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Message Publié : 04 Sep 2007, 13:53
par jeug
a écrit :NOUVELOBS.COM  03.09.07

En Afrique, en Asie et en Amérique du sud, où vivent 70% des races de bétail uniques au monde, l’arrivée des animaux d’élevage à haut rendement entraîne la disparition de nombreuses races locales. Cette perte de diversité génétique du cheptel a été évaluée pour la première fois à l’échelle mondiale par la FAO, l’organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation, qui présente cette semaine cet inventaire alarmant lors d’une conférence organisée en Suisse (du 3 au 7 septembre). L’évaluation s’appuie sur 169 rapports nationaux et une douzaine d’études thématiques.

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La vache Ankole d’Afrique de l’est et du centre, très résistante à la sécheresse, est pourtant menacée de disparition d’ici 50 ans, détrônée par la Holstein Frisonne. (ILRI)

La vache Holstein Frisonne pour le lait, la poule White Leghorn pour les œufs, le porc Large White pour sa viande, font partie des races d’élevage à haut rendement que les pays industrialisés proposent aux petits producteurs des pays en développement pour augmenter leur production. Les petits éleveurs sont poussés à intensifier et à industrialiser leurs pratiques. Au passage, les races locales de bovins, d’ovins ou de volailles sont abandonnées. Selon l’évaluation menée par la FAO et le CGIAR, le groupe consultatif pour la recherche agricole internationale, 62 races d’élevage ont disparu ces six dernières années, soit environ une par mois. Et encore, ce n’est qu’une estimation : 36% des races locales de bétail seraient encore inconnues, selon la FAO.

« Il faut faire prendre conscience aux gens du risque que représente la perte de diversité génétique, explique Carlos Seré, directeur de l’Institut international de recherche sur l’élevage (ILRI). Les efforts de conservation qui ont été menés pour les végétaux, comme la voûte de Svalbard (lire), il faut maintenant les faire pour les animaux d’élevage ». Première étape : éduquer les éleveurs, les informer des atouts de leurs races locales, alors qu’à l’heure actuelle toute l’information vient des compagnies qui produisent les races à haut rendement.

Si l’arrivée d’un troupeau de vaches laitières Holstein Frisonne est rentable à court terme pour un éleveur africain ou sud-américain, elle peut s’avérer catastrophique à moyen ou long terme, avertissent la FAO et les autres organisations. Ces races issues de pays tempérées ne sont pas adaptées aux aléas climatiques et aux maladies des pays tropicaux. En Ouganda, une sécheresse a récemment décimé des troupeaux de vaches noires et blanches tandis que la race locale, la vache Ankole, a pu parcourir de longues distances pour aller s’abreuver.

« Avec le réchauffement climatique, l’environnement va changer de plus en plus vite, souligne le Dr Seré. La nature n’aura pas le temps de s’adapter, d’où l’intérêt de disposer d’une large palette génétique. Il existe des races adaptées à de petites niches écologiques dont les gènes peuvent être très intéressants pour faire face à un nouvel environnement ou à une nouvelle maladie. Or quand des gènes disparaissent, ils sont perdus à jamais ».

D’où la nécessité, en plus de l’éducation et de l’évolution des pratiques agricoles, de la création de banques génétiques pour conserver la semence des animaux. « Nous disposons désormais de très bonnes techniques pour conserver les semences, ajoute Carlos Seré, et les méthodes d’analyse génétique permettent de sélectionner plus rapidement une race afin de la croiser avec une autre, autrement dit de faire en peu de temps ce que les éleveurs font progressivement». Il existe déjà des banques génétiques dans certains pays, comme en Inde, mais aucune en Afrique où les risques sont les plus élevés. Sécheresses, maladies et conflits armés fragilisent l’élevage et de nombreuses races sont menacées de disparition.

Un plan mondial d’action pour les ressources zoogénétiques sera présenté cette semaine à Interlaken, en Suisse, par la FAO et ses partenaires, afin que la communauté internationale apporte rapidement son aide aux éleveurs du sud.