« Lettre à un jeune professeur »
Pourquoi enseigner aujourd’hui
de Philippe Meirieu
aux éditions ESF
96 pages
9,90 €
août 2005
« Enseigner, c’est organiser la confrontation avec les savoirs et fournir les aides pour se les approprier »
« "Le dernier ouvrage de Philippe Meirieu (...) prend un peu un caractère
« testamentaire » (...)"
Oufff! »
Ce commentaire lu sur un site de discussion m’a fait sursauter..
.J’en ai déduit qu’il fallait que je me procure au plus vite ce « testament »
J’établis une distinction entre l’auteur du rapport sur les lycées et celui qui depuis de nombreuses années se prend à penser pédagogie...Le premier m’a déçu, le deuxième m’intéresse car si je n’approuve pas toutes ses analyses, sa défense de la « pédagogie moderne »ne peut qu’attirer ma sympathie.
J’avoue ma perplexité devant cette opposition frontale entre les dénonciateurs de l’école menacée et tous ceux qui veulent changer l’école...J’éprouve d’ailleurs un malin plaisir à me trouver entre deux feux !
Si pour moi l’appauvrissement des contenus est une réalité, la critique du « pédagogisme » ne me semble pas de bon aloi ou du moins pavée d’ambiguïté !
On peut tout à la fois, et c’est mon avis, se prononcer contre la réduction du nombre d’heures consacré à la lecture en primaire tout en pratiquant une pédagogie non frontale, interdisciplinaire, permettant aux enfants d’être des acteurs de leurs savoirs....
Mais venons en à la lettre ouverte de Philippe Meirieu...
L’auteur considère que tous les enseignants, quel que soit le niveau enseigné ou la discipline se trouvent confrontés aux mêmes interrogations sur le métier.
« Dans tous les cas, le professeur doit, à la fois, permettre à chaque élève de se confronter à un savoir qui le dépasse et lui fournir l’aide nécessaire pour se l’approprier ; il doit en même temps, solliciter l’engagement de la personne et mettre à sa disposition les ressources sans lesquelles elle ne pourra réussir dans ses apprentissages »
Il ne s’agit pas dans le cadre du débat indirect que l’auteur poursuit avec les dénonciateurs du « niveau qui baisse » de proposer de réduire les savoirs ou de les adapter mais de se donner les moyens pour rendre ces savoirs accessibles...
Quand Philippe Meirieu propose de prendre appui sur les centres d’intérêts des élèves, il convainc à moitié ses interlocuteurs notamment tous ceux qui pensent qu’il ne faut pas s’adapter aux goûts du jour mais faire découvrir et connaître les humanités...Le débat lancé mériterait qu’un véritable échange sans tabous ni interprétations puisse s’enclencher entre la société des agrégés, tancée - souvent à juste titre - dans ce livre et les animateurs des cahiers pédagogiques... d’autres courants pédagogiques auraient sans doute aussi leur mot à dire dans ce débat (mouvement Freinet, GFEN…)
Naturellement ce petit livre peut indisposer nombre de lecteurs très critiques envers les différentes réformes successibles que les gouvernements ont imposées...Certes...Mais d’abord l’auteur ne défend pas inconditionnellement toutes les politiques et certaines qu’il vante peuvent indisposer certains adeptes de la pédagogie moderne...
Prenons par exemple, l’obligation faite pour tous les établissements de bâtir un projet pédagogique... Ne s’agit-il pas là d’un « bidule administratif » ou d’une machine infernale risquant de conduire à une concurrence effrénée entre établissements....15 ans après la loi d’orientation de Lionel Jospin, les craintes exprimées par certains enseignants syndicalistes et militants pédagogiques ( et non « pédagogistes ») sont devenues une triste réalité, risque de dangers....
Le livre de Philippe Meirieu m’a intéressé et interpellé, j’y ai retrouvé là un auteur d’ouvrages pédagogiques qui est à la fois un penseur, un praticien et un militant de l’enfance...
Il entre dans le vif du sujet, au centre du débat actuel, bousculant les certitudes tout en suscitant des interrogations.
On sent chez Philippe Meirieu la passion d’enseigner et le désir de transmettre qu’il cherche à faire partager à la génération montante....