Le marxisme est-il une science ?

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par redspirit » 24 Fév 2012, 19:52

(Matrok @ vendredi 24 février 2012 à 19:49 a écrit : Je suis franchement en désaccord avec ça. La science n'a pas pour but d'établir "une relation entre un sujet et un objet". Elle a pour but d'établir des théories scientifiques, avec un contenu logique qui leur est propre, indépendamment de tout sujet connaissant.

Tu as raison, ce n'est pas son but, mais c'est ce qu'elle est. La science est une relation entre un sujet et un objet, et c'est en cela que les rapports sociaux interagissent sur la définition même de son contenu.
redspirit
 
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Message par Barnabé » 24 Fév 2012, 19:55

J'ajoute une chose sur le fameux bon mot de Sokal (dont par ailleurs j'apprécie la valeur face à des relativistes):

a écrit :Quiconque croit que les lois de la physique ne sont que des conventions sociales est invité à essayer de transgresser ces conventions de la fenêtre de mon appartement. (J'habite au 21e étage.)


Il est quand même basé sur un jeu de mot pas très rigoureux. Que sont ici les "lois de la physique"? Sokal semble entendre par là la réalité objective qu'est l'attraction gravitationnelle. Mais cela justement au sens strict n'est pas une "loi de la physique", c'est une régularité du monde monde objectif. Les lois de la physiques, ce sont les différentes tentatives pour décrire ce fait. Celles-ci ne sont certes pas de pures conventions sociales. Elles sont déterminées et orientées par ces régularités objectives qu'elles doivent décrire. Par contre leurs expressions sont historiques. Elles ont été formulées pas n'importe quand, et pas dans n'importe quel contexte social. Elles se sont affinées avec les capacités de mesurer le mouvement de la matière. Elles été marquées par un contexte idéologique. Elles ont nécessité la constitution historique de l'activité scientifique elle-même, de ses méthodes, etc.
Barnabé
 
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Message par Matrok » 24 Fév 2012, 19:59

(redspirit @ vendredi 24 février 2012 à 18:52 a écrit :
(Matrok @ vendredi 24 février 2012 à 19:49 a écrit :La science n'a pas pour but d'établir "une relation entre un sujet et un objet". Elle a pour but d'établir des théories scientifiques, avec un contenu logique qui leur est propre, indépendamment de tout sujet connaissant.

Tu as raison, ce n'est pas son but, mais c'est ce qu'elle est.

Non ! Ça, c'est la vulgarisation, la pédagogie, l'explication des théories, etc. Étape importante, obligée même, mais appeler ça "la science", c'est louper non seulement ce qu'est son but, mais aussi ce qu'elle apporte réellement.
Matrok
 
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Message par Barnabé » 24 Fév 2012, 20:03

(Matrok @ vendredi 24 février 2012 à 19:49 a écrit :
(Barnabé @ vendredi 24 février 2012 à 13:02 a écrit : La science, ou plutôt la connaissance dont la science est un moment historique du développement (avec la constitution de méthodes, de disciplines, etc.), est le processus par lequel on connaît le monde extérieur objectif. C'est donc un rapport entre un sujet qui connaît (et ce sujet est social puisque justement les institutions scientifiques ont comme fonction, notamment, de mutualiser et de socialiser la connaissance, et d'établir des procédures fiables pour le faire) et l'objet de la connaissance.

Je suis franchement en désaccord avec ça. La science n'a pas pour but d'établir "une relation entre un sujet et un objet". Elle a pour but d'établir des théories scientifiques, avec un contenu logique qui leur est propre, indépendamment de tout sujet connaissant. C'est en cela qu'on peut parler de "connaissance objective" et c'est cela que je voulais dire dans la phrase que Barnabé a citée.

