Expo "L'oeil extatique" : Eisenstein (Centre Pompidou Metz)

[Byrrh]

Du 28 septembre 2019 au 24 février 2020, le Centre Pompidou Metz (Moselle) propose l'exposition L'Œil extatique. Sergueï Eisenstein, cinéaste à la croisée des arts.

https://www.centrepompidou-metz.fr/l-il ... e-des-arts

Celles et ceux qui ont vu l'exposition Rouge. Art et utopie au pays des soviets, il y a quelques mois au Grand Palais, reconnaîtront certaines des oeuvres prêtées par les musées russes et réutilisées dans cette exposition de province avant leur restitution... D'ailleurs, cette expo centrée sur l'oeuvre d'Eisenstein montre également, à l'échelle d'un seul artiste, à quel point le stalinisme a représenté une négation de la liberté artistique des premières années de la Russie des Soviets.

Mais pas seulement... L'intérêt de cette exposition, c'est aussi de souligner le syncrétisme de l'oeuvre d'Eisenstein, de confronter celle-ci à l'art de tous les pays et de toutes les époques, à ces peintures, gravures, sculptures ou photographies qui ont pu influencer le grand cinéaste soviétique. Peintures du Greco ou de Goya, gravures de Jacques Callot, sculptures de Michel-Ange, masques traditionnels japonais, statuettes mexicaines typiques de la "fête des morts", caricatures de Daumier, dessins sur la répression versaillaise après l'écrasement de la Commune de Paris, architectures constructivistes soviétiques, icônes orthodoxes de l'ancien régime, travaux du dramaturge Vsevolod Meyerhold autour de la "biomécanique" dans la formation des acteurs, etc. Ce voyage à travers l'histoire de l'art - et à travers l'histoire tout court - est réellement captivant.

Attention : le catalogue de l'exposition a du retard et ne paraîtra qu'au début du mois prochain.

[Cyrano]

Dois-je l'avouer, Byrrh? Eisenstein m'ennuie (et je me censure): c'est un esthétisme qui me fait penser à Leni Riefenstahl. Voilà, c'est dit.

[Byrrh]

Le rapprochement est rude... En plus, je ne vois pas trop le rapport avec Riefenstahl. Dans Les dieux du stade et Le triomphe de la volonté, qui se veulent des "documentaires", on a la célébration tranquille de la force (la force tranquille ?), d'une jeunesse "saine" et athlétique, d'un ordre (nouveau), de la symétrie des foules dociles qui ne bougent dans le décor que pour magnifier l'architecture d'Albert Speer...

Chez Eisenstein, qui était lui-même tout à fait "dégénéré" selon les critères nazis (voire staliniens), on trouve désordre et instabilité, violence et mort, bref, le monde tel qu'il est vraiment. À Vertov qui défendait un "ciné-oeil", Eisenstein opposait un "ciné-poing"...
Va voir cette expo et on en reparlera. Et imagine aussi ce que les flics staliniens ont fait subir à son oeuvre... S'il n'y avait pas eu Staline, Que viva Mexico! aurait sans doute été le film majeur d'Eisenstein. En attendant, Le cuirassé Potemkine, c'est quand même pas de la daube.