art prolétarien ?

Message par kasimir » 05 Mai 2008, 21:25

si je peux me permettre je voudrais émettre un avis sur cette longue citation extrêmement longue qui se veut manifestement théorique mais qui n'en n'est pas moins fausse du point de vue de l'histoire de l'art.

Je n'ai pas trop le temps de répondre sur toutes les erreurs de compréhensions des lois internes du développement de la création artistique essaimées dans ce texte soporifique, mais commençons par la première idée.
"Le réalisme n’est pas historiquement propre au prolétariat; la bourgeoisie a été obligée de l’assumer dans sa lutte contre l’aristocratie."

Le réalisme n'est propre ni au prolétariat ni à la bourgeoisie. N'en déplaise à l'auteur de ces lignes mais le réalisme n'est propre à aucune classe sociale. Le réalisme est propre à la créativité artistique. C'est le fondement même de l'art.
Le réalisme est une notion esthétique qui a été inventée dans une période assez précise de l'histoire de l'art. Elle s'opposait précisément à la notion Romantique de certains artistes du début du 19ème siècle enivrés par leur idéalisation de l'Ancien Régime face à leur incompréhension de la nouvelle société (capitaliste) qui les frappait avec violence. Ces derniers étaient révoltés par une société qu'ils voyaient se transformer avec une vitesse jusque là inimaginable et ils voyaient aussi un nouveau type de misère sociale se développer sans issue. Leur retour religieux ou mystique, dressant des images idylliques d'un passé moins sombre fut la base de ce qu'on appela le romantisme. Mais leur mépris pour cette classe de Banquiers, Négociants, Industriels incultes et vulgaires qui se trouvaient désormais aux commandes du Pouvoir a aussi permis de développer un nouveau style d'expression qui a permis de transformer des codes de représentations, des codes linguistiques, plastiques qui ont aussi dynamiser l'histoire de l'Art.
Les Réalistes au travers de leur "chef de file" Gustave Courbet se sont mis à défendre une autre notion de l'objet de l'Art. L'art devait avoir pour sujet la société, le peuple, l'évènement social, journalistique etc. Mais tout comme les Romantiques leur motivation était nourrie par ce mépris de la société capitaliste et de la vulgarité et le philistinisme propre aux Bourgeois qui étaient devenus les nouveaux dirigeants.
Mais le point commun entre ces deux courants esthétiques comme d'ailleurs entre tous les autres courants esthétiques c'est la RÉALITÉ. La question posée par chaque artiste retenu par l'histoire de l'art fut toujours comment représenter la réalité, ou sa propre notion de la réalité.
Bref en d'autre thermes la base fondamentale de la créativité est la Réalité. De toutes les tendances qui ont constituées et continuent à constituer les diverses branches esthétiques de l'histoire de l'art, la force motrice élémentaire et commune à toutes ces tendances, c'est la Réalité.

D'autre part comme le fait remarquer Leon Trotsky dans Litterature et révolution la seule classe sociale qui ne développera jamais aucune culture faute de temps c'est la Classe Ouvrière.
En effet, du point de vue de la révolution, le prolétariat en prenant le pouvoir et en exerçant sa dictature révolutionnaire commence en même temps à dépérir en tant que classe sociale, entraînant avec elle l'extinction de la bourgeoisie. Contrairement à la Bourgeoisie qui a eu le temps depuis "l'époque Communale", et tout le long de l'Ancien Régime, en se développant économiquement et politiquement et dans une certaine mesure indépendamment de la féodalité , de se constituer une culture propre; la classe ouvrière quant à elle ne peut par sa position d'aliénée développer de culture propre dans le cadre du capitalisme.
Par conséquent la culture qui naitra au travers de la dictature du prolétariat ne sera pas prolétarienne. Ce sera la base d'une culture socialiste et non prolétarienne. Et l'art qui en sera une de ses expressions sera aussi socialiste.

