a quoi sert le progrès

Rien n'est hors-sujet ici, sauf si ça parle de politique

Message par Barnabé » 15 Mars 2004, 23:18

Certes, mais il n'en reste pas moins que dans nos sociétés, les clopes par exemple répondent à un besoin. Un caprice c'est un acte individuel. Un besoin c'est ce qui fait qu'un objet a une valeur d'usage, et qu'il est produit. Et ça, c'est déterminer socialement. Dans la société actuelle, le besoin de clope joue un rôle exactement identique au besoin de nourriture. Mais au fond admettre ça, revient aussi à admettre que la "consomation" ne peut pas fondamentalement se transformer indépendamment de changements profond dans la sociétés, et en fait de changement dans le mode de production.
Autant pour la "décroissance soutenable"...
Barnabé
 
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Message par Dolmancé » 15 Mars 2004, 23:35

Dans l'extrait Marx ne parle pas de bouffer un quignon de pain, il parle de besoins et de plaisirs sociaux... N'importe quel prolo qui a du mal avec ses fins de mois à un téléviseur alors lachez moi avec les SDF... (évidemment quand je parlais de théatre je parlais de théatre associatif à 2 euros l'entrée...)

D'après ce que je comprends du texte de Marx, il pense que ce besoin apparait parce qu'il y a une sorte de frustration par rapport aux repères qu'il a sous les yeux. Perso je n'y crois pas.

Pour moi c'est une question d'infrastructures qui empèchent la possibilité de vivre si on ne se conforme pas au progrès (sachant que j'incorpore les manipulations mentales du à la publicité dans ces infrastructures).



a écrit :# Il n'est pas possible de réaliser un compromis DURABLE entre technologie et liberté, car la technologie est de loin la force sociale la plus puissante et empiète continuellement sur la liberté de compromis SUCCESSIFS en compromis SUCCESSIFS. Imaginons le cas de 2 voisins, chacun possédant la même superficie de terrain ; mais l'un d'entre eux étant plus fort que l'autre. Le fort demande à l'autre une partie de son terrain. Le faible refuse. Le fort dit : "Ok, faisons un arrangement. Donne moi la moitié de ce que je t'ai demandé". Le faible n'a pas d'autre choix que d'obtempérer. Un peu plus tard, le fort réitère sa demande, de nouveau il y a arrangement, et ainsi de suite. Par cette longue série d'arrangements, le fort finira probablement par se rendre maître de tout le terrain de l'autre. Il en va ainsi du conflit entre technologie et liberté.
# Expliquons maintenant pourquoi la technologie est une force sociale plus forte que le désir de liberté.
# Une avancée technologique qui apparaît à première vue comme ne présentant pas de danger pour la liberté se révèle souvent très menaçante au bout d'un certain temps. Par exemple, considérons les transports. Un homme à pied pouvait pratiquement aller où bon lui semblait, à son rythme sans s'occuper des règles du code de la route et était indépendant des structures technologiques. Quand les véhicules à moteurs sont apparus, ils semblaient devoir donner plus de liberté à l'homme. Ils n'empiétaient pas sur la liberté du piéton, personne n'avait d'automobile s'il n'en voulait pas, et celui qui choisissait de posséder une automobile pouvait voyager beaucoup plus vite qu'un homme à pied. Mais l'introduction de ces engins a rapidement changé la société de telle façon que la liberté de se déplacer s'en est trouvée restreinte. Quand les automobiles deviennent trop nombreuses, il devient nécessaire de réglementer leur usage. Dans une voiture, tout spécialement dans les zones fortement peuplées, personne ne peut se déplacer à son rythme, le mouvement est dicté par celui du flot et par les règles du code de la route. De surcroît, l'utilisation d'un moyen de transport motorisé n'est plus simplement optionnel. Depuis l'introduction de ces engins, la conformation de nos villes a tellement changé que la plupart des gens ne peuvent plus vivre sans avoir à se déplacer sur de longues distances entre leur domicile et leur travail, les centres commerciaux, et autres, ce qui fait qu'ils DEPENDENT de l'automobile pour le transport. Ou bien ils utilisent les transports publics, auquel cas ils ont encore plus perdu quant à leur liberté de déplacement qu'en prenant la voiture. Même la liberté du piéton a été considérablement restreinte. En ville, il est continuellement obligé de s'arrêter aux stops et aux feux qui servent principalement à gérer le trafic automobile. A la campagne le trafic rend la marche extrêmement dangereuse et déplaisante le long des grands-routes (Notez le point important que nous avons illustré avec le cas du transport motorisé : quand un nouvel artefact technologique est introduit en tant qu'option qu'un individu peut refuser ou accepter, il ne RESTE pas souvent optionnel. Dans la majorité des cas, la nouvelle technologie change la société de telle façon que les gens se trouvent CONTRAINTS de l'utiliser).
# Alors que le progrès technologique DANS SON ENSEMBLE réduit continuellement notre sphère de liberté, chaque nouvelle avancée technologique CONSIDEREE SEULE apparaît sous un jour favorable. L'électricité, l'eau courante, les communications à longue distance ... Comment pourrait-on protester contre ces choses ou contre n'importe quelles autres avancées parmi les innombrables qui ont été faites dans la société moderne ? Il aurait été absurde de s'opposer au téléphone par exemple. Ainsi que nous l'avons déjà expliqué dans les paragraphes 59-76, toutes ces avancées technologiques prises ensemble ont créé un monde où le destin de l'individu moyen n'est plus entre ses mains, ou entre celles de ses voisins ou amis, mais dans celles des politiciens, des dirigeants de trusts, et d'inaccessibles et anonymes techniciens et bureaucrates sur lesquels il n'a aucun pouvoir. [21] . Le même processus se poursuivra dans le futur. Prenons l'ingénierie génétique par exemple. Peu de gens résisteront aux techniques génétiques qui élimeront les maladies héréditaires. Elles ne présentent pas d'inconvénient apparent, et empêchent la souffrance. Il est pourtant évident qu'une bonne partie des travaux en génétique transformeront l'homme en un produit manufacturé au lieu qu'il demeure une création du hasard (ou de Dieu, ou ce que vous voulez, suivant vos convictions).
- La société industrielle et son futur
Dolmancé
 
