Le plus grand accélérateur de particules du monde mis en rou

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par Proculte » 10 Sep 2008, 17:44

AFP - mercredi 10 septembre 2008 :wub:



Le plus grand instrument de physique au monde, le Grand collisionneur de hadrons LHC, a été mis en route mercredi, avec pour mission de recréer les conditions d'énergie intense des premiers instants de l'univers.

Un premier jet de particules a fait mercredi matin un tour complet dans l'anneau de 27 km enfoui à 100 mètres sous terre de part et d'autre de la frontière franco-suisse.

Le LHC doit faire se fracasser des protons circulant en sens inverse, faisant jaillir des particules élementaires encore jamais observées.

Il recréera, durant une fraction de microseconde, les conditions qui prévalaient dans l'univers juste après le Big Bang, avant que les particules élémentaires s'associent pour former les noyaux d'atomes.

Il pourrait mettre en évidence des particules dites "supersymétriques" qui composeraient la matière noire, dont on ne sait pratiquement rien, sinon qu'elle compte pour 23% de l'univers, contre seulement 4% pour la matière ordinaire, les 73% restants étant de l'énergie noire responsable de l'expansion de l'univers.

Il devrait également permettre de repérer de l'antimatière, générée en quantité égale avec la matière au moment du Big Bang il y a 13,7 milliards d'années, mais qui a pour l'essentiel disparu depuis.

Ces expériences seront réalisées par quatre grands détecteurs installés autour de l'anneau.

Juste après 07H30 GMT mercredi matin, un premier faisceau de protons, des particules composites de la famille des hadrons, a été injecté dans l'accélérateur.

Un flash sur les écrans de contrôle a indiqué que le faisceau était bien entré dans la première section de l'anneau. Un peu moins d'une heure après, le faisceau réalisait un premier tour complet de l'anneau, sous les applaudissements des scientifiques.

Ce démarrage sera suivi par la mise en route d'un second faisceau tournant en sens inverse.

Guidés par des aimants supraconducteurs refroidis à 271,3°C, soit 1,9°C au-dessus du zéro absolu, les faisceaux seront progressivement accélérés jusqu'à une vitesse proche de celle de la lumière.

Les premières collisions de protons - qui ne devraient pas intervenir avant plusieurs semaines- seront produites à des énergies de 450 gigaélectronvolts (Gev), soit un peu moins de la moitié de la puissance du Fermilab de Chicago, jusqu'ici le plus grand accélérateur du monde.

Les énergies atteindront à terme des niveaux inégalés, jusqu'à 7 téraélectronvolts (Tev) par faisceau, soit sept fois la puissance du Fermilab.

L'objectif, "c'est l'acquisition de la compréhension sur le comportement de la matière la plus fondamentale", a déclaré à l'AFP Daniel Denegri, un physicien travaillant sur un des quatre détecteurs de particules installés autour de l'anneau.

La mise en route de mercredi est un "un tour de force technologique", pour ce physicien qui "s'attend à des découvertes plus ou moins spectaculaires".

Les chocs de protons dégageront brièvement une chaleur 100.000 fois supérieure à celle du coeur du Soleil et devraient permettre de détecter notamment le boson de Higgs, une mystérieuse particule qui donnerait sa masse à toutes les autres dans la théorie du "Modèle standard".

Les collisions pourraient également créer des mini trous noirs dont les physiciens du Cern assurent qu'ils seront sans danger, tant leur présence sera éphémère. Quelques scientifiques ont émis la crainte qu'ils absorbent toute la matière autour d'eux, provoquant la fin du monde.

Le projet de 3,76 milliards d'euros a connu bien des retards. Il remonte à 1983 pour sa conception et à 1996 pour le début des travaux et a mobilisé des milliers de physiciens et d'ingénieurs du monde entier.


Proculte
 
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Message par Zimer » 10 Sep 2008, 18:49

:emb: :emb: :emb: :emb: :emb: :emb: :emb: :wavey: je perçoit bien l'émotion que suscite ce formidable engin de recherche mais je dois dire et pour un matérialiste c'est vraiment la honte que je pige vraiment pas grand chose :emb: :emb: :
a écrit :Il recréera, durant une fraction de microseconde, les conditions qui prévalaient dans l'univers juste après le Big Bang, avant que les particules élémentaires s'associent pour former les noyaux d'atomes.
ça d'abord ?? cela veux dire quoi concrètement ?


