Relativité 100ème anniversaire

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Relativité 100ème anniversaire

Message par com_71 » 04 Nov 2015, 02:34

Dans le journal du NPA

La Relativité, un siècle après sa découverte

Hebdo L'Anticapitaliste - 309 (29/10/2015)

Tribune. Cette semaine nous ouvrons nos colonnes au physicien Hubert Krivine à l’occasion d’un anniversaire qu’il ne faut pas oublier de célébrer...

« Ce que j’admire le plus dans votre art, dit Albert Einstein à Chaplin, c’est son universalité. Vous ne dites pas un mot, et pourtant le monde entier vous comprend. C’est vrai, réplique Chaplin. Mais votre gloire est plus grande encore : le monde entier vous admire, alors que personne ne vous comprend. »

La théorie de la relativité restreinte a maintenant 110 ans et celle de la relativité générale, un siècle. Aussi ce dialogue attribué à Einstein et Chaplin a un peu vieilli : aujourd’hui la théorie de la relativité (restreinte) est enseignée à tous les étudiants en science, ce qui concerne quand même dans le monde quelques millions de personnes.

À l’instar de la mécanique quantique, la relativité a été conçue en vue d’expliquer certains paradoxes théoriques ou expérimentaux auxquels la science « classique » était confrontée. Pas pour fabriquer des lasers ou des bombes. Il est remarquable de voir que la réponse à ces soucis qui n’impliquaient qu’une toute petite frange de physiciens va, en moins de cinquante ans, concerner toute l’humanité. Des milliards de gens se servent – certes à leur insu – de la théorie de la relativité générale : tous les utilisateurs de GPS sur leur téléphone portable.

La relativité restreinte enseigne quatre choses liées, faciles à exposer, mais pas nécessairement à comprendre (voir encadré). Quant à la relativité générale, elle est difficile à exposer et encore plus à comprendre. L’usage pour vulgariser est de dire qu’elle décrit un espace-temps qui est déformé par la présence des masses. Est-ce compréhensible1 ?

Énigmes et inconnues

Un chroniqueur « culturel » de télévision a osé raconter que « Le but de la relativité n’était pas uniquement la construction de la bombe atomique »2. En d’autres termes que Einstein n’était pas uniquement un assassin ! Rien de plus bête : en 1915, on était à mille lieues de l’idée d’une telle bombe, mais surtout la théorie de la relativité est simplement (avec la mécanique quantique) la base de toute la physique moderne. Son but était uniquement d’aider à comprendre le monde !

Cette compréhension n’est ni achevée ni probablement achevable. On sait, par des observations astronomiques, que l’univers est en expansion, c’est donc qu’il a émergé jadis (il y a plus de 13 milliards d’années) d’une origine de dimension microscopique : le Big Bang. On le sait en remontant à l’envers les équations de la relativité qui régissent son évolution. Mais quand on les remonte trop, on arrive à un univers tellement contracté et chaud, qu’il faut, pour le décrire correctement, disposer d’une théorie quantique de la gravitation. Ce qu’on ne sait pas faire aujourd’hui.

Restent encore deux énigmes. Les mouvements des étoiles dans les bras des galaxies ne sont explicables par les lois de la gravitation même relativistes, que si on suppose la présence d’une quantité énorme de matière non vue. Cette matière « noire », inconnue, représenterait au moins 80 % de la matière de l’univers. De plus, l’expansion de l’univers irait en s’accélérant, ce qu’on ne pourrait expliquer que par l’existence également hypothétique d’une énergie « noire » qui représenterait 90 % de l’énergie totale de l’univers. En bref, plus de 90 % de l’énergie et de la masse nous seraient totalement inconnues !

Répercussions majeures

Nous voudrions tirer deux conclusions de cette présentation de la relativité :

1 – La relativité n’est pas contradictoire avec la physique habituelle (celle de Newton, qu’on apprend à l’école). Elle la fait seulement apparaître comme un cas particulier, valable (et même tout à fait suffisante) aux vitesses, distances et masses usuelles. Même si on l’ignore, ses applications sont partout présentes. Elle a de plus permis une réflexion tout à fait nouvelle sur le temps et l’espace.

2 – Jamais Einstein n’aurait pu faire financer ses recherches avec les méthodes d’aujourd’hui, c’est-à-dire des projets à court terme, bien finalisés avec retombées prévisibles de brevets.

Répétons-le : il n’y a jamais eu de progrès majeur dans la théorie, même en mathématiques, qui n’ait eu de répercussion majeure dans la société. À nous de veiller à que ces répercussions soient bénéfiques !

