Karl Popper le marxisme et la psychanalyse

Et lutte contre les pseudo-sciences et les obscurantismes

Message par shadoko » 17 Juin 2004, 22:45

Salut, je ramène ma fraise, pas pour défendre Popper ;-), mais pour dire ce que je pense de manière générale du sujet qui est discuté ici.

Je pense qu'il y a une sorte de "mauvaise manière de poser le problème" que je crois déceler chez Popper, ou plutôt dans ce qui est rapporté dans ce fil de ce que dit Popper (que je n'ai pas lu directement, que ce soit tout de suite clair).

Je vois la méthode scientifique comme ceci:

1. On fait des expériences ou on constate des faits (pour ne pas exclure les sciences sociales...).

2. On élabore des constructions intellectuelles (que j'appellerai modèles ou théories) qui ne sont pas en contradiction avec ces faits.

3. On déduit de ces théories des prévisions.

4. Tant qu'on est pas tombé sur des prévisions qui ne se sont pas réalisées, on continue à faire des prévisions et à développer la théorie (et à s'en servir d'un point de vue pratique pour envoyer des fusées dans l'espace ou pour mener des révolutions, ou pour comprendre comment le gouvernement réagit (sous la pression du patronat et en déduire une riposte...)

4bis. Si on est tombé sur des prévisions dont le contraire s'est réalisé, on retourne à l'étape 2 (ex (à la mode sur ce fil) l'orbite de Mercure, ou alors la faillite de la social-démocratie pendant la première guerre mondiale, ou alors la décision de construire une quatrième internationale et d'abandonner la troisième).

La question de savoir si une théorie est "vraie" ou "fausse" me paraît être un problème mal posé. Il n'y a pas de théorie 100% vraie (en ce sens qu'elle correspond exactement à la réalité). Il y a des théories qui sont proche (voire très proches) de la réalité, mais quand on y regarde un peu mieux (et on ne fait souvent ça, d'un point de vue social, que quand on en a besoin), on est contraint d'en développer une autre qui réponde mieux à ce qu'on regarde. En ce sens, une théorie a un "domaine de validité", ou elle fonctionne, et quand on veut élargir ce domaine, il en faut une autre. Par exemple: la mécanique Newtonnienne est largement suffisante pour faire rouler des voitures. Elle ne l'est plus quand on veut envoyer des sondes sur Mars. Quand à la mécanique relativiste qui la remplace, elle n'est pas suffisante pour expliquer les fonctionnements microscopiques. Autre ex: le marxisme n'est pas une science des comportements individuels, mais des comportements de masse, à l'échelle de la société. On ne va pas s'en servir pour prédire qu'un bourgeois se comportera comme ci ou comme ça dans une situation, mais on va s'en servir pour prédire que la bourgeoisie se comportera comme ci ou comme ça.

Quand à l'induction, je la vois comme nécessaire pour élaborer l'étape 2. Ca ne veut pas dire qu'elle "valide" la théorie. Ce rôle est plutôt réservé à l'étape 3 et 4 (et encore, temporairement, et dans un certain domaine). Mais dans la manière dont je présente les choses, et également, je pense dans la pratique scientifique, c'est plutôt à ça qu'elle sert, et non pas à essayer obsessionnellement de dire qu'une théorie est "vraie".

En ce sens, je pense que l'analyse (qui est décrite plus haut comme celle) de Popper est assez décalée par rapport à la pratique scientifique. Pour moi, le "test" pour savoir si une théorie est scientifique, c'est qu'elle produit des résultats pratiques tangibles (envoyer des fusées sur la lune, etc...). Ce n'est pas le cas de l'astrologie ou de l'homéopathie, et pour la psychanalyse, je n'en sais rien.

Pour ce qui est du sort de la qualité de scientifique de la théorie marxiste, attaquée par Popper, suis d'accord avec Canardo:

a écrit :depuis un siecle et demi que des révolutionnaires utilisent le marxisme, non seulement pour expliquer le passé, mais pour prévoir le déroulement des processus historiques en court, il a toujours fourni une grille d'analyse satisfaisante et n'a jamais pu à l'épreuve des faits etre sérieusement réfuté.


Enfin, il existe une cinquième étape qui se substitue parfois à l'étape 4bis pour renvoyer la communauté scientifique à l'étape 2.

5. On trouve une théorie qui explique de manière plus simple ce qu'explique la théorie précédente.

Comme exemple de cette étape 5, ou pourrait donner le passage de la vision géocentriste du monde à la vision héliocentriste. Les trajectoires des planêtes sont beaucoup plus faciles à calculer et à présenter comme ça. Mais d'un point de vue d'autruche (qui a caractérisé l'église jusqu'à ce que ce ne soit plus tenable, par exemple), on peut toujours soutenir que tout tourne autour de la terre, en ayant des trajectoires complètement invraissemblables.

Voilà, voilà...
:smile:
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Message par Jacquemart » 28 Mars 2005, 11:09

Hem... Vous allez me dire si je me trompe. Il me semble que plusieurs intervenants, dont Wapi, défendent la position suivante :

1. Exiger qu'une théorie soit "vérifiable" pour qu'on puisse la qualifier de scientifique, c'est appliquer le critère de Popper.
2. Or Popper s'est servi de ce même critère pour nier le caractère scientifique du marxisme.
3. Donc, ce critère doit être rejeté.

