporaines : le DPR.

Le DPR c'est Diviser Pour Régner. Diviser pour régner, c'est pas étonnant que quelqu'un comme moi, bon disciple des encyclopédistes, qui ne songe qu'à rendre science et philosophie populaires, je m'applique à regarder à ce niveau populaire la réflexion scientifique de niveau le plus élevé de savoir comment ça fonctionne quand les savants essaient de se montrer comme savants, le dicton populaire le plus élémentaire qui parle de diviser pour régner. Et c'est vrai que tout le monde sait bien que le pouvoir des dominateurs s'exerce toujours dans l'exercice de division.

Alors quelle est la malformation de la personnalité qui fait que presque tout le monde fait comme s'il ne le savait pas? Et se laisse porter par n'importe quelle suggestion, à toute division, à tout partage. Je me suis mis à rechercher ce que nous autres, chercheurs de pointe, nous avons trouvé, comme niveau de base de la sagesse.

Le niveau de base de la sagesse, c'est alliance, différence et ressemblance; épanouissement de la singularité dans la culture des solidarités. Résistance aux exclusions, partitions, sécessions, discriminations, ségrégations. Le niveau de base de la sagesse, c'est la résistance au diviser pour régner.

C'est le lait par exemple, pour vous donner une illustration, que j'emploie volontiers, c'est de dire, que moi, qui suis l'être le plus singulier du monde, moi }ui fonctionne partout avec un système de références culturelles très "original&&eot;, j'apparais évidemment par excellence, comme le grand apôtre de la solidarité.

Car plus on est différent de tout un chacun, plus on est à l'écart des idées reçues, plus il convient de s'appliquer à ce que les gens qui fonctionnent avec les idées reçues, vous considèrent comme quelqu'un de leur trempe.

Dans tout ce travail de manipulation dominatrice des idées reçues, des opinions publiques, c'est que dans la manipulation ordinaire des idées reçues, on assiste à une pression toujours infiniment plus dominatrice sur la recherche et l'exploitation des divergences que sur celles des convergences.

Quand on essaie de rechercher comment on peut au mieux faire converger tout ce qui peut y avoir comme résistance à ce qui pèse sur le sujet humain, on s'aperçoit que partout on se trouve en présence d'une culture et d'une exploitation de ce qui peut faire diverger les hommes entre eux. Alors c'est très grave, parce que pour en venir à un certain nombre des principes sur lesquels, tout de même les gens de notre temps sont solidaires, le fait est, que toutes les opinions ne sont pas respectables, tant s'en faut, des gens qui veulent vous faire respecter toutes les opinions, faut voir, toutes les opinions ne sont pas respectables, ou tolérables, toutes les opinions qui prônent le rejet d'autrui, son exclusion, ségrégation, jusqu'à son anéantissement, ne sont pas respectables. Mais le malheur, c'est que toutes les opinions qui ne sont pas respectables, ont sur le sujet humain, l'emprise qui fait l'objet d'une insuffisance d'étude qui est assez remarquable. Le nombre des sujets humains qui sont possédés par des opinions qui ne sont pas respectables pose, à vous et moi, chacun d'entre nous devant un problème qui est celui-ci et qui est un problème dramatique.

Le drame de notre vie, c'est de faire concorder le maximum de tolérance individuelle vis à vis de tout sujet humain avec le traitement résolu des opinions intolérables dont ils sont possédés. Or ceci ne se fait pas beaucoup, c'est pas très "dans le vent".

Je vous ai donné là un certain nombre de préludes, j'ai la notoriété d'être le psychiatre qui parle le moins de psychiatrie parmi tout ce dont il peut parler, mais il faut quand même que je parle de psychiatrie.

Je suis tombé sur ma préoccupation dominante, et mon activité dominante dans le moment présent, c'est que, ce dont nous sommes les témoins, dont nos patients surtout sont les victimes, c'est une sorte d'obscurantisme intolérable qui anéantit tout regard sur la corrélation entre quoi que l'on fasse pour s'occuper du sujet humain en difficulté, évidemment tout le monde pense aujourd'hui à la chimie, les chimiothérapies mais c'est la dénégation que notre boulot, notre activité, notre responsabilité qui est loin de nous être individuelle, parce qu'il s'agit de la faire partager par tout un chacun, c'est la corrélation entre ce qu'on peut faire et qui agit dans l'enveloppe corporelle du sujet et ce que l'on peut faire qui est dans l'ordre relationnel, dans l'ordre de la relation humaine, dans l'ordre des effets psychothérapiques, dans l'ordre de tout ce qui est, que je trouve plus opportun de nommer "la science et l'art de l’écoute et de l’écho".

Science et art de l'écoute et de l'écho, qui n'est pas facile mais c'est certainement parce qu'elle n'est pas facile, qu'elle est intéressante. C'est très difficile, de se casser la tête pour savoir qu’est-ce que ça peut bien vouloir dire Je est un autre, quand on en creuse indéfiniment le sens, c'est un sacré boulot, mais c'est le plus passionnant à faire, et c'est ce sur quoi nous sommes ensemble acharnés ici

Ce travail sur la recherche des convergences, je pourrais en raconter. Mais il m'est venu un modèle exemplaire.

C'est un témoignage personnel, mais qui a un tout autre effet. Il se trouve qu'il m'est arrivé d'écrire, "on ne peut pas faire grief à Freud d'avoir parlé du marxisme comme si le marxisme était une doctrine suivant laquelle le facteur économique est le seul déterminant. " On ne peut pas lui faire grief, il a parlé comme tout le monde. On peut d'autant moins lui faire grief que le meilleur témoin en la matière c'est Engels, en 1890, qui écrit ce texte extraordinairement méconnu, que quiconque réduit leur doctrine à l'idée que le facteur économique est le seul déterminant. Dans le texte d’Engels, il est dit que c'est une phrase vide abstraite, absurde. C'est absurde de dire des choses pareilles. Seulement la lettre d’Engels qui a ce côté un peu testamentaire, qui est une protestation contre une perversion qu'il sent bien, se termine par les mots : "Je ne peux dire, je ne peux tenir écarté ... car il est vrai que l'on a fait des choses singulières".

Et il est vrai que l'on a fait des choses bien singulières, déjà en 1890, que déjà on a lancé quelque chose qui, bien plus tard, à montré que, ce que j'appelle moi, le marxisme de chapitre de chanoine, avec le militantisme de sérail qui va avec, a produit des effets qui aujourd'hui sont devenus spectaculaires, et devant lesquels nous avons été plus nombreux qu'on ne le croit, mais très inefficaces quant à résister, à cela qu'on

appelle communément le stalinisme, enfin en 1890 ce n'était pas Staline. Déjà l'idée de faire des choses singulières était dans l'air.

J'ai dit, on ne peut pas faire grief à Freud de ça, mais enfin, c'est pas bien de parler du marxisme comme ça. Il a parlé des séquences du marxisme telles qu'elles ont été. Alors je vais vous recommander une lecture.

Il y a un texte, qui m'a, quant à moi, ému très profondément, et que j'ai relu, pour les apprentis érudits qui m'écoutent, lisez : Moïse et le monothéisme. Et puis après, je vous recommande un texte qui est particulièrement émouvant, qui est la dernière des Nouvelles conférences, les Nouvelles conférences de 1932 n'ont jamais été prononcées, parce que physiquement, Sigmund Freud était incapable de les parler à ce moment-là. Elles n'ont jamais été parlées, mais elles ont été écrites. Le dernière des Nouvelles conférences, qui s'appelle "D'une conception de l'univers" est un des textes les plus méconnu de toute la leçon freudienne. Et pourquoi ce texte est-il si méconnu ? Ce n'est pas dans les Nouvelles conférences que l'on trouve, ce dont je dis souvent, que le meilleur enseignement que j'ai jamais tiré des leçons de mon maître S. Freud, c'est :

"N'oubliez pas l'oubli".

Il y a quelque chose là-dedans qui dans cette nouvelle conférence, est tout à fait impressionnant. J'ai toujours été impressionné par la lucidité de ce texte, mais quand je me suis mis à en faire l'apologie publique, j'ai dit c'est le meilleur texte que je connaisse sur la question qui me tient à coeur le plus profondément, c'est la question de l'opium du peuple.

L'opium du peuple, c'est comme Je est un autre, et encore mieux. C'est encore bien mieux, parce que tout le monde parle de l'opium du peuple, dans une version comme ça, plus ou moins métabolisée par les idéologies dominantes et tout ça, mais qui a lu La Sainte Famille ? Qui a lu le texte qui, quand il parle de la religion, dit : "Elle est le soupir de la créature accablée, elle est à la fois l'acceptation de la misère réelle et la protestation contre la misère réelle. Elle est le coeur d'un monde sans coeur, comme elle est l'esprit d'un monde sans esprit. Elle est l'opium du peuple. "

Je reviens au drame dont je parlais tout à l'heure, le drame de la tolérance infinie, de la compréhension illimitée à l'égard de qui est possédé par des opinions que l'on ne partage pas.

