Un docu sur Engels

Un docu sur Engels

Message par com_71 » 23 Nov 2020, 01:07

Sur Arte. Prochaine diffusion le mercredi 2 décembre à 00:10. Disponible sur https://www.arte.tv/fr/videos/097515-00 ... e-de-marx/ Je ne l'ai pas encore vu. La présentation sur le site :
Éclipsé au fil des décennies par l’immense héritage de Karl Marx, Friedrich Engels (1820-1895) se décrivait lui-même comme un "second violon". Il faut pourtant se garder de minimiser son rôle dans l’élaboration de l’œuvre théorique du communisme.

Issu de la grande bourgeoisie industrielle de Wuppertal, le jeune Friedrich préfère de beaucoup la philosophie et la politique aux affaires. Ayant observé dans les usines textiles familiales, notamment à Manchester, les conditions de vie épouvantables des ouvriers, il théorise les rapports entre bourgeoisie et prolétariat en s’appuyant sur la dialectique hégélienne, étudiée à Berlin. La rencontre en 1844 avec Karl Marx, dont il partage les idées, scellera une amitié indélébile, ponctuée de voyages, et une collaboration intellectuelle parmi les plus fructueuses de l’histoire. Du Manifeste du parti communiste jusqu’au Capital, dont Engels retravaillera et publiera les derniers volumes après la mort de son ami, leurs deux noms resteront indissociables. Retour sur le parcours de ce penseur aux mœurs libres, resté dans l’ombre, dont on fête cette année le bicentenaire de la naissance.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Re: Un docu sur Engels

Message par Gayraud de Mazars » 23 Nov 2020, 10:43

Salut camarade Com,

Ce documentaire de 52 minutes que je viens de voir, traite essentiellement de la première partie de la vie Engels jusqu‘en 1849 peu de choses après cette période, rien sur l’Association Internationale des Travailleurs (AIT), trop peu d’éléments sur la suite, c’est bien dommage… A part les analyses peut être, sur la vie personnelle et intime d’Engels et son côté épicurien, et bien léger avec les dames ! On en restera pas là, reste le révolutionnaire, le militant et théoricien…

Pour le 200e anniversaire de la naissance d'Engels ce documentaire intitulé - "Friedrich Engels - Dans l'ombre de Marx" mérite quand même le détour, même s'il est partiel et partial parfois !

Fraternellement,
GdM
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Re: Un docu sur Engels

Message par Ottokar » 23 Nov 2020, 19:28

Merci de l'avoir signalé, c'est pas mal, enfin disons qu'on a fait tellement pire dans le genre... à part que l'un des deux spécialistes invités à commenter est Gregor Gysi, un des derniers dirigeants du parti de la dictature en Allemagne de l'Est, accusé d'avoir été collaborateur de la Stasi et qui a su retourner sa veste à temps et soutenir les manifs de la chute du mur, devenir dirigeant de ce parti et continuer sa carrière à die Linke. Et quelques perles : La situation de la classe laborieuse en GB, "a été accusée d'être un plagiat", une petite saloperie dite en passant, comme ça, sans rien pour le confirmer, alors que la ême émission reconnaît qu'Engels a fait une compilation sérieuse des sources de l'époque. Des rivalités ou polémiques avec Lassalle lors de la révolution de 1848 alors que celui-ci ne joue aucun rôle avant les années 1860, une fin qui termine sur le fait qu'Engels "savait se remettre en cause" et qu'à la fin de sa vie, il aurait "approuvé la social-démocratie" sous-entendu, le réformisme... Et bien entendu, les images ne correspondent pas à l'époque, les années 1850, mais à 1900. Le cinéma n'étant pas inventé en 1840-50, c'est excusable :P
Ottokar
 
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Re: Un docu sur Engels

Message par Byrrh » 23 Nov 2020, 20:44

Ottokar a écrit :Et bien entendu, les images ne correspondent pas à l'époque, les années 1850, mais à 1900. Le cinéma n'étant pas inventé en 1840-50, c'est excusable :P

Les excellents documentaristes de la télé des années 60/70 n'auraient pas commis cet anachronisme. Ils auraient filmé des gravures et des photographies, quitte à faire des zooms et des mouvements de caméra dedans pour que ça bouge un peu.
Byrrh
 
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Re: Un docu sur Engels

Message par Duffy » 23 Nov 2020, 21:03

Ottokar a écrit :une fin qui termine sur le fait qu'Engels "savait se remettre en cause" et qu'à la fin de sa vie, il aurait "approuvé la social-démocratie" sous-entendu, le réformisme...

