Le marxisme est-il une science ?

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par Barnabé » 21 Fév 2012, 14:21

(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 14:18 a écrit :
(luc marchauciel @ mardi 21 février 2012 à 14:12 a écrit :
(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 14:04 a écrit : . Et cela me paraît tout à fait testable (même si un test probant à une large échelle nécessiterait des événements d'une autre ampleur que ceux que nous avons pu connaître dans un passé récent).

Et l'absence des évenements en question pourrait être avancée comme une preuve (pour l'instant) du fait que le marxisme a été invalidé par l'histoire, si celle -ci est le test de celui-là.

Comme science, le marxisme explique les contradictions de l'organisation social depuis leurs racines dans la production jusqu'à la variété de leurs expressions (politiques, idéologiques, etc.) et les mécanisme qui les gouvernent. Ce qui pourrait être une preuve d'invalidation, ce serait par exemple l'absence de lutte de classe, le fait que l'économie capitaliste arrête de produire des crises, des guerres et qu'il s'avère capable de répondre aux besoins de l'humanité.

Et j'ajoute à nouveau qu'à ce compte là, la théorie de l'évolution elle-aussi ne fait qu'exprimer des mécanismes généraux et s'avère incapable de prédire par exemple précisément l'apparition de telle ou telle nouvelle espèce.
Barnabé
 
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Message par luc marchauciel » 21 Fév 2012, 14:21

(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 14:04 a écrit :

Un mot quand même encore sur la scientificité du marxisme dans ce contexte. Certainement, il n'y a pas de "laboratoire". Mais tout de même, il y a des choses que l'on vérifie... dans la pratique de la lutte des classes. Oui le marxisme aide à comprendre le sens des événements. Et il aide aussi clairement à s'orienter dans une grève ou un mouvement, à prévoir (dans une certaine mesure évidemment) ce qui est possible ou pas. Personnellement, j'ai été pleinement convaincu du matérialisme historique parce que dans des mouvements, même petits, il permettait de mieux comprendre, de mieux s'orienter et de mieux agir. Et cela me paraît tout à fait testable (même si un test probant à une large échelle nécessiterait des événements d'une autre ampleur que ceux que nous avons pu connaître dans un passé récent). Et d'ailleurs c'est comme cela, en confrontation avec les événements objectifs de la lutte des classes que le marxisme a été élaboré.

Si on adhère à ce paragraphe-là pour le marxisme, on peut y adhérer aussi pour la psychanalyse, et dire que le psychanalyse est une science car elle aide à s'orienter dans la vie, qu'elle aide à comprendre de le sens des événements, qu'elle s'élabore en confrontation avec les événements objectifs de la cure analytique, etc.
Mais, pour tout dire, je me demande si on ne pourrait pas dire là même chose de la croyance en Dieu, qui aide à s'orienter dans la vie, à comprendre le sens des événements et qui s'élabore en confrontation avec les événements de la vie quotidienne

Quand tu postules un truc non réfutable, tu peux lire le réel avec en tête ton postulat, et le retrouver un peu partout à ta guise et ainsi confirmer ton postulat.

Ceci dit, je pense que la psychanalyse est bien plus testable et réfutable que le marxisme. C'est pour ça que je pense qu'elle a en gros été réfutée, et pas lui.
luc marchauciel
 
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Message par luc marchauciel » 21 Fév 2012, 14:27

(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 14:21 a écrit :
(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 14:18 a écrit :
(luc marchauciel @ mardi 21 février 2012 à 14:12 a écrit :
(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 14:04 a écrit : . Et cela me paraît tout à fait testable (même si un test probant à une large échelle nécessiterait des événements d'une autre ampleur que ceux que nous avons pu connaître dans un passé récent).

Et l'absence des évenements en question pourrait être avancée comme une preuve (pour l'instant) du fait que le marxisme a été invalidé par l'histoire, si celle -ci est le test de celui-là.

Comme science, le marxisme explique les contradictions de l'organisation social depuis leurs racines dans la production jusqu'à la variété de leurs expressions (politiques, idéologiques, etc.) et les mécanisme qui les gouvernent. Ce qui pourrait être une preuve d'invalidation, ce serait par exemple l'absence de lutte de classe, le fait que l'économie capitaliste arrête de produire des crises, des guerres et qu'il s'avère capable de répondre aux besoins de l'humanité.