Oui mais cela c'est une abstraction. Il n'y a pas de connaissance indépendamment d'un sujet qui connait. Connaître c'est une relation: x connait y. Le contenu de cette relation est forcément déterminé à la fois par x et par y.
Je ne sais pas ce que c'est que des "théories scientifiques, avec un contenu logique qui leur est propre, indépendamment de tout sujet connaissant". L'expression théorique de la chute des corps c'est une expression théorique. Elle suppose quelqu'un (ou une société) pour la formuler et d'ailleurs aussi quelqu'un pour la comprendre. Par contre la méthode scientifique consiste à établir de telles formulations comme indépendante du sujet connaissant, c'est à dire comme universelle. Cela veut dire dont la valeur ne dépend pas du sujet (mais bien de l'adéquation à la réalité objective décrite), pas qui puisse se passer de tout sujet (ou alors vraiment au niveau le plus abstrait, mais là cela tombe dans l'idéalisme).
Barnabé
 
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Message par Barnabé » 24 Fév 2012, 20:07

(Matrok @ vendredi 24 février 2012 à 19:59 a écrit :
(redspirit @ vendredi 24 février 2012 à 18:52 a écrit :
(Matrok @ vendredi 24 février 2012 à 19:49 a écrit :La science n'a pas pour but d'établir "une relation entre un sujet et un objet". Elle a pour but d'établir des théories scientifiques, avec un contenu logique qui leur est propre, indépendamment de tout sujet connaissant.

Tu as raison, ce n'est pas son but, mais c'est ce qu'elle est.

Non ! Ça, c'est la vulgarisation, la pédagogie, l'explication des théories, etc. Étape importante, obligée même, mais appeler ça "la science", c'est louper non seulement ce qu'est son but, mais aussi ce qu'elle apporte réellement.

Non, c'est simplement de l'histoire des sciences...

Si c'est pour dire que la méthode scientifique moderne (ses critères de validation, de formulation, la reproductibilté expérimentale sur la base de protocoles stricts) constitue un progrès majeur pour la connaissance du monde objectif. Je crois qu'on est tous d'accord ici. Cela ne fait pas de la science une "activité objective" (quoi que cela puisse vouloir dire). Cela fait en fait une activité permettant à un sujet (social) de connaître le réel objectif bien plus précisément.
Barnabé
 
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Message par Matrok » 24 Fév 2012, 20:17

(Barnabé @ vendredi 24 février 2012 à 19:03 a écrit : Il n'y a pas de connaissance indépendamment d'un sujet qui connait. Connaître c'est une relation: x connait y. Le contenu de cette relation est forcément déterminé à la fois par x et par y.

Je vais devenir assez terre à terre, mais t'es-tu déjà baladé dans une bibliothèque universitaire ? Des tonnes de papier qui dorment là, dont la plupart dans des volumes que personne n'a consulté depuis des années, parfois des décennies. Bien sûr c'est en voie de disparition, maintenant la plupart de ces vieilleries ont été numérisées et dorment sur des disques durs connectés à internet... Peu importe. La plupart de ces articles scientifiques dorment. Si tu en prend un au hasard dans un bouquin assez ancien, tu peux parier que personne ne le connait vraiment. Il y a bien d'autres articles plus récents qui y font référence, peut-être... Un jour un chercheur va faire une recherche sur un sujet voisin, va retrouver cette référence, va sortir cet article de l'oubli. L'auteur est peut-être bien mort depuis longtemps, auquel cas il n'y avait plus de "sujet connaissant" avant cette redécouverte. Comment expliquer cela si la connaissance est forcément celle d'un sujet ?
Matrok
 
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Message par Barnabé » 24 Fév 2012, 20:31

(Matrok @ vendredi 24 février 2012 à 20:17 a écrit :
(Barnabé @ vendredi 24 février 2012 à 19:03 a écrit : Il n'y a pas de connaissance indépendamment d'un sujet qui connait. Connaître c'est une relation: x connait y. Le contenu de cette relation est forcément déterminé à la fois par x et par y.

Je vais devenir assez terre à terre, mais t'es-tu déjà baladé dans une bibliothèque universitaire ? Des tonnes de papier qui dorment là, dont la plupart dans des volumes que personne n'a consulté depuis des années, parfois des décennies. Bien sûr c'est en voie de disparition, maintenant la plupart de ces vieilleries ont été numérisées et dorment sur des disque durs connectés à internet... Peu importe. La plupart de ces articles scientifiques dorment. Si tu en prend un au hasard dans un bouquin assez ancien, tu peux parier que personne ne le connait vraiment. Il y a bien d'autres articles plus récents qui y font référence, peut-être... Un jour un chercheur va faire une recherche sur un sujet voisin, va retrouver cette référence, va sortir cet article de l'oubli. L'auteur est peut-être bien mort depuis longtemps, auquel cas il n'y avait plus de "sujet connaissant" avant cette redécouverte. Comment expliquer cela si la connaissance est forcément celle d'un sujet ?