1 • La vitesse de la lumière, c, est une constante absolue d’environ 300 000 km/s indépendante de la vitesse de l’observateur. C’est paradoxal, car si l’on se déplace en TGV à 300 km/h et qu’on envoie un signal lumineux vers l’avant, on s’attend à ce qu’il se déplace à la vitesse de c + 300 km/h par rapport au paysage. Il n’en est rien : la mesure de la vitesse de la lumière donne toujours la même valeur c, que la source soit immobile ou en mouvement. Rassurons-nous : les vitesses faibles (petites par rapport à celle de la lumière) s’ajoutent bien : si vous marchez à 5 km/h dans ce TGV, vous ferez, comme votre intuition vous le suggère, du 305 km/h par rapport au paysage (mais il faudrait en toute rigueur retrancher à ce résultat 5/100 de milliardième km/h !).

2 • La fameuse relation E=mc2. Elle exprime que toute masse possède un contenu énergétique, appelé énergie de masse. Ce qui veut dire par exemple que la disparition de 1 mg de matière crée une énergie colossale de 20 millions de kilocalories ! En fait toute production d’énergie correspond à une perte de matière et réciproquement : toute perte de matière correspond à un dégagement d’énergie. Mais pour des énergies « raisonnables », celles de la vie quotidienne, cette perte est dérisoire et on ne l’avait jamais mesurée : pour une kilocalorie, elle vaudrait moins d’un milliardième de milliardième de microgramme ! On pouvait donc croire que dans les réactions chimiques, « rien ne se perd, rien ne se crée ». Par contre, dans les réactions nucléaires (fission ou fusion) les pertes de masse ne sont plus dérisoires et l’énergie libérée devient colossale. La chaleur du soleil (ou des bombes atomiques) peut en témoigner.

3 • L’inertie d’un corps n’est plus identique à sa masse, elle augmente avec sa vitesse. Ce point est subtil. L’inertie d’un corps caractérise sa résistance à la mise en mouvement. Sa masse intervient dans la loi de gravitation, par laquelle les masses s’attirent. Il se trouve que, aux petites vitesses, les deux grandeurs sont identiques. Mais, lorsque la vitesse d’un mobile augmente, sa masse ne change pas mais son inertie augmente, si bien qu’il devient de plus en plus difficile de l’accélérer. Comme l’inertie devient infinie lorsque la vitesse s’approche de la vitesse de la lumière, celle-ci apparaît comme une limite indépassable. La vitesse de la lumière ne peut être atteinte que par des corps de masse nulle : les photons qui sont les « grains » de lumière qui se propagent avec elle.

4 • Nous vivons avec l’intuition que le temps est universel : il se déroule pour tout le monde de la même façon, que l’on soit au repos ou en mouvement. En fait, là encore, cela n’est vrai que lorsque les vitesses en jeu sont petites devant celle de la lumière. Il n’y a plus de temps absolu : sa mesure dépend de la vitesse de l’observateur. À la limite, un photon qui s’éloigne à la vitesse de la lumière d’une horloge fixe ne pourrait pas « voir » les aiguilles bouger, puisque c’est toujours le même signal qui lui parvient. Quant à vous, vous éloignant à vitesse plus faible, vous les verriez tourner, mais plus lentement. Bien entendu, ce ralentissement est imperceptible aux vitesses usuelles, il n’avait donc jamais été observé. Il a été maintenant largement mis en évidence par exemple dans des avions embarquant des horloges atomiques (de précision inouïe, car elles dérivent de moins d’une seconde pour 160 millions d’année) !

Lire De l'atome imaginé à l'atome découvert, contre le relativisme, Hubert Krivine, 19 euros.

notes
1. Voir par exemple l’article assez pédagogique « La Relativité générale et la Courbure de l’espace-temps » : http://www.astronomes.com/la-fin-des-eto...
2. Accréditant ainsi pour des millions de téléspectateurs, l’idée que la science est responsable du lâcher de la bombe sur Hiroshima, comme si la découverte du bacille de la peste par Yersin était responsable de la guerre bactériologique !

L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Ondes gravitationnelles & gravité de la situation économique

Message par com_71 » 12 Fév 2016, 22:24

brève lo a écrit :Prodiges scientifiques et âge de pierre de l’économie
12/02/2016

En observant pendant deux dixièmes de seconde un événement cosmique survenu à 1000 milliards d’années-lumière de la terre, des astrophysiciens ont confirmé une hypothèse majeure des théories d’Einstein, faite il y a 80 ans.