Et j'ajoute à nouveau qu'à ce compte là, la théorie de l'évolution elle-aussi ne fait qu'exprimer des mécanismes généraux et s'avère incapable de prédire par exemple précisément l'apparition de telle ou telle nouvelle espèce.

Je pense (a priori) qu'elle le peut, mais qu'en général les processus se font sur des temps trop long pour être vérifiés à l'échelle de la vie humaine.
Ceci dit, pour des espèces à forte reproduction et faible durée de vie, faudrait voir.
Je vais essayer de me renseigner auprès de spécialistes, si j'ai un tuyau je viendrai le lâcher ici.
Dans la lignée de ce que dit Canardos plus haut sur le marxisme, on peut dire que la théorie de l'évolution prédit l'apparition de nouvelles espèces si les condtions changent... mais qu'elle ne peut pas à l'avance prédire toutes les caractéristiques précises de ces espèces.
luc marchauciel
 
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Message par Barnabé » 21 Fév 2012, 14:33

(luc marchauciel @ mardi 21 février 2012 à 14:21 a écrit :
(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 14:04 a écrit :

Un mot quand même encore sur la scientificité du marxisme dans ce contexte. Certainement, il n'y a pas de "laboratoire". Mais tout de même, il y a des choses que l'on vérifie... dans la pratique de la lutte des classes. Oui le marxisme aide à comprendre le sens des événements. Et il aide aussi clairement à s'orienter dans une grève ou un mouvement, à prévoir (dans une certaine mesure évidemment) ce qui est possible ou pas. Personnellement, j'ai été pleinement convaincu du matérialisme historique parce que dans des mouvements, même petits, il permettait de mieux comprendre, de mieux s'orienter et de mieux agir. Et cela me paraît tout à fait testable (même si un test probant à une large échelle nécessiterait des événements d'une autre ampleur que ceux que nous avons pu connaître dans un passé récent). Et d'ailleurs c'est comme cela, en confrontation avec les événements objectifs de la lutte des classes que le marxisme a été élaboré.

Si on adhère à ce paragraphe-là pour le marxisme, on peut y adhérer aussi pour la psychanalyse, et dire que le psychanalyse est une science car elle aide à s'orienter dans la vie, qu'elle aide à comprendre de le sens des événements, qu'elle s'élabore en confrontation avec les événements objectifs de la cure analytique, etc.
Mais, pour tout dire, je me demande si on ne pourrait pas dire là même chose de la croyance en Dieu, qui aide à s'orienter dans la vie, à comprendre le sens des événements et qui s'élabore en confrontation avec les événements de la vie quotidienne

Quand tu postules un truc non réfutable, tu peux lire le réel avec en tête ton postulat, et le retrouver un peu partout à ta guise et ainsi confirmer ton postulat.

Ceci dit, je pense que la psychanalyse est bien plus testable et réfutable que le marxisme. C'est pour ça que je pense qu'elle a en gros été réfutée, et pas lui.

Ben oui, en un certain sens, la fonction générale des idées est de permettre d'agir sur le monde. C'est là qu'il y a des degrés. Ce qui fonde la spécificité des sciences modernes (qui sont aussi un produit historique) c'est d'avoir cherché à expliquer les processus à partir de mécanisme matériels internes. C'est cela qui fait que la croyance en dieu ou la variété des explications mystiques, qui remplacent de tels mécanismes par une volonté externe, n'est pas une science.
Pour la psychanalyse, c'est plus compliqué. Indépendamment des circonstances, bidonnages etc. à son origine, la démarche visant à chercher dans le psychisme des mécanismes expliquant son fonctionnement était scientifique (en partie, parce que chez Freud, il reste une forme d'idéalisme). C'est en cela que, sans y regarder de trop près (comme Trotsky qui n'avait pas que cela à faire), cela pouvait sembler un pas en avant. Et les marxistes qui y ont regardé de plus près (je renvoie au texte de Vygotsky que j'ai cité tout à l'heure) ont, tout en soulignant un certain effort, bien vu où cela coinçait. En voulant (ou en prétendant) exhiber des mécanismes strictement psychiques, elle a nié l'unité fondamentale du psychique et du physiologique. Et oui, c'est falsifiable, parce que le résultat c'est que pour des choses que la psychanalyse prétend expliquer et sur laquelle elle prétend agir (au hasard, l'autisme), ça ne marche clairement pas.
S'il y avait des énoncé marxiste équivalents à "l'autisme est causé par l'absence d'amour de la mère", du genre "le remède au cancer c'est l'auto-organisation des travailleurs", alors oui, le marxisme serait de la charlatanerie.
Barnabé
 
