Warda...

Warda...

Message par com_71 » 01 Jan 2024, 19:24

... de Sonallah Ibrahim, chez Actes Sud (06/10/2005), 4e de couverture :
Venu rendre visite à des parents, un couple d'Egyptiens de la classe moyenne expatriés à Oman, le narrateur découvre un pays rutilant de propreté et très policé. Il cherche vainement la trace de Warda et de son frère Ya'rib, deux omanais qu'il a connus à l'Université du Caire dans les années 1950. Tous deux, comme le narrateur, militaient dans des partis de gauche plus ou moins clandestins, avant de quitter le Caire pour Beyrouth. Au début des années 1960, ils s'engagent dans ce qui va devenir la guérilla du Dhofar. Quand il va désespérer de jamais les retrouver, le narrateur est abordé par un jeune homme qui lui remet le premier cahier du journal intime de Warda et lui promet la suite. A partir de là, selon un procédé familier à Sonallah Ibrahim, la narration est entrecoupée de chapitres formés de ce carnet de bord d'une révolutionnaire des années 1960. A travers elle, le lecteur revit l'épopée des guérilleros du Dhofar. Les premiers chapitres du carnet sont marqués par l'optimisme. La guérilla s'implante dans la région, recrute aisément parmi les Dhofaris traditionnellement rebelles à l'autorité. L'éviction des Britanniques d'Aden et l'instauration d'un régime marxiste dans le Sud-Yémen voisin (1967) confortent Warda dans ses convictions. Plus dure sera la chute... A partir de 1970, Qaboûs, nouveau sultan, avec le soutien militaire britannique, va reconquérir le terrain perdu et surtout lancer la modernisation du pays qui va lui donner une base populaire. Tandis que le régime d'Aden prend peu à peu ses distances pour tenter de rompre avec son isolement régional, Warda et ses hommes doivent désormais combattre dans des conditions de plus en plus difficiles. Repoussés dans des régions toujours plus inhospitalières, ils finissent par se perdre aux confins du Rob’ el-Khâli, le désert infranchissable qui sépare l'Arabie saoudite du Yémen et d'Oman, où Warda trouve la mort dans des circonstances troubles. Avec Warda, Sonallah Ibrahim construit peut-être son plus beau personnage romanesque, en tout cas le premier qui ne soit pas un anti-héros. Loin de Zeth, petite-bourgeoise ridicule et sans cesse ridiculisée par son créateur, loin de Charaf, adolescent falot et inconsistant sans aucune maîtrise Sur son destin, Warda change le monde; elle est belle, courageuse, lucide. Elle n'est pas l'incarnation désincarnée d'un idéal mais un être humain complexe, une femme libre de notre temps. A travers elle, l'auteur rend un magnifique hommage à l'idéal révolutionnaire des années 1960 et à ceux qui y ont sacrifié leur jeunesse et parfois leur vie.

... Je termine ce roman, en effet "un magnifique hommage à l'idéal révolutionnaire des années 1960".
Comment ne pas penser à "Ma guerre d'Espagne à moi" de Mika Etchebehere ? Une femme combattante, qui lutte les armes pour ses idées, pour libérer l'humanité...
Mika en Espagne, c'était la lutte contre le franquisme et le stalinisme, dans les rangs des milices du POUM, dans lesquels combattaient, malgré les errements de sa direction, des militants trotskystes (à l'époque ils se désignaient comme bolcheviks-léninistes). C'était le dernier sursaut de la vague révolutionnaire européenne d'après la première guerre mondiale. Ces mouvements révolutionnaires furent vaincus et à l'issue de la 2e guerre le statu-quo imposé par l'impérialisme fut renforcé. Du côté des puissances occidentales la terreur anti-ouvrière se déchaîna (ex. Hiroshima, Nagasaki, Dresde rasée...). Du côté de l'URSS une féroce dictature anti-ouvrière répandant des ersatz d'idées révolutionnaires, sous la forme d'un salmigondis stalino-nationaliste au nom duquel de nombreux militants trotskystes avaient été massacrés. Ces ersatz stalino-nationalistes eurent leur heure de gloire, en Chine, au Viet-nam, en Algérie, à Cuba...
Le livre de Sonallah Ibrahim nous conduit à la fin des années 60 début 70 au sein du Front de Libération du Dhofar, dans le sultanat d'Oman. Les combattants, sincèrement anti-impérialistes sont nourris de nassérisme, de maoisme, d'unité arabe. Une ardente sympathie va aux peuples vietnamiens, palestiniens... Mais du bolchevisme, il ignorent tout, le stalinisme a coupé le fil et quasiment personne n'a essayé de les armer de ce "système d'éducation révolutionnaire pour l'accomplissement de la révolution prolétarienne" (Trotsky). Beaucoup en moururent.
En 2024, presque tout reste à faire, entre autres résister aux appels à la "centralité de la classe ouvrière" de ceux qui font le contraire et se méfier aussi de ceux qui prétendent que le trotskysme est dépassé depuis la disparition de l'URSS...
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Re: Warda...

Message par artza » 02 Jan 2024, 08:15

Et à Gaza ?

Le Hamas se carapate, applaudi, admiré par les pauvres peut-être rejoint par eux ?
Sur place reste la classe ouvrière que l'on bombarde pour la paix de tous les possédants du monde.
artza
 
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Re: Warda...

Message par satanas 1 » 02 Jan 2024, 12:05

Merci de cette belle présentation qui donne vraiment envie de lire le bouquin.
satanas 1
 
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