a écrit : Trotsky cité par Badou
La première concentration des moyens de production entre les mains de l'Etat que l'histoire connaisse a été accomplie par le prolétariat au moyen de la révolution sociale et non par les capitalistes au moyen des trusts étatisés. Cette brève analyse suffit à montrer combien sont absurdes les tentatives faites pour identifier l'étatisme capitaliste et le système soviétique. Le premier est réactionnaire, le second réalise un grand progrès.
Il faut alors donner une explication sérieuse de l'apparition de régimes semblables, avec concentration des moyens de production aux mains de l'Etat, en Chine, en Corée du Nord etc. Car Trotsky défendait ce point de vue avant la seconde guerre mondiale.
L'explication marxiste qui me semble la meilleure, c'est que ces régimes correspondaient à une tentative d'industrialiser des pays arriérés ou semi-arriérés à marches forcées. Ces tentatives étaient incarnées par des bureaucraties, car la bourgeoisie privée n'était pas assez développée et trop liée à l'impérialisme pour procéder à une telle tentative. C'est pourquoi l'idéologie et le "modèle" staliniens ont eu autant de succès dans le tiers monde auprès de la petite bourgeoisie nationaliste, candidate à jouer ce rôle.
LO accepte en gros cette explication pour la Chine et les autres pays, sauf pour l'URSS, sans aller jusqu'au bout de son analyse, c'est à dire sans mettre en lumière toutes les significations de ce phénomène.
Une fois que le prolétariat a perdu le pouvoir en URSS - on peut évidemment discuter de la date - la révolution russe, qui était une révolution "double", c'est à dire une révolution bourgeoise dirigée par le prolétarait, est "retombée" au niveau d'une révolution bourgeoise de cette forme nouvelle et exceptionnelle pour l'époque, et ce
en dépit du maintien de l'économie étatisée, qui n'avait pas de caractère de classe en elle-même..
Autrement dit, les régimes de la Chine et de l'URSS ne représentent pas un dépassement du capitalisme, mais au contraire un capitalisme archaïque qui utilisait les formes d'exploitation les plus brutales, comme le travail forcé, c'est à dire les méthodes du 19ème siècle à une échelle gigantesque, pour procéder à l'accumulation primitive du capital dans des pays isolés.
a écrit :
L'URSS constituait-elle un progrès par rapport au tsarisme et la restauration du capitalisme un recul
La révolution russe, "retombée" au rang de révolution bourgeoise après la perte du pouvoir par le prolétariat représente un progrès par rapport à un régime semi-féodal, de même que la révolution chinoise a représenté aussi un progrès au même titre. En détruisant les structures féodales, ces révolutions ont permis le développement du capitalisme.
Le problème est que ce développement du capitalisme n'a plus le caractère progressiste qu'il avait avant que les forces productives soient suffisamment développées pour passer à une forme d'organisation socialiste.
Le programme stalinien de développement d'industries nationales dans des pays arriérés n'est pas un programme progressiste, par rapport au développement complètement différent que connaîtraient ces pays si le socialisme mondial avait la possibilité de mettre l'industrie des pays les plus développés à leur service.
Quant à ce que tu appelles la restauration du capitalisme, ce n'est que le passage d'une forme de gestion de l'économie incapable de continuer à développer les forces productives (stagnation et même recul sous Brejnev) à une autre.
La fermeture de gigantesques usines russes - et aussi chinoises - obsolètes peut se comparer à la fermeture d'entreprises non compétitives sur le marché mondial dans n'importe quel pays du monde. Pour les travailleurs concernés, c'est bien évidemment une catastrophe, mais l'alternative, ce n'est pas le retour à un capitalisme d'Etat moribond, c'est la révolution mondiale.
a écrit :
Ta phrase correspond exactement au célebre "j'écoute ceux qui ne manifestent pas".
Non, car quand Sarkozy ou d'autres, face à des manifestations, déclare qu'il écoute ceux qui ne manifestent pas, cela signifie qu'il y a justement des gens qui manifestent, même s'ils sont moins nombreux (comme presque toujours) que ceux qui restent chez eux ou au boulot. Mais, en URSS personne n'a manifesté pour défendre le régime. Tous les travailleurs du monde se mobilisent, à des degrés divers, quand on leur reprend des acquis importants. Les travailleurs russes ne sont pas plus stupides que les autres.
A Cuba par exemple, où il reste des acquis de la révolution - du moins il en restait il n'y a pas très longtemps -, une partie au moins de la population se mobiliserait contre un débarquement américain ou d'émigrés de Miami, même si elle critique Castro. Certes cette mobilisation aurait aussi un contenu nationaliste, mais pas seulement.
a écrit :
Donc désolé si tu te sent accusé d'anti-communisme, mais si tu utilisait des argument de bonne foi cela ne risquerait pas d'arriver.
Tu fais visiblement partie de ces gens qui sont tellement convaincus d'avoir raison, qu'ils ne peuvent pas admettre qu'on puisse défendre... de bonne foi un point de vue différent. Mieux vaut t'y habituer : s'il y a un jour un parti révolutionnaire influent parmi les travailleurs, il sera certainement parcouru par différents courants, tout le monde n'aura pas nécessairement le même point de vue sur tout.
a écrit : Finimore
Les "thèses mao-staliniennes" comme tu dis, sont-elles intéressantes pour comprendre et éclairer le sujet ? moi je pense que oui !
Disons qu'il est difficile de discuter de la même façon avec des nostalgiques du stalinisme qu'entre militants qui possèdent un certain nombre de références communes en dépit de leurs divergences.
Or, je n'avais pas clairement compris jusqu'ici que tu te revendiquais du mao-stalinisme, dont le système de pensée, les concepts etc sont totalement différents de ceux du courant trotskyste. Le stalinisme est à mon avis l'idéologie de classe de la bureaucratie, en cela il s'écarte complètement du marxisme. Staline a transformé une méthode d'analyse vivante en une série de dogmes à géométrie variable servant uniquement à justifier sa politique. Ne parlons même pas du maoisme qui tient carrément de la superstition avec la déification de la "pensée mao tsé toung" mise à toute les sauces.
Les ouvriers du Yunan qui ont redécouvert le cirage grâce à la pensée de Mao (Pékin Information), ça ne te rappelle rien ?