Rien n'est aussi éloquent, rien n'est un aliment aussi fécond pour faire en sorte que, quand on a quelque chose à inventer ou à produire on fait ce que je ne cesse de dire jamais, que tout ce que moi j'ai pu inventer et produire, je ne l'ai jamais fait qu'avec des anticléricaux de toute trempe, y compris dans la résistance, c'est cela, c'est ce regard sur qu’est ce que ça signifie la croyance, qui dans la parole de Marx apporte une luminosité extraordinairement méconnue qui fait que autant Freud dise que le bolchevisme tel qu'il est parti va devenir etc et alors il cite toute la problématique qui se pose dans l'étude du Monothéisme ce qui a pour sens la mise en lumière de l'esprit de prohibition de l'esprit de rejet et des intolérances réciproques.

Quand Freud parle de la malfaisance du monothéisme qui arrive constamment à donner ces effets, c'est comme ça qu'il m'arrive de dire: le meilleur connaisseur que je connaisse sur le thème d'opium du peuple c'est Sigmund Freud. C'est là qu'on peut voir comment se passe les moyens d'esprit de faire marcher les hommes dans l'inconscience de ce qui correspond à leurs désirs. C'est là que l'on trouve ce sur quoi, lorsque nous parlons de convergence, la preuve, que l'on soit ici ensemble, c'est ce que nous cherchons. On est là ensemble pour chercher ça.

Comment diable va-t-on converger à travers toutes les divergences possibles sur les conceptions de l'univers, pour au moins résister à cette malformation de l'esprit humain. Alors là, dans mon aventure, il y a une dimension, malheureusement très or}winale. C'est que, autant la leçon de Freud ouvrait avec N'oubliez pas l'oubli et avec les propositions tout à lait fondamentales sur l'opium du peuple dans les Nouvelles conférences et dans d'autres lieux, Freud ouvrait sur une incitation à ce qui sera nommé plus tard par un autre maître, Gaston Bachelard, la psychanalyse de la connaissance.

Il se trouve que nous vivons dans un monde dans lequel les gens comme moi, y compris dans le regard sur la folie, qui nous a permis de dire très tôt, ma première formulation claire, je m'en souviens très bien date de 1943: La connaissance que nous avons de la folie est fausse, nous observons ce qui se passe dans la modification de l'observé par l'observateur.

Ce texte là était un texte très directement inspiré par ce qui nous avait très profondément inspiré dans la réflexion sur le regard sur la science, qui était le nouvel esprit scientifique de Gaston Bachelard et avec un texte, pour des gens comme moi, qui parlait tout à l'heure de notre activité militante, avec un impact tout à fait saisissant par Sadate. Sadate, c'est juin 1936.

Dans une revue où, la participation de Bachelard, en commun avec le mouvement surréaliste se manifestait avec le titre : Le surrationnalisme, c'est là le texte qui pour les gens de ma trempe, les gens de mon expérience a été bouleversant. Il parle de l'enseignement de la philosophie comme ça, par un rationalisme borné aux enfants des écoles, alors on vous raconte que la somme des angles d'un triangle est égal à deux droits, vous répondez tranquillement : ça dépend. Et effectivement, ça dépend. Car Si les hommes de science n'arrivaient pas à

penser que "ça dépend", tout simplement on ne serait pas allé sur la lune. Mais les gens comme nous, les gens dans-la lignée de laquelle nous fraternisons depuis, sont des gens qui quand on leur a dit, la folie c'est ça, ont répondu : ça dépend.

Cela a été très important. Je parlais de psychanalyse de la connaissance, l'un de mes proches qui vient de mourir, il y a deux ans, c'est Georges Canguilhem, et qui a été notre coopérant dans bien des choses, et notamment dans la résistance au fascisme italien dans les années 30, j'ai fait sa connaissance à Toulouse, quand je lui ai demandé d'aller faire une conférence de philosophie dans une arrière salle de bistrot parce qu'il était professeur antifasciste, ce qui ne courrait pas les rues, et qu'ensuite je le retrouve commissaire adjoint de la République &mgrave; Clermont-Ferrand, et travailler avec lui à St Alban avec notre Société du Gévaudan et que c'est lui, qui par la suite parraine le travail de Michel Foucault qui a fait un bruit tout à fait infernal dans le monde psychiatrique, car il mettait dans le même ensemble historique notions, institutions, mesures juridiques et policières, des concepts scientifiques qui essaient de décrire une folie qui est par définition insaisissable à l'état sauvage c'est ce qui nous a animé, et c'est ce qui nous a permis de dire que quand les gens perdent la tête, ce qu'il en advient sera plus ou moins suralién&eacuus; et plus ou moins désaliéné, suivant la façon dont on parle avec le sujet en difficulté.

Je vais revenir sur mon DPR. Le fait qu'une de mes grandes découvertes de post-euclidien expérimenté que vous connaissez plus ou moins, c'est la découverte de ce syndrome effroyablement épidémique dans le monde où nous vivons, c'est de diviser pour régner.

Car une psychanalyse de la connaissance qui se développerait, au fond la prohibition de la psychanalyse de la connaissance équivaut énormément à ce que fut la prohibition de la psychanalyse il y a trois quarts de siècle, la psychanalyse, c'?gacute;tait pas beau à voir, c'était pas possible, c'était inacceptable. Alors cette idée de la psychanalyse de la connaissance qui est celle sur laquelle nous nous sommes acharnés, c'est une idée qui n'apparaît pas comme recevable, je vous donne une parenthèse ici, (si vous lisez la préface des Nouvelles conférences vous verrez que Freud a écrit que ces conférences ne sont pas faites pour les "analystes de métier", mettez des guillemets à "analystes de métier", et suivez mon regard) alors la main mise des "analystes de métier" sur une conception restrictive de ce qu'ils appellent comme ça, La Psychanalyse, n'est pas pour rien dans le fait que la recherche dans le sens de psychanalyse de la connaissance a été fort délaissée.

Faisons un petit exercice de science populaire comme dirait notre bon maître Denis Diderot : Est-ce que vraiment c'est étranger à la mentalité du sujet humain ayant une intelligence pas trop pervertie, de comprendre ce que dit notre bon maître Gaston Bachelard, quand dans la formation de l'esprit scientifique, lorsqu'il étudie les "gourances" comme dit le bon peuple, les aberrations de la recherche scientifique, il dit que l'on y découvre toujours dans toute sa plénitude la volonté de dominer les hommes. Alors la volonté de dominer les hommes, c'est ce que les gens de notre trempe, n'ont jamais cessé de rechercher dans toute l'exploitation de toutes les divergences.

Vous voyez, diviser pour régner, c'est très grave, parce que le fait est que toute notre histoire, est une histoire de résistance infirmisée par ce qu'on appelait traditionnellement la puissance de l'idéologie dominante, ce qui n'était pas si mal dit.

Car c'est vrai que l'idéologie dominante est tellement dominante qu'elle fait que, parmi les chercheurs que nous sommes, les esprits critiques parmi lesquels je prétends me situer disent : attention !

C'est tout de même vrai que dans la contestation de ce que cette société a fait, bien sûr dans notre rayon, les fous, mais aussi dans l'ensemble avec les êtres humains, c'est tout de même vrai que les résistants ont effroyablement succombé à la tentation de la divergence. Alors maintenant notre boulot, c'est de chercher les convergences.

C'est de dépister la résistance aux pulsions de divergence qui essaient de régner en divisant ceux qui pourraient résister à l’idéologie dominante et à la puissance dominante. Dans l'étude de tout ça, dans mes recherches, disons, de la psychanalyse de la connaissance, il y a ceci: je me souviens que c'était à Brumath, quand on s'était réuni pour faire une mise en question extrême-ment importante du fait historique immense qu'a été l'anéantissement des malades mentaux, anéantissement dur, par Hitler qui les a gazés, doux en France, qui les a laissés mourir de faim sous le régime de Vichy, nous avions une corrélation tout à fait sympathique où le discours n'était pas simplement le discours de psy, mais allait beaucoup avec le discours d'hommes de science. Dans la conversation avec des hommes de science, on s'est bien amusé, à réfléchir sur le bon mot dans le monde scientifique qui dit que, "on ne saurait prouver qu'il n'y a aucune corrélation entre le battement d'une aile de papillon en Australie et un tremblement de terre en Amazonie. On ne saurait prouver qu'il n 'y a aucune corrélation. "

L'idée de chercher à barrer, qu'est-ce que e{able on pourrait trouver et qui explique etc..., bon, je me souviens qu'à l'époque j'avais dit: chez nous on va faire pareil, on va dire, on ne saurait prouver qu'il n 'y a aucune corrélation entre la gifle donnée par un paysan d'Auvergne à un gosse qui n’a rien fait et un génocide en Afrique. On ne saurait dire qu'il n 'y a aucune corrélation.

Ça va loin, tout ça c'était pour dire, d'une façon un peu amusante, mais ce qui au fond est le fond de notre pensée est ce qui nous rassemble. Au fond j'ai envie de m'en tenir là pour laisser la parole à mes interlocuteurs, parce qu'au fond ce qui nous rassemble c'est que ensemble nous devons réfléchir sur le fait que : Nul n 'est irresponsable de ce qui se passe dans son environnement.

