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Les pattes en puissance du poisson spatule[/center]
Le développement des pattes chez les tétrapodes aurait bénéficié d'un outillage génétique très ancien présent chez des poissons primitifs.
La formation des nageoires chez un jeune spécimen de poisson spatule. (MC Davis)D’où viennent les pattes des tétrapodes ? Les premiers animaux vertébrés qui ont délaissé le milieu aquatique pour vivre sur la terre ferme ont développé des membres dont leurs lointains cousins aquatiques restent dépourvus. Ces pattes sont-elles une invention relativement récente de l’évolution? Pas vraiment, selon une étude publiée aujourd’hui dans la revue Nature. Des poissons possédaient les gènes nécessaires au développement des membres bien avant l’apparition des premiers tétrapodes il y a environ 365 millions d’années, affirment Neil Shubin et ses collègues.
Les découvertes récentes de fossiles comme celui du Gogonasus -un poisson primitif- ou du Tiktaalik –mi-poisson mi-tétrapode- permettent de mieux connaître les étapes du passage de la mer à la terre. Pour mieux comprendre comment et quand l’outillage génétique nécessaire au développement des pattes s’est développé, l’équipe de Neil Shubin s’est tournée vers un poisson considéré comme un ‘’fossile vivant’’, le Polyodon spathula ou poisson spatule –dont l’appendice nasal ressemble à celui de l’ornithorynque. Il est le descendant d’une très ancienne famille de poissons à nageoires rayonnées, les Actinoptérygiens, qui ont partagé un ancêtre commun avec les actuels poissons osseux (téléostéens).
Chez les tétrapodes, la famille de gènes Hox joue un rôle crucial dans le développement des membres. Chez le poisson zèbre (Danio rerio), utilisé comme organisme modèle dans les laboratoires, l’expression des gènes Hox est différente de celle des tétrapodes et ne permet pas de construire des pattes. En revanche, dans les nageoires du poisson spatule, Neil Shubin et ses collègues ont retrouvé le même schéma d’expression des gènes Hox que chez les tétrapodes.
Beaucoup plus évolué que le poisson spatule, le poisson zèbre a pu perdre un outillage génétique dont il n‘avait pas besoin mais qui existait chez un ancêtre, analysent les chercheurs. Du même coup, cela signifie que l’apparition des membres a utilisé un mécanisme très primitif. Cela contredit certaines théories qui estimaient que le développement des pattes était le fruit d’un changement radical, d’une innovation spectaculaire chez certains poissons.
Cécile Dumas
Sciences et Avenir.com
(24/05/07)