a écrit :
[center]Les récifs coralliens sont menacés par le réchauffement[/center]
LE MONDE | 21.03.07 |
Les menaces s'accumulent sur la Grande Barrière de corail, le plus grand récif corallien au monde, qui s'étire sur 2 000 kilomètres au nord-est de la côte australienne. Inscrits au patrimoine mondial de l'humanité, les 2 500 massifs de coraux, répartis sur 350 000 km2, constituent un ensemble unique sur la planète et abritent une exceptionnelle variété d'espèces.
Or le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) doit publier, le 5 avril, à Bruxelles, des conclusions inquiétantes. Selon la dernière version du résumé pour les décideurs, dont Le Monde s'est procuré une copie, une augmentation de 2 oC (par rapport aux niveaux de 1990) entraînerait un blanchissement généralisé des coraux. Si le réchauffement atteint 3 oC, des mortalités "importantes" sont redoutées.
Les coraux vivent en symbiose avec des algues microscopiques, les zooxanthelles, qui fournissent au corail sa nourriture et lui donnent ses couleurs. L'augmentation de la température des océans stresse les coraux, les fait expulser des zooxanthelles et "blanchir", car le squelette calcaire du corail apparaît. Si les zooxanthelles ne retournent pas dans le tissu corallien, le corail meurt.
Les deux derniers épisodes majeurs de blanchissement sur la Grande Barrière remontent à 1998 et 2002 : entre 60 % et 95 % des massifs avaient été touchés. Les coraux ont repris leurs couleurs au bout de quelques semaines, mais au total 10 % des massifs sont morts. "Nous sommes chanceux par rapport aux Maldives, où la quasi-totalité a été détruite, relève Paul Marshall, responsable de l'équipe changement climatique de la Great Barrier Reef Marine Park Authority (GBRMPA), chargé de la gestion de la zone. Mais la perspective de voir se renouveler les épisodes de blanchiment nous inquiète fortement."
Une autre menace pèse sur les récifs. Le Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation (CSIRO), principal organisme de recherche australien, a publié, en février, des images satellites montrant une accélération du déversement des sédiments dans l'océan, via les rivières. " Auparavant, ils restaient assez près des côtes et se diffusaient lentement. Ces images montrent que les panaches d'eau douce atteignent directement le récif et le traversent", explique le CSIRO.
Les sédiments forment des nuages autour des coraux, qui bloquent les rayons du soleil et empêchent la photosynthèse. Les cultures et l'élevage pratiqués sur les côtes ont un impact négatif : ils favorisent l'érosion, et les pesticides utilisés dans les plantations de canne à sucre se retrouvent dans l'océan.
SOLUTIONS D'APPOINT
Pour tenter de lutter contre ces phénomènes, la stratégie des autorités australiennes est de renforcer la qualité de l'eau et la "résistance" de la Grande Barrière. Des partenariats sont noués avec les agriculteurs afin de modifier les pratiques nuisibles à l'environnement. De plus, depuis 2004, 30 % de la Grande Barrière sont classés "zones vertes". L'autorité régulatrice du parc multiplie les mises en garde afin de faire respecter ces frontières par les pêcheurs, mais les résultats sont plutôt bons. La Grande Barrière se trouve en meilleur état que, par exemple, les récifs des Caraïbes, dont la dégradation est catastrophique.
Pour prévenir les blanchissements, des solutions d'appoint sont testées dans les zones très fréquentées par les touristes. Des parasols ont été installés pour freiner l'augmentation de la température de l'eau. Des systèmes d'arrosage en surface, destinés à diminuer l'intensité de la lumière pénétrant dans l'eau, sont testés. "Ces solutions sont expérimentées sur quelques centaines de mètres, là où sont situées d'importantes infrastructures touristiques qui ne peuvent pas être déplacées", explique M. Marshall. Le tourisme dans la zone génère un chiffre d'affaires annuel de près de 4 milliards d'euros.
L'Australie reste le seul pays riche, avec les Etats-Unis, à ne pas avoir signé le protocole de Kyoto, visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le premier ministre, John Howard, vient tout juste d'admettre l'existence du réchauffement climatique.
Gaëlle Dupont
--------------------------------------------------------------------------------
La France est le quatrième détenteur mondial de récifs
L'ensemble des récifs coralliens du monde s'étend sur 527 000 km2. Ils constituent l'un des écosystèmes les plus riches au monde. Le dernier rapport sur leur état, établi en 2004, estimait que 20 % ont déjà été détruits.
Les récifs coralliens placés sous l'autorité française, dans les océans Atlantique, Indien et Pacifique, s'étendent sur 55 000 km2, ce qui place la France au quatrième rang mondial, derrière l'Australie, les Philippines, et l'Indonésie. Ces massifs sont encore dans une relative bonne santé, mais ils subissent diverses menaces : surpêche, remblaiement des zones côtières, défrichement des terres sur les côtes (favorisant l'érosion), pollutions urbaine, agricole et industrielle, activités touristiques, etc. L'Initiative française pour les récifs coralliens (Ifrecor) a pour objectif d'améliorer leur protection, en agissant auprès des collectivités concernées. Aujourd'hui seulement 2 % de la surface totale des récifs et lagons français sont des aires marines protégées. Les zones totalement sanctuarisées ne couvrent que 0,3 % de cette superficie.