La Côte-d'Ivoire n'est peut-être pas si loin que cel

Réunions publiques, fêtes et autre...

Message par Bertrand » 03 Jan 2011, 17:57

Edito LO du 3 janvier 2011

a écrit :LA CÔTE-D'IVOIRE N'EST PEUT-ETRE PAS SI LOIN QUE CELA


Les États impérialistes ont beau brandir des menaces, des délégations de chefs d'État africains ont beau se succéder à Abidjan, la crise politique en Côte-d'Ivoire se prolonge et s'aggrave.

A l'issue de l'élection présidentielle qui vient d'avoir lieu, les candidats restés en lice au deuxième tour, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara, se sont, tous les deux, proclamés vainqueurs. L'un, Ouattara, a été reconnu comme président de la République par le Conseil électoral, l'autre, Gbagbo, l'a été par le Conseil constitutionnel. Gbagbo bénéficie du soutien du gros de l'appareil d'État ivoirien, notamment de l'armée. Ouattara a été reconnu par ce qui s'intitule la "communauté internationale", c'est-à-dire par des chefs d'État et par l'ONU.

Qui des deux est plus légitime ? Bien naïf ou prétentieux celui qui s'aventurerait à trancher, surtout de loin, alors que chacun des deux camps brandit les tricheries, les bourrages d'urnes, de l'autre camp.

Ce qui n'empêche pas Sarkozy de trancher et, de concert avec tous les chefs d'État, de proclamer dans une belle unanimité : l'élu, c'est Ouattara.

Pourquoi donc cette unanimité, en particulier des grandes puissances ? Parce que Ouattara a eu plus de voix ? Mais qu'en savent-ils, eux qui sont passés maîtres en fabrication d'élections ouvertement truquées, de l'Afghanistan à l'Irak ?

Par souci démocratique ? Mais longue est la liste des chefs d'État africains, aujourd'hui morts ou encore au pouvoir, de feu Houphouët-Boigny en Côte-d'Ivoire à Bongo père puis fils au Gabon, présidents grâce au pétrolier Total, en passant par l'inamovible Biya au Cameroun, dont tout le monde sait qu'ils étaient ou sont des dictateurs. Ils étaient ou sont pourtant fréquentables et reçus à l'Élysée en grande pompe car défendant les intérêts des groupes capitalistes français.

Ouattara, ex-Premier ministre de Côte-d'Ivoire, a cet avantage sur son rival que, en tant qu'ex-directeur général adjoint du FMI, il a pu être jugé et jaugé par les cercles dirigeants du monde impérialiste et reconnu plus fiable, plus malléable, plus contrôlable, que Gbagbo.

Oh, cela ne signifie pas que Gbagbo menace en quoi que ce soit les intérêts des groupes capitalistes français ! Il est au pouvoir depuis bientôt dix ans et les groupes français présents dans le pays, de Bolloré à Bouygues, n'ont jamais eu à se plaindre de lui.

Et si Gbagbo avait en France des amis à la direction du PS et bénéficie encore du soutien publicitaire des deux ténors du barreau réputés de gauche Dumas et Vergès, cela n'en fait pas encore un ami des classes pauvres de Côte-d'Ivoire ! Mais il suffit qu'il paraisse moins prévisible, moins fiable, pour que le monde impérialiste accorde sa préférence à Ouattara.

La lutte pour le pouvoir a déjà fait plus de 200 morts et plusieurs centaines de blessés. La population vit dans la crainte permanente d'attaques venant des milices armées d'un clan ou de l'autre. L'insécurité rend difficile, voire impossible, de se rendre à son travail et de toucher son salaire. En même temps, les prix des produits alimentaires ont doublé en un mois, menaçant de pousser nombre de familles d'ouvriers vers la famine.

Mais le plus grave est que les deux camps cherchent à mobiliser leur base électorale au nom de leur appartenance ethnique. S'ils arrivaient à ce que les machettes sortent dans les deux camps, ce serait une catastrophe. Du Liberia voisin au Rwanda, les pays d'Afrique qui ont connu de tels affrontements en portent encore les stigmates physiques et moraux.

Même dans l'émigration ivoirienne, la déchirure est visible entre ceux qui mettent leur confiance en Gbagbo et ceux qui la mettent en Ouattara. Nous, travailleurs ici, en France, nous n'avons pas à nous en étonner. Combien de fois dans le passé avons-nous mis nos espoirs dans un dirigeant, de Mitterrand à Jospin, pour finir trompés et déçus ?

Dans un pays pauvre comme la Côte-d'Ivoire où la vie est plus dure, comme le sont les pratiques politiques, les illusions se paient comptant. Mais pas plus là-bas qu'ici, "il n'y a de sauveur suprême". Là-bas comme ici, mettre notre espoir dans un des camps de la bourgeoisie, s'enrôler derrière un dirigeant par crainte de l'autre, paraît plus facile. Mais cela conduit inévitablement, au mieux, à la déception, au pire, au sang versé dans une guerre qui n'est pas la nôtre. Construire notre propre force, celle des travailleurs conscients de leurs intérêts de classe, peut paraître plus difficile. Mais, pour les exploités, c'est la seule voie qui représente l'avenir.

Arlette Laguiller

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Bertrand
 
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Message par com_71 » 25 Jan 2011, 02:55

(PAROLE DE TRAVAILLEURS (ZONE INDUSTRIELLE YOPOUGON à Abidjan 03 01 2011) a écrit :
L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes (Karl Marx)

TRAVAILLEURS, OÙ ALLONS-NOUS ?

