a écrit :LES MUTUELLE.S DE SANS-TICKETS
Octobre 2005
Depuis 2000, le RATP - Réseau pour l’Abolition des Transports Payants - s’est saisi de la revendication des transports gratuits pour toutes et tous et a essayé de la faire vivre, en la nourrissant de réflexions, de débats et d’actions concrètes, toujours dans un sens de rupture avec les logiques aliénantes et oppressives du capitalisme et de l’Etat.
Lorsque que l’on commence à réfléchir sur l’organisation des transports, on s’aperçoit vite que la justification des transports payants n’est absolument pas économique, mais d’abord politique : les transports payants sont, par divers biais, un instrument privilégié de contrôle social, ce qui signifie dans une société capitaliste et étatiste, un instrument d’ « apartheid social ». Le ticket de transport est le prétexte à toutes les polices : police des étrangers et étrangères, des pauvres, des jeunes, des militants et militantes, des révolté.e.s, etc.
Aujourd’hui, nous constatons que le discours sur les transports gratuits pour toutes et tous est souvent compris, intégré et vécu par des usagers et usagères, voire par certains et certaines salarié.e.s des entreprises de transport. Les élu.e.s, lorsqu’ils ou elles ne sont pas bouchés, tentent d’y faire face en réorientant la revendication vers une « gratuité-charité », c’est-à-dire réservée à celles et ceux que l’on catégorise comme victime d’un système dans lequel le but demeure la « réinsertion ». Cela donne généralement des systèmes d’allocations complexes et coûteux, dont l’un des buts est surtout de ne pas remettre en cause le principe des transports payants, ni la valeur travail (car ces bénéficiaires de la gratuité sélective sont définis par rapport à la situation de chômeur ou d’allocataires des minima dits « sociaux »).
Dans le même temps, nous constatons une répression très fortement accrue sur toutes les personnes pauvres et/ou revendicatives. Dans le domaine des transports (transports en commun comme automobile), ce sont toutes les lois répressives nouvelles depuis 1999, et tout particulièrement les lois Jospin (LSQ de 2001), Sarkozy (LSI de 2003) et Perben (I et II de 2002 et 2004). Résultat pour les transports en commun : c’est jusqu’à 7.500 € d’amende et jusqu’à 6 mois d’emprisonnement qui attendent le ou la sans-ticket qui a le malheur de s’être fait verbalisé.e plus de 10 fois sur une période de 12 mois (sans avoir pu réglé les amendes).
Ces lois répressives sont bel et bien appliquées puisqu’à ce jour, on peut estimer à plus de 8.000 les dépôts de plainte pour délits de fraude habituelle (dont 5.000 par la SNCF sur toute la France, 2.000 par la RATP en Ile-de-France, et 1.000 cumulés sur tous les autres réseaux urbains : Marseille, Lyon, Orléans, etc.), ayant conduit à plus de 2.700 jugements déjà rendus, dont grosso-modo 1/3 de peine de prison ferme, 1/3 de peine de prison avec sursis et 1/3 de « simple » amende.
Pour l’Ile-de-France en particulier, et en croisant toutes les données, on peut estimer un rythme mensuel de : 430 dépôts de plaintes ( 180 SNCF et 250 RATP) 125 jugements rendus ( 50 SNCF et 75 RATP) dont 45 amendes, 45 prison avec sursis et 35 prison ferme.
Face à cette répression comme à d’autres, l’action individuelle est vouée à l’échec, et seuls des outils de résistance et de lutte collectifs et solidaires permettront d’offrir une perspective concrète et efficace. Pour répondre à cette évidence, le RATP s’est interrogé sur les mutuelles de sans-tickets dont on apprend l’existence ici et là, plus particulièrement chez nos voisin.e.s scandinaves (finlandais d’Helsinki, suédois de Stockolm ou Göteborg). Le principe est simple : on cotise à une mutuelle qui prend ensuite en charge le paiement des amendes auxquelles on n’a pas pu échapper.
Après avoir réfléchi à comment ne pas faire de cet outil une simple assurance, qui finirait par générer un contre-modèle de transports payants (basé sur le prix de l’amende et non plus du ticket !), le RATP s’est investi dans la création d’une première petite mutuelle sur Paris et la région parisienne, clairement rattachée à la revendication des transports gratuits pour toutes et tous. Bien sûr, toute initiative locale pour multiplier des petites mutuelles sur des quartier ou des villes, nous semble préférable, plutôt que d’essayer de construire une énorme structure à l’échelle de la région. Il sera toujours temps, avec une multitude de petites structures, d’imaginer et de mettre en œuvre une fédération des mutuelles.
Pour celles et ceux que ce genre de mutuelle intéresse, la première réunion de fonctionnement se tiendra mercredi 12 octobre 2005 au CICP (21ter rue Voltaire, Paris 11ème) à 19h (puis ensuite environ une fois par mois) pour faire fonctionner cet outil de résistance par l’entraide et la solidarité.
Fraternité à toutes et tous, Le RATP