Un grand classique que bien des "intellectuels" diffusent encore...

Paul Frölich, "Rosa Luxemburg" a écrit :
Friedrich Engels, le conseiller du socialisme international et le gardien dévoué des idées marxistes, est mort en 1895. Sa mort a levé un obstacle important à la progression de l'opportunisme ; en effet, l'Engels "mûr et doux" est devenu le témoin juré de la politique réformiste. Son dernier ouvrage est une introduction au livre de Marx sur la révolution française de 1848, Luttes des classes en France. Cette introduction est l'un des documents les plus importants sur la stratégie marxiste. Le "Général", comme Engels était appelé en raison de sa connaissance des affaires militaires, soutenait que les anciennes tactiques de barricade, basées sur une stratégie défensive d'attrition, c'est-à-dire d'usure de l'armée ennemie, avaient été rendues inopérantes par le développement de la technique militaire moderne et de l'urbanisme moderne. Les insurrections futures devraient prendre un caractère très différent et être menées par de grandes masses populaires dans une offensive orageuse contre les forces militaires de l'ennemi. Cela exigerait un programme d'illumination beaucoup plus intensif et une organisation de la classe ouvrière plus ferme que ce qui avait été réalisé jusqu'alors. Tout jeu avec l'idée d'insurrection devait être condamné. Pendant longtemps, la social-démocratie internationale devra se contenter d'utiliser toutes ses possibilités juridiques ; elle devra suivre l'exemple du SPD, qui a fait du droit de vote un instrument d'émancipation.

L'exécutif du SPD considérait cette introduction, en raison de sa tranchance révolutionnaire, comme un document qui pourrait offrir à la réaction en Allemagne une nouvelle excuse pour des mesures répressives, d'autant plus qu'à cette époque même un projet de loi contre les activités subversives (Umsturzgesetz), visant à écraser la social-démocratie, était en instance au Reichstag. Il a donc supprimé toutes les phrases et les mots du manuscrit qui faisaient référence à de futures luttes armées. Au début, Engels proteste contre l'émasculation de son Introduction, mais il se soumet ensuite aux considérations tactiques du moment. C'est ainsi que cette Introduction aux luttes de classes, rendue publique, est entrée dans l'histoire comme le "Testament de Friedrich Engels" : une condamnation de toutes les formes de violence et de toutes les révolutions futures, et une glorification de la légalité, en vertu de laquelle les partis ouvriers "développeront des muscles forts et des joues rouges, et auront la vie éternelle"[22]. Ce n'est qu'en 1924 que Riazanov [directeur de l'Institut Marx-Engels-Lénine à Moscou] redécouvrit le manuscrit et publia le texte original.

Les livres ont leur destin, et ils deviennent le destin lui-même. Le "Testament" d'Engels, dans sa forme publiée, réclamait à grands cris une révision de la conception marxiste de l'histoire, et comme l'exécutif du parti dissimulait obstinément sa manipulation du manuscrit, l'"Introduction" est devenue un argument éloquent entre les mains des réformistes. Même les radicaux ont été fortement impressionnés par elle. Bien que Kautsky ait su par Engels que quelque chose n'allait pas dans le texte, il ne connaissait pas toute la vérité. Même Parvus a adopté le "Testament", avec sa condamnation de la violence, comme base de ses tentatives de radicalisation de la politique sociale-démocrate. Rosa Luxemburg n'a jamais accepté à elle seule l'extraction falsifiée du document, et elle a fermement refusé de considérer qu'il représentait les véritables opinions d'Engels.

