
sur le site du CNRS:
a écrit :
Paris, 13 avril 2007
[center]La colonisation bactérienne d'environnements riches en arsenic[/center]
Aucune bactérie capable de se développer dans un environnement contaminé par l'arsenic n'a été à ce jour complètement caractérisée. Cependant, une équipe du Laboratoire de génétique moléculaire, génomique et microbiologie (CNRS – Université Strasbourg 1), en collaboration avec des scientifiques du Groupement de recherche 2909(1), a étudié en profondeur le génome de la ß-protéobactérie Herminiimonas arsenicoxydans. L'analyse génomique de ce microorganisme, complétée par de nombreuses expériences, a révélé chez cette bactérie des comportements inattendus face à l'arsenic. Ces travaux sont publiés dans la revue PloS Genetics du 13 avril 2007.
Trouver des moyens de préserver les environnements naturels d'une contamination par l'arsenic, en particulier les eaux souterraines et l'eau distribuée au robinet, représente un important défi pour les sociétés modernes. Or la bactérie H. arsenicoxydans présente la capacité de mettre en oeuvre des réactions d'oxydoréduction vis-à-vis de ce métalloïde et, en particulier, de le faire passer de son état le plus toxique As [III] à sa forme oxydée, beaucoup moins mobile et toxique As[V]. D'autre part, en plus de ces multiples processus biochimiques, H. arsenicoxydans présente un chimiotactisme positif, c'est-à-dire que cette bactérie est attirée et se déplace d'elle-même vers les milieux riches en arsenic. Enfin, les scientifiques ont mis en évidence une capacité de séquestration de cet élément toxique au sein d'une matrice d'exopolysaccharides élaborée par la bactérie, ce qui rend cet élément beaucoup moins disponible et participe ainsi à la détoxication de l'environnement.
Les biotransformations microbiennes ont un impact majeur sur la contamination des écosystèmes par l'arsenic, affectant la santé publique de plusieurs dizaines de millions de personnes dans les pays développés et en développement. Ces observations démontrent l'existence d'une stratégie entièrement nouvelle permettant de coloniser efficacement des environnements riches en arsenic, qui va bien au-delà des seules réactions d'oxydoréduction. De tels mécanismes de détoxication, qui pourraient être exploités à des fins de bioréhabilitation de sites contaminés, ont probablement aussi joué un rôle crucial dans l'occupation sur Terre de niches écologiques ancestrales.
Test qualitatif de spéciation de l'arsenic réalisé sur divers mutants d'Herminiimonas arsenicoxydans obtenus par transposition. En présence de nitrate d'argent, l'As[III] produit un précipité jaune alors que l'As[V] produit un précipité brun. L'absence de coloration brune révèle la présence de mutants affectés dans l'oxydation de l'arsenic. La souche sauvage (en bas à droite) est utilisée comme contrôle.
© GMGM (cette image est disponible auprès de la photothèque du CNRS, 01 45 07 57 90, phototheque@cnrs-bellevue.fr)
Notes :
1) Groupement de recherche composé de chercheurs de l'Université Louis Pasteur, du Génoscope, de l'Institut Pasteur, du CNRS, du CEA, du BRGM, de l'Université Claude Bernard et de l'Université de Haute Alsace.
Références :
A Tale of Two Oxidation States: Bacterial Colonization of Arsenic-Rich Environments, PloS Genetics, 13 avril 2007.