CODE
des particules dites "supersymétriques"
pareil c'est quoi ?

CODE
Le boson de Higgs, une mystérieuse particule qui donnerait sa masse à toutes les autres dans la théorie du "Modèle standard".
Enfin ça , cela veux dire quoi concrètement donner sa masse ?? :emb: :emb: :emb:
Bon si certains on un peu de temps ....Merci :wavey: :wavey:
Zimer
 
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Message par Matrok » 11 Sep 2008, 18:04

Un bon article sur le sujet dans Libé (il y avait tout un dossier mais les articles étaient de qualité variable) :

a écrit :LES OBJECTIFS DU LHC

Remonter le temps, explorer l’intimité de la matière. La double vocation du LHC illustre à merveille l’extraordinaire puissance d’investigation de la physique et de l’astrophysique contemporaines. Avec lui, les scientifiques frôlent les confins de la matière, de l’espace et du temps. Confins de l’histoire de l’univers, puisque, selon Michel Spiro, le directeur de l’Institut national de physique nucléaire et des particules (Cnrs), «les collisions entre protons, puis entre ions de plomb, vont nous permettre d’étudier la matière telle qu’elle était une minuscule fraction de seconde après le big bang». L’avancée du LHC, par rapport à ses devanciers, comme le Tevatron du Fermilab, près de Chicago, se mesure ainsi : «Cent fois plus près du big bang, dix fois plus chaud», explique Spiro.
Cette grande manip, recréer un bout de big bang en labo, permet d’opérer une jonction entre les deux infinis - grand et petit - au service d’une approche rationnelle de questions hier réservées à la théologie. Ainsi, les astrophysiciens racontent l’histoire de l’univers depuis le big bang, il y a environ 14 milliards d’années, son refroidissement, son expansion, sa structuration en galaxies, la formation des étoiles et des planètes. Les cosmologistes étudient les traces de ses premiers instants, dans le rayonnement fossile émis 300 000 ans après le big bang. Et les physiciens des particules complètent le tableau par l’expérimentation contrôlée, le nec plus ultra de la démarche scientifique.
Ces derniers travaillent aussi pour leur confrérie. L’intimité de la matière n’aura jamais été sondée aussi profond. Le LHC fonctionne comme une sorte de scalpel surpuissant, découpant la matière en «morceaux» de 10^(-18) mètre, auprès desquels les atomes semblent gigantesques. Les physiciens espèrent ainsi découvrir de nouvelles particules, susceptibles de dissiper les mystères qui se sont accumulés ces dernières années.

Cibles. A l’aide d’une douzaine de particules élémentaires et de quatre interactions fondamentales (gravitation, nucléaire forte et faible, électromagnétisme) les physiciens reconstituent certes toutes les structures macroscopiques connues, du grain de sable à la galaxie en passant par la pâquerette. Mais ce modèle, mille fois validé en laboratoire, se révèle tragiquement incomplet, puisqu’il n’explique même pas comment les particules élémentaires de matière acquièrent leur masse… Sauf en invoquant un mystérieux «boson de Higgs», dont l’existence théorique remonte aux années 60, mais qui a toujours, depuis, échappé aux physiciens, par défaut de puissance de leurs machines. Logique, alors, que la première mission du LHC soit de le découvrir.

Si ce gibier de choix constitue la première cible de la machine, les physiciens espèrent aller bien plus loin. Comprendre pourquoi l’antimatière semble avoir disparu de l’univers, alors qu’elle surgit à parité avec la matière de chaque collision de particule. Découvrir si, oui ou non, l’espace-temps se limite aux quatre dimensions classiques, ou si d’autres dimensions spatiales se cachent aux tréfonds de la matière, comme le postulent les théories les plus à la mode. Progresser vers la résolution de l’énigme la plus fondamentale de la physique depuis Einstein : est-il possible d’unifier les quatre interactions fondamentales en une seule théorie, et ainsi de comprendre le big bang lui-même ? Pour l’instant, la seule chose que les physiciens peuvent en dire, c’est que leurs théories s’écroulent à son contact, débouchant sur un «instant zéro, souvent maquillé en origine, une vision naïve qui ne fait que souligner notre ignorance», souligne Spiro.