C'est un homme de l'entourage immédiat d'Engels qui a réalisé la "Révision du marxisme" : Eduard Bernstein. Né à Berlin en 1850, il a rejoint le mouvement social-démocrate dans sa jeunesse avant même l'adoption des lois anti-socialistes, et lui a rendu de grands services pendant la période de persécution. En tant que rédacteur du Sozial-demokrat, publié pendant ces années à Londres, il s'était transformé, sous l'influence d'Engels, d'un socialiste éthique petit-bourgeois en un socialiste radical. En même temps, cependant, il avait été influencé par les conditions prévalant en Angleterre : la large base démocratique, la politique de collaboration économique menée par les syndicats et les vues sociale-réformistes des Fabiens. Une étude sur la révolution française de 1848 choque sa nature fondamentalement petit-bourgeoise et il reconnaît avec horreur que la politique des Radical Clubs (Auguste Blanqui) est en accord sur des points essentiels avec celle de Marx. Et c'est dans cette politique révolutionnaire qu'il a vu l'échec final de la révolution. De 1896 à 1898, il écrit une série d'articles dans la Neue Zeit sur les "problèmes du socialisme", attaquant avec une détermination croissante les principes fondamentaux du marxisme. Au début, l'importance de ses essais ne s'est pas concrétisée, et aucune opposition ne s'est manifestée jusqu'à ce qu'un socialiste anglais, Belfort Bax, lance un appel à la bataille : "Bernstein a complètement abandonné le but final du mouvement socialiste en faveur des idées du libéralisme et du radicalisme bourgeois actuels ? Le mouvement social-démocrate allemand se déchaîne, mais Bernstein est toujours défendu par Wilhelm Liebknecht, Kautsky et Schonlank. Mais Bernstein prononça alors la sentence fatale : "Le but final du socialisme, quel qu'il soit, ne signifie rien pour moi ; c'est le mouvement lui-même qui est tout" (Das Endziel, was immer es sei, ist mir nichts, die Bewegung alles), Parvus a tiré la sonnette d'alarme dans le Sachsische Arbeiterzeitung. C'est ainsi qu'est née la grande controverse Bernstein, qui a préoccupé la social-démocratie allemande pendant des années. C'est à cette époque que Rosa Luxemburg a commencé son activité au sein du parti allemand.

La controverse Bernstein a déclenché la crise la plus difficile et la plus prolongée de l'histoire de la social-démocratie internationale d'avant-guerre. Elle a appelé tous les théoriciens marxistes et les hommes politiques pratiques sur le champ de bataille. Parvus, Kautsky, Mehring, Bebel, Clara Zetkin et Rosa Luxemburg en Allemagne ; Plekhanov, qui a défendu le matérialisme historique surtout dans le domaine de la philosophie, en Russie ; Antonio Labriola en Italie ; Jules Guesde et même Jean Jaurès en France. Le tempérament orageux de Jaurès, nourri par les traditions de la grande Révolution française, l'a conduit à rejeter les vues sobres et pédantes de Bernstein, bien qu'elles soient en fait étroitement liées aux siennes.


(C'est une traduction automatique à partir de l'ebook en anglais, j'ai pas le bouquin en français sous la main...)
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Re: Un docu sur Engels

Message par artza » 24 Nov 2020, 09:14

Merci de rétablir ce point très important.

C'est une activité naturelle aux opportunistes de raboter, limer les angles dures du marxisme, la science émancipatrice du prolétariat.
Il y a au moins deux choses qui chiffonnent nos amis opportunistes, la violence révolutionnaire sa terreur et sa dictature. Notre vieille dictature du prolétariat. (re)lire Terrorisme et communisme de Trotsky.
Deuxième chose "les prolétaires n'ont pas de patrie", vite tournons la page et merci Jaurès, "un peu d'internationalisme éloigne de la patrie, beaucoup d'internationalisme en rapproche" et ça se termine par "mr le président vous m'avez trompé" (Jaurès à Poincaré en juillet 1914).


Maintenant ce docu est plutôt sympa. Il nous montre un Engels humain, à auteur d'homme, un type avec qui on peut bavarder, boire un coup et qui s'en va avec votre copine. :lol:

Maintenant à quoi et à qui ça sert ce genre de docu?

Peut-on le donner à voir un public captif de collégiens et de lycéens, sans risquer sa tête?

Bref, le public sera de gauche, déjà matraqué par le pacifisme pour les opprimés, la démocratie pour les dominants, le patriotisme, pardon le souverainisme protecteur de "nos" entreprises et le "produire local et consommer local", mort lente et assurée des producteurs et famine annoncée pour les consommateurs.
Bref, mijotons avec nos illusions, nos leurs
et nos remèdes sociaux homéopathiques. Si monsieur Gysi ce n'est pas pour faire avancer la connaissance historique, mais préparer les élections.

Un autre aspect c'est le culte du grand homme visionnaire infaillible.
Qu'importerait que le vieil Engels s'illusionne?
ça invaliderait l'oeuvre passée?
Voilà bien la vanité révisionniste.

A propos de ces tripatouillages de textes, il en est quelques uns qui s'essayèrent à faire du vieux Trotsky un combattant "de la guerre sainte antifasciste" justifiant à posteriori quelques poignées de main interclassistes rêvées. :lol:
artza
 
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Re: Un docu sur Engels

Message par Gayraud de Mazars » 24 Nov 2020, 10:38

Salut Artza,

artza a écrit :A propos de ces tripatouillages de textes, il en est quelques uns qui s'essayèrent à faire du vieux Trotsky un combattant "de la guerre sainte antifasciste" justifiant à posteriori quelques poignées de main interclassistes rêvées.