Justement, les sciences comme mouvement historique, c'est aussi la mutualisation, la socialisation, l'accumulation des connaissances, et pour cela des structures de communication, de conservation, de formation etc. Je crois que tu démontres ici un peu l'inverse de ce que tu souhaitais: en effet les connaissances scientifiques accumulées existent grâce à un formidable appareil social, des bibliothèques (physiques ou numériques) notamment.
Maintenant un bouquin oublié sur une étagère est bien quelque chose de tout à fait objectif: de l'encre et du papier (ou des données sur des disques durs). Cela représente certainement de la connaissance produite par des sujets. Et réappropriable potentiellement par d'autres (et c'est une force de l'appareil scientifique que de permettre cela). Mais elles ne sont des connaissances effectives justement que lorsqu'elles sont utilisées, réintégrées dans un réseau de communication scientifique (par exemple en effet par un article qui y fera référence, etc.), et par là dans la société. Pour prendre l'exemple limite, si l'ensemble de l'humanité disparaissait, il ne resterait vraiment là dedans plus que de l'encre et du papier sans signification...
Barnabé
 
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Message par Matrok » 25 Fév 2012, 01:25

(Barnabé @ vendredi 24 février 2012 à 19:31 a écrit :Je crois que tu démontres ici un peu l'inverse de ce que tu souhaitais...

Il me semble que c'est plutôt toi qui perd le fil de ce que je souhaitais démontrer... C'est peut-être ma faute alors je vais essayer de récapituler comment je comprend cette discussion :

Le sujet du fil étant la question "le marxisme est-il une science", cette partie de la discussion porte sur une question annexe, celle de savoir s'il est pertinent de parler de "science prolétarienne" et de "science bourgeoise". Le lien entre les deux questions, c'est la tentation qu'on pourrait avoir de qualifier le marxisme de "science prolétarienne", ce qui justifierait de ne pas utiliser les mêmes critères de scientificité que pour la "science bourgeoise. Personne ne l'a formulé aussi nettement dans ce fil, mais c'est un sous-entendu qui me semble présent notamment dans ce qu'écrit logan, car il ne précise pas ce que cette distinction a d'important pour lui sur le sujet du fil.

Je conteste l'idée même d'une "science prolétarienne" qui serait fondamentalement différente de la "science bourgeoise", je pense (comme canardos le dit plus haut) qu'il s'agit d'un avatar du relativisme, et rappelle que même Trotsky qui (à ma grande surprise) admet ces notions, reconnait assez logiquement le marxisme comme un produit de la "science bourgeoise".

Tu contestes cela avec le raisonnement suivant :
(Barnabé @ mardi 21 février 2012 à 09:59 a écrit :... la science (...) est le rapport entre un sujet qui est social (et donc déterminé en termes de classe) et le réel objectif.

Et donc, selon ta théorie personnelle, le marxisme, qui a pour sujet la classe ouvrière, est une science prolétarienne.

Je conteste ton raisonnement en rappelant que la science ne consiste pas en un rapport social entre un sujet et un objet, mais en :
1) une méthode d'élimination de la subjectivité contenue dans les théories en les confrontant avec rigueur à la réalité via l'expérimentation, et
2) des théories "scientifiques" ayant résisté à cette confrontation, consignées dans des livres ou d'autres supports, et dont le contenu logique continue par ce biais à exister même en l'absence de sujet connaissant.

Je n'ai jamais contesté que les livres sont des objets en papier, ni qu'il faut une certaine organisation sociale pour tenir une bibliothèque, un institut de recherche ou une université. Et je suis d'accord avec canardos quand il concède que l'organisation de la société et les luttes de classes peuvent jouer comme frein ou comme accélérateur dans l'évolution des sciences. Dans ce sens ce n'est pas totalement absurde de parler de "science bourgeoise" sous le capitalisme ou de "science féodale" pour le moyen-âge. C'est sur l'idée que leur contenu même est socialement marqué que je suis en désaccord.