«Quête historique». Le LHC, c’est donc aussi de la culture puisqu’il s’agit, selon le physicien, «de notre rapport au monde, de poursuivre une quête historique de l’humanité, entamée dès l’antiquité, et qui vient empiéter sur les croyances et les mythes». Dans cette quête, cette expérience constitue, souligne-t-il, «une étape indispensable dont on attend beaucoup».


La phrase de Michel Spiro sur l"instant zéro, souvent maquillé en origine, une vision naïve qui ne fait que souligner notre ignorance" va plaire à notre convive, j'en suis sûr...

Matrok
 
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Message par Matrok » 11 Sep 2008, 18:14

Sur la polémique idiote au sujet des "mini-trous-noirs" (on en a parlé sur un autre fil), un article réellement inquiétant pour le coup, du journal suisse "Le Temps". Longs extraits :
a écrit :Au CERN, la rumeur menace les chercheurs

Des physiciens se sentent menacés par des gens qui ont peur des hypothétiques trous noirs. L'analyse d'un sociologue des sciences.

Olivier Dessibourg
Mercredi 10 septembre 2008


Vendredi dernier, John Ellis dit avoir reçu un paquet. «Il me semblait suspect, et je ne connaissais pas l'expéditeur. Je l'ai donc fait transmettre à la police», explique l'un des plus médiatiques physiciens du CERN. Qui poursuit: «Sur des blogs, des personnes inquiètes menacent de venir au CERN avec des fusils. Et aux Etats-Unis, des scientifiques impliqués, dont un Prix Nobel, ont reçu des menaces de mort.» Au CERN, les physiciens ne cachent plus leur inquiétude face à la peur panique de certaines gens, et devant les actes inconsidérés qu'elle peut engendrer. Quelle peur? Que le LHC cause la fin du monde, dès son lancement aujourd'hui, en générant des microscopiques trous noirs susceptibles de grossir en avalant la Terre. «Toutes ces histoires ne sont absolument que pure fiction, ne cesse de rappeler James Gillies, porte-parole du CERN. Mais elles angoissent réellement certains.»

Comment en est-on arrivé là?
(suit une description du buzz assez effarante... je coupe).

Le langage des physiciens

À bien des égards, la physique est un monde en soi. Un exemple? Dans la théorie de la thermodynamique, «la probabilité que toutes les molécules d'air d'une pièce se déplacent dans un coin, ne laissant plus d'air pour respirer, est infime (une chance sur plus d'un million de milliards de milliards), mais non nulle», explique le physicien Greg Landsberg dans le New York Times. Autrement dit, cette possibilité existe dans le formalisme scientifique, mais l'entendement fait que chacun se convainc facilement, à juste titre, que cela n'arrivera pas.

Il en va de même pour les microscopiques trous noirs que certains imaginent voir apparaître au CERN. Un calcul le montre, qui se base sur les rayons cosmiques. Ces particules de très haute énergie collisionnent en permanence les astres dans des chocs bien plus faramineux que ceux qui auront lieu au LHC. «Chaque seconde dans l'Univers, il y a 30000 milliards de fois l'ensemble des collisions qui auront lieu au LHC durant des années, détaille le physicien John Ellis. Or aucun trou noir vorace ne s'est créé depuis 13,7 milliards d'années, l'âge de l'Univers, puisque nous sommes toujours là.» Malgré cela, les physiciens, honnêtes dans leur formalisme, considèrent comme non nulle la probabilité qu'un tel micro-trou noir puisse être créé. Et quand bien même: «Toutes les théories assurent avec une certitude absolue qu'il se désintégrerait en un milliardième de milliardième de milliardième de seconde, sans causer de problème.» Mais, à l'aune de l'ampleur qu'a pris le débat autour de ce genre de déclarations, quelques physiciens le reconnaissent: ils auraient mieux fait de dire au grand public que la création de trous noirs est un événement qui, simplement, n'arrivera pas.
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Message par Jul » 11 Sep 2008, 19:44

Moi ce truc je trouve ça trop classe !
Ca me rappelle la conférence de Etienne Klein à la fête (super !) !!

