a écrit : Nathalie Arthaud
l’Union soviétique continua sur un cours ascendant son développement industriel au point que, de pays sous-développé du départ, comparable à l’Inde ou au Brésil, elle devint dans les années 1960 une puissance industrielle
Evitons les insultes, les grandes proclamations idéologiques etc. Examinons les faits.
Inutile de tergiverser : le passage souligné est erronné.
En 1913, le PIB par tête en Russie était de 1200 , contre 700 pour le Brésil et 536 pour l'Inde. Surtout, la Russie était déjà en pleine industrialisation très rapide dans la période qui précède la guerre. Le développement industriel du Brésil et de l'Inde sera beaucoup plus tardif : je le répète : 1ère aciérie au Brésil en 1940. Et l'Inde était un pays colonial dominé par l'Angleterre.
Voyons maintenant les développements comparés entre 1913 et 1989 (chiffres Maddison) :
PIB par tête en dollars, même source.
La Russie URSS passe de 1202 à 7461
Le Brésil de 700 à 4241
L'Inde de 536 à 1065
La Corée de 819 à 6500
Le Japon de 114 à 15 000
L'Espagne de 2188 à 9880
La moyenne du tiers monde de 997 à 3966
La moyenne de l'Amérique Latine de 1467 à 4247
Que ressort-il de ces chiffres ?
Le PIB de l'URSS a été multiplié par 6
Celui de la France par 4,5
Celui du Brésil par 6
Celui de l'Inde par 2
Celui de la Corée par 8
Celui du tiers-monde par 4
Donc, en gros, selon ces chiffres :
L'URSS s'est développée un peu plus vite que la France, plus vite que le tiers-monde,
à la même vitesse que le Brésil, mais beaucoup moins vite que le Japon et la Corée.
C'est donc un développement un peu au dessus de la moyenne, mais inférieur au développement des pays les plus "dynamiques".
Sur le plan purement quantitatif (représenté par le PIB),
ce sont des résultats très honorables. Mais on est très loin d'une supériorité évidente et surtout d'avoir accompli en 20 ou 30 ans le chemin parcouru par les autres en un siècle.
Sur le bilan social, j'ai mis en ligne un texte comportant des éléments d'appréciations et des chiffres concernant la situation dans les annnées 80.
Pour avoir un bilan complet, il faudrait connaître la part du produit national attribué à la population (alimentations, biens de consommations, logements, services sociaux), celle attribuée à la nomenklatura et celle attribuée à l'industrie lourde et militaire qui fit pousser des cris d'extase aux staliniens (Gagarine et son spoutnik).
ON en a au moins un, que personne n'a pris la peine de commenter : 4/5 % du budget consacré à la santé, dont la moitié pour les établissements spéciaux réservés à la nomenklatura, contre 11 % en France...
Pour conclure, je n'essaie pas à tout prix de prétendre que l'URSS ne se serait pas développée, ni que la planification n'aurait aucune efficacité, mais je m'élève contre la véritable apologie qui ressort de la dernière intervention de NA et j'essaie de cerner la réalité de ce développement, au delà de la mythologie.
Ajoutons que, si l'on doit s'extasier sur le développement industriel, quelle que soit la nature des biens produits, et quelles que soient les souffrances imposées à la population pour y parvenir, c'est la Chine qui devrait aujourd'hui vous faire pousser des cris d'admiration.
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NB Il y a un autre élément à prendre en compte quand on essaie de comprendre la signification des chiffres cités. C'est que les périodes de développement extensif donnent des augmentations de PIB plus rapides que les périodes de développement.
intensif.
Enfin, dans les pays déjà très développés en 1913 (France, Allemagne etc), même quand le rythme d'augmentation est plus faible, l'augmentation en valeur reste très élevée. Ainsi, si le Japon de 1989, dont le PIB était le double de celui de l'URSS, augmentait son PIB de 5 % et l'URSS de 5 %, l'écart en valeur absolue se creuse.