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Des mammifères qui ont un flair aquatique[/center]
NOUVELOBS.COM | 21.12.2006 |

Les bulles sortant du nez étoilé du condylure. (Ken Catania)
Contrairement à ce que l’on a toujours supposé, certains mammifères terrestres sont capables d’utiliser leur odorat sous l’eau. Selon le biologiste Kenneth Catania, deux animaux au moins reniflent leur proie lorsqu’ils chassent sous l’eau : la taupe au nez étoilé et la musaraigne palustre. Il est probable que d’autres mammifères amateurs de plongée aient la même aptitude, selon Catania, qui rend compte de ses travaux dans la revue Nature publiée aujourd’hui.
Kenneth Catania étudie depuis plusieurs années le condylure étoilé (Condylura cristata), une sorte de taupe étonnante dont le nez est composé d’une vingtaine de tentacules roses. Le condylure vit dans des milieux humides et chasse sur terre ou sous l’eau. Grâce à des caméras ultra-rapides, Catania a pu observer que le nez du condylure faisait beaucoup de bulles sous l’eau au contact des proies. Lorsque ces bulles, soufflées puis rétractées très vite, entrent en contact avec l’objet, elles permettent aux molécules odorantes de se mélanger à l’air et de revenir dans les narines de la taupe, explique Catania.
Pour vérifier que le condylure ne se servait pas de ses tentacules pour repérer la proie, le biologiste de l’Université de Vanderbilt (USA) a imaginé un dispositif qui laissait passer les bulles mais pas les tentacules. La taupe était quand même capable de suivre une odeur.
Le condylure est un animal étonnant, qui bat des records de vitesse lorsqu’il se nourrit. Le même chercheur avait démontré l’année dernière que le taupe au nez étoilé repère et ingurgite sa proie en seulement 230 millisecondes. Catania a donc voulu tester un autre mammifère sous l’eau pour s’assurer que le condylure n’était pas une exception. Il a étudié de la même façon la musaraigne palustre (Sorex palustris) et constaté que le rongeur faisait lui aussi des bulles sous l’eau.
La vitesse d’expiration et d’inhalation des bulles d’air correspond à la fréquence des inspirations de ces mammifères à l’air libre, précise le biologiste. Si les grands mammifères marins ont perdu leur odorat en devenant aquatique, les mammifères terrestres semi-aquatiques sauraient encore exercer leur flair sous l’eau. Kenneth Catania espère que d’autres scientifiques le vérifieront chez la loutre ou le phoque.
Cécile Dumas
Sciences et Avenir.com
(22/12/06)