Bon, admettons. Mais alors, qu'est-ce que distingue une théorie scientifique d'une quelconque charlatanerie ? Quel est alors le critère qui permet de retenir la psychanalyse - ou le marxisme, d'ailleurs - et de rejeter l'homéopathie, l'astrologie ou la parapsychologie ?
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Message par Jacquemart » 28 Mars 2005, 11:37

a écrit :Quel est donc le critère de vérité? (c'est à cela que se résume les questions de Jack) C'est un problème résolu depuis longtemps. La pratique , bien sur.

Donc, la psychanalyse a prouvé sa validité par la pratique ? Y a-t-il des études à ce sujet ?
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Message par Wapi » 28 Mars 2005, 12:24

J'avais fait une remarque un peu latérale sur Popper, je regrette que ce soit devenu central sur ce fil.

J'attendais en fait shadoko pour qu'il nous explique cette histoire du théorème de gödel qui a donné lieu à plusieurs intérprétations contradictoires.

Je me demandais aussi, suite à la conférence, ce que la psychologie évolutionniste disait du père alors même qu'elle a mis en évidence une fonction maternelle dans le développement neurophysiogique de l'enfant avant et après la naissance... "La voix de la mère"...

Et sur l'importance physiologique absolue du "bain de langage"... antécédent au développement normal de tout individu ...

Pour Popper et les sujets approchants, Caupo a donné une explication parfaitement satisfaisante sur ce point :

a écrit :
a écrit :Quel est donc le critère de vérité? (c'est à cela que se résume les questions de Jack) C'est un problème résolu depuis longtemps. La pratique , bien sur.

Donc, la psychanalyse a prouvé sa validité par la pratique ? Y a-t-il des études à ce sujet ?



C'est là que le bât blesse un peu.... dans la succession non anodine des deux questions. La seconde ne se déduit pas automatiquement de la première, puisqu'il faut à présent prendre en compte ce que tu appelles "une étude" ...

C'est que la condition de production de l'étude (nécessaire) est bien complexe... ceci a été discuté sur le fil concernant le rapport de l'INSERM... Il est vraisemblable qu'ils se réattelleront à la tâche d'ici quelque temps...

A ce compte-là, où sont les études objectives, indépendantes, qui prouvent la validité du marxisme ?

Il y a les idées, qu'on peut ou non accepter mais qu'il est possible de discuter, et après, on franchit ou non le pas de s'en servir dans une pratique thérapeutique à différents niveaux, avec l'appréciation la plus rigoureuse possible de ce qu'on est en train de faire, par différents moyens : l'observation attentive d'un processus de soin, la discussion, l'information...

En attendant de lire, vous pouvez voir ou écouter ceux qui sont impliqués dans ce travail comme quidam et j1v3. Même aller voir dans les services comment ça se passe...
Wapi
 
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Message par Wapi » 28 Mars 2005, 13:49

Canardos écrivait le 1er avril 2004 (!), bien avant de connaître certains intervenants du forum...

a écrit :il en va tout autrement de la psychanalyse parce que d'abord elle a été partiellement réfutée pour toute une série de maladies mentales par les progres de la neurologie... et parce qu'elle refuse par définition toute évaluation de son action et toute confrontation avec les nouvelles connaissances du fonctionnement cérebral.

donc, par l'application de la méthode inductive on peut nier le caractere de science de la psychanalyse meme si il y des raisons de penser que certaines de ces hypotheses offrent des pistes scientifiques tres intéressantes et mériteraient d'etre verifiées et meme si en appliquant la méthode popperienne sa réfutation partielle par les neuro-sciences lui donnerait ce statut.


j'espère que le premier paragraphe n'est plus d'actualité... pour lui...

quand au second... je ne comprends pas tout mais je retiens que "certaines de ses hypothèses offrent des pistes scientifiques très intéressantes"...

que s'est-il donc passé entre temps ... msytère ... alors qu'on approche du premier anniversaire de cette discussion qui a choisi un bien beau jour pour naître... ?
Wapi
 
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Message par Wapi » 28 Mars 2005, 14:24

[quote=" "]
ma deuxieme idée c'était quand meme pour rappeler que meme si la démarche psycchanalytique est tout sauf scientifique dans sa méthode elle était tout de meme fondée sur une série d'intuition sur l'inconscient, sur le refoulement, etc qui auraient pu constituer avec un peu plus de rigueur une bonne base de départ pour l'élaboration d'une théorie unifiée du psychisme humain[/quote]


=D> =D> =D>


tu sais, on n'en demandait pas plus... moi aussi j'en suis à peu près là...

Il y a une base de départ et puis une histoire et ses développements... Vouloir se couper de toute une partie de l'histoire de la psychologie est aussi une faute de méthode que pratiquent trop de tenants de la psychologie "strictement scientifique".

Pourquoi se priver de telles avancées : je te parie un paquet de cacahouètes que dans quelques temps ils vont nous faire une découverte sur la "capacité" du cerveau à produire des métaphores... évidemment. Comment pourraient-ils ne pas le trouver ? Il reste ensuite à associer un contenu à la forme, le plus délicat...

Enfin sur ce sujet... Popper m'ennuie profondément, je l'ai lu un peu autrefois, mais je crois qu'on en n'a vraiment pas besoin pour comprendre ce que c'est que la science, ni pour distinguer ce qui est scientifique de ce qui ne l'est pas ?
Wapi
 
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