Le décalage entre cette prouesse scientifique et notre incapacité à prévoir l’état de l’économie mondiale au-delà de quelques jours est frappant. L’incertitude actuelle sur les marchés financiers et la menace quotidienne d’une nouvelle crise catastrophique font peser une dramatique incertitude sur l’avenir des milliards d’habitants de la planète. Pourquoi ? Parce que pour nourrir les hommes, les loger, les soigner, répondre à leurs besoins, même les plus élémentaires, c’est la « loi du marché » qui s’impose : les capitalistes produisent ce qu’ils veulent, comme ils veulent, en étant guidés uniquement par la recherche du profit maximum sans avoir à rendre de compte au reste de la société.

Il est vraiment temps de sortir cette économie de l’âge de pierre.
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Re: Relativité 100ème anniversaire

Message par com_71 » 12 Fév 2016, 23:53

Humanité 12/02/2016 a écrit :L’univers sort de l’onde
Laurent Mouloud

Des chercheurs sont parvenus à observer les ondes gravitationnelles théorisées par Einstein. De quoi bouleverser notre connaissance.

L’histoire de la connaissance est jalonnée de dates clés. Ce jeudi 11 février va sûrement en devenir une. Hier après-midi, plusieurs équipes internationales de chercheurs ont annoncé avoir détecté, pour la première fois de façon directe, les fameuses ondes gravitationnelles imaginées par Albert Einstein il y a près de cent ans. « Cette avancée marque la naissance d’un domaine de l’astrophysique entièrement nouveau, comparable au moment où Galilée a pointé pour la première fois son télescope vers le ciel » au XVIIe siècle, a souligné jeudi France Cordova, directrice de la Fondation nationale américaine des sciences, qui finance l’un des principaux laboratoires de recherche. Sur tous les continents, la communauté scientifique a salué cette découverte « historique » qui pourrait bien révolutionner la connaissance de l’univers.

En décrivant comment la force de gravitation structure l’univers, Einstein avait postulé l’existence de ces vibrations infimes qui se propageraient à la vitesse de la lumière en déformant imperceptiblement l’espace-temps. Mais jusqu’ici, malgré des décennies de traque, elles n’avaient jamais été observées au-delà des équations mathématiques et des déductions savantes. Mais voilà, le génial Albert, encore une fois, avait raison.

L’hypothèse des ondes gravitationnelles lui est venue en 1915. Dans le cadre de sa théorie de la relativité, le célèbre physicien décrit la gravitation comme une déformation de l’espace, envisagé désormais comme une entité unique dotée d’une élasticité et modelée par son contenu : planètes, étoiles, galaxies… Ces masses le courbent à la manière d’un objet sur un trampoline. Si la masse est petite, la déformation est faible, si elle est grande, la déformation est importante. Et si cette masse bouge et connaît une accélération, cette déformation va se déplacer et se propager à travers le cosmos, formant des ondes gravitationnelles.

Dilatation et contraction de l’espace

Et ce n’est tout pas. À l’image de vaguelettes à la surface d’un étang où l’on aurait jeté une pierre, cette onde, sur son passage, dilaterait puis contracterait l’espace. Résultat : tout objet se trouvant sur le trajet devrait donc voir sa longueur varier, l’espace s’étant détendu puis resserré. C’est justement ce mouvement que les scientifiques ont cherché à constater durant des décennies.

Au milieu des années 1960, le physicien américain Joseph Weber fabrique deux cylindres en aluminium d’un mètre de rayon et de deux mètres de longueur. Ils ont l’espoir que ces détecteurs rudimentaires rentrent en résonance et vibrent au passage d’une onde gravitationnelle. Une expérience qui n’aboutira pas. Pour cause : les variations de longueur engendrées par cette vague cosmique sont microscopiques. Selon les calculs scientifiques, la fusion de deux astres massifs dans une galaxie proche de la Voie lactée entraînerait une distorsion d’un milliardième du diamètre d’un atome (10–18 mètre)… Faute de constat visuel, des preuves indirectes de l’existence des ondes gravitationnelles ont été apportées. En 1974, Russell Hulse et Joseph Taylor parviennent notamment à le déduire en observant un pulsar – une étoile à neutrons qui émet un rayonnement électromagnétique intense – en orbite autour d’un autre astre. Une découverte qui leur vaudra le Nobel de physique en 1993. Mais toujours pas de preuve matérielle. Dans les années 1990, les États-Unis décident alors de mettre au point un instrument de mesure ultrasensible, un interféromètre. Ce détecteur gigantesque, baptisé Ligo, est constitué de deux tunnels de 4 kilomètres de long, l’un en Louisiane, l’autre dans l’État de Washington. Dans chacun circulent des faisceaux lasers en parfaite synchronisation. Si rien ne vient les perturber, ils restent en phase. Mais si une onde gravitationnelle passe et déforme la Terre, alors un des faisceaux peut s’allonger et l’autre rétrécir et troubler ainsi la synchronisation… À partir de 1994, la France et l’Italie élaborent le même type de laboratoire, baptisé Virgo et bâti près de Pise. Depuis 2007, Ligo et Virgo travaillent main dans la main, échangeant leurs données en temps réel et analysant ensemble les résultats. Cette collaboration internationale, à laquelle participent six équipes du CNRS, a visiblement porté ses fruits.

