pour le moment le gouvernement hésite encore...
a écrit :
[center]Les promesses du vaccin contre le cancer du col de l'utérus[/center]
LE MONDE | 28.11.06 |
C'est une annonce pleine de promesses, une innovation apparemment majeure pour la santé des femmes. Sanofi Pasteur MSD, filiale du laboratoire français Sanofi-Aventis et de l'américain Merck, a fait savoir le 23 novembre que le premier vaccin destiné à prévenir le cancer du col de l'utérus était désormais disponible, sur prescription médicale, dans les pharmacies françaises. "Vaccin", "prévention", "cancer", chaque mot retentit comme une incroyable avancée médicale. Pour la première fois, il serait possible de se protéger contre une tumeur solide.
Néanmoins, seul le laboratoire - qui a reçu fin septembre une autorisation européenne de mise sur le marché - a communiqué sur le sujet. Les autorités sanitaires, ne livreront que courant décembre les recommandations officielles en fonction de la balance bénéfices-risques. Ce décalage de calendrier ne permet pas au grand public de se faire une opinion précise sur la portée exacte de ce nouveau produit. Faut-il vacciner au plus vite les jeunes filles ou attendre ? Jusqu'à quel âge est-il justifié de le faire ? Y a-t-il des risques ?
Dans l'attente des recommandations vaccinales du Conseil supérieur d'hygiène publique de France (CSHDPF), nous livrons une revue de détail des promesses, des conditions d'utilisation et des limites de ce nouveau vaccin.
De quoi protège-t-il ?
Ce vaccin a fait l'objet d'essais cliniques menés sur 20 000 femmes dans plusieurs pays. Ciblant les papillomavirus humains (HPV) de types 6, 11, 16, 18, il pourrait prévenir 70 % des cancers du col de l'utérus mais aussi les lésions précancéreuses de l'appareil génital féminin (col, vulve, vagin) - qui nécessitent des traitements chirurgicaux parfois mutilants - et 90 % des verrues génitales (condylomes).
Grâce au dépistage par frottis, l'incidence du cancer du col de l'utérus a considérablement diminué en France mais touche encore, chaque année, 3 300 femmes et provoque environ 1 000 décès. Dans le monde, 250 000 femmes, dont 80 % dans les pays en voie de développement - où aucun dépistage n'est organisé et qui seront les derniers à bénéficier de ce vaccin - meurent chaque année de ce cancer.
Qui doit se faire vacciner ?
Infection sexuellement transmissible, on estime que 70 % des personnes sont un jour ou l'autre exposées au papillomavirus. Dans 90 % des cas, il disparaît spontanément de l'organisme en un à trois ans et l'infection ne se traduit par aucun symptôme. Dans 3 à 10 % des cas, l'infection persiste et peut évoluer en verrue génitale externe ou en lésion précancéreuse, qui, si rien n'est fait, peut évoluer en cancer. En résumé, le cancer du col est une complication rare d'une infection commune.
La règle de base est donc d'être vacciné avant les premiers rapports sexuels. Le schéma vaccinal comporte l'injection de trois doses par voie intramusculaire répartie sur 6 mois. En l'absence, pour l'heure, de recommandations officielles, le laboratoire préconise de vacciner entre 9 et 15 ans. Aux Etats-Unis, le Centre de contrôle et de prévention des maladies recommande une vaccination entre 11 et 12 ans et un "rattrapage" entre 13 et 26 ans.
Quels sont les effets secondaires et les contre-indications ?
Les effets indésirables enregistrés lors des études montrent quelques réactions au point d'injection et un épisode fiévreux (supérieur à 39º) pour 1,5 % de la population étudiée. Le vaccin est contre-indiqué en cas de grossesse. L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a mis en place un "plan national de gestion des risques pour détecter et traiter tout signal d'effets indésirables nouveaux dans les conditions réelles d'utilisation de ce nouveau vaccin". Aux Etats-Unis, où le Gardasil est utilisé depuis juin, aucun signal inquiétant n'est survenu.
Quelles sont ses limites ?
En premier lieu, le dépistage systématique par frottis reste nécessaire car le vaccin ne protège pas contre 30 % des cancers du col ni contre d'autres virus à transmission sexuelle. Ce vaccin ne doit surtout pas donner aux jeunes filles un sentiment de totale sécurité et ne dispense pas de l'usage du préservatif. De plus, on ne connaît pas la durée exacte de protection. Pour l'instant, le laboratoire dispose d'un recul de cinq ans sur l'immunité. Il est trop tôt pour savoir si un rappel sera nécessaire.
Cette incertitude pose la question de l'âge le mieux adapté pour être vaccinée, car les cancers surviennent plusieurs années après la contamination.
Sera-t-il remboursé ?
Disponible à 145,94 euros la dose, soit 437,82 euros pour être protégée, le prix du Gardasil peut représenter un frein pour beaucoup de familles. Le laboratoire promet que ce prix élevé contribuera à financer le développement du vaccin dans les pays pauvres. "Dans le courant du premier semestre 2007", indique la direction générale de la santé (DSG), on saura si ce vaccin est admis au remboursement et quelle tranche d'âge pourra en bénéficier. Auparavant, la Haute Autorité de santé (HAS) devra se prononcer sur le service médical rendu par ce vaccin, et le Comité économique des produits de santé (CEPS) devra négocier avec le laboratoire un accord sur son prix et les études de suivi.
Les conséquences ?
Si ce vaccin tient ses promesses et si le dépistage se maintient "on peut imaginer éradiquer le cancer du col de l'utérus et largement diminuer les interventions chirurgicales", estiment plusieurs médecins.
Sandrine Blanchard