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[center]Le jour où les avions seront silencieux[/center]
LE MONDE 07.04.07
1,5milliard de passagers en 2000. 3,5 milliards annoncés en 2020. A technologie inchangée, cet essor du transport aérien doublerait les nuisances sonores à proximité des aéroports, à moins d'en construire de nouveaux. Ce à quoi rechignent de plus en plus les populations alentour...
Ces réserves sont désormais prises au sérieux par l'industrie aéronautique. Avec une trentaine d'entreprises anglo-saxonnes, Boeing a cofinancé, depuis 2003, un projet de recherche d'avion silencieux, le "Silent Aircraft Initiative" réunissant l'université de Cambridge (Royaume-Uni) et le MIT (Etats-Unis).
Dotée d'une enveloppe de 2,5 millions de livres (3,7 millions d'euros), l'équipe d'universitaires vient de dévoiler le design du SAX-40. "C'est un avion de 44 m de long et 68 de large, pouvant transporter 215 passagers, explique Ann Dowling, professeur à Cambridge et coordinatrice du projet. Grâce à une forme évoquant celle d'une chauve-souris, nous sommes parvenus à réduire de moitié le bruit au décollage et à l'atterrissage."
Les chercheurs ont repris l'idée d'aile volante, imaginée dans les années 1930, mais rapidement abandonnée au profit de la forme actuelle, un tube central, greffé de deux ailes indépendantes. "L'aile permet non seulement de réduire la vitesse d'atterrissage et donc le bruit, mais aussi de diminuer la consommation de kérosène de 25 %, et donc de polluer moins", ajoute Mme Dowling.
Parmi les autres facteurs de réduction sonore, la suppression des volets hypersustentateurs (actuellement situés sur les ailes et sortis en phase d'approche) ou l'utilisation de moteurs à "double flux". Plus silencieux, ceux-ci sont placés non plus sous les ailes mais sur le fuselage, de manière à faire écran au bruit.
Chez Airbus, ces travaux sont observés avec circonspection. "Ces évaluations sont avant tout des études papier", juge Michel Goulain, responsable des besoins technologiques. L'avionneur européen préfère mettre en avant son propre projet, Nacre, engagé en 2005 et disposant d'un budget nettement supérieur (32 millions d'euros). Dans Nacre, l'aile volante et le placement du moteur sur le fuselage sont aussi à l'étude, mais les conclusions ne sont pas attendues avant 2008.
Selon les chercheurs, il faudra attendre au moins 2020 avant que le monde du transport aérien (compagnies, aéroports...) ne s'adapte aux divers changements qu'induirait l'aile volante. "Nous avons démontré que l'on pouvait construire un avion sûr, plus écologique et moins bruyant, résume Mme Dowling. Mais si l'on veut voir un jour cet avion transporter des passagers, il faut qu'une partie des investissements soit supportée par les puissances publiques."
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Silent Aircraft Initiative, University of Cambridge, Royaume-Uni
Auréliano Tonet