Awa Sow Cissé Dembélé, coordinatrice d'ONG au Mali : [center]«La désertification produit des exodes massifs»[/center]
Par Pierre DAUM Libération : Lundi 25 septembre 2006 -Montpellier
La désertification menace 40 % des terres disponibles de la planète, essentiellement en Afrique et en Asie. Un processus qui s'aggrave, alors que les Nations unies ont déclaré 2006 «Année internationale des déserts et de la désertification». Scientifiques et représentants d'ONG venus d'une cinquantaine de pays d'Afrique, d'Asie et d'Amérique du Sud se sont réunis trois jours (du 20 au 23 septembre) à Montpellier pour le forum Désertif'Actions. Parmi les intervenants, la Malienne Awa Sow Cissé Dembélé, directrice exécutive du Conseil de concertation et d'appui aux ONG (CCA ONG), qui regroupe 172 organisations non gouvernementales, toutes engagées dans des actions de lutte contre la désertification au Mali.
Le Mali est-il particulièrement touché par la désertification ? Les zones touchées représentent 40 % du territoire. Mais ce chiffre recouvre des réalités très diverses. Au nord, on a l'image classique du désert de sable sans une goutte de pluie, avec des vents qui poussent les dunes à grignoter de plus en plus d'espaces cultivés. Mais à l'est et au centre du pays, le problème est qu'il pleut trop ! Notre période pluvieuse, qui va de mai à septembre, provoque d'énormes inondations. Dans ces régions semi-montagneuses, la partie fertile des sols est arrachée par les eaux de ruissellement, laissant un sol rocailleux impropre à toute culture.
Quelles actions sont menées ?
Ce sont des actions de dimensions très modestes, voire microscopiques. En voici deux exemples parmi tant d'autres. Dans les régions semi-montagneuses, des ONG construisent de petits murets de pierre perpendiculaires à la pente, qui permettent de retenir les coulées de boue lors des averses. Et, au nord, on plante des arbustes ( Acacia albida ) ou des buissons épineux ( Prosopis ) capables de résister à la sécheresse. On les place en bordure des villages et des champs comme remparts à l'invasion des dunes de sable.
L'homme est aussi parfois à l'origine de la désertification...
Bien sûr. Pour faire la cuisine, les Maliens brûlent d'énormes quantités de bois, puisées sans retenue dans les grandes forêts du centre du pays par des bûcherons très pauvres qui n'ont que la vente de ce bois pour nourrir leur famille. Certaines ONG tentent d'organiser les femmes de ces bûcherons autour d'activités de teinture, de petits commerces et d'épargne, afin que leur participation financière au foyer incite leur mari à couper moins d'arbres. Autre problème : la démographie. Chaque fois qu'une famille s'agrandit, elle coupe l'arbre qui est devant la case afin de construire une autre case pour le fils. Nous avons besoin d'un changement de comportements : chaque fois que tu coupes un arbre, tu dois en planter un autre.
Ces actions sont-elles suffisantes ? Non. D'abord par manque de moyens. Les ONG, qui travaillent déjà avec très peu d'argent, n'obtiennent de leurs bailleurs occidentaux que des promesses de financement sur deux ou trois ans. Et après, plus rien ! Vous croyez qu'il suffit de trois ans pour stopper la désertification d'une région ? L'autre problème, c'est que le gouvernement ne s'est toujours pas engagé dans une politique globale de lutte contre ce fléau. Or, pour empêcher qu'une zone aride ne se transforme en véritable désert, il faut absolument améliorer les conditions de vie des populations présentes pour les inciter à y rester. Il faut leur creuser des puits, leur construire des écoles et les pourvoir en soins médicaux. Résultat, alors que nous luttons depuis vingt ans, la situation va de mal en pis. Et les acteurs sur le terrain sont désespérés.
Que reprochez-vous aux organisations internationales ? De ne pas dégager assez d'argent pour les programmes de lutte contre la désertification. Lors de la Conférence de Rio, en 1992, la communauté internationale a défini trois priorités : la biodiversité, les changements climatiques et la désertification. Il a été décidé que le Fonds pour l'environnement mondial serait le financeur principal des deux premières, mais pas de la troisième ! Pourtant, c'est dans l'intérêt direct des pays riches de nous aider. Car la désertification produit des phénomènes massifs d'exode. Les populations de ces zones arides vont vers les grandes agglomérations de leur pays, gonflant les bidonvilles. Pour les plus courageux dans ces populations écrasées par la misère, la seule solution reste l'émigration vers les pays riches...
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canardos
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par Crockette » 25 Sep 2006, 07:40
en fait pour le MAli ça serait bien de connaitre l'évolution de sa production de riz depuis quarante ans, car ce pays est trop vaste pour tirer des conclusions climatiques.
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Crockette
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par canardos » 25 Sep 2006, 14:58
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[center]La constante avancée du désert est la cause oubliée des migrations africaines[/center]
LE MONDE | 25.09.06 | MONTPELLIER ENVOYÉ SPÉCIAL
Un constat de Jean-François Faye, de l'association sénégalaise Prabioc, est partagé par la majorité des experts de la désertification : "Il y a une relation évidente entre désertification, pauvreté et migration." Le thème n'a cessé d'être évoqué pendant le colloque Désertif'Actions, qui a réuni à Montpellier, les 21 et 22 septembre, près de deux cents chercheurs et représentants de la société civile des pays du Sud. L'avancée des déserts, en rendant toujours plus difficiles les conditions de vie dans les zones arides, conduit les populations jeunes à émigrer en nombre croissant.
