On ne naît pas Noir, on le devient

[Valiere]

« On ne naît pas Noir, on le devient »
de Jean-Louis Sagot-Duvauroux
aux éditions Albin Michel
232 pages
16 €
septembre 2004

UNE CULTURE, DES CULTURES, UN (E) CITOYEN (NE)

L’auteur, metteur en scène et dramaturge traite d’ une des questions clés de ce début du troisième millénaire : la citoyenneté et la construction de sa propre identité.
Etre soi, être reconnu comme tel et apprendre à vivre avec les autres ?
Comme il l’annonce au début de son livre et dans son titre : « On ne naît pas Noir, on le devient », il faut plusieurs jours pour que la peau se pigmente avant de se construire peu à peu comme un citoyen de plein exercice doté qu’on l’accepte ou non d’une double culture.
Il n’est pas toujours facile de vivre les contradictions…A la maison, c’est « Baisse les yeux quand tu me parles ! », signe de respect et de politesse alors qu’à l’école il faut regarder son interlocuteur !?
Quand Mamadou- prénom attribué par l’auteur- rentre à l’école, l’instituteur peut lui demander, sans qu’il y ait une intention malsaine : « d’où viens-tu ? ».
L’enfant interrogé peut-il répondre comme Noémie qu’il habite rue Jean Jaurès et qu’il est né en France ? Et pourtant, c’est une réalité : sa langue c’est le français, la culture télévisuelle qui l’a « bercé » est aussi française !
Quand on lui demande de parler de « sa » culture, il est bien gêné.
Ne faudrait-il pas que l’instituteur présente réellement la réalité de la culture africaine, sa diversité et sa richesse au-lieu d’interroger Mamadou !quitte à ce que l’écolier s’investisse dans la discussion.
L’auteur nous invite à la rencontre de familles vivant en France, baignées dans une double culture, parfois non partagée et duale alors qu’il s’agit d’une grande richesse culturelle à développer.
Avec beaucoup de finesse et style, il nous décrit la vie, les idées et les aspirations de ces filles et garçons originaires d’Afrique ou des Antilles.
Tantôt il s’agit de faire un voyage dans le temps ou au Mali, dans ce pays où il s’est marié, tantôt il s’agit de partager la vie de maliens français ou de français maliens en France.
Si Jean-Louis Sagot-Duvauroux ne garde aucune rancœur contre l’instituteur qui croît bien faire en interrogeant le petit noir sur « sa culture », il est implacable avec la domination impérialiste, « blanche » qui sous-évalue l’art africain et qui nie l’apport culturel pourtant colossal d’un continent riche en histoire :
« Dernière trouvaille , les « arts premiers », qui remplacent pour une part la dénomination un peu trop évidemment raciale d’arts nègres. Premiers ? Primitifs ? Originels ? Sans généalogie ? Sans contact avec le reste du monde ? Surgis de l’âme vierge ? Identiques dans leur principe, que l’artiste soit du premier millénaire avant notre ère ou qu’il ait créé au XX è siècle ?… »
L’auteur analyse, critique, vilipende les racistes et les imbéciles mais il n’oublie pas que l’histoire moderne conduit à la rencontre, au mélange, à l’enrichissement réciproque, à la fin des frontières liées aux couleurs et aux origines…

Valière

[pelon]

En tout cas, j'aime bien le titre.

[Valiere]

C'est en plus très bien écrit, ce qui donne du plaisir à la lecture et m'a préparé à la lecture du livre de Sarkozy qui nous apprend beaucoup sur les idées de l'ex premier flic de France mais qui est nul à l'écrit.