Quoique... on va peut-être trouver un terrain d'accord là-dessus : comme je l'ai concédé plus haut la science "évolue continuellement dans le sens de devenir purement objective". "Continuellement" n'est peut-être pas le mot juste, disons qu'en temps normal la science évolue ainsi en remodelant les théories en place. Comme il n'y a pas vraiment de règle stricte pour proposer des théories, cela implique qu'au départ elles peuvent porter un certain degré de subjectivité, ensuite éliminé progressivement par la méthode scientifique. Ainsi, tu as présenté dans un premier temps un bouquin comme justifiant ton idée que le contenu des théories scientifique serait en partie déterminé par la lutte des classes. Mais s'y j'en crois ton résumé (que tu as posté après ma petite provocation un peu minable je dois le reconnaitre) il s'intéresse en fait au livre de Newton jusque dans ses formulations particulières, plus qu'au contenu logique de la théorie Newtonienne une fois rôdée par quelques décennies de confrontation à la réalité. Dans ce cas précis, cela ne me surprend pas qu'on puisse y déceler des choses qui trahissent l'esprit de leur temps...

Ceci dit sur le fond, il n'y a pas de méthode scientifique bourgeoise ou prolétarienne, et les distinctions sur le contenu ne devraient finalement intéresser que les historiens des sciences d'après, longtemps après la révolution...

Par ailleurs, juste là dessus :
a écrit :...si l'ensemble de l'humanité disparaissait, il ne resterait vraiment là dedans plus que de l'encre et du papier sans signification...

Selon Kuhn, pas besoin d'un scénario aussi catastrophique, il suffit d'une révolution scientifique et le sens des œuvres scientifiques issues de l'ancien paradigme devient impossible à comprendre pour les scientifiques du nouveau ; c'est ce qu'il appelle l'incommensurabilité... Mais à mon avis il y a beaucoup d'exagération chez Kuhn sur ce phénomène. Le déchiffrage est difficile mais pas strictement impossible, et on ne devrait pas en tirer de conclusion relativiste.
Matrok
 
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Message par redspirit » 25 Fév 2012, 15:35

a écrit :Je conteste ton raisonnement en rappelant que la science ne consiste pas en un rapport social entre un sujet et un objet, mais en :
1) une méthode d'élimination de la subjectivité contenue dans les théories en les confrontant avec rigueur à la réalité via l'expérimentation, et
2) des théories "scientifiques" ayant résisté à cette confrontation, consignées dans des livres ou d'autres supports, et dont le contenu logique continue par ce biais à exister même en l'absence de sujet connaissant.


Matrok, je te réponds sur les deux points en question :

1) La science, une méthode d’élimination de la subjectivité ? C’est une illusion pure et simple. Les faits que la science analyse sont toujours imprégnés de théorie : il n’existe pas de « faits bruts ».
Je m’explique. La question est la suivante : comment, en science, sont produites les connaissances ? Elles sont produites par les scientifiques. Comment : par la confrontation de leurs théories aux faits. Cette confrontation est supposée éliminer toute subjectivité aux théories scientifiques, puisque les faits auraient une objectivité matérielle. C'est ce point que tu soutiens et c’est précisément celui que je conteste. Les faits que nous percevons ne sont pas neutres. Nous les voyons d’une certaine manière, propre aux conditions économiques et sociales de notre époque.
Ce que dit Barnabé, c’est simplement que la science est une activité sociale. Ce n’est pas une activité qui transcende les conditions sociales dans lesquelles elle est produite. Avoir cette vision de la science, c’est avoir un rapport non scientifique à la science, mais à l’inverse un rapport métaphysique : la science est conçue comme un rapport transcendantal au monde permettant d’établir des vérités objectives et incontestables dessus. A l’inverse, je pense que la science ne transcende pas la société.