D'où la phrase bien célèbre de Léon Trotsky, de janvier 1932, dans "La révolution allemande et la bureaucratie stalinienne" :

https://www.marxists.org/francais/trots ... 20127e.htm

C'est précisément dans ce sens que j'écrivais - avec l'intention délibérée de susciter l'effroi sincère ou l'indignation feinte des imbéciles et des charlatans, - que, dans la lutte contre le fascisme, nous étions prêts à conclure des accords pratiques militants avec le diable, avec sa grand-mère, et même avec Noske et Zörgiebel.


Fraternellement,
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Re: Un docu sur Engels

Message par Duffy » 02 Déc 2020, 15:09

Ottokar a écrit :une fin qui termine sur le fait qu'Engels "savait se remettre en cause" et qu'à la fin de sa vie, il aurait "approuvé la social-démocratie" sous-entendu, le réformisme...


D. Riazanov : Introduction d'Engels aux « Luttes de classes en France, 1848-1850 », Unter dent Banner des Marxismus, 1925-1926, 1, pp. 160-165.

https://www.marxists.org/francais/marx/ ... da_6_1.htm
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Re: Un docu sur Engels

Message par Gayraud de Mazars » 02 Déc 2020, 15:53

Salut camarade Duffy,

Merci de la source pertinente et on peut lire :

«Dans tous ces écrits, je ne me qualifie jamais de social-démocrate, mais de communiste. Pour Marx, comme pour moi, il est absolument impossible d'employer une expression aussi élastique pour désigner notre conception propre. »

Fr. Engels - Préface à la brochure du Volksstaat de 1871-1875.


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Re: Un docu sur Engels

Message par Gayraud de Mazars » 03 Déc 2020, 07:21

Salut camarades,

Friedrich Engels (1820-1895), révolutionnaire communiste
02 Décembre 2020, dans le journal Lutte Ouvrière n°2731 / il y a 200 ans
Par Michel BONDELET

https://journal.lutte-ouvriere.org/2020 ... 53268.html

Le 28 novembre 1820, naissait Friedrich Engels, qui allait être le compagnon de lutte et l’ami de Karl Marx.

Engels naît à Barmen, en Rhénanie. Son père est un fabricant textile prospère, dans la vallée de la Wupper.

Dans les Lettres de la vallée de la Wupper (1839), Engels, révolté, dénonce la « terrible misère parmi les classes inférieures, en particulier parmi les ouvriers des fabriques : rien qu’à Elberfeld, 1 200 enfants d’âge scolaire sur 2 500 sont soustraits à l’enseignement et grandissent dans les fabriques », payés moitié moins que les adultes. À Brême puis à Berlin, Engels se frotte aux idées nouvelles et radicales de son époque. Inquiet de l’évolution du jeune homme, son père l’envoie travailler en Angleterre, dans une fabrique textile de Manchester dont il est un associé.

Les deux années d’Engels à Manchester (1842-1844) transforment sa vision du monde, mais ce n’est pas dans la direction souhaitée par son père. La ville d’industrie cotonnière aux 500 cheminées d’usine et aux 100 000 ouvriers est le berceau de la révolution industrielle. Des fortunes colossales s’y bâtissent, et le prolétariat moderne s’y forge une conscience. Dans l’ouvrage qu’il consacre à La Situation de la classe laborieuse en Angleterre (1845), Engels explique ce qu’est cette révolution industrielle, qui va gagner le continent européen après la Grande-Bretagne. L’ouvrage détaille les conditions de travail des différents secteurs de la classe ouvrière : journées de 12 ou 14 heures, accidents et empoisonnements au travail, conditions de vie insalubres dans des taudis et dans des caves, etc. Dans un réquisitoire féroce contre le capitalisme industriel en développement à Manchester, Engels appelle de ses vœux une révolution sociale qui mettra à bas ce système qui « ôte à des milliers d’êtres les moyens d’existence indispensables ».

En 1844, à Paris, sur le chemin du retour vers la Rhénanie, Engels noue avec Karl Marx (1820-1883) l’amitié d’une vie. Les deux hommes partagent les mêmes idées et engagent une collaboration qui ne cessera pas. Communistes, ils ne se satisfont pas des projets de communautés avancés par le Britannique Robert Owen et le Français Charles Fourier. Pour eux, le moteur de l’évolution historique, ce sont les luttes de classes. Or « les prolétaires n’ont à perdre que leurs chaînes. Ils ont un monde à gagner. » C’est donc en direction de cette classe qu’ils orientent leurs efforts.