Est-ce que socialisme et réalisme ont en soi une essence identique ? Rien n'est moins sûr. Que la Réalité sous le socialisme soit toujours la base de la créativité cela me paraît censé et vrai. Mais dire que l'art socialiste sera réaliste revient à ériger en dogme absurde la loi interne de l'histoire de l'art.
L'art abstrait tout autant que le Baroque sont une illustration de la Réalité digérée et exprimée par l'artiste. Pour moi l'art socialiste permettra à quiconque de créer librement en ne se souciant plus des dogmes académiques anciens et nouveaux.
kasimir
 
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Message par com_71 » 05 Mai 2008, 22:04

(El convidado de piedra @ mardi 22 avril 2008 à 20:12 a écrit :
C'est encore de la rédaction, mais n'as tu pas vu les guillemets ?

Normalement cela indique que la personne citée parle, non ?

Normalement oui. Mais s'il s'agit d'une source stalinienne nous savons tous (y compris toi) que celles-ci se sont placées dans le cadre d'une normalité assez spéciale où les citations sont tronquées, retournées, inventées, noyées dans des notes fantaisistes, etc.

S'appuyer là-dessus c'est comme vouloir asseoir un raisonnement scientifique sur une bulle papale...

C'est quand-même la moindre des choses que de donner tes sources quand on te les demande dans une discussion.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par Vérié » 26 Mai 2008, 10:15

Kasimir, je suis sincèrement bluffé !

A part un point dont je ne discuterai pas ici car il est HS =D> =D> =D>
Vérié
 
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Message par kasimir » 26 Mai 2008, 11:07

CONVIDADO fait preuve d’une malhonnêteté intellectuelle dérangeante. Sa conception unilatérale et de mauvaise foi de l’histoire de l’art est désespérément médiocre et offensante quant à la rigueur du raisonnement. Il n’hésite pas à mentir et à faire dire aux autres ce qu’ils n’ont pas dit.

Schopenhauer disait : « (…)si nous étions fondamentalement honnêtes, nous ne chercherions rien d'autre, en tout débat, qu'à faire sortir la vérité de son puits, en nous souciant peu de savoir si une telle vérité apparaît finalement conforme à la première opinion que nous ayons soutenue ou à celle de l'autre; ce qui serait indifférent, ou du moins d'importance tout à fait secondaire. La vanité innée, particulièrement susceptible en tout ce qui concerne les facultés intellectuelles, ne veut pas admettre que notre affirmation originelle se révèle fausse, ni que celle de l'adversaire apparaisse juste. Par conséquent, chacun, sans doute, ne devrait ne rien chercher d'autre que de formuler des jugements justes : pour en arriver là, il devrait commencer par réfléchir, et ensuite ouvrir la bouche. »
Malgré le fait qu’aucune vanité ne soit innée, le reste de la citation me paraît tout à fait applicable à la réponse que fait CONVIVADO.

Reprenons ce que CONVIVADO dit au début de son premier texte : « Le réalisme n’est pas historiquement propre au prolétariat; la bourgeoisie a été obligée de l’assumer dans sa lutte contre l’aristocratie.L’éloignement du réalisme par la bourgeoisie ne s’effectuera que progressivement; il est parallèle au passage du capitalisme concurrentiel au capitalisme monopoliste, du libéralisme « civilisé « à l’impérialisme barbare.Il est marqué par le passage du moment où le peintre Courbet est valorisé à celui où il est critiqué pour ne pas apporter de touche subjective au tableau, pour n’être qu’un « ouvrier »-copiste de la nature.Le réalisme est insupportable pour la bourgeoisie à partir du moment où celle-ci ne peut plus accepter le monde tel qu’il est, avec un prolétariat existant et exigeant de prendre le rôle de guide de la société humaine. »