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Message par Barnabé » 21 Fév 2012, 14:38

(luc marchauciel @ mardi 21 février 2012 à 14:27 a écrit : Je pense (a priori) qu'elle le peut, mais qu'en général les processus se font sur des temps trop long pour être vérifiés à l'échelle de la vie humaine.
Ceci dit, pour des espèces à forte reproduction et faible durée de vie, faudrait voir.
Je vais essayer de me renseigner auprès de spécialistes,  si j'ai un tuyau je viendrai le lâcher ici.

Ce n'est pas seulement une question de temps. Dans la spéciation, ou même la modification des équilibres de composition des espèces, il y a bien des facteurs (dérive génétique, phénomènes d'isolement de petits groupes, etc.) qui ne peuvent simplement pas être prédits. Cela n'empêche pas qu'on puisse construire des modèles théoriques, mais ils restent quand même assez généraux et limités à des cas relativement simples.

a écrit :Dans la lignée de ce que dit Canardos plus haut sur le marxisme, on peut dire que la théorie de l'évolution prédit l'apparition de nouvelles espèces si les condtions changent... mais qu'elle ne peut pas à l'avance prédire toutes les caractéristiques précises de ces espèces.

Assez d'accord (enfin) avec cela. Mais du coup en quoi la théorie de l'évolution est-elle plus scientifique que le marxisme?
Barnabé
 
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Message par Matrok » 21 Fév 2012, 17:14

Ce fil commence à être d'un niveau franchement difficile à suivre, et pour tout dire, moi qui suis accusé d'être "le pédant" sur un autre fil, là je dois reconnaître que je suis largement dépassé par les références qu'il faudrait avoir lues et assimilées pour se sentir le droit d'en placer une... Bon, je ne vais quand même pas me gêner, car j'aimerais quand même expliquer pourquoi cette manie d'accoler un adjectif après le mot "science" m'agace autant.

Barnabé, le point de vue que tu développes est original. Ce n'est pas un compliment, c'est un constat : je veux dire qu'il me semble que c'est le tien, pas forcément celui de la "science marxiste" ! Je veux bien débattre de tes arguments, mais je préfèrerais que tu les assumes comme les tiens, plutôt que d'écrire "il me semble que c'est ce que Trotsky voulait dire". Parce que lorsque tu écris qu'on peut considérer le marxisme d'une certaine manière comme une "science prolétarienne", le raisonnement que tu proposes pour justifier ça me semble pour le moins original. Je reviendrais plus tard sur pourquoi je pense qu'il est faux.

J'ai exprimé plus haut ce que j'avais compris du raisonnement de Trotsky dans ce paragraphe de que logan nous a sorti :
a écrit :Trotsky écrit bien que le marxisme n'est pas une "science prolétarienne", qu'il n'est pas le produit d'une "culture prolétarienne", mais bien le produit de la "science bourgeoise", ce qui revient à dire qu'à l'heure où il écrit ce texte il n'y a pas à proprement parler de "science prolétarienne"...

D'ailleurs, logan a sorti ce texte sans préciser comment il le comprenait et ce qu'il en tirait sur la question "le marxisme est-il une science". Il me semble que visiblement Trotsky ne se posait pas cette question là. Son avis semble tranché, je le cite : "Il y a plus de science véritable dans le seul Manifeste du Parti communiste que dans des bibliothèques entières remplies de compilations, spéculations et falsifications professorales sur la philosophie et l'histoire". Le genre d'avis sur la question qui n'éclaire pas le raisonnement... Il faut aussi voir que ce texte date de 1924, soit dix ans avant le premier bouquin de Popper, pour donner une date clé dans la réflexion épistémologique moderne. On peut faire plein de critiques de Popper, de Kuhn, de Feyerabend, etc. mais il me semble que ces critiques (Sokal et Bricmont par exemple) ne permettent pas pour autant d'annuler l'existence de cette réflexion épistémologique qui a quand même évolué depuis 1924. Et par ailleurs, la question du fil c'est "le marxisme est-il une science", sous-entendu ici et maintenant, le marxisme actuel peut-il prétendre être une science aujourd'hui... pas en 1924, ou en 1848. Je précise cela car j’admets la remarque de redspirit qui me paraît judicieuse :
a écrit :Ce qui a valeur de science aujourd'hui ne le sera plus demain, tout comme ce qui était scientifique par le passé ne l'est plus aujourd'hui.

