Il existe en France nombre de réactionnaires qui n'ont pas abandonné l'idée d'interdire à nouveau l'avortement. Si, à l'assemblée nationale, ils n'attaquent pas frontalement, leur pugnacité, leur activisme est bien présent. A titre d'exemple, un amendement qui vient d'être voté pourrait avoir des conséquences juridiques. Vous lirez dans l'article ci-dessous que ce sont les femmes les plus modestes qui risquent de subir les conséquences de cet amendement.
Oui, les droits des femmes reste un problème d'actualité brulante.
CITATION
Les députés créent un délit d'interruption involontaire de grossesse «par maladresse, imprudence, inattention, négligence..»
A l'Assemblée, une ombre sur le droit à l'avortement
Par Jacqueline COIGNARD
vendredi 28 novembre 2003
Grand charivari dans l'hémicycle, hier à l'Assemblée nationale : en deuxième lecture d'un texte censé traiter de criminalité organisée, Jean-Paul Garraud (UMP) a fait passer un amendement créant un délit d'interruption involontaire de grossesse passible d'un an de prison commis par «maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité». Qui s'appliquerait en cas d'accident mais aussi d'erreur médicale... Cet amendement qui flirte avec une redéfinition du statut du foetus, et qui pourrait être un premier pas vers une remise en cause du droit à l'avortement, a fait hurler l'opposition. «Vous n'avez pas présenté ce texte en première lecture pour éviter le Sénat ! Est-ce normal pour un sujet de cette gravité ?», s'indigne Jean-Yves Le Bouillonnec (PS). Jean-Paul Garraud s'est, en effet, heurté à l'hostilité des sénateurs. Un texte sur la violence routière lui servait alors de véhicule. L'Assemblée avait fini par l'adopter. Mais la commission du Sénat l'avait rejeté, estimant qu'il remettait en cause le statut du foetus. «Des sénateurs de la majorité se sont ralliés à l'opposition. Et Badinter s'est battu bec et ongles contre votre amendement», tonne Jean-Yves Le Bouillonnnec. Selon Jean-Paul Garraud, la démarche n'aurait pour but que de combler un vide.
Pour l'opposition, il n'y a aucun vide juridique à combler. «La Cour de cassation estime qu'il ne peut y avoir d'homicide involontaire contre un foetus. Ce qu'elle dit ne constitue pas un vide juridique, mais une appréciation de la loi», martèle Jean-Yves Le Bouillonnec. Et il réclame, au moins, un débat public sur un sujet qui ne peut pas être expédié de cette manière «à l'esbroufe, dans des conditions indignes de notre Assemblée». «Vos arguments sont ceux des groupes "pro-life" qui se battent contre l'IVG», ajoute Jean-Marie Le Guen (lire ci-contre). Le député PS décrit ainsi la démarche de Garraud. D'abord : ne pas remettre en cause frontalement le droit à l'IVG, objet d'un consensus fort, mais l'entourer d'une image de pénalisation. Ensuite : se cacher derrière un appel à la compassion en s'appuyant sur quelques cas particuliers. Enfin : camper dans le rôle de la victime injustement attaquée dans les médias.
Pour Perben, il ne s'agit pas d'une remise en cause du droit à l'IVG. Selon lui, un sous-amendement du rapporteur Warsmann permettrait de lever toute ambiguïté en stipulant que l'amendement Garraud «ne saurait en aucun cas faire obstacle au droit de la femme enceinte de recourir à une IVG». Le Bouillonnec raille : «Ce sous-amendement c'est le summum ! Il dit : "Je vous l'affirme, l'IVG n'est pas un délit." Vous avez déjà vu ça dans le code pénal ?» L'amendement Garraud a été adopté. Il sera réexaminé, avec l'ensemble du texte, par le Sénat en janvier.
© Libération
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