Si une classe sociale peut se considérer effectivement comme à l’origine du développement de courants réalistes c’est bien la Bourgeoisie, mais seulement si nous considérons l’histoire de l’art débutant à la Renaissance ! Et ce n’est même pas la vision de Convivado puisqu’il fait commencer le développement de la culture bourgeoise à l’époque de l’impressionnisme « La première étape du développement de la culture bourgeoise va être l’impressionnisme » dit-il. Or, malheureusement (pour lui) le réalisme des peintures pariétales de la préhistoire vient contredire cette affirmation. La Venus de Milo ou les portraits des Césars sculptés dans les marbres antiques ont traversé les temps pour sourire à notre grand historien Convivado qui ne se demande pas si ces pièces semblent plus réalistes ou moins que celles du Caravage, de Vélasquez ou de Courbet ?
Mais allons plus loin. Selon Convivado la bourgeoisie se serait éloignée du Réalisme à partir de Courbet pour aller vers une peinture plus symboliste, plus abstraite, plus subjective etc… Et l’ouvrier quant à lui serait resté fidèle au Réalisme. Et tout cela parce que la Bourgeoisie « n’accepterait plus le monde tel qu’il est » à cause de l’existence du prolétariat qui remet en cause son pouvoir. Elle aurait subitement un besoin de s’évader dans les nuages du symbolisme. Est-ce que cela reviendrait-t-il à dire que l’Ouvrier quant à lui accepterait de voir le monde tel qu’il est ? Si nous comprenons bien, Convivado cherche à déterminer une psychologie sociale générale de chaque classe sociale. Et que nous apprend-t-il sur ces psychologies ? La bourgeoisie s’enfuirait dans un monde irréaliste individualiste, intimiste « écologiste » et le prolétariat exigerait de voir un monde tel qu’il est.
Et cela serait donc une analyse conséquente et sérieuse d’un marxiste ? Rappelons à Convivado que la classe Bourgeoise connaît parfaitement son monde et reste extrêmement vigilante quant aux sursauts du mouvement ouvrier. Citons pour exemple le nombre de chefs et de petits cadres que celle-ci se paye dans les usines et les entreprises pour surveiller et effrayer les travailleurs. Citons pour exemple le nombre d’intellectuel à son service qui réfléchit et analyse les moindres variations économiques et sociales pour lui dresser un tableau le plus exact possible de notre monde. Et d’autre part si montrer la classe ouvrière au travail dans des tableaux c’est cela montrer la réalité alors la réalité serait extrêmement pauvre et sa vision faussée. Convivado manifestement confond psychologie de classe et devoir politique du parti ouvrier. Il a l’air de confondre beaucoup de choses autant en politique qu’en esthétique d’ailleurs. La classe ouvrière n’exige pas sauf dans des périodes révolutionnaires ni de prendre conscience de sa situation de classe aliénée ni de son rôle historique dans la transformation socialiste du monde. Par contre c’est le rôle du parti révolutionnaire de donner une conscience politique au prolétariat par la propagande et l’agitation avant pendant et après la révolution Mais Convivado ne semble ne pas comprendre les choses de cette manière.
Tout ce que Convivado veut nous faire admettre par ses manigances cérébrales c’est que chaque classe a sa propre psychologie et qu’elle trouve son reflet artistique dans deux courants qui s’opposent. Le Réalisme serait la forme artistique propre au prolétariat et la peinture symboliste abstraite serait celle propre à la bourgeoisie. Et cela serait donc une critique marxiste conséquente de l’histoire de l’art en tant que reflet de la lutte des classes ! Mis à part le fait que ce fatras d’ânerie n’a rien à voir avec le marxisme nous pouvons féliciter Convivado pour son talent en schématisme.
Mais il y a plus grave avec ce mode de pensée. Si nous comprenons bien la doctrine de Convivado un marxiste ou un ouvrier face à une œuvre dite réaliste devrait s’extasier mais par contre s’il se trouve face à un carré noir sur fond blanc alors là le même marxiste ou le même ouvrier devrait la rejeter ? Et tout cela sous prétexte que la première œuvre est réaliste donc bonne pour le prolétariat et la deuxième est abstraite et donc bonne pour la bourgeoisie. La conclusion de cette doctrine revient à proposer au prolétariat dans sa lutte de classe contre la bourgeoisie à nier tout art non réaliste. Par conséquent est-ce que Convivado demanderait aux travailleurs de brûler l’ensemble des œuvres qui se trouvent à Beaubourg sous prétexte de lutte de classes ? Camarades, espérons que Convivado ne milite jamais ailleurs que sur Internet et qu’il ne rencontre aucun travailleur durant son existence.