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Message par logan » 15 Mars 2004, 23:45

a écrit :D'après ce que je comprends du texte de Marx, il pense que ce besoin apparait parce qu'il y a une sorte de frustration par rapport aux repères qu'il a sous les yeux. Perso je n'y crois pas.


Il n'y a pas à y croire ou pas c'est un fait.
A l'époque ou Marx écrit ces lignes l'electricité n'existe pas.
Aujourd'hui l'electricité est un besoin vital.

de même nos estomacs ne supporteraient pas longtemps le régime alimentaire de l'ère préhistorique.
Hé oui même la faim est un besoin socialement déterminé
logan
 
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Message par Dolmancé » 16 Mars 2004, 09:34

a écrit :Il n'y a pas à y croire ou pas c'est un fait.
A l'époque ou Marx écrit ces lignes l'electricité n'existe pas.
Aujourd'hui l'electricité est un besoin vital.


La remarque n'est pas que c'est devenu indispensable (encore que... y a des écovillages qui s'en passent bien de l'électricité) mais que l'explication que donne Marx sur les raisons de ce phénomène avec sa parabole sur la maison et le palais ne tient pas la route...

a écrit :de même nos estomacs ne supporteraient pas longtemps le régime alimentaire de l'ère préhistorique.
Hé oui même la faim est un besoin socialement déterminé


Attends à l'époque ils bouffaient que du gibier élevé au grand air avec pas un gramme de graisse, rien à voir avec nos élevages prisons fournisseurs officiels des maladies cardiovasculaires! A mon avis c'est plutot l'homme préhistorique qui tiendrait pas deux minutes avec le régime alimentaire occidental (commentaire d'une africaine devant des européens qui mangent : "mais vous bouffez vraiment comme des porcs!") !
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Message par Barikad » 16 Mars 2004, 09:48

Dolmancé, toujours aussi retrograde....
Maintenant, il faudrait se passer d'electricité, n'importe quoi!!!
Quand à la parabole de Marx, tu peux la trouver idiote, mais c'est pourtant une realité. Nos désirs et envies sont conditionnés par les possibilité réelles. Je vais prendre un exemple un peu simple. Quand j'etais gamin, comme beaucoup de gamin, je revbais d'etre cosmonaute et d'aller dans l'espace. Evidemment quelques siecles en arriere je n'aurais pas eu ce desir, c'est une evidence.
Se battre pour une vie meilleures passe par la lutte pour un mieux en terme de "confort". Pouvoir se payer uen machine à laver, pour toi c'est du gaspillage, pour celles qui se tapaient cette corvée dans les lavoirs c'est une liberation. Elles ne pouvait avoir se besoin que lorsque la machine à laver fut inventer. Non?
Barikad
 