Le 14 septembre dernier, à exactement 16 h 51 GMT (18 h 51 en France), les premières ondes gravitationnelles ont été observées. Elles proviennent d’un couple de trous noirs en orbite l’un autour de l’autre et qui ont fusionné il y a 1,3 milliard d’années. Ils étaient 29 et 36 fois plus massifs que notre soleil. La source de ces ondes était probablement située dans l’hémisphère Sud du ciel mais, pour l’instant, le manque de détecteurs empêche une localisation plus précise. Qu’importe, cette découverte historique ouvre un nouvel outil d’exploration de l’univers et de son histoire. « Les ondes gravitationnelles peuvent être encore plus révolutionnaires que ne l’a été le télescope », souligne l’astrophysicien David Shoemaker, responsable du Ligo au Massachusetts Institute of Technology. L’analyse de ces signaux permettra ainsi de déduire la masse et la distance d’objets jamais vus car n’émettant pas d’ondes lumineuses, comme les trous noirs. « La gravité est la force qui contrôle l’univers et le fait de pouvoir voir ses radiations nous permet d’observer les phénomènes du cosmos les plus violents et fondamentaux, qui sont quasiment inobservables autrement », ajoute Tuck Stebbins, astrophysicien à la Nasa. Ces ondes qui voyagent sans perturbations pendant des milliards d’années pourraient ainsi nous permettre de remonter à la première milliseconde du big bang. Ce que même le grand Einstein n’avait peut-être pas imaginé.
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Re: Relativité 100ème anniversaire

Message par Zorglub » 14 Fév 2016, 00:30

Je n'ai pas lu l'article. Mais à ce que j'ai lu, ce sont deux découvertes majeures :
    la confirmation de la prédiction d'Einstein
    la première preuve directe de l'existence des trous noirs
Zorglub
 
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Re: Relativité 100ème anniversaire

Message par com_71 » 21 Fév 2016, 01:27

sur le site du NPA :
L’onde gravitationnelle, pourquoi faire ?

La lunette de Galilée

Depuis la nuit des temps, bergers, marins, astrologues, prêtres, astronomes et savants ont scruté le ciel. Ils l'ont fait avec les moyens du bord : en regardant à l’œil nu ses lumières. Puis à la Renaissance, Galilée a eu l'idée d'amplifier cette lumière à l'aide de la lunette des Hollandais. Il découvrit les montagnes de la Lune, les satellites de Jupiter, les taches solaires et surtout la confirmation du modèle de Copernic qui affirmait le mouvement de la Terre. Toutes choses interdites par l'Église. Sur le plan scientifique notre vision du monde sera bouleversée, mais pas seulement, sur le plan sociétal également.

Les ondes radio

Mais qu'était cette lumière porteuse d'information sur l'Univers ? Il faudra attendre les travaux de Maxwell dans la seconde moitié du XIXème siècle pour en avoir une idée plus précise. Il établit dans ses célèbres équations le lien entre l'électricité et le magnétisme : les charges électriques en mouvement créent une onde qu'on appellera onde électromagnétique qui se propage ; la lumière visible est un cas particulier de cette onde caractérisée par sa longueur d'onde ; de 0,4 (pour le rouge) à 0.7 microns (pour le violet). À d'autres longueurs d'onde, cette onde existe mais n'est pas visible, comme les infrarouges (IR) ou l'ultraviolet (UV). En deçà de la longueur d'onde des UV, il y a les rayons X puis gamma ; au-delà de celle des IR, les ondes radios. Tout ceci, Maxwell l'ignorait ; il avait seulement écrit une théorie qui prévoyait cette onde. Trente ans plus tard Hertz la mettait en évidence, par une première expérience de ce qu'on appellera ensuite la Transmission Sans Fil (TSF)1. Impossible encore une fois d'en minimiser les profondes implications sociales. Et encore une fois, dans le domaine scientifique, l’observation du ciel en dehors de la lumière visible (UV et IR) va ouvrir de nouveaux horizons.