Peut-être faudrait-il demander à Convivado plus clairement ce qu’il entend par Réalisme ? Car si un Réaliste -pour notre grand historien de l’art- signifie être « un ouvrier copiste » « de la nature » sans aucune intervention « subjective » alors oui il faut en effet rediscuter sérieusement des bases ou du moins des lacunes de notre provocateur comique.
Courbet ne s’est jamais présenté comme un ouvrier copiste de la nature ni comme quelqu’un qui ne pense pas ! Et ses œuvres confirment par ailleurs qu’il ne l’a jamais été ! Et pour le noter gratuitement la peinture de Courbet est certainement plus subjectiviste que celle de Manet et encore plus que celle de Monet.
Si notre Grand Esthète s’était donné la peine d’ouvrir au moins une monographie de Courbet, il se serait peut-être aperçue que un enterrement à Ornan ou l’atelier du peintre pour ne citer que ces deux œuvres majeures n’ont rien ni de très objectifs ni de très naturel.
(Petite parenthèse : J’ai lu dans l’Avant-garde le mensuel théorique de la JC un article sur Courbet assez surprenant. Tout comme Convivado, l’auteur de l’article réinvente l’histoire de l’art. Elle dit « Encore loin de son tableau le plus connu, l’origine du monde, Courbet peint de la façon la plus réaliste possible ». C’est assez curieux de dire « son tableau le plus connu » alors que L’origine du monde est resté caché, camouflé, planqué, gardé en secret pendant des décennies. Il n’a jamais été montré du vivant de son auteur. Et si Courbet peignait vraiment de la façon la plus réaliste possible alors il était vraiment médiocre face à un Géricault ou un Le Caravage).
Tout au contraire ces deux toiles sont composées avec subtilité et il faut avoir une petite idée de l’art religieux ainsi que des ordres académiques et une bonne dose d’imagination pour comprendre ces subtilités qui mêlent le peuple avec des figures comme Napoléon, Baudelaire, des artistes, des banquiers et qui n’ont rien de naturelles. Le sujet est très difficile à cerner et nombre d’interprétations ont pu être écrite. Aucun historien de l’Art ne s’aventurera à affirmer que cette toile est une copie fidèle de la Réalité sans intervention subjective de l’artiste. Elle fait partie de ces toiles symbolistes au grand regret de Convivado.
Dans un enterrement à Ornan : La composition en frise romane découpée en trois bandes horizontales donnent un effet de planéité « pré moderniste ». L’utilisation du clair obscur accentue certaines parties ou ambiance de la scène subjectivement. Le détournement des dimensions du format Historique au profit d’un sujet banal de la vie quotidienne d’un village inconnu n’ayant rien à voir avec un sujet Historique (aux yeux de l’Académie) fût le motif du scandale que produisit cette toile. Un chien et une fosse de cimetière mis au premier plan d’un gigantesque format dit Historique, la maîtrise de la caricature, les attaques évidentes anticléricales de Courbet, font de ce tableau un ensemble de preuves contraires aux inventions de Convivado sur un prétendu réalisme « objectiviste ». Courbet ne copie pas la nature avec fidélité et intervient subjectivement dans tous ses sujets. Ce qui serait plus juste de dire c’est qu’il dépeint une certaine réalité qu’il désire montrer -voire démontrer- et n’hésite pas à user de tout un ensemble d’artifices picturaux, de compositions savantes, subtiles, réfléchies et terriblement orientées et subjectives pour arriver à ses fins.
D’autre part je voudrais demander à Convivado en quoi Manet est impressionniste ? Ni lui ni aucun historien de l’art n’a jamais affirmé que ce peintre était un impressionniste. Il était admiré certes par toute une partie des jeunes impressionnistes qui venaient lui rendre visite et lui demander conseil, mais les sujets et la manière de peindre de Manet n’ont jamais été impressionnistes. Disons plutôt que l’histoire de l’art a retenu Manet comme le précurseur du Modernisme surtout avec le fifre, l’Olympia ou avec le déjeuner sur l’herbe.
Mais Manet tout autant que Courbet représente des scènes quotidiennes de son époque et en profite pour y intégrer une certaine critique sociale. La seule différence qu’il y a entre Courbet et Manet c’est que ce dernier libère non pas la touche car c’est déjà fait avec Rembrandt et les romantiques mais l’utilisation de la couleur et de la lumière ce que fera Courbet pour la couleur plus tardivement.
Nous voyons que les notions de réalisme et de réalité sont bien plus complexes que ce qu’imagine puérilement Convivado.