L'exemple type étant l'histoire des parents : " On ne saurait dire que les parents sont irresponsables de ce qu'il advient à leurs enfants. " Nul n 'est irresponsable. Mais le fait est que nous vivons dans une société dans laquelle la capacité de mieux faire avec les autres, nous revenons toujours sur la difficulté du Je est un autre, la difficulté de faire avec les autres, de faire au mieux avec les autres, est aussi mal cultivée que possible. Et voyez le malaise. C'est aussi mal cultivé que possible. Et le principe de cette inculture, c'est le Mea culpa.

Je me souviens de cette période où tous les citoyens français ne se sont pas rendus compte de ce que ça pouvait être, de ce qu'un ministre, d'une façon un peu inconséquente, sans se rendre compte d’où et quand elle le disait, avait dit : Responsable, mais pas coupable. Alors tous les manipulateurs de DPR, tous les argumentateurs possédés par un désir de puissance de celui qui cause sur celui qui écoute, se sont mis à se livrer à une débauche incroyable d'intoxication des esprits par le fait que Responsable = Coupable.

Il n'y a pas de meilleur moyen d'empêcher le sujet humain qui a à faire face aux difficultés de la vie, il n'y a pas de meilleure intoxication, pour l'empêcher de voir distinctement et clairement comment le fait qu'il n'est pas irresponsable de ce qui se passe autour de lui, peut être traité avec plus de sagesse, avec plus de lucidité et avec plus de sérénité.

Le mea culpisme qui est cultivé par cette société dans son discours ordinaire, est le symptôme le plus pervers de la maladie du Diviser pour régner. Il peut empêcher les gens de se rendre compte.

Prenons encore une petite lumière sur l'actualité immédiate. Le grand problème d'aujourd'hui c'est la pédophilie. Tout le monde en cause, tout le monde fait une inflation de propos dramatisants, là-dessus, et je dis voyons: c’est une goutte dans les cours d'eau qui mènent au fleuve dont nous parlons à l'heure actuelle. En parlant de ça, on n'a pas été irresponsable du fait de quelque chose qui... bon, je prends un autre exemple.

Dans les opinions communes courantes, ordinaires, le crime passionnel, c'est une circonstance atténuante, atténuante, je veux bien que tous les crimes ont des circonstances atténuantes, mais enfin, donné comme le plus atténuant, le crime qui signe le vécu de l'amour comme une possession et maîtrise de l'autre, le fait de participer à ce sentiment là, ça alimente bien les gouttes d'eau du courant dont nous parlons.

Il m'est tombé hier un effet tout à fait remarquable, du fait que aussi originaux que nous paraissions, nous ne sommes pas des gens comme les autres, on discute en dehors, à côté de la plaque... , il arrive parfois que le truc le plus simple arrive tout de même à être formulé avec des moyens d'assez grande audience avec lesquels, je parlais de convergence. Si il y a une convergence possible c'est bien avec ce que j'ai lu hier dans Le Monde d'hier, sous la plus de Bertrand Poirot-Delpech et qui à propos des histoires en question parle de ce qui est inculte dans notre société, de ce qui est contre cultivé dans notre société par la mise en valeur y compris médiatique etc., des désirs dominateurs et tout ça, c'est la richesse que l'on peut trouver dans le fait de se priver de ses désirs, pour le bien de l'autre.

Alors vous voyez que Je est un autre peut avoir une certaine audience


Wapi
 
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Message par Wapi » 20 Fév 2005, 14:01

Puis la discussion qui a suivi l'intervention :

a écrit :


Jean Marc Gendrault-Herzfeld

Question de gagner un peu de temps, je vais associer sur le mot résistance. Deux petits trucs, une histoire plutôt marrante, qui n'est pas une histoire juive pour une fois, à savoir l'histoire de l'adulte qui s'adresse à l'enfant, qui lui dit: "dis-moi ton prénom" et l'enfant dit: "Non je ne dirai pas mon prénom," Si, "dis-moi ton pré-nom",
Je vais vous la refaire : C'est l'adulte qui dit à l'enfant: "Dis-moi ton prénom", et l'enfant répond:
Et l'autre histoire de résistance, c'est l'histoire de Moïse et de l'Eternel, qui dit:

"c'est bien gentil tout ça, je vais aller parler au peuple, je vais aller raconter tout ce que vous avez raconté, mais qu'est-ce que je dois dire de Qui vous êtes ?"

Et là, l'Eternel, il résiste, il dit : "Il suffira de dire je suis qui je suis".

Lucien Bonnafé

Il me semble que tout ça nous renvoie à la problématique de la croyance. Par ce que dans la mesure où l'on décrète la Vérité, et où le sujet auquel on décrète la Vérité est posé comme interlocuteur, c'est à ce moment-là que le problème de la résistance se pose à lui, et effectivement le problème de la résistance c'est celui qui se trouve posé à partir du moment, je reviens à l'idée de progrès, pour simplifier, quand on m'avait demandé de quoi j'allais parler, j'avais répondu que j'allais parler un peu du progrès en psychiatrie.

Alors, on parlait de : "Le progrès ". L'idée de "Le progrès !", a fait l'objet l'année dernière, je citais Le Monde, tout à l’heure, l'année dernière, au mois de septembre, il y a eu toute une série d'articles dans Le Monde, qui a été extrêmement éloquente en ce sens que les uns et les autres se sont mis à descendre, au fond, l'idée bornée de Le progrès en tant que tel comme bienfaisant. Sur cette idée comme ça de la malfaisance de "Le progrès" vécu en tant que tel, l'idée que j'en ai donné, c'était l'idée de répandre à travers le monde, ce qu'on appelait "Le progrès" quand j'étais petit, c 'était la civilisation occidentale, c'était le colonialisme, le colonialisme était la mise en pratique de Le progrès.

Or si on regarde l'éclairage jeté par les comportements sur la folie, sur le comportement d'une société, on s'aperçoit que l'exportation des modèles xp sur la folie dans le monde entier a été un véritable désastre.

Que l'idée d'exporter ce qui, chez nous, faisait l'objet déjà d'une critique vigoureuse, comme le truc le plus inadapté possible, je reviens à mes maîtres Eluard et Breton, quand dans "L'immaculée conception" ils parlent des catégories orgueilleuses dans lesquelles on va caser les hommes qui ont eu un compte à régler avec la raison humaine, tout ce système d'oppression, de rejet, d'exclusion, sur la folie, est un système, qui pour les gens comme nous, oui, je reviens, j'avais cité Breton et Eluard tout à l'heure, un des moyens d'information que je dois aux gens qui sont mal informés, c'est que peu de gens sont conscients du fait que c'est le mouvement surréaliste qui le premier dans l'histoire des cultures a mis en question d'une façon sérieuse et vigoureuse le comportement de cette société à l'égard de ceux qui ont un compte à régler avec la raison humaine. Et cela, c'est extrêmement mé{gonnu. Cette société a réalisé pour la folie, cette aberration grandiose, qu'était le monde asilaire. Avec la colonisation, mais pas seulement avec elle, l'influence de la civilisation occidentale sur le monde, ce modèle a été copié. Ce modèle a été copié dans des sociétés pour lesquelles, si chez nous c'était une aberration, dans ces sociétés là, c'était une aberration au carré.

Car il est vrai que le regard, il y a la barbarie à l'égard de la folie, il y en a un peu partout à travers le monde, dans les formes culturellement les plus diverses, ne serait-ce que dans la civilisation islamique, ou s'est répandu le fait de lapider les fous, ou, ça et là, d'autres barbaries, mais enfin si les gens pétris de civilisation islamique veulent arriver à donner, avec l'exemple type de la psychiatrie, le modèle d'une relation meilleure devant les perturbations humaines, c'est pas en copiant les modèles occidentaux qu'il fallait le faire. C'était en inventant autre chose. Or les potentiels d'inventer autre chose, existent.

Chez nous, dans nos proches, je me souviens de notre proximité avec quelqu'un qui a été chez nous un découvreur exemplaire, qui s'appelait Henri Collomb, un ancien médecin de la marine, qui est devenu psychiatre à Daliar, et qui s'est mis à découvrir comment dans les sociétés tribales l'accompagnement de celui qui perd la tête, était aux antipodes d'une attitude de rejet telle qu'elle existe dans nos civilisations, qu'elle était une attitude d'accompagnement, ce qui lui permettait de dire que les psychoses chroniques étaient en Afrique une importation de la civilisation occidentale. Parce que ça allait beaucoup mieux dans les conduites de participation dans les sociétés tribales par rapport à celui d'entre nous qui perd la tête.

Je me souviens que dans les dernières références, il n'y a pas très longtemps que Georges Devereux est mort, mais c'était quelqu'un qui à travers l'étude des comportements des diverses sociétés devant la folie, nous a apporté des révélations extraordinaires. Et je me rappelle, que j'en parlais l'année dernière, en écho de tous ces trucs qui me reviennent en tête, je disais : le travail de Georges Devereux sur la folie dans les sociétés moraves, vient de paraître.