Par contre je ne suis pas forcément d'accord avec tout le reste de ce que dit redspirit mais bon, on verra plus tard si j'ai le temps (moi et redspirit on a pris l'habitude de discuter des questions philosophiques avec cinq ans de délai ;) ).

On en vient aux arguments de Barnabé en faveur du retour aux lubies de la "science prolétarienne" et de la "science bourgeoise" :
a écrit :...je crois que l'opposition "science bourgeoise"/"science prolétarienne" a exactement autant de sens que "état bourgeois"/"état ouvrier": il met en avant le fait que les activités sociales sont fondamentalement déterminées en terme de classe. Or la science est une activité sociale. La nature ne l'est pas. Et c'est pour cela qu'on doit juger des énoncés scientifiques en fonction de leur adéquation au monde objectif. Mais la science elle-même n'est pas purement objective: elle est le rapport entre un sujet qui est social (et donc déterminé en termes de classe) et le réel objectif.
De ce point de vue là, il n'y a pas de distinction fondamentale entre science de la nature et science de la société. Car lorsqu'on prend la société comme objet, c'est précisément qu'on la considère comme objective. Si le marxisme se veut une science prolétarienne, ça n'est pas parce que son objet est déterminé socialement (d'ailleurs de ce point de vue, le marxisme est surtout une science qui prend la société bourgeoise comme objet), mais parce que son sujet doit être le prolétariat (qui est le seul à pouvoir comprendre la société adéquatement parce qu'il est le seul à pouvoir la transformer).

Il y a là à mon avis une erreur de perspective. La science, sans adjectif devant (ou si tu préfères la science "bourgeoise", la seule qui existe en fait pour le moment), est bel et bien purement objective, ou du moins elle évolue continuellement dans le sens de devenir purement objective ; car son but est de créer une connaissance objective, et non pas comme tu le prétends d'établir un rapport entre un sujet et le réel. Bien sûr une hypothèse ou une théorie peut avoir un contenu subjectif, dans le sens où elle peut porter la trace des préjugés et de l'idéologie de celui qui l'a élaborée. Mais la méthode scientifique ne réside pas dans l'élaboration des théories, elle réside dans la confrontation des théories à l'expérience ou à l'observation, autrement dit l'adéquation au monde objectif, en tentant autant que possible d'éliminer de cette démarche toute subjectivité. C'est par le fonctionnement normal de la science "bourgeoise" que les théories racistes ont été progressivement éliminées du champ des sciences. C'est également par son fonctionnement normal que les théories psychanalytiques sur l'autisme ont été presque partout abandonnées. La science "prolétarienne" ne s'y prendrait pas autrement : vérifier si les théories résistent à l'expérience, et ne garder que celles là. Autrement dit la distinction entre science "bourgeoise" et "prolétarienne" n'a pas lieu d'être.

Pour terminer :
(rappel historique posté par luc a écrit :Formellement, la notion [de science prolétarienne] est liquidée en France en  1953 [par les staliniens eux-mêmes, sous la pression de scientifiques qui en soulignaient l'absurdité] (...) La liquidation de fait prendra plus de temps, s’échelonnant jusqu’au début des années 60, et s'opérant discipline par discipline.

En clair les staliniens ont commencé à s'en débarrasser dès la mort de Staline et y sont arrivés à peu près en une décennie, mais certains trotskystes y tiennent encore... Je trouve ça affligeant.
Matrok
 
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Message par Matrok » 21 Fév 2012, 17:17

(luc marchauciel @ mardi 21 février 2012 à 13:27 a écrit :
(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 14:21 a écrit :... la théorie de l'évolution elle-aussi ne fait qu'exprimer des mécanismes généraux et s'avère incapable de prédire par exemple précisément l'apparition de telle ou telle nouvelle espèce.

