"1953, un 14 juillet sanglant"

Message par pelon » 04 Avr 2003, 15:12

Maurice Rasjfus vient de sortir un bouquin sur un événement peu connu. voici la critique de J. M. Krivine :
( J.M. Krivine @ article de Rouge a écrit :

- "1953, un 14 juillet sanglant", Maurice Rasjfus, Agnès Viénot
Editions, 2003, 14 euros.
Le 14 juillet 1953, jeunes étudiants en médecine et bons militants
communistes, nous avions participé, ma femme et moi, au défilé
traditionnel organisé par le PCF et la CGT pour fêter la prise de la Bastille.
Arrivés place de la Nation, où se trouvait la tribune "officielle", nous nous
apprêtions à partir quand des coups de feu retentirent. Près de nous un
Algérien était tombé et saignait du cou. Nous nous précipitâmes et en taxi
nous le transportâmes à l'hôpital Saint-Louis, en lui comprimant la
carotide. Ce n'est qu'après que nous avons appris ce qui s'était passé : la
police avait délibérément tiré sur le cortège de quelques milliers
d'Algériens qui défilaient, encadrés par les membres du service d'ordre du
MTLD (mouvement nationaliste), porteurs de brassards verts.
A la lecture de l'Humanité de l'époque, il est difficile de comprendre
pourquoi le tir avait eu lieu, faisant sept morts... et peu de temps après, il
devenait même impossible de savoir qu'il avait bien eu lieu. On n'en parla
plus. Ni la presse communiste, ni même les auteurs écrivant sur cette
période ne mentionnent cet "incident". Par contre, nombreux sont ceux qui
stigmatisent le massacre du 17 décembre 1961 avec ses 200 morts
algériens à la suite d'une manifestation interdite ou encore les huit morts
français du métro Charonne en février 1962.
Cinquante ans plus tard, en pleine "année de l'Algérie", c'est le grand
mérite de Maurice Rajsfus de nous rafraîchir la mémoire avec son 1953,
un 14 juillet sanglant, dans lequel il raconte comment les Algériens ont été
amenés à se battre avec les forces de police. Il ne se contente pas de
donner son point de vue mais présente de nombreux extraits de journaux
de l'époque et d'interventions à la Chambre des députés. Le lecteur peut
donc être assez rapidement convaincu que la cause réelle de l'intervention
policière a été la présence chez les manifestants de drapeaux algériens et
de mots d'ordre nationalistes "subversifs" ("A bas la répression
colonialiste ! Libérez Messali Hadj ! Indépendance de l'Algérie !") dont la
presse communiste ne soufflera mot. D'abord impressionnés par la ruée
des flics, les manifestants vont rapidement réagir en se saisissant de la
hampe des drapeaux et en démontant les barrières canalisant le cortège
pour en faire des matraques. Les policiers vont alors tirer délibérément et
sans sommation. Il y aura sept morts, dont un Français communiste,
militant syndicaliste. "J'ai toujours pensé, rappelle un témoin, que j'avais
vu tomber, ce jour-là, les premiers morts de la guerre d'Algérie."
Y eut-il une enquête et des suites judiciaires ? Pensez donc ! L'auteur
rappelle opportunément que "L'institution policière n'a jamais été mise en
cause, aussi bien pour la “petite” tuerie du 14 juillet 1953 que pour
l'assassinat de masse du 17 octobre 1961 ou, bien sûr, pour sa
participation au génocides des Juifs pendant la Deuxième Guerre
mondiale".
Quant à la "haine du Bougnoule", elle s'est transmise héréditairement
dans la police qui "consacre toujours une partie notable de ses activités à
pourchasser, dans les cités, les jeunes issus de l'immigration
algérienne"...

                                     Jean-Michel Krivine.
pelon
 
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