Je vous en recommande la lecture. Comment la manière de regarder et de réagir à la folie dans telle ou telle société, peut être infiniment, c'est quand on parlait de progrès que je disais ça, comment elle peut être infiniment meilleure dans son principe, dans sa réalité, que ce que nous appelons progrès. Dans ce sens, les sauvages s'étaient montrés toujours beaucoup plus savants que "les civilisés" entre guillemets.

C'est peut-être un peu à côté, mais je pense que, tout ce qui a à voir avec la retombée sur la société de la vérité révélée, nous pose cet éternel problèmet- du progrès.

A propos du progrès et de la psychiatrie, je vais vous en raconter une autre. J'aurais l'insolence de parler encore de psychiatrie étant donné les incidences sur l'ensemble des êtres humains, et je vais vous poser une question, puisque vous avez po{oeacute; la question du progrès.

Je suis d'une vieille génération de psychiatres, qui en a connu des progrès en psychiatrie, il y a eu la fièvre, il y a eu l'électricité, avec l'électrochoc, il y a eu l'insuline, il y a eu le 45-60 R, autrement dit la chimiothérapie contemporaine, il y a eu des progrès énormes, alors la question que je voulais vous poser c'est, et je pense quelle va nous aider à contourner le problème en cause. Le plus schématique à travers cette séquence est l'électrochoc. Parce que c'est à propos de l'électrochoc que j'ai lu les choses les plus significatives. Alors, est-ce que l'électrochoc est un progrès ?

Ca dépend.

C'est le moins que l'on puisse dire.

Oui, mais je pose la question, elle est un peu vicieuse dans ce sens que je n'arrête pas de lire, chez des gens ayant un discours un tout petit peu modernisant que l'électrochoc, c'est pas bien. C'est une idiotie. Etant donné ce que l'électrochoc a été, quand on demande est-ce que c'est un progrès ? Cela a été dans l'histoire de la psychiatrie le moment du premier triomphalisme, le moment où les psychiatres ont le mieux pu montrer qu'ils faisaient du bien à leurs malades, et le fait que quand on se servait du choc électrique, on s'occupait bien des gens, notre problème, aux gens de ma trempe, Oury le sait aussi bien que moi, le problème c'était de résister à une demande excessive de patients qui redemandaient tout le temps des électrochocs tellement ça leur faisait du bien.

Donc l’électrochoc, ça dépend de la manière de s'en servir. Mais il s'est trouvé que ce progrès de la thérapeutique, a été employé dans les asiles d'aliénés, ils étaient baptisés déjà, hôpitaux psychiatriques, ce progrès a été appliqué d'une façon, qui.epour les gens de ma trempe, est apparue totalement insensée.

L'électrochoc, c'était la thérapeutique courante, tout le monde passait, les uns après les autres et puis tout le monde passait à la machine, et pendant qu’il était dans le coma, passait devant ceux qui attendaient, et qui à ce moment là se mettaient à avoir de l'électrochoc une impression telle, qu'ils arrivaient à en dire du mal de la manière la plus significative. Parce qu'ils disaient même que ça faisait du mal. Ce qui n'était pas vrai.

Ce qui était scientifiquement une aberration, puisqu'une des propriétés de l'électrochoc c'est que ça ne fait pas de mal du tout. Mais l'électrochoc, ils se sont arrangés pour le faire si mal vivre, que les gens qui l'ont mal vécu ont raconté que ça faisait du mal. C'est une de ces caricatures de la vérité, qui font que suivant les usages du progrès...

A l'heure actuelle, bon je continue sur cette histoire, il y a un exemple qui est intéressant à connaître, parce qu'il a une valeur historique. J'ai parlé de la fièvre tout à l'heure, il fut un temps où, la pyrétothérapie, on va soigner les malades en leur donnant de la fièvre, est devenue une thérapeutique efficace. Et puis après ils se sont aperçus que ça ne faisait plus rien. Parce qu’ils se sont mis à le faire dans les asiles avec un système tellement routinier que l'on s'occupait si peu des malades que ça ne leur faisait plus rien.

Il y a encore mieux. La cure de Sakel, la cure d'insuline, qui a été le grand triomphalisme psychiatrique tellement ça faisait du bien an malade, c'était un truc extrêmement efficace, elle a perdu son efficacité dans les années qui ont précédé la chimiothérapies contemporaine, en 1950, 51. A ce moment là, les savants qui ont constaté que les cures d'insulinothérapies perdaient de leur efficacité, ils ont trouvé le truc. Le truc, c'était que la vieille insuline était moins purifiée que la nouvelle, donc c 'étaient les impondérables de la vieille insuline qui étaient actifs. Hors la maison Roussel a refabriqué sous étiquette rose, une insuline spéciale, modèle ancien pour l'usage psychiatrique, alors que les diabétiques avaient droit à l'étiquette blanche.

Je vous parlais tout à l'heure du grand obscurantisme contemporain, qui est l'oubli, la négation, l'effacement, l'oblitération complète de toute la problématique de corrélation entre ce que l'on fait, disons sur le plan physique, sur le plan biologique et tout ce qui est de l'ordre de la science de l’écoute et de l'écho, de l'ordre des conduites relationnelles.

C'est un fait que, à l'heure actuelle, les gens qui sont mal dans leur peau, souffrent d'une inflation de chimiothérapies qui est effroyablement inquiétante alors que l'on a démontré, les gens comme nous, les gens qui cherchent, savent très bien que l'on peut faire des économies dans les doses de médicaments administrées, suivant le contexte dans lequel cela se fait, et en particulier avec cette note très intéressante que c'est dans la mesure où la prescription a été faite collectivement, par le collectif soignant. A ce moment là, il en faut beaucoup moins. Et c'est un fait qui est prouvé.

On parlait des retombées sur l'en semble de la civilisation, c'est tout de même un fait que à l'heure actuelle une certaine image de la psychiatrie, plus exactement on devrait dire, de la chimiothérapies, celle qui permet au laboratoire Roussel de lancer une enquête, pour savoir dans quel cas la chimiothérapie serait possible, sic, avec la psychothérapie, il est certain que cette conception que les troubles de la conscience et du comportement relèvent d'une façon étroite de la chimiothérapies, n'est pas pour rien dans la conception de la société française et notamment de ses instances de médecine générale dans le fait que 1 enfant sur 6 en France, à l'heure actuelle, prend des médicaments contre les perturbations psychiques, contre les cris et les larmes. C'est tout de même gigantesque.

J'ai vu hier à la télévision, une émission sur ce qui se passe aux États Unis, avec l'administration de drogues au moindre problème posé par l'enfance. Y a qu'à lui donner de ceci, lui donner de ça. Et on s'étonne après que les gens qui ont des difficultés à faire face aux problèmes de la vie, vous savez les difficultés à faire face aux problèmes de la vie, vous êtes au courant, c'est si rare que ça, c'est si pathologique que ça, les gens qui ont des difficultés pour faire face aux problèmes de la vie, ils n'ont qu'à absorber une substance étrangère. Et c'est ainsi que le gosse qui a vu maman absorber une substance étrangère parce que c'était plus fort qu'elle de supporter ses problèmes et à qui eux-mêmes on a administré une substance étrangère pour les aider à faire face aux difficultés de la vie, suivez mon regard, car je parle d'intoxication.

Bon, vous me faites divaguer.



Jean Oury

Je voudrais reprendre quelques notions que d'ailleurs tu n'as pas abordées, mais qui me semblent très importantes, c'est quand tu parles des différentes passions secrètes.

Une des passions secrètes, c'est bien sûr la passion, qui n'est pas si secrète que ça, la passion de l'ignorance. De même, il y a la passion comptable, qui fait des ravages actuellement. On pourrait y ajouter bien d'autres passions comme confondre par exemple, exactitude et vérité.

Mais enfin je voudrais reprendre , ce que tu as évoqué, en particulier dans cette nouvelle conférence de Freud, quand il dit :

"N'oubliez pas l'oubli."

N'oubliez pas l'oubli est tout à fait actuel, parce qu'il y a une passion qui peut être partie de l'ignorance, mais de l'ignorance de l'histoire, et qu'on pourrait appeler, comme certains le disent actuellement, de l'ignorance de l'historico-historial (il faudrait redéfinir cela) qui semble faire des ravages actuellement.

D'autre part, j'aimerais bien que l'on puisse justement parler, à partir de formulations, qui sont des formulations qui me semblent très intéressantes, qui paraissent de l'ordre de la négativité quand tu dis : résistance, qui est maximum, et généralisée, la résistance à l'inhumanité.

Ca, c'est peut être très important à discuter en rapport avec le fait de dire que nul n’est irresponsable. Bien sûr que là il faudrait rentrer dans des exemples tout à fait concrets, l'histoire des électrochocs ou de l'insuline est tout à fait parlante. Il est évident que le fait d'oublier l'importance de ce qui nous entoure et de ce qui fait en fin de compte l'humanité, et pas l'inhumanité, on pourrait dire, en passant par Ganguilhem et par Michel Foucault, quand, pour justement aboutir à cette notion, on peut dire qui fait des ravages sur le plan mondial, qu'on appelle la biopolitique.