À l’issue du deuxième tour des élections présidentielles, deux candidats revendiquent la victoire. La guerre est engagée entre les deux clans, celui du LMP et celui du RHDP, pour imposer sa victoire.
Les fusils sont sortis. Le nombre de morts s’élève déjà à plus de 170, selon des chiffres officiels. Les blessés se comptent par centaines. S’y ajoutent de nombreuses arrestations et des exactions arbitraires. Dans de nombreux quartiers pauvres, les machettes ont été aiguisées et sont gardées à portée de main. Des bandes de racketteurs sévissent. Les habitants vivent dans la crainte permanente d’éventuelles attaques venant d’un clan ou de l’autre.
Les travailleurs qui arrivent tant bien que mal à se rendre au travail dans cette situation d’insécurité et d’absence de transport en commun, même ceux-là arrivent difficilement à se nourrir. De nombreuses familles ouvrières vivent à la limite de la famine, tellement les prix ont augmenté.
Dans les usines, avant que n’éclate la crise actuelle, entre les sympathisants du LMP et les sympathisants du RHDP, c’était des plaisanteries. Mais aujourd’hui, les gens se méfient les uns des autres. Ça discute par affinité politique. On cherche à éviter la confrontation verbale, mais elle est inévitable si la discussion se limite à prendre parti pour l’un ou l’autre des deux hommes qui se proclament présidents tous les deux. Quand ça arrive, le ton monte. Mais jusque-là, on arrive le plus souvent à calmer les collègues, souvent en entamant des discussions sur nos conditions de travail qui sont communes, au-delà de nos appartenances ethniques ou politiques.
Pour l’instant, la division entre les travailleurs n’a pas encore atteint le seuil de l’irréparable. Les travailleurs de tous bords travaillent côte à côte dans les ateliers, les chantiers ou les bureaux, vivent côte à côte dans les mêmes quartiers.
Mais cette lutte pour le pouvoir entre RHDP et LMP risque d’entraîner les travailleurs à une confrontation plus ouverte et sanglante.

Travailleurs !

La guerre que se mènent deux leaders et leurs clans politiques respectifs n’est pas la nôtre ! Celui qui l’emportera y gagnera le droit d’occuper le palais présidentiel. Le clan du vainqueur y gagnera des postes et des positions : ministres, présidents d’institutions, hauts fonctionnaires, chefs des « corps habillés », directeurs d’entreprises d’État. Ils y gagneront le droit de vivre et de s’enrichir sur notre dos, de se servir dans les caisses de l’État, d’empocher l’argent de la corruption.
Mais nous, les travailleurs, qu’est-ce que nous pourrions gagner dans cette guerre civile fratricide, quelle qu’en soit l’issue ? Qui que ce soit qui l’emporte, nous n’aurons droit à rien, mais nous aurons à pleurer nos morts, nos blessés, nous désoler sur nos maisons transformées en ruines. Nous n’avons pas à verser ni notre sang ni nos larmes pour rien, simplement pour assurer le droit d’un des deux présidents concurrents à nous opprimer pendant les années qui viennent !
Un travailleur peut préférer tel président plutôt que tel autre. Mais chacun d’entre nous, en réfléchissant, se rendra compte qu’aucun des deux ne représente nos intérêts de travailleurs. Aucun ne prendra le parti des pauvres contre les riches, des ouvriers contre les patrons.
L’appel aux sentiments d’appartenance ethnique ne leur sert qu’à nous embrigader chacun dans son camp.
Si les dirigeants de tous ces partis politiques, pour arriver à leurs fins, réussissent à se servir des travailleurs comme des petits pions pour qu’ils s’entretuent entre eux, ce sont alors tous les pauvres qui payeront le prix du sang.
Nous les travailleurs, notre camp, c’est le camp des travailleurs. Nous sommes bété, burkinabé, baoulé, senoufo, agni, dioula, gouro, ébrié, dida, yakouba, etc. C’est nous qui faisons tourner l’économie de ce pays. Nous sommes ouvriers d’usines, manœuvres dans le bâtiment, petits employés de bureaux, journaliers, djobeurs, balayeurs, chauffeurs, femmes de salle, dockers, etc. Nous avons en commun de vivre de notre travail. Nous sommes la classe des pauvres. Nous avons tous besoin d’un salaire régulier qui nous permette de mener une vie honnête. Nous avons besoin d’augmentation de salaire. Nous avons besoin de nous loger. Nous avons besoin d’avoir accès aux hôpitaux. Nous avons besoin de scolariser nos enfants.
C’est cette communauté d’intérêts qui nous unit au-delà de nos sentiments pro-Gbagbo ou pro-Ouattara ; au-delà de notre appartenance ethnique, clanique, religieuse, tribale ou nationale.
Pour améliorer nos conditions de vie et de travail, ne serait-ce que pour rattraper le niveau de salaire qui était le nôtre il y a vingt ans, il nous faudra nécessairement unir nos forces pour affronter le patronat qui nous exploite. Aucun gouvernement n’est jamais venu à notre aide. Aucun ne le fera dans l’avenir. Si nous sortons divisés de cette crise, comment pourrons-nous alors faire face au patronat pour lui imposer des augmentations de salaire indispensables, pour ne pas crever de misère ?
Alors, camarades travailleurs, sachons éviter le piège qui est devant nous. Si nous nous divisons aujourd’hui entre deux camps politiques qui ne nous représentent pas, non seulement nous payerons le prix du sang, mais le chemin de l’unité sera plus difficile à trouver demain. Or, il nous faudra nécessairement nous retrouver tous ensemble pour affronter le patronat et le gouvernement, pour la défense de nos intérêts en tant que travailleurs.
Pas de guerre entre travailleurs ! Nos ennemis sont ceux qui nous exploitent, nous rackettent et nous oppriment !
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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