"C'est une problématique nouvelle pour les scientifiques", observe Antoine Cornet, chercheur à l'Institut de recherche pour le développement. Le schéma est simple : "Les paysans n'arrivent plus à satisfaire leurs besoins primaires, et vont vers les villes, vers les côtes ou vers les pays développés", résume Jean-François Faye.
Depuis quelques années, le phénomène semble même s'accélérer, comme au nord du Cameroun : "La désertification se manifeste par la disparition du couvert végétal, par le fait qu'on doit puiser l'eau de plus en plus profondément, par des conflits violents autour des points d'eau, dit Aboukar Mahamat, de l'Association camerounaise pour l'éducation environnementale. On voit se produire des migrations qu'on n'avait jamais vues dans cette zone." Si la pauvreté est le principal motif de départ, l'envie de découverte n'est pas à négliger : "Ils veulent aussi découvrir d'autres pays, les voyages instruisent, dit Marie Tamoifo Nkom, de l'association Jeunesse verte. On ne peut pas interdire aux jeunes de rêver."
RENFORCER L'AGRICULTURE
La migration ne semble viser que marginalement les pays européens : on s'en va d'abord vers les métropoles de son pays ou des pays proches, ou vers d'autres régions. Par exemple, les pêcheurs en eau douce du nord Cameroun visent la région de Douala, sur la côte, où ils espèrent trouver de nouvelles ressources halieutiques. En Iran (la désertification n'affecte pas que l'Afrique), le départ des paysans se fait principalement vers les grandes villes, observe Catherine Razavi, de l'association iranienne Cemesta. Au Sénégal, la majorité des jeunes vont sur Dakar et seulement quelques-uns en Europe, dit Jean-François Faye.
Peut-on quantifier le phénomène ? Un chiffre, produit par la Banque mondiale, circule depuis plusieurs années : 60 millions de personnes des zones arides pourraient migrer d'ici à 2020. En fait, "il y a très peu d'études relatives à l'influence de la désertification sur la migration. La question est cruciale, mais il faut l'étudier plus précisément", dit Antoine Cornet.
Pour prévenir l'émigration, il faudrait enrayer la désertification, qui affecte près de 3,6 milliards d'hectares sur Terre, dont 37 % en Afrique et 33 % en Asie. "La lutte contre la désertification, c'est donner aux gens les moyens de vivre", résume Aïda Tarhouni, qui intervient en Tunisie pour l'association suisse Intercoopération. Et c'est l'agriculture qui apparaît aux experts comme la principale activité économique à renforcer : "Le schéma classique de développement - l'industrialisation des villes pour absorber l'exode rural - ne fonctionne plus, dit Antoine Cornet. Il faut intensifier l'agriculture, lui redonner la priorité."
La conférence s'est conclue par un appel qui, en cette année déclarée Année de la désertification par les Nations unies, enjoint aux décideurs de prêter plus d'attention à ce problème oublié.
Hervé Kempf
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canardos
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par canardos » 26 Sep 2006, 06:05
dans le Figaro:
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[center]En Iran ou au Mali, les éleveurs sont les plus exposés [/center]
C. M. . Publié le 25 septembre 2006
Dans ces deux pays, les nomades se retrouvent démunis pour faire face à la désertification. ENVIRON 60% de la population malienne vit de l'élevage, principalement dans le nord du pays, le plus touché par la désertification. L'avancée des dunes et le dérèglement de la mousson africaine obligent ces nomades à aller chercher des pâturages de plus en plus loin, vers le sud de l'Algérie, pour faire survivre leur cheptel. «Or le grenier du pays, le Sud, qui en souffre moins, reçoit davantage d'aides que les éleveurs, car ils ont du coton et du riz. Nous, éleveurs, avons tendance à être oubliés», se plaint Abihadge Abdallah, maire de la commune malienne d'Adiel Hoc. La situation des éleveurs maliens est loin d'être isolée. En Iran, un pays aride et semi-aride, les sept cents tribus d'éleveurs nomades ont également le sentiment que leur dignité a été bafouée. Alors que leur mode de vie repose sur une culture ancestrale, la réforme agraire à la base de la «révolution blanche» du Shah dans les années 1960 les a incités à se sédentariser en leur construisant des villages, alors que leurs transhumances se faisaient auparavant sur 500 à 600 kilomètres. Au bout de quelques années, le constat est là : ces terres historiquement dédiées au pâturage ne sont guère adaptées à des cultures sédentaires, faute de ressources en eau suffisantes. La désertification des hauts plateaux du pays, en partie due à la déforestation, et la construction de puits profonds qui ont vidé la nappe phréatique ont fait le reste. L'exode rural est devenu un phénomène massif dans le pays. Restructurer le territoire Or, la contribution des éleveurs au PIB est loin d'être négligeable : un million de nomades produit 35 à 40% de la viande rouge du pays. D'où le projet que l'ONG Cenesta (Centre pour le développement durable et l'environnement) a lancé dans deux régions de l'Iran : l'Azerbaïdjan au nord, et le Fars, terre d'origine des Persans, au sud-ouest du pays. «Là, nous nous efforçons de restructurer l'aménagement du territoire en tenant compte des lois coutumières», explique Khadija Razavi, qui dirige cette ONG. Et de poursuivre : «Notre gouvernement a compris les erreurs du passé et fait aujourd'hui beaucoup pour remédier à la désertification.» Fixation des dunes par des plantations ou avec du goudron, développement des plantes médicinales qui permettent aux jeunes d'obtenir des microcrédits.
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canardos
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