Poursuivons.
« Avec l’impressionnisme on en revient à l’intimisme romantique ; la lumière éclaire tellement les œuvres qu’il ne reste plus qu’une trace, une « impression. « Il n’y a plus d’exaltation, mais simplement un repli sur soi, sur l’intimité de la vie bourgeoise, sur les rapports entre l’individu et la nature, les paysages, etc. (« Le déjeuner sur l’herbe « de Manet, « La foire à Dieppe, Matin, Soleil « de Pissarro).

Alors là j’aime tout particulièrement ce passage pour son schématisme affligeant. L’impressionnisme serait un repli sur soi, sans exaltation, qui raconte la vie privée des bourgeois sur leurs rapports entre eux et la nature ou les paysages… Bon alors reposons le problème à l’envers.
L’ouvrier selon Convivado aime-t-il l’usine, la mine, le bruit, l’acier, le charbon ? Son logement crasseux ? Ses guenilles ? Le pain sec ?
Car s’il aime cela alors dépeindre cette vie serait effectivement une envolée exaltante ! Mais quel est l’imbécile qui ne voudrait pas fuir la misère, qui ne voudrait pas l’oublier, ne serait-ce qu’un court moment ? Quel imbécile se satisferait de son boyau au fond du puit de charbon, de sa cuve d’acier incandescent qui lui brûle les yeux et les bronches ? Quel est l’imbécile qui est capable d’exalter le travail dans la société de classe ?
Tout ce que je peux répondre à ce sujet c’est qu’heureusement aucun artiste à cette époque n’a pris ce parti esthétique. Tout ce que je sais des artistes qui effectivement ont exalté la torture qu’est le travail dans la société capitaliste c’est qu’ils ont été grassement financés par le troisième Reich et par le Proletcult (de la personnalité).
Mais Convivado ne sait pas ce qu’est un ouvrier aujourd’hui et n’arrive pas à imaginer ce que ça pouvait être à l’époque de Manet non plus. Convivado ne sait pas non plus quel est l’origine matérielle de l’impressionnisme et quel rôle il a pu jouer dans le développement de l’art moderne. Convivado pérore et récite quelques lignes qu’on lui a ordonné de répéter. Et ce qui est triste c’est qu’il y croit.
Alors revenons sur Manet et sa critique sociale puis nous parlerons un peu de l’impressionnisme de ses origines socio-historique, de son indifférence quant à la critique sociale et de son importance dans le développement d’un art que les historiens qualifieront de moderne.
Convivado manifestement ne comprend pas ce que signifie le déjeuner sur l’herbe de Manet ni les autres sujets de Manet. Il pense certainement que si une toile montre un ouvrier ou un paysan au travail c’est une œuvre réaliste mais si l’image montre des petits-bourgeois qui prennent du plaisir avec une prostituée à la campagne alors là ça devient de l’art « intimiste romantique » , il n’est plus réaliste selon les critères de Convivado.
Alors posons une question logique à notre grand historien de l’art Marxo Stalinien. Si. « Le réalisme est insupportable pour la bourgeoisie » et que Manet et les impressionnistes sont des artistes non réalistes et donc bourgeois alors comment se fait-il que la bourgeoisie de l’époque les ait rejetés radicalement en ridiculisant leur art ?
Si les impressionnistes étaient des artistes bourgeois pourquoi firent –ils partie des Refusés au Salon ? Pourquoi durent–ils exposer en parallèle parmi les parias de l’art Académique au Salon des Refusés ? Et demandons aussi à notre grand philosophe matérialiste dialectique comment se fait-il qu’au contraire pour « son poulain réaliste » Courbet ; le Salon lui permit d’exposer certaines de ses toiles ? Et enfin pourquoi Courbet en tant qu’artiste super révolutionnaire prolétarien fut accepté malgré tout par Louis Napoléon Bonaparte qui lui permis de concurrencer le fameux Salon Académique en créant son Salon des refusés ? Voilà des questions qui mériteraient d’être débattues. Mais Convivado n’est ni matérialiste ni dialectique. Il croit que l’histoire est linéaire sans contradictions internes. Tout ce qui lui importe c’est de jeter des phrases avec des mots qu’il ne maîtrise pas, avec des notions qu’il devrait étudier avant.
Manet fit scandale tout autant que Courbet et bien plus en réalité car il savait toucher là où ça faisait mal. Lorsque Manet dépeint une scène de la vie quotidienne de son milieu petit-bourgeois parisien il y incorpore toute une raillerie grinçante de son propre milieu. Et quoi de plus normal que de parler et de se moquer ou de dénoncer les choses que l’on connaît le mieux ? Et que connaît-on de mieux que son propre milieu ? Et qui donc aurait le droit de condamner un artiste qui raconte avec son style les mœurs de son époque ?
Mais en quoi représenter une telle scène est scandaleuse me demanderez-vous ? D’abord par son sujet. Au Salon, à l’Académie, aux beaux-arts, une seule préoccupation persiste c’est la copie des Anciens, des Classiques. Il y a des ordres des genres et une manière doctrinaire de construire une image, une scène etc. Certains artistes en ont assez de se sentir prisonnier de cet académisme qui ne leur permet ni d’aborder les sujets qui les rongent ni de les représenter comme ils le souhaitent. Et puisque Convivado caquette comme un poulet qui a trouvé un grain sur la superstructure et l’infrastructure arrêtons nous un instant là-dessus.