Les neutrinos

Les neutrinos sont des particules élémentaires neutres postulées en 1930 par Pauli pour rendre compte de la conservation de l'énergie dans la désintégration bêta et mises expérimentalement en évidence en 1956. Ils interagissent très peu avec la matière et donc, bien que difficiles à détecter, ils peuvent véhiculer de l'information issue de zones éloignées et denses que l'observation optique ne saurait fournir.

Les ondes gravitationnelles

En 1917, Einstein achevait sa théorie de la relativité générale. Comme avec les équations de Maxwell, cette théorie contenait une « équation d'onde » se propageant dans le vide à la vitesse de la lumière (300.0000 km/s). Chez Maxwell, cette onde était créée par le déplacement de toutes charges électriques, ici c'est une onde de nature tout à fait différente, elle est créée par le mouvement de toutes masses. L'usage est de dire que cette onde « déforme l'espace-temps ». Ce qui, avouons-le, est peu clair pour les non-initiés. En pratique, le passage de cette onde modifie les distances sur les objets qu'elle traverse. Le problème est que cette modification est si dérisoire (voir plus loin) qu'Einstein avait les plus grands doutes sur sa possible mise en évidence expérimentale. Il faut des mouvements extrêmement rapides de masses extrêmement colossales.

Une bonne indication avait été fournie en 1974 par la décroissance orbitale d'un pulsar binaire (une étoile orbitant autour d'une étoile à neutrons). Ce raccourcissement de l'orbite devait signifier une perte d'énergie qu'on devait retrouver dans l'énergie gravitationnelle émise. L’observation du raccourcissement de l'orbite va être en accord avec les calculs. Mais ce n'était pas une preuve directe : après tout d'autres théories pouvait expliquer la chose. Les physiciens se souviennent avec amertume qu'on avait longtemps cru à l'éther commemilieudevant exister pour expliquer la propagation de la lumière (comme l'air pour la propagation du son). Las, toutes les tentatives pour le trouver ont échoué : l'éther n'existe pas ; ce sera d'ailleurs un des résultats de la théorie de la relativité restreinte (1905) .

On peut raisonnablement dire que les résultats de l'expérience de LIGO aux États Unis sont une preuve directe de l'existence de ces ondes gravitationnelles : on a vu, au 14 septembre 2015 à 11 h 51, deux distances situées à plusieurs milliers de kilomètres osciller une fraction de seconde exactement selon les prévisions théoriques décrivant la coalescence (la collision) de deux trous noirs2. La perte de matière due à la collision, trois fois la masse du Soleil, a fourni l'énergie de l'onde gravitationnelle. Ajoutons en passant que c'est aussi la preuve la plus directe de l'existence des trous noirs.

Un miracle technique

Pour espérer « voir » une onde gravitationnelle, il faut qu'entrent en jeu des masses énormes (au moins de dizaines de fois la masse du Soleil) animées de vitesses énormes (une fraction de celle de la lumière). Ceci ne peut être fourni que par la Nature ; mais il faut de plus être capable de mesurer des variations relatives de longueur infinitésimales de l'ordre de 10 à la puissance -20. soit un milliardième de fois l'épaisseur d'un cheveu sur la distance Paris-New York ! Il faut ensuite être capable de faire un vide valant 1 millionième de la pression atmosphérique dans 7000 mètres cubes. Sans parler de l'appareillage qui doit être insensible aux vibrations occasionnées par les vagues d'un océan même lointain ou d'une baignoire qui se vide dans les environs.

Et grâce à tout cela on sait maintenant que l'univers a connu un événement cataclysmique quelque part au-delà de la galaxie naine du Grand Nuage de Magellan, il y a quelques 1,3 milliards d'années.

Et alors ?

La même question s'est posée pour la découverte du boson de Higgs. Nous avions répondu qu'il n'y avait jamais de progrès décisif dans la connaissance qui ne soit suivi tôt ou tard – et de façon non prédictible – d'implications pratiques. Il s'agit ici d'une confirmation forte de la théorie de la relativité générale au moment où les mystères de la matière et de l'énergie noires en justifiaient une relecture critique. C'est enfin la naissance d'une nouvelle sonde des profondeurs de l'univers dont la moisson ne saurait tarder.

Hubert Krivine

Paris le 14 février 2016


https://www.npa2009.org/idees/culture/l ... quoi-faire
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