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Message par Dolmancé » 16 Mars 2004, 11:55

a écrit :Quand à la parabole de Marx, tu peux la trouver idiote, mais c'est pourtant une realité. Nos désirs et envies sont conditionnés par les possibilité réelles. Je vais prendre un exemple un peu simple. Quand j'etais gamin, comme beaucoup de gamin, je revbais d'etre cosmonaute et d'aller dans l'espace. Evidemment quelques siecles en arriere je n'aurais pas eu ce desir, c'est une evidence.


a écrit :Et au cours de la civilisation elle peut s'agrandir tant qu'elle veut, si le palais voisin grandit aussi vite ou même dans de plus grandes proportions, celui qui habite la maison relativement petite se sentira de plus en plus mal à l'aise, mécontent, à l'étroit entre ses quatre murs.


Je remarque un truc, c'est que ce que tu as dis c'est pas : avoir la possibilité d'aller dans l'espace ou acquérir une navette spaciale mais être cosmonaute et aller dans l'espace, c'est un truc à creuser à mon avis...

Si c'est la jalousie des autres qui devient moteur des besoins et des désirs de l'homme, comment pourrait on espérer une société de partage et non de guerre permanente ? A partir du moment où l'homme reste un produit de la nature il est impossible d'avoir une égalité totale des conditions...


a écrit :Se battre pour une vie meilleures passe par la lutte pour un mieux en terme de "confort". Pouvoir se payer uen machine à laver, pour toi c'est du gaspillage, pour celles qui se tapaient cette corvée dans les lavoirs c'est une liberation. Elles ne pouvait avoir se besoin que lorsque la machine à laver fut inventer. Non?


Cf le texte de Théodore Kaczynski que j'ai cité.

a écrit :Alors que le progrès technologique DANS SON ENSEMBLE réduit continuellement notre sphère de liberté, chaque nouvelle avancée technologique CONSIDEREE SEULE apparaît sous un jour favorable. L'électricité, l'eau courante, les communications à longue distance ... Comment pourrait-on protester contre ces choses ou contre n'importe quelles autres avancées parmi les innombrables qui ont été faites dans la société moderne ?


La machine à laver individuelle c'est un marché de dupe car on ne peut y accéder qu'en faisant partie d'un système coercitif. On ne peut pas avoir l'avantage de la machine à laver sans avoir les inconvénients et dangers de tout ce qu'il y a autour (pollution et désocialisation notamment).

Je mets aussi les §59 à 76 vu qu'il y fait référence et que ça se rapporte au désir...


a écrit :EFFONDREMENT DU PROCESSUS DE POUVOIR DANS LA SOCIETE MODERNE

Nous divisons les désirs humains en trois groupes : (1) ceux qui peuvent être satisfaits avec un minimum d'effort ; (2) ceux qui ne peuvent être satisfaits qu'au prix d'un sérieux effort ; (3) ceux qui ne peuvent être satisfaits quels que soient les efforts accomplis. Le processus de pouvoir permet de satisfaire les désirs du second groupe. Plus il y a de désirs du 3ème groupe, plus cela génère frustration, colère, éventuellement défaitisme, dépression, etc ...

Dans la société industrielle, les désirs naturels de l'homme ont tendance à se retrouver dans les groupes 1 et 3, tandis que le deuxième groupe tend à regrouper tous les désirs artificiellement créés.

Dans les sociétés primitives, les besoins physiques relevaient généralement du groupe 2 : ils pouvaient être satisfaits seulement au prix de gros efforts. Mais les sociétés moderne ont tendance à garantir le minimum vital[9] en échange d'un effort minime, ce qui fait que les besoins primordiaux y relèvent du groupe 1 (il peut y avoir désaccord sur le fait que le fait de conserver un travail est "minime", mais généralement, dans les boulots des couches basses et moyennes de la société, ce qu'on vous demande principalement, c'est l'obéissance. Vous restez assis ou debout là où vous a dit de rester, et faites ce qu'on vous a dit de faire de la façon dont on vous a dit le faire. Vous devez rarement vous impliquer sérieusement, et dans tout les cas, vous avez du mal à acquérir une certaine autonomie, et , ainsi, le processus de pouvoir ne peut pas être satisfait).
Les besoins sociaux, comme le sexe, l'amour, et le statut social, relèvent souvent du groupe 2 dans la société moderne, suivant la position hiérarchique de l'individu. [10] Mais, à l'exception des individus qui ont un fort désir pour un statut social élevé, l'effort requis pour réaliser les désirs sociaux est insuffisante pour satisfaire le processus de pouvoir.