Et puis franchement pour les petits moments de déprime, il me suffit d'aller lire les commentaires des gens sur l'article du monde :

"au mon dieu, ces sales scientifiques vont tout détruire et réduire la terre, ma voiture et mon écran plasma à l'état de particule ! On va tous se faire bouffer par un trou noir... ah gnagnagnagna, le progrès gnagnagnagnagna......"


Jul
 
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Message par Matrok » 11 Sep 2008, 19:48

(Jul @ jeudi 11 septembre 2008 à 19:44 a écrit : Et puis franchement pour les petits moments de déprime, il me suffit d'aller lire les commentaires des gens sur l'article du monde :

"au mon dieu, ces sales scientifiques vont tout détruire et réduire la terre, ma voiture et mon écran plasma à l'état de particule ! On va tous se faire bouffer par un trou noir... ah gnagnagnagna, le progrès gnagnagnagnagna......"

On peut trouver ça rigolo un moment, mais quand ça vire aux menaces de mort on se demande jusqu'où ça va vraiment aller...
Matrok
 
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Message par Jul » 11 Sep 2008, 20:01

C'est pas bien étonnant, on trouve plus de Témoins de Jéhovah qui distribue leurs merdes que de scientifiques qui viennent expliquer comment marchent les choses....
Jul
 
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Message par fepasma » 11 Sep 2008, 20:24

Salut
Effectivement les journalistes ne sont pas très compréhensibles...

Petites tentavives d'explications...
a écrit :
a écrit :Il recréera, durant une fraction de microseconde, les conditions qui prévalaient dans l'univers juste après le Big Bang, avant que les particules élémentaires s'associent pour former les noyaux d'atomes.
ça d'abord ?? cela veux dire quoi concrètement ?


A ses débuts, l'univers était très chaud, et très petit. L'énergie y était très concentrée. En envoyant des protons (noyau d'un atome d'hydrogène), les uns contre les autres après leur avoir donné de l'énergie en les accélérant on recréera lors de la collision des conditions proches de celles qui prévalaient un centième de milliardième de seconde après le Big Bang.

La compréhension qu'ont les physiciens de la matière et des forces qui font tenir ses composants ensemble est réumée dans un modèle qui s'appelle le Modèle Standard. Ce modèle bien qu'il reproduise très bien les mesures a certaines limites. Notamment il ne prédit pas pourquoi certaines particules sont plus légères que d'autres, en fait c'est "à la main" que les physiciens introduisent les masses mesurées des particules pour les calculs.

Des extensions de ce modèle donnent des tentatives d'explication à la masse des particules et ces modèles prédisent l'existence de nouvelles particules non encore observée les fameuses
CODE
des particules dites "supersymétriques"
ainsi que
CODE
Le boson de Higgs, une mystérieuse particule qui donnerait sa masse à toutes les autres dans la théorie du "Modèle standard".


On pourra sans doute observer ses particules auprès des détecteurs situés le long du LHC si les collisions permettent de concentrer en un point plus que l'énergie équivalente à leur masse (inconnue encore). En effet E=mc2, la fameuse équation d'Einstein, dit que la matière avec sa masse m est équivalente à une énergie E, à un facteur près (le carré de la vitesse de la lumière c2).
fepasma
 
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Message par Matrok » 11 Sep 2008, 20:38

(Jul @ jeudi 11 septembre 2008 à 20:01 a écrit : C'est pas bien étonnant, on trouve plus de Témoins de Jéhovah qui distribue leurs merdes que de scientifiques qui viennent expliquer comment marchent les choses....

C'est exactement ça le problème, tu as raison. Faire de la vulgarisation scientifique est même assez mal vu dans le milieu de la recherche, pour un tas de raisons diverses et assez navrantes... En gros c'est l'idée que la science est forcément affaire de spécialistes, il y a un peu un sentiment aristocratique là dessous, où au moins élitiste... Résultat, pas mal de gens s'imaginent des énormités sur la recherche scientifique, voire considèrent les scientifiques comme des ennemis puisqu'ils sont coupés du monde (en apparence). C'est même pas la faute au témoins de Jéhova, ça serait trop simple : c'est bien la faute de la communauté scientifique, qui ne fait pas ce boulot de propager la culture et l'information scientifique.

(C'était ma microrévolte du jour)
Matrok
 
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