Pourquoi certains artistes remettent en question cet ordre séculier de l’Académie ? Pourquoi là ? Convivado ne semble pas vouloir savoir et il masque son ignorance stérile par des « lutte de classes » par ci et des « infrastructures » par là. Il croit avoir les pieds sur terre lorsqu’il parle de reflet de la lutte des classes alors qu’en réalité il invoque par des formules magiques tirées des principes du marxisme léninisme de Joseph Staline sa religion qu’il confond avec ce qu’on appelle le marxisme.
La doctrine Classique depuis la Renaissance tient si l’on désire la résumer dans une seule phrase :au principe suivant : C’est le principe de la fidélité picturale spéculaire au monde visible. En d’autres mots, un tableau est réussi quand il imite à s’y méprendre les apparences extérieures. On le compare à une fenêtre. C’est la « vie même », la vision « naturelle » qu’on prétend nous montrer. Le signe vaut la chose et vice-versa. On croit disposer une fois pour toutes de la technique projective la plus précise, la plus « neutre » la plus transparente, et personne, jusqu’aux premiers doutes des Manet, Cézanne, Van Gogh, ne s’interrogea sur la singulière invariance d’un tel système - alors que son objet explicite, la nature ou la réalité, est constamment réinterprété par l’exploration scientifique. Car c’est bien la situation même de l’homme dans le cosmos et sur terre que remettent en cause fondamentalement, au fil des siècles, les Kepler, les Galilée, les Newton, les Darwin. Pour ceux-ci, la réalité immédiate, celle qu’on croit percevoir à l’œil nu n’est qu’une partie très modeste du monde matériel. Un champ immense, proprement imperceptible, se développe en deçà et au-delà du visible. Aucun illusionnisme réaliste, si minutieux soit-il, ne peut en rendre compte.
Alors voilà une des raisons matérielles pour lesquelles certains artistes commencent à voir le monde différemment. Mais pas seulement. Il y a aussi les changements sociaux et historiques. On a cru jusqu’à la Révolution française que le Pouvoir appartenait au Roi car il était le représentant de Dieu sur terre. On a cru que rien ne changeait car tout était lent, la vision du monde se bornait à la fin de la route qui séparait le champs de tel seigneur avec celui de tel autre.
Le monde du 19ème siècle contrairement à celui des 10 précédents bouge. Il bouge très rapidement, il se transforme à une vitesse inimaginable. Il grandit aussi, il devient puissant, les forces qui naissent contribuent à démontrer que toutes les vieilles croyances ne suffisent plus à expliquer la place de l’homme dans la société etc.
Marx dit : Ce bouleversement continuel de la production, ce constant ébranlement de tout le système social, cette agitation et cette insécurité perpétuelles distinguent l'époque bourgeoise de toutes les précédentes. Tous les rapports sociaux, figés et couverts de rouille, avec leur cortège de conceptions et d'idées antiques et vénérables, se dissolvent; ceux qui les remplacent vieillissent avant d'avoir pu s'ossifier. Tout ce qui avait solidité et permanence s'en va en fumée, tout ce qui était sacré est profané, et les hommes sont forcés enfin d'envisager leurs conditions d'existence et leurs rapports réciproques avec des yeux désabusés.
(…) Poussée par le besoin de débouchés toujours nouveaux, la bourgeoisie envahit le globe entier.
Par l'exploitation du marché mondial, la bourgeoisie donne un caractère cosmopolite à la production et à la consommation de tous les pays(…. )A la place des anciens besoins, satisfaits par les produits nationaux, naissent des besoins nouveaux, réclamant pour leur satisfaction les produits des contrées et des climats les plus lointains. A la place de l'ancien isolement des provinces et des nations se suffisant à elles-mêmes, se développent des relations universelles, une interdépendance universelle des nations. Et ce qui est vrai de la production matérielle ne l'est pas moins des productions de l'esprit Les oeuvres intellectuelles d'une nation deviennent la propriété commune de toutes. L'étroitesse et l'exclusivisme nationaux deviennent de jour en jour plus impossibles et de la multiplicité des littératures nationales et locales naît une littérature universelle.
(…)La bourgeoisie a soumis la campagne à la ville. Elle a créé d'énormes cités; elle a prodigieusement augmenté la population des villes par rapport à celles des campagnes, et par là, elle a arraché une grande partie de la population à l'abrutissement de la vie des champs. De même qu'elle a soumis la campagne à la ville, les pays barbares ou demi-barbares aux pays civilisés, elle a subordonné les peuples de paysans aux peuples de bourgeois, l'Orient à l'Occident.