Ainsi, certains besoins artificiels ont été créés pour relever du groupe 2, de façon à essayer de satisfaire le processus de pouvoir. La publicité et le marketing ont été développés de manière à ce que beaucoup de personnes éprouvent des besoins pour des objets que leurs grand-parents n'avaient jamais désirés ou même imaginés. Il faut gagner beaucoup d'argent pour satisfaire ces besoins artificiels, ce qui les fait relever du groupe 2 (Toutefois, voir paragraphes 80-82). L'homme moderne doit satisfaire son besoin de processus de pouvoir essentiellement en courant après les besoins artificiels créés par la publicité et le marketing au service de l'industrie[11], et ce au travers des activités compensatrices.

Il semble que pour beaucoup de gens, peut-être la majorité, ces formes artificielles du processus de pouvoir sont insuffisantes. Un thème qui apparaît régulièrement dans les écrits de la critique sociale de la 2ème moitié du 20ème siècle est le sentiment d'inutilité qui accable de nombreuses personnes dans la société moderne (ce sentiment d'inutilité est souvent désigné sous d'autres termes comme "anomie" ou "vacuité de la classe moyenne"). Nous pensons que la soi-disante "crise d'identité" est à l'heure actuelle une recherche de sens, souvent sous la forme d'une activité compensatrice adéquate. Il est possible que l'existentialisme soit pour une grande part une réponse à ce sentiment d'inutilité.[12] La quête de l'épanouissement est très largement répandue dans notre société. Mais nous pensons que pour la majorité des gens une activité dont le but principal est l'épanouissement (c.a.d. une activité compensatrice) n'apporte pas un épanouissement réel et profond. En d'autres termes, il se satisfait pas totalement le besoin du processus de pouvoir (Voir paragraphe 41). Ce besoin peut être pleinement satisfait uniquement au travers d'activités qui ont un but extérieur, comme les nécessités vitales, le sexe, l'amour, le statut social, etc ...

Pire encore, lorsque les buts passent par gagner de l'argent, gravir les échelons hiérarchiques, ou oeuvrer comme un rouage du système d'une quelconque autre manière, la plupart des gens ne sont pas en position de poursuivre leurs buts de manière AUTONOME. Les travailleurs sont des employés standards, comme nous l'avons vu au paragraphe 61, doivent passer leurs journées à faire ce qu'on leur a dit de faire de la manière qu'on leur a dit de faire. Même la plupart des personnes à leur compte n'ont qu'une autonomie limitée. C'est la plainte constante des petits entrepreneurs comme quoi leurs mains seraient liées par une réglementation étatique abusive. Certaines de ces réglementations sont sans nul doute inutiles, mais elles sont le pendant essentiel et inévitable de notre société hautement complexifiée. Une grande partie des indépendants travaillent sous le régime de la franchise. Il a été rapporté il y a quelques années dans le Wall Street Journal que les sociétés franchisées faisaient passer aux postulants un test destiné à écarter ceux qui faisait montre de créativité et d'initiative, car de telles personnes ne sont pas suffisamment dociles pour se soumettre au système de la franchise. Ceci exclut ainsi beaucoup de gens qui ont un grand besoin d'autonomie.

Aujourd'hui les gens vivent plus en fonction de ce que le système fait pour eux ou à leur place qu'en fonction de ce qu'il font pour eux-mêmes. Et ce qu'ils font est de plus en plus canalisé par le système. Les possibilités deviennent celles que le système tolère, et elles doivent être jugulées par les lois et réglementations[13], et les techniques préconisées par les experts doivent être suivies si on veut avoir une chance de réussite.