À Londres en 1847, Marx et Engels convainquent les ouvriers allemands émigrés de la Ligue des justes de la rebaptiser Ligue des communistes, et de changer leur devise de « Tous les hommes sont frères » en « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! ». Au tournant de l’année 1848, ils écrivent pour cette organisation un programme, le Manifeste du parti communiste, qui précise leurs idées sur l’histoire des sociétés, le présent capitaliste et l’avenir dont le prolétariat est porteur.

Pendant les révolutions européennes de 1848, les deux hommes dirigent la Nouvelle gazette rhénane, un quotidien radical de Cologne qui sera interdit en juin 1849. La bourgeoisie libérale, effrayée par l’ardeur du prolétariat, se rallie à l’aristocratie et aux autorités qu’elle combattait la veille ; les deux classes possédantes se tournent contre le petit peuple insurgé. En 1849, Engels participe aux combats révolutionnaires dans le pays de Bade et le Palatinat, puis à ceux de la vallée de la Wupper. Quand le soulèvement est vaincu par les troupes prussiennes, il se réfugie en Suisse puis en Grande-Bretagne, où il débarque le 10 novembre 1849.

Engels rejoint bientôt Manchester, où il va travailler, pendant vingt ans, dans la gestion d’Ermen & Engels, la firme textile à laquelle son père est associé. Pendant ces deux décennies, Engels aide financièrement les Marx. Ceux-ci, réfugiés à Londres, traversent des années difficiles. Engels est convaincu que le travail de Marx, qui rédige alors une critique de l’économie politique bourgeoise, Le Capital (dont le premier livre parut en 1867), est irremplaçable. Il ne se contente pas de lui envoyer de l’argent, il lui fournit de la documentation et rédige, pour le libérer, nombre des articles que Marx adresse chaque semaine au New-York Daily Tribune (de 1851 à 1862). Ces textes critiquent la politique des pays européens, la répression britannique de la révolte indienne de 1857, ou l’intervention des puissances européennes en Chine.

Engels, pas plus que Marx, ne sépare le travail théorique de l’action. Au début des années 1860, après une longue décennie de reculs dus aux défaites de 1848-1849, le mouvement ouvrier progresse de nouveau, avec une multiplication des grèves, des syndicats et des sociétés ouvrières. Une Association internationale des travailleurs (AIT), regroupant des militants et des organisations de différents pays, est formée à Londres en 1864. Marx s’y engage et y assure un rôle dirigeant. Quand, en 1870, Engels quitte enfin ce qu’il appelle son « travail de chien », il déménage à Londres et participe pleinement à l’AIT. Avec Marx, Engels suit les développements du Parti social-démocrate allemand, en plein essor à partir de 1875. Il s’intéresse de près au mouvement ouvrier britannique, marqué par le réformisme, mais aussi par un courant révolutionnaire minoritaire dont la fille de Marx, Eleanor, (1855-1898), est une des représentantes.

Dans l’Anti-Dühring (1878), Engels se livre à une critique sans concessions des positions réformistes du philosophe allemand Eugen Dühring. Trois chapitres issus de cet ouvrage sont publiés en 1880 sous le titre Socialisme utopique et socialisme scientifique, dans lequel il situe l’apport spécifique de Marx aux idées socialistes. Dans L’Origine de la famille, de la propriété privée et de l’État (1884), Engels analyse, sur la base des connaissances scientifiques contemporaines, l’évolution des structures familiales et l’émergence de l’État dans l’histoire des sociétés. D’une grande curiosité, il applique la méthode du matérialisme dialectique à l’étude de la nature dans Dialectique de la Nature (1883), resté inachevé.

Marx meurt en 1883. Engels est son exécuteur testamentaire. Il publie les livres 2 (1885) et 3 (1894) du Capital et assure la réédition de plusieurs ouvrages de Marx. Engels assume désormais seul ce qui fut longtemps leur travail commun : aider, conseiller, orienter le mouvement ouvrier international. Tous les militants, de la Russie à l’Amérique, du Portugal au Danemark, qui écrivent à Engels obtiennent une réponse. Ceux qui frappent à sa porte sont accueillis. Engels est ainsi le chaînon vivant qui relie les premières années du mouvement ouvrier communiste et la génération qui bâtit la IIe Internationale.

Engels meurt en août 1895. Fidèle à son athéisme, il a demandé à être incinéré, et ses cendres sont dispersées dans la Manche. Quant aux idées qu’il a défendues pendant 50 années, dont 40 avec Marx, loin de mourir, elles continueront de se diffuser dans le mouvement ouvrier international


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