Juste histoire d'en rajouter une petite couche sur cette histoire de "temps zéro", de limites et de fictons mathématiques.
Le "temps zéro", c'est une idée qui choque tout matéraliste - si par cette expression, on sous-entend un moment qui a réellement existé, autrement dit un début de l'univers.
Faisons un petit détour et parlons non plus du temps, mais de la température : on sait qu'il existe un "zéro absolu". Dans notre échelle (centigrade), ce zéro absolu vaut -273°, mais dans une autre échelle, ce zéro vaut... zéro.
Sans doute parce que la température est un sujet moins sensible que le temps, aucun matérialiste raisonnable ne s'insurge à la notion de zéro absolu, en la qualifiant d'idéaliste ! Pourtant, quand on y réfléchit un peu, les deux questions portent des implications philosophiques assez semblables.
Ce zéro absolu est une température limite qu'aucune matière ne peut atteindre. On peut s'en rapprocher infiniment, mais jamais y être. On serait donc en droit de traiter -273° de "fiction mathématique", de spéculation sortie du cerveau sans jamais avoir été expérimentée - et pour cause ! - etc. Mais faire un tel procès d'idéalisme aux scientifiques qui parlent du zéro absolu et calculent sa valeur, ce serait une bien mauvaise accusation. Parce qu'une limite qu'on ne peut atteindre, c'est tout aussi "réel" qu'un état de la matière quel'on peut constater et reproduire... à condition bien sûr de ne pas aller raconter que la limite en question peut être atteinte, voire dépassée.
Eh bien, le "temps zéro" du Big Bang occupe pour le temps un statut similaire à celui du zéro absolu pour les températures. C'est un état limite, dont on peut se rapprocher indéfiniment sans jamais l'atteindre, et qui est un repère bien pratique dans les équations.
Alors, certes, bien des cosmologistes se servent de ce repère du temps zéro, de cette "fiction" (si l'on tient à ce mot), pour véhiculer des conceptions idéalistes, en particulier celle d'un début de l'Univers. Mais il est essentiel de comprendre que l'existence d'un "temps zéro" de la théorie du Big Bang n'implique pas davantage l'idée de création que le zéro absolu des thermomètres n'implique celle de la disparition de l'Univers pour cause de grands froids.
L'idée selon laquelle ce temps zéro a réellement existé est une extrapolation que font certains scientifiques ou commentateurs - le plus souvent, de manière sous-entendue, c'est-à-dire en fraude.
Conclusion : combattre les conceptions idéalistes est une chose, combattre la théorie du Big Bang elle-même en est une autre, et on a intérêt, je crois, à ne pas mélanger les deux.
PS : je ne suis pas un scientifique, juste un amateur plus ou moins éclairé. Des intervenants plus compétents pourront donc nuancer, voire démentir mes propos...