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Message Publié : 26 Oct 2006, 06:51
par canardos
a écrit :

[center]Le patrimoine génétique de l'abeille élucidé[/center]

Agence France-Presse
Paris Le mercredi 25 octobre 2006


Le génome de l'abeille à miel, insecte aussi utile à l'homme depuis des millénaires que passionnant par son comportement social de rare complexité, vient d'être séquencé par une équipe internationale, annonce la revue Nature de jeudi.

L'espèce apis mellifera - abeille à miel ou abeille mellifère, souvent appelée abeille tout court - est devenue le troisième insecte, après la mouche des fruits et le moustique, à dévoiler son patrimoine génétique, grâce à une vaste opération menée par des centaines de chercheurs à travers le monde, regroupés dans un consortium dirigé par l'Américain George Weinstock du Baylor College of Medicine, à Houston.

L'abeille est une des rares espèces que l'évolution a poussée à former des sociétés avancées. Leur société est formée autour d'un seul individu fertile de la colonie, la reine, les autres femelles sont (sauf exception) stériles et s'occupent, en tant qu'ouvrières, de la collecte de nourriture, de l'entretien des jeunes, de la construction de nids et de la défense de leur colonie, etc.

Les mâles, mis au monde éventuellement par des ouvrières, tous identiques, incapables de butiner et de se nourrir seuls, n'ont pour rôle que de féconder leur reine - qui ne s'accouple qu'une seule fois dans sa vie. En dehors de la période d'accouplement, ils contribuent à entretenir de la chaleur ou de la fraîcheur dans la ruche.

Les deux castes de femelles se développent à partir du même génome, relèvent les scientifiques qui ont réussi à décrypter le génome des abeilles grâce notamment à l'identification de nouvelles petites molécules d'acide ribonucléique, les microARN, qui semblent intervenir dans cette diversification sociale.

Comparé aux enseignements tirés de l'étude de la mouche des fruits et au moustiques, le génome des abeilles reflète une évolution plus lente depuis leur séparation du bourdon, il y a 60 millions d'années. En outre, précisent les scientifiques, certains gènes, par exemple ceux impliqués dans les rythmes biologiques, sont plus semblables aux génomes de vertébrés. Les abeilles ont également plus de gènes liés à l'odeur et des gènes spécifiques impliqués dans l'utilisation de nectar et de pollen.

Selon les données génétiques obtenues, les abeilles mellifères sont apparues en Afrique, avant de coloniser l'Europe et l'Asie, au terme de deux migrations séparées, et d'être exportées par l'homme dans les quatre coins du monde.

Les célèbres abeilles tueuses africaines, introduites il y a cinquante ans au Brésil avant d'infester le Mexique et le sud des Etats-Unis, sont une simple sous-espèce (apis mellifera scutellata), au comportement agressif, des gentils insectes domestiques.


Message Publié : 26 Oct 2006, 15:11
par canardos
un article du monde plus détaillé montrant le lien entre génome et organisation sociale des abeilles:

a écrit :

[center]L'organisation sociale des abeilles en voie de décryptage[/center]

LE MONDE | 26.10.06 |

Depuis des lustres, l'humanité se régale de miel et de gelée royale produits par les abeilles de l'espèce Apis mellifera. La complexité de l'activité de ces petits insectes organisés en colonies pouvant atteindre 50 000 individus fascine les scientifiques. Ces derniers veulent comprendre comment ces insectes au cerveau minuscule ont acquis, au fil du temps, une organisation sociale aussi élaborée. Ils souhaitent aussi découvrir de quelle manière un même génome peut donner naissance à une reine et aux ouvrières, ces dernières assurant le bon fonctionnement de la ruche, tandis que la reine a pour activité unique de pérenniser l'espèce.

Un des moyens de percer le mystère de ces insectes consiste à étudier leur génome. Le séquençage du génome d'Apis mellifera vient justement d'être réalisé par un consortium international, the Honeybee Genome Sequencing Consortium, dont les travaux sont présentés dans l'édition de la revue Nature du jeudi 26 octobre. Cette étude génétique de l'abeille a été effectuée en 2004 et 2005 au Baylor College of Medicine de Houston (Texas). Elle a permis d'identifier 10 500 gènes, et vient compléter le séquençage du génome de la drosophile (2000), de l'anophèle (2002) et du ver à soie (2004).

"C'est une porte ouverte vers l'avenir, car, jusqu'à présent, la génétique de l'abeille était très mal connue, explique Michel Solignac, généticien et professeur à l'université Paris-Sud, qui a participé à l'étude. Les données du séquençage vont maintenant être distribuées aux différentes équipes participant au projet. Car il reste à étudier l'expression de ces gènes et leur transcription en protéines."

L'étude génétique de l'abeille a déjà permis d'établir qu'Apis mellifera est originaire d'Afrique, et qu'elle s'est ensuite répandue en Europe et en Asie. Deux de ses sous-espèces ont atteint l'Amérique du Nord au XVIIe siècle. On a découvert également que les abeilles - notamment par rapport à la drosophile ou au moustique - possèdent beaucoup de gènes relatifs à l'odorat, mais peu concernant le goût.


VULNÉRABLE AUX PRODUITS CHIMIQUES


Enfin, il semble qu'Apis mellifera soit "bien moins armée que les autres insectes pour lutter contre les produits chimiques, car elle a un déficit très important en enzymes de détoxication", précise René Feyereisen, généticien moléculaire et directeur de recherches à l'Institut national de la recherche agronomique à Sophia-Antipolis (Alpes-Maritimes). Cette faiblesse, alliée à une mauvaise résistance aux parasites, pourrait expliquer en partie la mortalité importante des abeilles constatée en France depuis plusieurs années.

Une situation inquiétante : les abeilles sont menacées un peu partout, alors "qu'elles sont les premiers pollinisateurs sur Terre", rappelle Gene Robinson, directeur du Bee Research Facility de l'université de l'Illinois, un des instigateurs de l'étude du génome de l'abeille. "35 % de la production mondiale de nourriture résultent de la production de cultures dépendant des animaux pollinisateurs", note à ce sujet une étude qui vient d'être publiée dans les Proceedings of the Royal Society.

Cette faculté pollinisatrice des abeilles est très ancienne. Des chercheurs de l'université de l'Oregon viennent d'ailleurs de découvrir la plus ancienne abeille connue, vieille de 100 millions d'années. Emprisonnée avec du pollen dans de l'ambre fossilisé provenant du nord de la Birmanie, elle a été baptisée Melittosphex burmensis. Décrite dans l'édition de la revue Science du vendredi 27 octobre, elle est longue de 2,95 mm seulement et possède à la fois certains caractères des abeilles et des guêpes.

L'activité pollinisatrice des abeilles a eu un effet considérable sur l'évolution de la vie, car elle a contribué à l'expansion rapide et à la diversification des plantes à fleurs qui donnent des fruits. Un groupe qui représente aujourd'hui 80 % des végétaux sur Terre.



Christiane Galus