Voilà l’aboutissement du spectacle qui se déroule sous les yeux des Courbet, Manet, Pissarro, ou Cézanne.Voilà la base matérielle du développement historique de cette période (ce que Convivado nomme l’infrastructure). Mais notre historien confond infrastructure avec la lutte des classes. Comme si la lutte des classes avait un rapport direct avec l’idéologie.
Les artistes traduisent selon leur sensibilité et leur idéologie la réalité immédiate qu’ils vivent. Manet montre son milieu et en fait une critique car il n’aime pas son milieu. Il trouve que cette petite bourgeoisie est ignare, vulgaire, étriquée. Et il nous le montre. jusqu’à nos jour, et il continu de nous le montrer. Et cela n’a rien à voir avec la lutte des classes. Manet n’avait absolument rien à secouer des grèves ou des révolutions. Mais ça ne l’empêcha pas de nous montrer ce qui le préoccupa.
Manet va plus loin, car il remet en cause ce fatras d’idiotie académique qu’est le réalisme. Cette doctrine qui reflète justement le philistinisme ambiant de cette classe qui contrôle le pouvoir. La bourgeoisie, cette classe qui a voulu imiter l’aristocratie n’y est jamais vraiment arrivée. Sa médiocrité intellectuelle due à son esprit étroit lié aux lois du commerce et de la concurrence avait à sa disposition un art qui lui allait bien. Il montrait avec hypocrisie des Venus extrêmement sexy, il ventait leur heure de gloire légèrement falsifiée ou corrigée dans des toiles Historiques, dissertait sur la bible ou sur les héros mythologiques etc.
Manet regarde sa société et lui dit ; regardez la vie il y a des choses simples qui composent notre quotidien qui méritent désormais un intérêt artistique, un intérêt plastique. Il nous dit si vous voulez montrer une image qui se rapproche de la réalité spéculaire alors prenez une photographie. Mais si vous avez des choses à dire à montrer à transmettre alors utiliser la couleur, la lumière, des sujets qui vous touchent qui vous parlent. La peinture doit sortir du carcan Classique. La peinture dispose aussi d’un langage propre constitué d’une grammaire des signes, des formes, des couleurs. Manet est le premier à se lancer dans cette aventure. Et c’est parce qu’il jette les prémisses d’une nouvelle conception de la créativité qui n’est plus aliénée à la notion de réalité spéculaire mais qui sera un nouveau langage exprimant ce que l’ancienne peinture était incapable d’exprimer. Exprimer des idées complexes, des sentiments complexes, des notions complexes, exprimer avec des méthodes libérées de doctrines sclérosées, qui ne permettent plus de s’épanouir, qui ne répondent plus à cette vision plus complexe de la réalité. Le modernisme qui se dessine avec les découvertes des Manet, des Impressionnistes, des Cézanne, est l’issue que peut prendre la création si elle ne veut pas mourir ni disparaître.
Mais tout ceci ne semble pas intéresser convivado.
Il dit simplement : Du temps...et de la culture prolétaire (dans le sens qu'il prend publiquement place du coté des prolétaires) il y en a eu des tonnes. Mais un dogmatique cite et ne s'informe pas, ne reflechi pas. Et cite pas exactement les meilleurs morceaux de son héros.