Je pense (a priori) qu'elle le peut, mais qu'en général les processus se font sur des temps trop long pour être vérifiés à l'échelle de la vie humaine.
Ceci dit, pour des espèces à forte reproduction et faible durée de vie, faudrait voir.
Je vais essayer de me renseigner auprès de spécialistes, si j'ai un tuyau je viendrai le lâcher ici.

Je me souviens avoir lu un truc dans ce genre au sujet de papillons... c'est mince comme piste mais si ça peux t'aider !
Matrok
 
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Message par luc marchauciel » 21 Fév 2012, 18:13

Je voudrais revenir sur un argument de Barnabé, déja critiqué par Matrok, mais j'ai autre chose à en dire, à la relecture :

a écrit :
la science est une activité sociale. La nature ne l'est pas. Et c'est pour cela qu'on doit juger des énoncés scientifiques en fonction de leur adéquation au monde objectif. Mais la science elle-même n'est pas purement objective: elle est le rapport entre un sujet qui est social (et donc déterminé en termes de classe) et le réel objectif.


OK, la science est une activité sociale. Elle l'est même de plus en plus au fur et à mesure de l'histoire [entre parenthèse, elle est même peut-être l'activité humaine qui aujourd'hui à le plus besoin d'être socialisée sur un mode coopératif à une échelle internationale pour pouvoir continuer à progresser, ce qui préfigure des trucs qui nous plaisent et pose dès aujourd'hui la question du dépassement des contraintes en termes de concurrence et d'égoïsmes nationaux]
La nature n'est pas une activité sociale : là, je vois pas ce que cela veut dire.
Du coup, Barnabé, j'ai du mal à te suivre quand tu enchaînes avec "c'est pour cela que..."
Mais SURTOUT, ce qui me pose problème, c'est la suite de ton raisonnement :

a écrit :
on doit juger des énoncés scientifiques en fonction de leur adéquation au monde objectif


Très bien, mais... qu'est ce qui te permet d'émettre ce jugement et de dire que quelque chose est "en adéquation au monde objectif" ? Quels sont les critères à partir desquels tu vas juger, quelle est la méthode à partir de laquelle tu vas juger de la capacité d'un énoncé à décrire/expliquer correctement le monde objectif ?
Il me semble que c'est précisément la méthode scientifique qui permet de mesurer ce degré d'adéquation, par les critères de preuves (avec dans le meilleur des cas des expériences reproductibles) qu'elle a progressivement élaborés.
Autrement dit : c'est la méthode scientifique qui permet de juger de la scientificité d'un énoncé [sinon, quelle autre ? quels critères alternatifs ?]
Autrement dit : la science est à elle-même son propre juge, elle est "en soi", sans déterminisme de classe [en tant que méthode, toujours, pas en tant qu' ensemble d'institutions socialisant et encadrant les personnes qui appliquent la méthode] , il n'y a pas d'adjectif à lui accoller.



Ceci dit, je suis d'accord avec Matrok pour dire que dans ce fil on atteint un niveau où il est difficile de suivre,et dans les discussions, j'ai atteint [dépasse ?] la limite de ce que j'ai l'impression de maîtriser, je me retrouve à "élaborer" au fur et à mesure, c'est à dire à m'exposer à dire de grosses conneries qui seraient facilement réfutées.
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Message par canardos » 21 Fév 2012, 18:46

(luc marchauciel @ mardi 21 février 2012 à 14:21 a écrit :

Ceci dit, je pense que la psychanalyse est bien plus testable et réfutable que le marxisme. C'est pour ça que je pense qu'elle a en gros été réfutée, et pas lui.

oui, les pseudosciences sont bien plus faciles à "falsifier" que les sciences historiques. la réalité de l'efficacité d'une thérapie peut être contrôlée, on peut vérifier facilement que les concepts utilisés sont compatibles ou non avec les lois physiques ou les connaissances sur la physiologie humaine par exemple.

les théories historiques ne peuvent se vérifier que par induction et leurs capacités prédictives se limitent à la définition de règles générales. La seule manière de les "falsifier" c'est de vérifier si elles sont compatibles avec toutes les situations étudiables et si d'autres théories remplissent également toutes ces conditions. c'est une procédure de validation longue et jamais complète qui ne correspond pas aux critères très stricts de Popper. Cela n’empêche pas que cette procédure de validation si elle est longue et menée de façon rigoureuse et même si elle est incomplète au sens popperien permet de parler de sciences sociales. Plutôt que de mettre charlatanerie et sciences historiques sur le meme plan, il vaut mieux redéfinir ce que peut être la meilleure et la plus complète forme de validation dans un domaine donné en adaptant cette forme de validation en fonction du domaine étudié et sans essayer d'appliquer exactement les mêmes procédures pour la vérification d'une loi physique et d'un processus socio-economique.


