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Les ’traînées de boue’’ des chalutiers[/center]
Grâce à des images satellite, l’impact des filets traînés derrière les chalutiers sur l’écosystème marin est plus visible que jamais.
Les ''traînées de boue'' des chalutiers crevettiers en mer Jaune, au large de la province chinoise de Jiangsu. (Quickbird satellite, © DigitalGlobe)A cause de leur ressemblance avec les traînées de condensation que les avions laissent dans le ciel, les chercheurs Kyle Van Houtan et Daniel Pauly les ont surnommées les «traînées de boue»*. Derrière les chalutiers pêchant dans les eaux côtières, la vase remuée par les filets raclant les fonds marins forme de longues traînées marron, larges de plusieurs centaines de mètres et s’étendant sur plusieurs kilomètres, bien visibles sur les images satellites haute résolution.
Grâce à ces images, les deux scientifiques vont essayer de quantifier les volumes de boue remuée par les filets et mesurer ainsi plus précisément l’impact du chalutage de fond sur l’écosystème marin. Ils espèrent aussi sensibiliser davantage le public à la menace que représente cette pêche pour la biodiversité des océans.
Kyle Van Houtan (Duke Universiity, USA) et Daniel Pauly (University of British Columbia, Canada) ont d’abord pioché dans le stock d’images du satellite QuickBird, disponibles sur Google Earth. Ils ont déniché quelques clichés exemplaires, comme cette armada de chalutiers pêchant la crevette en mer Jaune, au large des côtes chinoises. Ou cet autre chalutier crevettier au large du Mexique entourés de petits points blancs : ce sont les oiseaux marins attirés par la nourriture. Ces crevettiers rejettent près de 90% de leurs prises, soulignent Van Houtan et Pauly, essentiellement des poissons piégés dans leurs filets.
Bien que les dégâts du chalutage de fond soient connus et fréquemment dénoncés, cette pratique de pêche se poursuit à travers le monde, regrettent les deux chercheurs. Les filets lestés raclant le plancher océanique détruisent les reliefs sous-marins. «Ils transforment des communautés vivant dans un environnement riche et tridimensionnel en zones plates, boueuses et appauvries» écrivent-ils. Ces zones profitent aux espèces invertébrées, comme les crevettes, au détriment des poissons benthiques.
La vase remontée des profondeurs qui reste en suspension dans la colonne d’eau favorise l’eutrophisation des eaux et la formation de ‘’zones mortes’’, ajoutent les deux chercheurs. Une trop grande quantité de débris organiques dans l’eau provoque en effet une prolifération d’algues et de végétaux et un appauvrissement en oxygène des couches plus profondes.
Cécile Dumas
Sciences et Avenir.com
(16/05/07)