Woody Allen, lu par G. Galienne

Message par com_71 » 13 Juil 2012, 16:18

Biographie du comte de Sandwich

a écrit :1718 : Naissance du comte de Sandwich - de parents aristocrates - de parents aristocrates. Son père est fier du poste de maréchal en chef de Sa Majesté le Roi, une position dont il se prévaudra pendant de nombreuses années, jusqu'à ce qu'il découvre qu'il n'est que maréchal-ferrant et démissionne avec amertume. Sa mère est une simple Hausfrau d'origine allemande, dont le menu ordinaire consiste essentiellement en lard au gruau, bien qu'elle puisse parfois faire preuve de quelque imagination culinaire en exécutant un sabayon passable.

1725-1735 : Il va à l'école, où on lui apprend l'équitation et le latin. À l'école, il entre en contact pour la première fois avec de la viande froide et manifeste un intérêt particulier envers des tranches fines de rosbif et de jambon. À l'époque de ses diplômes, ceci est devenu une obsession, et, bien que son mémoire, De l'analyse et du phénomène subséquent de la collation, éveille l'intérêt de l'Université, ses camarades de classe le prennent pour un original.

1736 : Il entre à l'université de Cambridge, sur ordre de ses parents, pour y poursuivre des études de rhétorique et de métaphysique, mais montre peu d'enthousiasme pour ces matières. En révolte constante contre tout académisme, il est accusé de voler les morceaux de pain et de se livrer sur eux à des expériences contre nature. Convaincu d'hérésie, il est expulsé.

1738 : Désavoué de tous, il s'exile en Scandinavie, où il passe trois ans de recherches intensives sur le fromage. Il éprouve d'énormes difficultés avec les nombreuses variétés de sardines qu'il rencontre et écrit dans son carnet : "Je suis convaincu qu'il existe une durable réalité, par-delà tout ce que l'homme a déjà atteint dans la juxtaposition des matériaux alimentaires. Simplifier. Simplifier." Dès son retour en Angleterre, il rencontre Nell Smallbore, la fille d'un maraîcher, et il l'épouse. C'est elle qui lui enseignera tout ce qui concerne la laitue.

1741 : Vivant à la campagne sur un petit héritage, il travaille jour et nuit, économisant souvent sur les repas pour acheter de la nourriture. Sa première oeuvre achevée - une tranche de pain, une tranche de pain par-dessus, et une tranche de dinde couronnant le tout - échoue lamentablement. Amèrement désappointé, il retourne à son laboratoire et repart à zéro.

1745 : Après quatre années de labeur frénétique, il a la conviction de frôler le succès. Il présente à l'approbation de ses pairs deux tranches de dinde avec une tranche de pain au milieu. Son ouvrage est rejeté par tous, sauf David Hume, qui prévoit l'imminence de quelque chose de grandiose et l'encourage. Galvanisé par l'amitié du grand philosophe, il retourne à ses expériences avec une vigueur nouvelle.

1747 : Dans un total dénuement, il n'a plus les moyens' de travailler sur le rosbif ou la dinde, et se rabat sur le jambon, qui coûte moins cher.

1750 : Au printemps, il expose et démontre trois tranches de jambon consécutives empilées l'une sur l'autre; ceci éveille quelque intérêt, particulièrement dans les cercles intellectuels, mais le grand public demeure indifférent. Trois tranches de pain l'une sur l'autre ajoutent à sa réputation et, bien que son style de maturité ne soit pas encore évident, il est convoqué par Voltaire.

1751 : Voyage en France, où le philosophe-dramaturge vient d'obtenir quelques résultats intéressants avec du pain et de la mayonnaise. Les deux hommes deviennent amis et entament une longue correspondance qui s'achèvera brusquement, Voltaire étant à court de timbres.

1758 : L'approbation grandissante des cercles éclairés lui vaut une commande de la reine pour "préparer quelque chose de spécial" à l'occasion d'un goûter avec l'ambassadeur d'Espagne. Il travaille jour et nuit, déchirant des centaines d'esquisses, mais finalement - à quatre heures dix-sept du matin, le 27 avril 1758 - il crée un prototype consistant en plusieurs morceaux de jambon enfermés, au-dessus et en dessous, dans deux tranches de pain de mie. Dans un éclair d'inspiration, il garnit le tout de moutarde. Immédiatement, cela fait sensation, et il reçoit la commande de tous les goûters du samedi jusqu'à la fin de l'année.

1760 : Les succès succédant aux succès, il crée des "sandwiches" (ainsi les avait-on baptisés en son honneur) au rosbif, au poulet, à la langue de boeuf, et pratiquement à tous les ingrédients concevables. Non content de répéter des formules éprouvées, il ne cesse d'expérimenter de nouvelles idées et invente le sandwich panaché, pour lequel on le décore de l'Ordre de la jarretière.

Il reçoit la visite des plus grands esprits du siècle : Haydn, Kant, Rousseau et Benjamin Franklin séjournent chez lui, les uns appréciant ses remarquables créations à table, les autres en emportant pour la route.

1778 : Bien que vieilli physiquement, il s'évertue à découvrir de nouvelles formules et écrit dans son journal : "je travaille longtemps dans les nuits glaciales, et maintenant je fais tout griller dans l'espoir que cela se gardera au chaud." Cette même année, son sandwich au rosbif chaud déclenche un véritable scandale par sa sincérité.

1783 : Pour célébrer son soixante-cinquième anniversaire, il invente le hamburger, et se lance dans une tournée des grandes capitales du monde, exécutant des hamburgers dans les salles de concert, devant des audiences aussi nombreuses qu'attentives. En Allemagne, Goethe lui suggère de les servir sur des pains briochés - une idée qui ravit le comte, au point qu'il dit de l'auteur de Faust : "Ce Goethe, quel type !" Cette remarque enchante Goethe, qui néanmoins rompra avec lui l'année suivante à la suite d'une dissension sur les concepts de bleu, à point et bien cuit.

1790 : Lors d'une exposition rétrospective de ses œuvres à Londres, il est brutalement atteint d'angine de poitrine, et on le croit mourant, mais il se remet suffisamment pour superviser l'élaboration d'un monument en forme de sandwich géant par des disciples talentueux. Son inauguration en Italie provoque une révolution par son style avant-gardiste, et il demeure incompris de tous, sauf de quelques critiques.'

1792 : Il est frappé d'un genu valgum(1) qu'il néglige de soigner à temps, et expire dans son sommeil. Il est inhumé à l'abbaye de Westminster, et des milliers de fidèles portent son deuil. À ses obsèques, le grand poète allemand Hölderlin fait la somme de son oeuvre avec un respect non déguisé, en ces termes émouvants : "Il libéra l'humanité du déjeuner chaud. Nous lui devons beaucoup."

Woody Allen, Pour en finir une bonne fois pour toutes avec la culture, Opus 2,
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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