Outre les incohérences de notre critique qui nous fait redécouvrir l’Histoire de l’Art, si nous arrivons à déchiffrer le sens profond de ses phrases incompréhensibles nous lui répondons ceci : Citez donc les meilleurs morceaux de Trotski selon vous !!! Ne vous gênez surtout pas ! Comme ça vous pourrez enfin vous-même non seulement vous informer, mais de plus vous pourriez y prendre goût.
Convivado parle de Malevitch et de bien d’autres sans savoir ni ce qu’ils ont fait ni comment le régime Stalinien les a enfermé dans la prison du Réalisme Socialiste. « Soit tu dépéris soit tu fais du réalisme pour venter les mérites du régime de Staline ». Convivado n’est pas pour la liberté intellectuelle, il est pour brûler la cervelle de ceux qui contestent l’ordre, ceux qui contestent l’endoctrinement unilatéral de l’art, ceux qui contestent les savants fous qui disent : « l’art doit être ainsi, et pas autrement ». Voilà ce que défend convivado.
Et nous Marxistes, nous continuons d’affirmer avec Trotski, avec Huelsenbeck, avec Breton, « toutes licences en art ».
kasimir
 
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Message par kasimir » 26 Mai 2008, 12:42

Merci c'est Malevitch. Supremus n°58. Jaune et noir. 1916.
kasimir
 
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Message par Matrok » 26 Mai 2008, 12:55

(El convidado de piedra @ jeudi 8 mai 2008 à 07:42 a écrit :Le Romantisme, on en a déjà discuté, est le courant artistique de la réaction, de la Restauration monarchique, qui s'est opposé directement au réalisme figé sortie de la révolution française.

On en a déjà discuté en effet, au moins ici, et encore . Je n'ai pas envie de relancer le débat car je sais qu'on va encore pas s'en sortir, alors au moins ceux que ça intéresse iront lire tout ça...

Sinon (mais peut-être il faudrait un nouveau fil) :
(kasimir @ lundi 5 mai 2008 à 21:25 a écrit :D'autre part comme le fait remarquer Leon Trotsky dans Litterature et révolution la seule classe sociale qui ne développera jamais aucune culture faute de temps c'est la Classe Ouvrière.
(...) Contrairement à la Bourgeoisie qui a eu le temps depuis "l'époque Communale", et tout le long de l'Ancien Régime, en se développant économiquement et politiquement et dans une certaine mesure indépendamment de la féodalité , de se constituer une culture propre; la classe ouvrière quant à elle ne peut par sa position d'aliénée développer de culture propre dans le cadre du capitalisme.

Pour la culture prolétarienne, je ne sais pas. Mais pour l'art, il y a bien non seulement des œuvres plus ou moins isolées mais même des courants artistiques entiers qui sont issus du prolétariat. Tiens, par exemple : le jazz...
Matrok
 
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Message par kasimir » 26 Mai 2008, 13:11

a écrit :Pour la culture prolétarienne, je ne sais pas. Mais pour l'art, il y a bien non seulement des œuvres plus ou moins isolées mais même des courants artistiques entiers qui sont issus du prolétariat. Tiens, par exemple : le jazz...




Pourrais tu développer stp ? Car pour ma part je connais différents musiciens de tendances musicales différentes qui sont effectivement issus de milieux populaires voire prolétarien mais de là à dire que leur musique est une création de classe, une création prolétarienne cela me paraît équivoque. Mais je voudrais sincèrement connaître la base sur laquelle tu fondes ton affirmation.
kasimir
 
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