La biopolitique, je fais référence là à tout un développement à partir de Michel Foucault, mais en dépassant un peu Michel Foucault, en particulier d'un philosophe italien Giorgio Agemben, dans Homo sacer - un livre assez récent - quand il parle de cette notion effrayante qu'on appelle la vie nue, avec l'exemple maintenant malheureusement exemplaire disons des camps et de l'extermination des juifs, des tziganes, et autres, il fallait d'abord les déshumaniser, il ne fallait pas qu'ils soient de l'ordre de l'humanité et alors ils étaient de l'ordre de la vie nue, et à ce moment là on peut faire tout ce qu'on veut. Or par exemple ce qu'on rappelait sur les électrochocs, c'est déjà une sorte de commencement, de glissement vers quelque chose de l'ordre du pur physiologique, ce qui n'a aucun sens, ou le pur biologique. Tu l'as dit au départ, cette sorte de dichotomie ravageuse, entre le psychique et le soi-disant physique et qui est en jeu justement dans l'application des électrochocs ou de l'insuline, ou des neuroleptiques et autres, c'est un oubli, un oubli justement, ne pas oublier l'oubli. On oublie justement que ce qui est en question c'est pas la vie nue, c est des quantités de petites choses comme ça qui, on peut même aller jusqu'à parler de l'aile de papillon, comme tu l'as rappelé, mais des fois c'est des tous petits détails, disons de la vie quotidienne, peu de choses, on dit : Oh j'ai pas fait grand chose, j'ai pas dit grand chose, c'est rien, mais ce petit rien comme disait Jankelevitch c'est peut être ça qui va déclencher les pires catastrophes.

Et on est là peut être et c'est justement toute l'illustration il me semble que tu donnes ce soir, par quelques évocations, pour essayer de mettre en question ce que tu appelais, disons après Foucault, cette folie insaisissable, à l'état sauvage. Il n'y a pas d'état sauvage de la folie. Alors c'est ça qui est peut être le plus difficile à mettre en acte surtout dans cette époque actuelle de déshumanisation systématique avec le profil du biopolitique.

Tout devient biopolitique. Pensez par exemple à l'importance que l'on donne actuellement au génome et à toute cette biopolitique qui se profile autour de ça.

Pour résumer, je vais le répéter d'une autre façon, il me semble que le très important de mener disons, d'une façon permanente comme disait Tosquelles, l'analyse du savoir. La psychanalyse du savoir dont parlait Bachelard ou l'analyse du savoir dont parlent aussi beaucoup d'autres, comme par exemple Blanchot d'une façon très remarquable est que c'est inséparable, il ne s'agit pas seulement d'être psychanalysé, si ça veut dire quelque chose. Si on l'est jamais, mais ça n'a pas de sens si ce n'est pas corrélatif d'une part de l'analyse du savoir mais en même temps de l'analyse politique dans laquelle on est dans la concrétude de l'existence. Disons, dans tout objectif, même scientifique on est plongé dans une dimension non pas intentionnelle, mais dans une dimension politico-éthique, qui fait partie de notre travail et alors justement la plus grande résistance, c'est la résistance à accepter cela.

Ce que je voulais dire tout à l'heure c'est que le devoir éthique, c'est le devoir de rigueur, mais de rigueur la plus minutieuse, il ne s'agit pas de devenir obsessionnel, mais de la rigueur la plus minutieuse vis à vis de ce qu'on tait et de la façon même, dont ça va être fait.

On a bien vu, tout à l'heure la façon de taire des électrochocs s'est complètement détériorée et ça a abouti à des horreurs. C'était une réflexion pour essayer de relancer un petit peu.

Lucien Bonnafé

Un mot à propos de la façon de... Dans les activités collectives dans lesquelles j'ai été heureusement compromis et partie prenante, il y a un travail fait, c'est pour VST, pour l'organe des CEMEA, c'est pour cela qu'on l'avait fait, un travail pour pousser la réflexion de tous les personnels soignants, les personnels infirmiers en premier lieu, sur ce que nous avons appelé la façon de donner. La façon de donner, vaut mieux que ce qu'on donne. ça n'a l'air de rien mais c'est une donnée de la sagesse populaire qui est extraordinairement extravagante de méconnaître. La façon de donner vaut mieux que ce qu'on donne.

Question

Pourquoi l'homme au cours de ce siècle a-il voulu tuer Dieu ? C'est au philosophe que vous êtes, Monsieur Bonnafé que je m'adresse. Ce n'est pas de moi, c'est d'un philosophe des années 70.

Lucien Bonnafé

L'homme a toujours voulu tuer Dieu. Particulièrement dans ce moment ? Bon il faut reconnaître qu'il y a, un aspect assez saisissant.

Ces intolérances réciproques ont fini, avec les développements de ce qu'on peut appeler, disons la vie démocratique de l'esprit, le fait que tant d'intolérance réciproque, non ça ne peut pas aller. Et c'est un fait, je ne sais pas, Tuer Dieu, je dirais que ça se discute beaucoup à la lumière de ce que je vous disais tout à l'heure à propos de l'opium du peuple.

L'idée, je voudrais vous donner une réponse, au fond peut être un petit peu trop simpliste mais elle est pourtant là dans tout ce que je n'ai cessé de proclamer depuis toujours, c'est que de tout ce que j'ai pu arriver à coproduire de plus intéressant, les co-producteurs les plus fertiles ont toujours été des anticléricaux de diverses trempes. Quelqu’un d'aussi foncièrement athée que moi, quelqu'un qui se demande comme ça, il faut réfléchir sur ce que ça veut dire dans la tête humaine quand on pense qu'il faut un être suprême, souverain, tout puissant, qu'est ce qu'ils ont dans la tête pour penser ça ? Pour moi, l'idée de la croyance en Dieu, se pose en ces termes là. Qu'est-ce que les gens ont dans la tête pour avoir l'idée qu'il leur faut un Tout-puissant.

Ceci dit, quand on parle, je reviens sur ce que je disais tout à l'heure à propos de la tolérance, la tolérance infinie, bon il le croie, c'est son affaire, la seule chose que je lui demande c'est de ne pas en faire un instrument de persécution d'autrui. Dans la mesure où il n'en fait pas un instrument de persécution d'autrui, c'est mon frangin, c'est mon frère, c'est mon complice, c'est avec lui que je vais faire tout ce que diable nous pouvons faire ensemble, avec des exemples historiques merveilleux, l'exemple historique le plus, pas tellement méconnu au fond, mais c'est quand même l'exemple de la résistance.

L'exemple de la résistance à l'envahisseur allemand dans lequel la fraternité des croyants et des incroyants a été dans l'histoire contemporaine, poussée à son comble. Alors que le nombre des gens qui avait la même position que moi, à l'idée quel besoin d'un être Tout-puissant... c'est à considérer. C'est mon frère, c'est mon semblable qui pense comme ça, c'est son affaire, mais ça n'empêche pas la fraternité avec lui.

Le fait que en gros, c'est pas tellement vrai quand vous dites qu'à l'heure actuelle il y a une dominante à tuer Dieu, ça se discute, hein, la religion, la croyance la plus maîtresse du monde à l'heure actuelle c'est la croyance en Allah. Or il se trouve que la main mise de la pensée musulmane, du vécu musulman avec Allah comme suprême est en train en ce moment non pas de disparaître, mais de faire des petits, c'est en train de s'enfler en ce moment.

Ceci dit il y a des trucs qui sont aussi mal connus que possible et dans lesquels les informations que nous avons, nous laissent extrêmement perplexes. Mais numériquement la croyance la plus répandue au monde c'est le bouddhisme, numériquement.

Or les gens qui vivent cette croyance où est-ce qu'ils en sont maintenant? Je crois que parler de Dieu, la première précaution élémentaire c'est de ne pas parler seulement du Dieu qui règne sur notre propre civilisation. C'est de penser à Dieu dans le vécu humain. Tel que dans diverses cultures il a été pensé, figuré, matérialisé... Et de ce côté là, ça ne renvoie qu'à la question de tolérance.

Dans quelle mesure, la perversion historique dominante du monothéisme, celle que signale Freud, la perversion dominante du monothéisme c'est tout de même l'exclusivisme, l'intolérance réciproque. Cette main mise sur le monde de cette intolérance réciproque a engendré dans nos sociétés, c'est vrai, une résistance qui va croissant depuis le siècle des lumières, depuis que Jean François De La Barre a été supplicié, il a été accusé de ne pas s'être découvert devant une procession pose un problème qui est aussi mal connu que possible par les enfants des écoles et par les citoyens français. Comment ne pas se découvrir devant ce qui est considéré comme une manifestation d'intolérance est intolérable, est tellement intolérable que ça vaut le supplice, et que même noble il ne sera pas décapité, il ne sera décapité qu'après avoir été torturé parce que ce qu'il a fait est si affreux, la décapitation, je ne sais pas, vous n 'êtes pas au courant, mais la décapitation c 'était pas bon pour le peuple, c'était pour les nobles, et Jean François De La Barre a été supplicié avant d'être décapité quoique noble.

Ça en dit long sur le fait que le problème de la religion si on peut dire, je plaisante à peine, en disant que ce n'est pas le problème.