Ainsi le processus de pouvoir se désagrège dans notre société du fait d'une déficience de buts authentiques et d'une perte d'autonomie dans la poursuite de ces buts. Mais il se désagrège aussi à cause des désirs qui relèvent du groupe 3 : les désirs qui ne peuvent être satisfaits quels que soient les moyens mis en oeuvre. Un de ces désirs est le besoin de sécurité. Nos vies dépendent de décisions prises par d'autres personnes ; nous n'avons aucun contrôle sur ces décisions, et nous ne connaissons même pas les gens qui les prennent ("Nous vivons dans un monde dans lequel relativement peu de gens - peut-être 500 ou 1000 - prennent les décisions fondamentales" - Philip B. Heymann de l'université de droit de Harvard, interrogé par Anthony Lewis, du New York Times le 21 avril 1995). Nos vies dépendent des niveaux de sécurité réellement appliqués dans une centrale nucléaire ; de la quantité de pesticides autorisée dans nos aliments ou de la pollution dans notre atmosphère ; du niveau de qualification de notre médecin ; le fait que nous trouvions ou perdions un emploi est soumis à l'arbitraire des économistes du gouvernement ou des dirigeants de trusts ; et ainsi de suite. La plupart des individus ne sont pas en position de se défendre eux-mêmes contre tous ces périls, sinon sur une très petite échelle. La recherche de la sécurité est ainsi frustrée, ce qui conduit à un sentiment de dépérissement.

On peut rétorquer que l'homme primitif est physiquement bien moins à l'abri que son homologue moderne, ainsi que le montre sa plus faible espérance de vie ; c'est pourquoi l'homme moderne souffre moins et non pas plus de l'insécurité. Mais la sécurité psychologique ne correspond pas exactement avec la sécurité physique. Ce qui nous fait nous SENTIR en sécurité n'est pas tant une sécurité réelle que le sentiment de confiance en notre capacité à nous débrouiller nous-mêmes. L'homme primitif, acculé par un fauve ou poussé par la faim, peut se défendre ou partir à la recherche de nourriture. Il n'est pas certain de réussir, mais il n'est certainement pas sans ressource face à l'adversité. D'un autre côté, l'homme moderne est démuni face aux accidents nucléaires, aux substances cancérigènes dans la nourriture, à la pollution, la guerre, l'augmentation des impôts, les intrusions dans sa vie privée, et en général face aux phénomènes sociaux ou économiques à l'échelle de la nation qui peuvent détruire son mode de vie.

Il est vrai que l'homme primitif est démuni face à certains périls, la maladie par exemple. Mais il accepte stoïquement le risque de maladie. Cela fait partie de la nature des choses, ce n'est la faute de personne, sinon d'un démon, contre lequel on ne peut rien. Mais ce que subit l'homme moderne est L'OEUVRE DE L'HOMME. Ce n'est pas du à la malchance, mais ça lui est IMPOSE par d'autres personnes qu'il est incapable, en tant qu'individu, d'influencer. En conséquence de quoi, il se sent frustré, humilié et en colère.

Ainsi l'homme primitif a pour une grande part sa sécurité entre ses propres mains (soit comme individu, soit comme membre d'un PETIT groupe) tandis que la sécurité de l'homme moderne est entre les mains de personnes ou d'organisations qui sont trop inaccessibles pour qu'il soit à même de pouvoir les influencer. Ainsi, le désir de sécurité de l'homme moderne tend à relever des groupes 1 et 3 ; dans certains cas (nourriture, logement, etc ...), cette sécurité est assurée au seul coût d'un faible effort, tandis que dans les autres cas, il ne PEUT PAS accéder à cette sécurité (Ce qui précède simplifie exagérément la situation réelle, mais indique en gros en quoi la condition de l'homme moderne diffère du primitif).

Les gens ont des désirs passagers ou des envies qui sont nécessairement contrariées dans la vie moderne, et qui relèvent ainsi du groupe 3. On peut être affamé, mais la société moderne ne permet pas de chasser. L'agression verbale est même interdite dans de nombreux cas. Quand on se déplace, on peut être pressé ou bien décontracté, mais on n'a pas généralement le choix, sinon de se déplacer au rythme du trafic et d'obéir aux signaux. On peut vouloir travailler d'une manière différente, mais souvent on doit travailler suivant les directives de son employeur. De bien d'autres manières, l'homme moderne est emprisonné dans un réseau de lois et réglementations (implicites ou explicites) qui contrarient ses envies et ainsi interfèrent avec le processus de pouvoir. La plupart de ces réglementations ne peuvent pas être ignorées, car elles sont nécessaires au fonctionnement d'une société industrialisée.

La société moderne est sous bien des aspects extrêmement permissive. Tout ce qui ne perturbe pas le fonctionnement du système, nous pouvons le faire. Nous pouvons croire en la religion de notre choix (tant qu'elle n'encourage pas des attitudes dangereuses pour le système). Nous pouvons coucher avec qui bon nous semble (tant que nous pratiquons le "safe sex"). Nous pouvons faire ce que nous voulons tant que c'est ANODIN. Mais quand cela devient IMPORTANT, le système a tendance à progressivement réguler nos comportements.