Donnons un exemple. Une expérience en physique, c’est toujours à la fois l’observation précise de phénomènes accompagnée de l’interprétation de ces phénomènes. Cette interprétation substitue aux données concrètes recueillies par l’observation des représentations abstraites et symboliques qui leur correspondent en vertu des théories admises par le scientifique qui mène l’expérience. Je cite le titre d’une section de Pierre Duhem, physicien du début du 20ème siècle : « une expérience en physique n’est pas simplement l’observation d’un phénomène ; elle est, en outre, l’interprétation théorique de ce phénomène ». En ce sens très précis, il n’existe pas de faits bruts car les faits sont toujours interprétés selon un cadre théorique déterminé historiquement et socialement. Les faits sont imprégnés de théorie. Duhem donne l’exemple de la compression des gaz par Regnault :

a écrit :Il prend une certaine quantité de gaz, l’enferme dans un tube de verre, il maintient la température constante, il mesure la pression que supporte le gaz et le volume qu’il occupe. Voilà, dira-t-on, l’observation minutieuse et précise de certains phénomènes, de certains faits. Assurément, sous les mains et les yeux de Regnault des faits concrets se sont produits ; est-ce le récit de ces faits que Regnault a consignés pour contribuer à l’avancement de la physique ? Non. Dans un viseur, Regnault a vu l’image d’une certaine surface de mercure affleurer à un certain trait ; est-ce là ce qu’il inscrit dans la rédaction de ses expériences ? Non. Il a inscrit que le gaz occupait un volume ayant une telle valeur. […] Or, qu’est-ce que la valeur du volume occupée par le gaz, qu’est-ce que la valeur de la pression qu’il supporte, qu’est-ce que le degré de la température à laquelle il est porté ? Sont-ce trois objets concrets ? Non, ce sont trois symboles abstraits, que seule la physique théorique relie aux faits réellement observés.


Et cela renvoie au but même de la science : elle n’est pas là pour décrire le monde, mais pour l’expliquer. Sinon, il n’y aurait pas de théories et de méthodes scientifiques, mais de simples énumérations de phénomènes. Pour comprendre ces phénomènes, les relier les uns aux autres, par des rapports de causalité, il faut introduire de la théorie c’est-à-dire une interprétation de ce phénomène. Et ceci d’autant plus que sans cadre théorique pour interpréter les phénomènes, l’observation est autant source de connaissances sur le monde, que source d’erreur : l’observation peut être trompeuse. Il est nécessaire d’avoir un cadre théorique pour penser les phénomènes, sinon il n’est même pas possible de les observer correctement !
Une fois que l’on dit que les faits sont imprégnés de théories, il n’y a aucun fait qui échappe à la subjectivité humaine. Néanmoins, il ne faut pas tomber dans le relativisme absolu non plus : les théories élaborées dépendent également des faits. Ce ne sont pas justes des idées sur le monde, mais une interprétation de celui-ci qui dépend aussi des faits. Il y a un aller-retour un faits et théories : ils se déterminent l'un l'autre.

2) Dire que le savoir scientifique survit aux scientifiques et existe indépendamment de ceux qui l’ont constitué ne change rien à l’affaire. Ce qui compte, ce sont les conditions de production du savoir scientifique. Le savoir scientifique n’est jamais indépendant des conditions sociales dans lesquels il est produit. Qu’importe s’il survit à ces conditions particulières pour être réutilisé dans d’autres contextes sociaux. La production de la connaissance nécessite un rapport entre des faits (le monde) et un sujet (le scientifique). La science est une interprétation particulière du monde. La science n’est pas le monde. Ainsi, même si ces interprétations survivent à ceux qui les ont formulés, il n’en reste pas moins que tout savoir scientifique dépend d’un rapport particulier entre un scientifique et les faits qu’il observe, et que ce rapport est codifié par des contextes théoriques particuliers sous-tendus par des rapports sociaux.

Je m'arrête là car je suis déjà long, mais si on tire les conséquences de ce que je dis, alors il existe une science prolétarienne et une science bourgeoise. Parce que les conditions de production de la science serait différentes. Mais aussi parce que le socialisme a un rapport à la science différent du capitalisme. Ce qui ne veut certainement pas dire que sous le socialisme, il y aurait d'autres critères de scientificité. Là n'est pas la question, ni l'enjeu.
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Message par com_71 » 25 Fév 2012, 16:09

(redspirit @ samedi 25 février 2012 à 15:35 a écrit : si on tire les conséquences de ce que je dis, alors

[hors sujet]ça m'écorche toujours un peu.

Tirer les conclusions
Subir les conséquences

me semblent plus conformes à "la belle langue" ; même si comme moyen de production, on peut se contenter de "tirer les conséquences". :roll:

http://www.achyra.org/francais/viewtopic.php?t=3333[/hors sujet]
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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