Le Progrès 2003@mercredi 29 octobre 2003 CITATION Pas de jour férié pour la polémique
Jouant l'apaisement, Jean-Pierre Raffarin s'est borné à annoncer hier, devant les sénateurs, que la suppression du lundi de Pentecôte comme jour férié n'était que « l'une des hypothèses » envisagées par le gouvernement pour financer l'aide aux personnes âgées et handicapées, contredisant en cela une information donnée un peu plus tôt par Matignon. Un flou qui n'a pas échappé à l'opposition et aux syndicats, qui ont a bruyamment dénoncé un «impôt travail».
Jean-Pierre Raffarin marche sur des oeufs. Après des informations contradictoires émanant de Matignon, annonçant que la décision avait été prise de supprimer le jour de Pentecôte pour financer l'aide aux personnes âgées et handicapées, le Premier ministre s'est contenté hier après-midi d'affirmer au Sénat que cette suppression n'était « seulement » que « l'une des hypothèses » envisagées.
Interrogé à sa sortie de l'hémicycle, ce dernier a confirmé que sa décision n'était « pas arrêtée à ce jour, tant que l'action en faveur des personnes dépendantes n'est pas elle-même arrêtée ». Il a ajouté avoir demandé aux ministre de la Santé, Jean-François Mattei, et du Travail, François Fillon, de « finaliser leurs projets ». Le chef du gouvernement n'a pas non plus rejeté la proposition d'Alain Juppé qui aurait, pour sa part, « plutôt » supprimé un jour de RTT. Quant au calendrier, Jean-Pierre Raffarin a déclaré qu'il n'était pas « à une semaine près ». Les syndicats, si, apparemment, qui n'ont pas attendu pour dénoncer unanimement cette éventuelle suppression. « Mauvaise réponse à une vraie question » pour la CFDT, « gadget » pour la CFTC, elle a été qualifiée de « charité obligatoire » par FO et de « pas sérieuse » par la CFE-CGC. Jean-Marc Ayrault, président du groupe PS à l'Assemblée, a renchéri : le gouvernement « est en train d'inventer un nouvel impôt, l'impôt travail ».
Rejoignant en ce sens Olivier Besancenot (LCR), qui a ajouté que « la suppression d'un jour férié » constituait « une nouvelle atteinte à la durée légale du travail ». Et de requalifier le lundi de Pentecôte de « journée pour le patronat alors qu'une seule journée de profits des grands groupes permettrait d'engranger un milliard d'euros ».--------------------------------------------------------------------------------
Cafouillage gouvernemental
Il y a des moments où l'on peut se demander si Jean-Pierre Raffarin sait précisément où il veut aller. L'affaire de la suppression du lundi de Pentecôte comme jour férié en constitue un bel exemple. Voilà plusieurs mois que l'idée a été lancée. Plusieurs mois pendant lesquels les services du Premier ministre ont eu largement le temps d'étudier la faisabilité d'une telle mesure et l'impact réel qu'on peut en attendre.
Au lieu de cela, ce qui s'est passé hier laisse pour le moins une impression de parfait cafouillage. A quelques minutes d'écart, l'information publiée le matin par deux quotidiens a d'abord été confirmée (source gouvernementale) puis rapidement démentie par Matignon, qui affirmait que rien n'était encore réellement décidé. De deux choses l'une : ou bien certains ministres jouent « perso » et tentent de mettre le Premier ministre devant le fait accompli. Ou bien le chef du gouvernement lui-même hésite et change d'avis au fil des heures. Dans les deux cas, ce n'est pas très rassurant. Au moment où Jean-Pierre Raffarin cherche désespérément comment restaurer sa cote de popularité, ce n'est certainement pas ce genre de valse-hésitation qui va lui permettre de retrouver la confiance des Français.
GÉRARD ANGEL
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Falco donne des noms
Le fait que Jean-Louis Debré, président de l'Assemblée nationale, lui ait hier coupé le micro en pleine séance parce qu'il avait dépassé son temps de parole, n'aura pas empêché le secrétaire d'Etat aux Personnes âgées de dire ce qu'il avait à dire. Sortant aussitôt de l'hémicycle pour s'adresser aux journalistes dans la salle des Quatre colonnes, Hubert Falco leur a déclaré qu'une demi-douzaine de députés socialistes, dont quatre anciens ministres, « avaient signé au mois de juin 2003 dans le journal La Vie un appel à la suppression d'un jour férié pour la solidarité nationale ». Citant les noms de Marilyse Lebranchu, Laurent Fabius, Jean-Marc Ayrault, Jean-Louis Bianco, Pascal Terrasse, François Loncle et Didier Migaud, le secrétaire d'Etat a affirmé que ces derniers étaient « les mêmes qui, aujourd'hui, attaquent cette possibilité qu'a le gouvernement de financer dans le cadre d'une contribution de solidarité nationale le plan vieillissement solidarité ».
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Le précédent allemand
En 1994, l'Allemagne supprime le « jour des pénitences et des prières », férié dans tout le pays depuis la réunification. Objectif : instaurer une allocation permettant de financer des soins à domicile aux personnes ayant besoin de visites de personnel spécialisé. Ou plutôt offrir une compensation au patronat, pour la ponction de 0,5% à laquelle ce dernier, ainsi que ses salariés, devaient consentir pour la financer. Le choix du jour férié avait été laissé à la libre appréciation des Etats régionaux- ou Länder -, mais l'écrasante majorité d'entre eux avaient jeté leur dévolu sur cette fête protestante, en dépit des récriminations des Eglises et des syndicats. Celle-ci offrant l'avantage de tomber toujours en novembre pendant un jour de semaine. Depuis 1994, toutes les tentatives de consultations populaires menées dans certains Etats régionaux pour réinstaurer « le jour des pénitences et des prières » ont échoué.
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