Je reviens à tout le reste, il est bon que tout le monde se demande, au fond c'est leur droit de se demander ce que c'est que la science, la mémoire, par exemple pour nous, la psychiatrie, la médecine, tout le monde a bien le droit de se demander ce que c'est, mais le hasard, toujours quand je cite cette séance, le comble c'est de se demander ce que c'est que le hasard.

Les gens ont le droit de se poser de telles questions seulement ils feraient bien de réfléchir à une chose c'est que de façon dominante, dans les modèles mentaux régnants se demander ce que c'est, c'est la manière de ne pas se poser la question sur la manière de s'en servir. C'est la meilleure manière d'évacuer la problématique vraie, notre problématique, la problématique humaine, la problématique de notre boulot, de notre réflexion quotidienne, comment s'en servir ?

C'est pour cela que je prends souvent le hasard comme exemple merveilleux car tout le monde par hasard peut rencontrer etc.. Et comment se fait-il qu'il y ait des gens qui se servent du hasard de leurs rencontres pour participer à des ensembles productifs et d'autres qui passent à côté. Se demander ce que c'est que cette sorte de travail, d'exercice sur la connaissance auquel nous sommes invités à participer ensemble, c'est surtout ça.

C'est pourquoi je donnais les exemples caricaturaux que nous donne la psychiatrie, la psychiatrie nous donne avec l'électrochoc, l'exemple le plus caricatural. La psychiatrie, dans le vécu ordinaire, c'est ce qui n'est pas comme le reste. C'est normal, c'est le pathologique. La psychiatrie c'est ce qui n'est pas comme le reste, détrompez-vous. Rien n'est plus démonstratif de ce qui est comme le reste. La psychiatrie c'est comme le reste, mais voilà c'est toujours plus caricatural, ou plus dramatique. En tous cas c'est toujours plus démonstratif. Alors cette idée que dans la psychiatrie sortent les exemples grandioses de ce dont nous avons à parler, quand on a parlé des maléfices de l'obscurantisme et bien il n'y a qu'à regarder ce que disent les chimiatres étroits dans notre boulot, pour lesquels il n'y a qu'à donner des remèdes et c'est une manière d'évacuer la corrélation avec la problématique vraie, la nôtre, la problématique qui est celle avec laquelle nous avons inauguré nos entretiens, celle du Je est l'au-tre.

Qu'est ce que ça veut dire le Je est l’autre, quand on étudie bien la manière de s'en servir. Alors les questions, sur ce que c'est, renvoient du point de vue de la philosophie des sciences à un des aspects de la connaissance les plus méconnus. Je vous le cite de mémoire, le texte le plus étonnant est celui de Condorcet disant qu'il est plus commode d'entendre comme entités homme ou animal que de faire attention aux idées qui peuvent leur appartenir.

Discuter sur les entités, ça permet de ne pas se poser de questions sur ce qu’on peut faire avec. Sur les problèmes pratiques que ça pose dans la vie humaine. Discuter sur ce que c'est, c'est surtout un moyen, une stratégie, pour ne pas se poser les questions sur ce que ça fait sur l'existence humaine, et sur les manières de s'en servir, avec tous les côtés d'usage pervers. Les usages pervers de la science...

Les histoires de biocratisme, je dis tranquillement les foutaises, les foutaises scientistes à l'enseigne du biocratisme ont eu des exemples caricaturaux. Le plus dramatique étant le racisme, le biocratisme des savants nazis qui a scientifiquement justifié l'extermination des mauvais sujets humains. La malfaisance du biocratisme ordinaire, le coût de la Shoah, ça sert, par sa monstruosi-té, à empêcher les gens à penser au racisme ordinaire, aux petits problèmes, ce qui fait qu'on n'a pas à faire attention au petit propos raciste parce que ce n'est pas la Shoah. Or, le biocratisme existe dans des petits riens, partout. Je me suis amusé à en illustrer un des aspects avec le propos d'un biocrate qui s'appelait De Clérambault. L'automatisme mental est histologique : la perturbation que j'observe chez le sujet humain est histologique. Qu'est ce que ça veut dire histologique ? Ça veut dire qu'il est dans les cellules, il n'a rien à voir avec ce qui n'est pas dans la matière corporelle du corps. On peut donc interroger quelqu'un qui souffre d'une perturbation mentale en se foutant totalement de ce que ça lui fait, la façon dont on l'interroge. Alors qu'en réalité quand quelqu'un perd la tête, ce qui est le plus important, c'est la manière dont on l'écoute dans le moment même où ce qu'il va advenir se joue avec le plus d'acuité.

Observez les publicités des journaux. J'en ai comparé deux, une qui a deux ans et une plus récente. Ca fait la propagande pour les révélations sur les secrets de la vie en disant: "c’est inclus dans ".

On parlait des gènes tout à l'heure. Il y a des trucs comiques parce que le comportement humain, son comportement sexuel comme ça, sont inclus dans les gènes. C'est la grande découverte de la science :

"c'est inclus dans". Qu'est ce que ça veut dire inclus dans en bon français ? ça veut dire qu'est exclu ce qui pourrait agir là-dessus et qui n'est pas dans les gènes, du moment que c'est inclus dans. Mais cet usage de la langue française, qui dit n'importe quoi, n'importe quel aspect de l'existence humaine est inclus dans.

Qu'est ce que ça veut dire d'autre que: "qu’est-ce donc qui est exclu ? " Qu'est ce donc qui les dérange et dont il ne faut pas s'occuper puisqu'ils disent inclus dans ? Et c'est très important, je crois, que du point de vue du développement d'une science critique, fondamentale, populaire, partagée par tous, arriver à savoir, c'est curieux que ça fait un bout de temps que l'on parle en-semble et je ne vous ai pas encore donné le vocabulaire qui sert beaucoup à me caracté-riser quand je parle, quand je dis fidèle disciple des encyclopédistes, et partisan de ren-dre science et philosophie populaires, je dis que la psychanalyse de la connaissance est une science dont la racine populaire est très bien établie, elle est sous exploitée, mais elle existe, car dans le vécu populaire, on sait bien dire : mais qu'est ce qu'ils ont dans le troufignon pour fonctionner comme ça ?

Alors, avec la séquence qui est déjà un niveau au-dessus, dans la hiérarchie des niveaux de la sagesse populaire, le niveau au-dessus de "qu'est ce qu'ils ont dans le troufignon?" c'est: "d’où ça leur tombe, qu'ils se mettent à fonctionner comme ça?". Et alors ce d’où ça leur tombe ? nous renvoie à tous ce dont nous parlons ici. Nous ne parlons que de ça. Comment les malformations, les histoires de malaise, qui nous ont rassemblés ici, sont là, au coeur du problème. Comment se fait-il que nous vivions dans un monde dans lequel la mal-formation des esprits soit si ordinaire ? Vous n'êtes pas au courant ? Vous ne savez pas que le DPR est la maladie la plus répandue de nos civilisations ? Le "diviser pour régner " est toujours là. Alors, arriver à casser l'esprit des gens, à ne pas voir les choses dans leur interdépendance, à ne pas voir les gens qui ont à souffrir différemment de diverses choses, a quand même pour premier réflexe de défense, de réexistence, de chercher toutes les convergences possibles : nous sommes aussi différents que possible l'un de l'autre, mais bon sang ! sur quoi pourrait-on s'allier pour résister à ce qui nous malmène vous et moi ?

C'est ça la question. Et ça c'est au coeur de la problématique du malaise.

Jean Oury

Non pas pour répondre, on ne peut pas répondre à cette question : Pourquoi l'homme a-t-il voulu tuer Dieu ? On ne va pas se mettre à parler de ces choses là, mais par contre, il semble qu'il faudra faire un déblayage des notions, ne pas confondre les Eglises, et quand je dis les Eglises, il n'y a pas que les Eglises déclarées, disons religieuses, mais il y a les Eglises des pseudo-sciences, l'Eglise des partis politiques, l'Eglise des conneries aussi. Or, Dieu, à mon avis, n'a pas grand chose à voir avec, c'est peut être une prise de position, avec les manigances disons, des Eglises. Ça ne veut pas dire que les Eglises ne soient pas nécessaires, c'est même peut être un support psychothérapique pour beaucoup de gens.

Par contre, c'est un problème qui évolue certainement avec les siècles, surtout depuis Descartes qui s'est débarrassé très rapidement du problème de Dieu en l'excluant du champ de ce qui allait devenir la Science. Ce qui n'empêche qu'il existe là tout un problème qui reste posé, pour arriver à cette chose actuelle, presque contemporaine, enfin d'il y a déjà plusieurs siècles, et qui est résumée par Lacan en disant que Dieu s'est réfugié dans le Réel. Bien sûr qu'il faudrait développer cela. Mais ça ne suffit pas de dire que Dieu s'est réfugié dans le réel.

