Spartacus

Message par eruditrotsk » 06 Avr 2005, 14:52

J'ai l'impression d'avoir déjà expliqué cela sur un autre fil. Mais j'accepte de radoter. En ce qui me concerne, malgré les titres communs, les deux romans ne sont pas comparables.

1. Celui de Fast a été écrit par un compagnon de route du PC américain en 1951 (de mémoire) au moment où il sortait de prison après le maccarthysme. Ne trouvant pas d'éditeur, il a même été son propre imprimeur et s'est débrouillé pour le diffuser. Mais la profondeur politique n'a jamais été le fort de Fast, sorte de démocrate américain égaré dans le mouvement stalinien (il en reviendra à partir de 1956 et se tournera pas la suite vers le... bouddhisme). Son roman est tonique, facile à lire, combatif, mais je suis d'accord avec le forumeur qui a écrit que tout est simple : les méchants sont méchants, les gentils sont gentils. Cela dit, c'est un livre commode, facile passer, et à lire, pour une première approche de Spartacus. Le film de Kubrick est une adaptation de ce roman... par Dalton Trumbo, scénariste chassé des studios (en théorie) par le maccarthysme (mais employé en fait, à pas cher, par les studios du fait de cette interdiction... comme Trumbo l'expliquait lui-même).

2. De mémoire le Spartacus de Koestler date de la fin des années trente (39 ?). je ne dirai pas qu'à ce moment-là Koestler, qui a effectivement évolué dans cette direction dans les années d'après-guerre, est un "anticommuniste". Politiquement, il était sioniste dans les années vingt, puis il a rejoint le mouvement stalinien. Avant le nazisme, il faisait partie de la "cellule" des intellectuels (plutôt une sorte de commission) dans laquelle on trouvait Brecht, Seghers et quelques autres moins connus (il raconte tout cela dans "Hiéroglyphes"). Dans la deuxième partie des années trente, il a été employé par l'équipe de publications "larges" de l'Internationale Communiste, dirigé par Willy Munzenberg dont il était proche (ce dernier a été exécuté par des tueurs staliniens en 1941). Par exemple, il collaborait à des publications dénonçant, photos et textes à l'appui, les crimes des franquistes en Espagne ("le livre noir du franquisme" ou un titre approchant). Mais comme beaucoup de staliniens de cette génération, il s'interrogeait sur l'évolution de l'URSS, notamment à cause des procès de Moscou qui voyaient défiler les dirigeants de la révolution russe pour s'accuser de tous les crimes possibles et inimaginables... Et il y avait pour le moins de quoi se poser des questions même quand on était par ailleurs un "petit soldat" du Komintern.

On sait peut de choses historiquement de la révolte des gladiateurs (environ 70 lignes d'un texte latin, je crois). Il a existé deux autres révoltes d'esclaves d'envergure dont une dans le Pont Euxin. C'est celle-là, dans mes souvenirs, où il a été tenté de bâtir une "cité du soleil". Donc, le Spartacus de Koestler fait un "mix" de ces trois révoltes... et discute en arrière fond de la dégénérescence de la révolution et des écueils qui la guettent. C'est moins gouleyant que Fast mais c'est certainement plus profond et plus proche des difficultés qui nous attendent au cas où la révolution repointerait le bout du nez...
eruditrotsk
 
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