Nos comportements ne sont pas seulement régulés par des lois explicites et pas seulement par le gouvernement. Le contrôle est souvent exercé par une coercition indirecte ou par une pression psychologique ou des manipulations, et, ce, par des organisations autres que le gouvernement, ou par le système dans son ensemble. La plupart des grandes organisations utilisent des formes de propagande [14] pour manipuler le public dans ses attitudes et comportements. La propagande n'est pas limitée au "commerce" et à la publicité, et parfois n'est même pas considérée comme telle par les gens qui la diffusent. Par exemple, le contenu d'un programme de divertissement est une puissante forme de propagande. Un exemple de coercition indirecte : Il n'y a pas de loi qui dise qu'il faille aller travailler tous les jours et suivre les directives du patron. Légalement, rien ne nous interdit de retourner à l'état sauvage ou de travailler pour notre compte. Mais en pratique, il reste peu de contrées sauvages, et il y a une place limitée dans notre économie pour "l'artisanat". Ce qui fait que la plupart d'entre nous ne peuvent survivre qu'en étant l'employé de quelqu'un.

Nous soutenons que les obsessions de l'homme moderne pour la longévité de sa vie et pour assurer jusqu'à un âge avancé la vigueur physique et l'attrait sexuel sont un symptôme d'une aliénation résultant de la déliquescence du processus de pouvoir. La "crise de l'âge mûr" en est aussi un symptôme. De même la perte d'intérêt pour une nombreuse progéniture assez courante dans la société moderne, mais presque insensée dans les sociétés primitives.

Dans une société primitive, la vie est une succession d'étapes. Les besoins et fonctions propres à un stade ayant été accomplies, il n'y a pas de problème particulier à passer au stade supérieur. Un jeune homme accomplira son processus de pouvoir en devenant un chasseur, non pour le sport ou pour l'agrément, mais pour assurer sa subsistance (en ce qui concerne les jeunes femmes, le processus est plus complexe, du fait d'un accroissement du rôle social ; nous n'en discuterons pas ici). Cette période ayant été couronnée de succès, il n'y a pas de problème pour s'assagir et fonder un foyer (par contre, certains "modernes" repoussent indéfiniment le moment d'avoir des enfants car ils sont trop occupés à rechercher "l'épanouissement" de quelque manière que ce soit. Nous pensons que l'épanouissement dont ils ont besoin est une expérience correcte du processus de pouvoir - avec des buts réels au lieu des buts artificiels des activités compensatrices). De même, après avoir élevé ses enfants, avoir utilisé le processus de pouvoir pour leur fournir subsistance, l'homme primitif sent que son heure est venue et accepte la vieillesse (s'il survit jusque là), puis meurt. D'un autre côté, la plupart des hommes modernes, sont hantés par l'inéluctabilité de la mort, comme le montre la somme d'efforts qu'ils déploient pour conserver leur vigueur, leur attrait et leur santé. Nous affirmons que ceci est du au fait qu'ils n'ont jamais utilisé leurs capacités physiques d'une quelconque manière, qu'il n'ont jamais éprouvé leur processus de pouvoir en utilisant leur corps de façon sérieuse. Ce n'est pas l'homme primitif, qui a quotidiennement exercé son corps, qui craint les affronts de l'âge, mais le moderne qui ne l'a jamais fait, à part marcher de sa voiture à sa maison. C'est l'homme dont le besoin du processus de pouvoir a été satisfait durant sa vie qui est le mieux préparé à accepter la fin de sa vie.

En réponse aux arguments de cette section, quelqu'un rétorquera : "la société doit trouver un moyen de donner aux gens la capacité d'exercer leur processus de pouvoir". Pour de telles personnes, cette capacité est nulle par le simple fait que la société la leur donnera. Ce dont elles ont besoin, c'est de trouver cette capacité d'elles-mêmes. Tant que le système leur DONNERA les "moyens", ils seront en laisse. Pour parvenir à l'autonomie, ils doivent se débarrasser de la laisse.




Et puis pour relativiser ces histoires d'espérances de vie... tout ce qu'on a gagné depuis les années 50, on le passe à regarder la télé (en 2001 les français passaient en moyenne 3h15 minutes devant la télévision, et près de 3h30 pour ceux qui avaient accès à un bouquet de chaines thématiques)
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