Je retrouvais dernièrement des réflexions, par exemple quelqu'un qui n'est pas du tout de l'obédience de Lacan, qui s'appelle Jean Beaufret, dans des réflexions sur Heidegger, qui reprenait l'histoire de l'athéisme depuis l'Antiquité et il est certain que l'on a perdu beaucoup de façons de penser. Il disait que du temps de l'Antiquité -quand on parlait de quelque chose - au lieu de poser la question comme les technocrates la posent actuellement en disant "combien ça coûte ? " (même dans les conférences les plus aimables), et bien on se posait la question du " par où ?" à tel point que j'ai même rassemblé ça : "par où que ça passe? ", "par o&ugravu{ que ça vient ? ", "comment ?". Ce n'est pas loin du comment, c'est différent du avec, qui est déjà très vulgarisé, mais c'est la question du "par où ?".

Et on peut dire que ce qui est en question est que c'est soutenu par quelque chose qui n'est pas, et ce que disait Jean Beauffret, c'est qu'en fin de compte, tout le monde, même les plus religieux dans la civilisation actuelle, est athée. Au sens que Dieu n'est plus là. Peut être qu'il y a toute l'aventure christique de mise à mort qui préparait une nécessité de mettre à zéro quelque chose pour reconstruire ce qui allait devenir une "civilisation", sans parler de l'Inquisition.

Enfin, c'est une autre affaire, mais je pense que lorsqu'on parle du singulier, on a à faire d'une façon éthique avec quelque chose, comme le disait très bien Bonnafé tout à l'heure, qui n'est pas le différent absolu, mais le singulier. C'est à dire que l'on ne se trompe pas quand on a affaire à quelqu’un, ce doit être à ce quelqu'un et pas à un autre. Comment définir le singulier ? Ça peut en effet poser des problèmes.

J'aurais tendance à dire que s'il y a de la théologie à faire ce sera bien plus dans notre pratique de l'ordre, (ça va peut être sembler énorme) de la théologie négative. C'est à dire que c'est même presque un blasphème que de parler de Dieu, par respect même pour Dieu. Le sens de cette théologie négative va dans ce que je retrouvais par exemple des élaborations très anciennes faites par Guillaume d'Occam (et qui ont été écrasées par toutes les papautés qui ont suivi. Il parlait de l'intuition du non-étant. Il faudrait développer ça, l'intuition du non-étant. Si l'on ne passe pas par là, on n'est pas du tout préparé à accueillir ce qui est justement le plus singulier. Or, c'est ce à quoi on a affaire.

Maintenant, on peut reprendre des élaborations quand même très fines à partir des critiques mêmes de Marx, je parle souvent dans les manuscrits de 44 quand il s'est mis à critiquer, le texte s'appelait L'athéisme de Feuerbach pour en arriver à me dire qu'il ne faut pas confondre la nature et Dieu. Pour arriver à cet aphorisme que je cite souvent , L'homme, c'est à mon avis une avancée tout à tait pratique et logique, qui dit bien, c'est de Marx) "L'homme est pour l'homme l'existence de la nature et la nature est pour l'homme l'existence de l'homme. "

Réfléchissez à cette affaire. Et c'est pas du tout, de ravager cette position théologique, qui sont d'une complexité extraordinaire, mais on sait bien, que ceux qui croient le moins en Dieu, sont les théologiens.

Dans notre pratique, il semble que ce qui est en question c'est ce respect d’autrui, alors qu'est ce qu'on va cacher derrière autrui, ça moi je dirais souvent que c'est l'inaccessible. Et c'est ça qu'on doit préserver. On sait bien que dans l'époque actuelle de la biopolitique, tout doit être transparent. Et on sait bien où ça mène, jusque dans la fumée des camps. Alors c'est ça qui est quand même en question actuellement, et le risque effrayant dans lequel on se trouve de la destruction, parce qu'il y a une destruction, je ne sais pas si vous vous en apercevez, mais une destruction réglée, généralisée, dans tous les pays, de la psychiatrie et en fin de compte avec tout ce qu'il y a autour.

Parlez aux technocrates, de l'organisation du secteur ou de choses comme ça, vous verrez qu'il y a actuellement des déportations, de malades, ou d'enfants un petit peu trop débiles soit disant, des déportations. C'est à dire qu'on les passe, par exemple on m'a parlé dernièrement, 300 enfants qui sont partis de certains lieux de France, pour aller à la frontière de Hollande sans tenir compte de pas grand chose, de même, on vide les hôpitaux, soit disant pour une vie humanitaire, pour goûter les joies de la cité magnifique, on les vide, il n'y a pas assez de lits, et on supprime des hôpitaux en déportant les malades sans précaution, sans les infnmiers, parce que il n'y en aura bientôt plus des infirmiers, pour les mettre ailleurs. Vous savez que dans les hôpitaux psychiatriques il y a actuellement 650 postes vacants, que les médecins ne veulent plus y aller, on a supprimé les écoles d'infirmiers, on a supprimé les infirmiers, et qu'est ce que ça veut dire ? On peut dire : Est-ce que Dieu peut arranger ça ? J'aurais tendance à dire, Dieu, flchez-lui la paix. C'est bien plus à un niveau de praxis, de respect absolu d'autrui, que certaines personnes fassent de la théologie, tant mieux, mais chacun doit en faire, d'ailleurs on en fait tous.

On va pas ressortir à propos du génome, les querelles jamais finies, entre la prédestination et la grâce. On en est encore là.

Question

J'aurais en fait une question. Par rapport aux moyens à mettre en oeuvre pour lutter contre le DPR. Puisque j'entends parler du DPR depuis un bon moment et je finis par me demander, si c'est pas un peu une chasse au dahut, je suis un peu dans le flou, et d'abord en premier lieu qu'est-ce qu'on appellerait ce Diviser pour régner et au départ, vous avez parlé de travail, et qu'est ce qu'on entend par travail, qu'est ce qui serait à mettre en oeuvre dans le sens où le premier travail serait donc de réfléchir, puisque vous avez parlé de réfléchir , et en second lieu, on pourrait croire, enfin il y aurait tout à penser que tout relève ensuite de l'action et quelles seraient ces actions? ça c'est la première partie de la question.

En deuxième lieu on a beaucoup parlé de la résistance, qu'est ce qu'on entend par résistance, est-ce que c'est se défendre de, ou s'opposer à, et dans la mesure où on s'oppose à, est ce qu'on peut être dans la convergence. Dans le sens où, quand on s'oppose à, est ce que ce n'est pas se mettre dans la place de l'opposition et donc en quelque sorte, tomber , avoir le risque de tomber dans une espèce de manichéisme en postulant un grand méchant loup de l'homogénéisation comme un alien qui dévorerait l'individualité de l'intérieur. Qu'est-ce que ce travail ? Et avant tout qu'est ce que ce Diviser pour régner et qu'est ce qu'on entend par résistance parce que ça paraît apparemment central dans le débat par rapport à ce malaise, le malaise étant ce symptôme de DPR.

Lucien Bonnafé

Je suis un très mauvais dialoguant, comme vous vous en êtes aperçus, mais nous ne sommes pas venus ici pour vous faire la leçon, mais pour participer à un acte de résistance. Car c'est un fait que l'obscurantisme dont nous ne cessons de parler exerce une puissance déconcertante. C'est extraordinaire de voir comment, lorsque je parle d'obscurantisme je sais ce que je dis, les dénégations par des hommes à l'en-seigne de la science d'une dimension de la connaissance parce ce qu'elle est épineuse parce qu'elle est difficile etc.., ça s'appelle l'obscurantisme en bon français, or le côté souverain, dominateur de cet obscurantisme est extraordinairement préoccupant pour les gens comme nous.

Etant donné que nous ne cessons, je racontais tout à l'heure, nous revenions de Saint AIban, nous étions des centaines, avant j'étais à Reims, nous étions des centaines, à Aubervilliers nous étions des centaines, à Corbeil, nous étions comme ici, partout, il y a partout des gens qui sont réunis pour se casser la tête sur ce que je crois il n'est pas trop pédant de dire: Qu'est ce que ça veut dire Je est un autre, quand on en creuse indéfiniment le sens. Comment c'est difficile de faire les uns avec les autres, et parce que c'est difficile, pourquoi c'est si palpitant et si passionnant. Or le fait est, que des centaines de gens se réunissent pour parler de ça. Alors se réunir pour parler de ça, est un acte de résistance.

C'est un fait que des gens sont là pour ne pas se laisser mener par le bout du nez, par n'importe quoi, les idées reçues, les publicités qui imprègnent plus ou moins, je parlais tout à l'heure de la malformation des esprits par l'esprit publicitaire quand vous regardez, mais bon sang arriver à avoir un niveau, le b.a ba d'une psychanalyse de la connaissance telle, qui permet de dire mais qu'est ce qu'ils ont dans le troufiguon pour vous parler de la lessive, ou des produits de beauté, ou des autos, comme ils le font à la télévision ? Pourquoi ils causent comme ça ? Qu'est ce que ça veut dire ? Quel sens ça a ? Comment est-ce à dire qu'on va manipuler les esprits humains dans le sens, je reviens sur l'excellente conclusion, d'empêcher les esprits humains de s'enrichir de résister à ce qui pourrait être un préjudice pour un autre. On s'enrichit à résister à ses désirs, à ses envies, dans la mesure où on les sent comme préjudice pour autrui.