Cette adaptation des règles est déjà pratiquée en biologie,les lois en biologie n'ont pas la même nature que les lois en physique. l'extrapolation d'une règle générale à partir d'un grand nombre de vérifications expérimentales est une procédure principalement inductive.

certes on peut essayer de falsifier la théorie de l’évolution. On pourrait dire par exemple que si on trouvait des os de lapin (ou d'un quelconque mammifère) dans des sédiments du Cambrien la théorie de l’évolution tomberait à l'eau.
Mais si on n'en a pas trouvé, l'application stricte des critères poppériens ne permettrait pas pour autant de considérer que la théorie de l'évolution est validée en tant que théorie scientifique.
Un biologiste haussera les épaules et dira que les collections de fossiles sont largement suffisantes pour régler la question même si l'ensemble des gisements du cambrien est loin d’être connu.

Et pourtant si du coup on s'éloigne un peu des critères poppériens, personne ne conteste que la théorie synthétique de l’évolution est une théorie scientifique validée par l’expérimentation.

pourquoi le meme raisonnement ne pourrait-il pas s'appliquer à une théorie historique.
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Message par luc marchauciel » 21 Fév 2012, 19:13

(canardos @ mardi 21 février 2012 à 18:46 a écrit :

pourquoi le meme raisonnement ne pourrait-il pas s'appliquer à une théorie historique.

Je dirais : parce que l'évolution de sociétés humaines, c'est vachement plus compliqué que celle des organismes vivant.
Ne serait-ce que parce que la première implique une part de volonté, liée au conflit de classes comme moteur essentiel, et pas l'autre. Les espèces vivantes, hors l'homme, évoluent sous l'impact de la sélection naturelle au gré des conditions envrionnementales auxquelles elles sont soumises. Les sociétés humaines pas, ou vachement moins. Les hommes créent largement leur propre environnement, en fonction de leur besoins [la question étant, à l'intérieur des sociétés humaines : qui décide quels sont les besoins et comment on va les satisfaire]. Les autres espèces subissent pour l'essentiel leur environnement.
Il y a quelque chose de beaucoup plus mécanique dans l'évolution des espèces que dans l'évolution des sociétés humaines. Ce qui rend cette dernière infiniment plus complexes, imposant forcément une épistémologie de leur étude qui soit tout à fait différente, et qui sort en partie du champ de ce que l'on peut rigouresusement appeler "science".
Prenons l'exemple du réchauffement climatique et de ses conséquences à venir. Il va modifier la biogéographie des espèces (ça a déja commencé), mais aussi provoquer des évolutions, avec probablement de nouvelles spéciations en fonction des modifications de l'environnement. C'est assez fatal et mécanique, même si les paramètres sont complexes, sans doute trop pour prédire. Mais pour les conséquences du réchfaumment climatique sur l'espèce humaine, il en va tout autrement : il n'y a rien de mécanique [j'ai horreur du déterminisme climatique, du genre "c'est sûr que ça va être une catastrophe et provoquer des morts", comme si c'était fatal], il s'agit là de choix de sociétés, sur "comment limiter ou pas le réchuffement ?", "comment s'organiser face aux conséquences pour ne pas en souffrir voire en profiter", etc.
C'est une question de choix, de conflits, et pas de lois scientifiques.
D'ailleurs, on n'explique pas dans notre propagande que nous avons raison parce que nous avons les lois de l'histoire avec nous. On dit qu'on a raison parce que notre programme est celui qui est favorable aux travailleurs.
Et on a raison d'avoir raison de cette manière

Ceci dit, Canardos, je suis sensible à la cohérence de ton argumentation.
luc marchauciel
 
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