Or, toute la malformation des esprits à l'heure actuelle, avec plein de trucs comiques, quand on essaie de faire de la philosophie de la vie quotidienne, s'éclater, par exemple, toute la manipulation des esprits, est une manipulation dont le sens, quand on veut bien se donner la peine d'y réfléchir, dont le sens n'est que le mépris de l'autre. C'est une sorte de " Moi, je "

Je reviens à mon bon maître Arthur Rimbaud, la conception fausse du Moi, c'est un peu les symptômes de base du DPR, comment ça s'infiltre dans les consciences, dans cette espèce de culture de cette conception fausse du Moi. Bon alors, bien sûr, c est pas commode, parce que la manipulation mentale, il n'y a qu'à penser la pédophilie à la lumière de toutes ces considérations. Apparaît généralement une monstruosité, et dans un climat d'ultra-culpabilisation qui empêche de piger de quoi il retourne. Comment pourrait-on voir qu'il y a dans la manipulation ordinaire des sujets humains, des choses qui vont dans le sens où le comble de la difficulté dans le rapport du Moi à l'autre, si je suis bien informé, vous êtes probablement au courant, s'appelle

l'amour, c'est là qu'il y a le comble de la difficulté. Alors toute cette culture des mentalités qui travaille le vécu profond de l'amour comme possession, comme main mise de l'un sur l'autre, les gens ne se rendent pas compte à quel point ils peuvent être possédés par des saloperies de ce genre.

Et c'est pourtant une saloperie sur le plan d'une conception intelligente des rapports humains. C'est comme ça.

Mîchel Lecarpentier

Peut-être à un autre niveau, mais quand j'entendais tout à l'heure que vous parliez de la dimension collective, des gens qui se rassemblent, une des passions secrètes, il me semble, c'est aussi celle de la grégarité. Il me semble que c'est Tosquelles qui disait ça: On n'a pas assez parlé de la grégarité. Alors le paradoxe c'est peut être un petit peu ça, qui se met en mouvement quand on dit mouvement surréaliste, mouvement de psychothérapie institutionnelle, ou ... mais ce mouvement là c'est quelque chose qui essaie d'une façon collective de mettre en question le ça-va-pas-de-soi de la grégarité.

Parce qu'au fond, tout de même, une des défenses les plus habituelles est le refuge qu'on trouve les uns et les autres y compris dans nos formes collectives d'assemblage, c'est l'inhibition.

C'est à dire qu'on a aussi une passion, il me semble, pour l'inhibition et que cette passion pour l'inhibition c'est ça : comment se donner des formes collectives, quoi mettre en mouvement, pour que ce piège là qui aboutit à une uniformisation à une ségrégation, à une auto-ségrégation, à la constitution de ce qu'on appelle maintenant une population, quand l'ensemble des médecins en psychiatrie répondent comme un seul homme aux ordonnances ou aux études d'adéquation... on peut dire que là il y a une uniformisation qui n'est pas loin de considérer que dans le dénombrable de la vie nue on peut dénombrer les individus, les déplacer, les mettre ailleurs, les trouver inadéquats..., c'est à dire perdre en même temps toute cette dimension de solidarité et d'altérité.

En fait au prix de ce clivage-là, ségrégatif, il y a une négativité qui se trouve évitée. C'est un petit peu ça la question que je me pose c'est comment est ce qu'on produit une histoire partagée, collectivement, mais qui échappe d'une certaine manière à la grégarité ?

Lucien Bonnafé

Je crois que y répondre, il n'y a pas lieu d'y répondre. Ce qu'il y a lieu, c'est de parler de ça. Pour que un des aspects des choses, dont je ne sais pas à quel point c'est devenu évident dans nos conversations, c'est que tout de même le problème, je le reprends à propos de la biocratie par exemple, tout ce qui a trait à la toute puissance de quelque substance administrée au sujet humain. Mais Si on s'appliquait à rendre les gens plus aptes à faire eux-mêmes leur propre destin, mais enfin où irions nous ?

L'idée de l'esprit dominateur que tout ce qui peut pousser les gens à se faire eux-mêmes les producteurs de leur propre destin mais c'est l'antinomie la plus profonde avec le désir dominateur. Arriver à se faire soi-même le producteur de son propre destin c'est pas facile. On est un certain nombre, à dire c'est pas facile, et c'est pourquoi on répond: c'est pour ça que c'est intéressant. C'est parce que c'est pas facile. p Et quand je parle de la difficulté en question tous les asseneurs de vérité dominatrice, cherchent toujours à cultiver l'amour de la facilité.

C'est soi-disant plus facile de se laisser mener en barque que de conduire soi-même sa barque. Primo, ça dépend. J'en suis pas si sûr. Deuxièmement uc C'est tout de même plus intelligent plus intéressant de conduire soi-même sa barque. Si le trajet est difficile bien sûr on est là pour ça, pour affronter les difficultés de la vie, je reviens sur cette formule qui m'a beaucoup servi parmi quelques clés, à propos de la tolérance.

La grande problématique de la tolérance, il ne faudrait tout de même pas oublier, que la tolérance est un problème dramatique. Dramatique parce que toutes les opinons ne sont pas tolérables ni respectables. Les opinions qui vont vers l'oppression d'autrui, sa réjection, sa ségrégation, son extermination ne sont pas respectables. Mais l'idée que ces opinions qui ne sont respectables intoxique plus ou moins profondément nos semblables, c'est un fait. Nos semblables et soi-même, avec beaucoup de rigueur d'esprit, soi-même ne peut que se demander jusqu'à quel point il n'est pas possédé par un truc de ce genre. Soi-même. Arriver à se poser la question vis à vis de soi-même, c'est arriver à mieux la résoudre par rapport aux autres. Si dans les principes d'une résistance à l'inhumain, on arrive à poser en termes de drame, comment la tolérance infinie à l'égard des personnes, permet vis à vis des personnes, de se montrer le plus intolérant possible à l'égard des idéologies qui peuvent les posséder. Et c'est vrai que les gens peuvent être possédés par, parlez avec quelqu'un qui ne sort qu'un racisme à la con passez-moi l'expression, c'est pas une raison pour le vouer aux gémonies.

Il s'agit de faire en sorte qu'on oppose a tout ce qui correspond à une version abrutissante de la personne humaine, qu'on oppose à cela' ce que bien souvent dans une image qui n'est sûrement pas assez employée, qu'il faut appeler un modèle à copier Nous vivons dans un monde dans le-quel modèle ça veut dire modèle à copier. Et pourtant rien n'a pu bouger dans la société qui ait l'allure d'une résistance à l'inhumain, sans que ce soit lié à la production de modèle de contraste. il s'agit de montrer que soi-même on n'est pas comme ça. Face

à tout ce qui donne une image d'inhumanité. Vous trouvez que c'est une conclusion ? Il y a de ça, c'est vrai.

C'est vrai que d'être réunis ensemble pour penser ensemble pose cet interminable, donc passionnant problème qui est celui de la convergence. Ne pas être d'accord sur tout, il ne manquerait plus que ça ! Le genre monolithique n'a jamais été une image de progrès humain. Bien sûr que chacun soit différent les uns des autres, avec la capacité de réussir le maximum de convergence possible entre ses différents, c'est la réalisation, de tout ce qui fait primer convergences sur divergences, c'est que la différence et ressemblance marchent bien ensemble.

Je vais vous donner un exemple : un de ceux qui me connaissait le mieux, qui est mon bon copain, Jean Marcenac, quand il parlait de moi, il parlait de notre ami commun qui était Eluard, il disait comme ça en parlant de nous, notoires apôtres de la différence, il disait que ce qui était le plus émouvant dans la parole d'Eluard, c'était "Je suis la ressemblance, tu es la ressemblance".

Mais, nous autres grands apôtres et grands défenseurs des différences le comble de la sagesse c'est de dire : " nous sommes les grands apôtres de la ressemblance". Ou bien parler comme ensemble, à Saint Alban, on était ensemble pour parler de ça on s'était réunis pour ça, et les gens se sont cassés la tête là-dessus, et alors ils se sont cassés la tête, par ce que c'était très positif, sur la question de singularité et solidarité.

Plus ils sentent épanouir les singularités dans la culture des solidarités. On revient toujours à ces propositions qui sont, c'est comme ça qu'on se vaccine contre le DUR. Bien vacciner, quand on est possédé par des principes de ce genre, c'est renforcer les capacités de résistance à la chicane.
Wapi
 
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Inscription : 08 Jan 2005, 16:30

Message par Cyrano » 22 Fév 2005, 18:20

Alter Ego, France-Inter, émission de Patricia Martin.
"Etat des lieux de la psychiatrie en France".
Emission du 22 Février 2005.
Jean Pierre OLIE, Psychiatre à Sainte Anne.
Ça parle des psychotiques, et du nouveau classement anglo-saxon des diagnostics, le DSM (selon les mêmes termes que Iko). Ça parle des soins nécessaires au long cours, etc. (J.P. Olie est moins critique sur le rapport de l'Inserm qu'Iko).
Pour l'écouter, cliquer ici :
Psychiatrie en France
Cyrano
 
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Inscription : 03 Fév 2004, 17:26

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