Arlette au Monde

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Message par alex » 10 Déc 2004, 16:09

ENTRETIEN

"Un "non" à la Constitution donnerait une victoire morale aux travailleurs"

LE MONDE | 10.12.04 | 14h37

Arlette Laguiller est porte-parole de Lutte ouvrière.

Lutte ouvrière se prononce en faveur du "non" au référendum sur la constitution européenne. C'est un tournant pour votre organisation, dont la position habituelle était l'abstention.

L'abstention aux référendums n'est pas pour nous une question de principe. Tout dépend de la question posée, de l'enjeu. Quand la dimension plébiscitaire est évidente - je pense, par exemple, au référendum de De Gaulle - en avril 1969 - sur la régionalisation - on préfère s'abstenir. En 1992, le référendum sur Maastricht était un autre cas encore. Nous avions une appréciation mitigée.

D'un côté, il y avait l'envie de ne pas apparaître anti-européen et d'affirmer que nous étions et sommes toujours pour la monnaie unique, comme nous sommes pour la suppression des frontières y compris, je le dis au passage, avec la Turquie. Nous ne sommes pas des souverainistes.

A côté de ces points positifs, il y avait aussi, dans le traité de Maastricht, un certain nombre de critères de stabilité dont on se doutait qu'ils seraient surtout à géométrie variable et qu'ils pèseraient sur les petits pays et pas sur les grands. Bref, il y avait des raisons d'être pour, d'autres d'être contre. Tout cela a fait qu'au final on a choisi l'abstention.

Le "non" s'est-il imposé comme une évidence ?

Au début, nous étions partagés entre le "non" et l'abstention, même si, à la direction de LO, existait plutôt une tendance en faveur d'un appel au "non". On a mené des débats internes. A l'issue de tout cela, le "non" l'a emporté. Lors du congrès - qui s'est déroulé à huis clos les 4 et 5 décembre -, moins de 10 % des camarades se sont prononcés en faveur de l'abstention.

Qu'est-ce qui, dans ce traité, motive votre "non"?

Il y a dans ce texte des formulations qui risquent d'entraîner des dérives réactionnaires. Il y a l'idée d'augmenter les budgets militaires, pour constituer une défense européenne. Ce qui ne nous convient pas. Autre exemple : le texte reconnaît toutes les religions, mais pas le matérialisme ni l'athéisme, qui ont permis de faire avancer la science et les idées. S'agissant des droits des femmes, le droit à la vie est mentionné, mais pas le droit à l'IVG, ce qui nous inquiète.

De la même façon, on reconnaît le mariage, mais il n'y a rien sur le divorce. J'ajoute que la notion de service public s'efface devant un nouveau vocable, celui de service d'intérêt économique général. Ce qui renvoie en réalité à toutes les grandes infrastructures que l'Union européenne a déjà décidé de construire pour l'est de l'Europe, au bénéfice des capitalistes de l'ouest qui veulent y investir et pas du tout au bénéfice des peuples.

Le fait que le PCF se soit engagé dans une campagne sur le "non" a-t-il joué un rôle ?

Pas du tout. On ne s'est pas déterminé en fonction du PCF, mais en fonction de ce que l'on pense.

A gauche, les partisans du "non" estiment que ce texte grave dans le marbre le libéralisme. Est-ce votre opinion ?

Cette Constitution ne nous semble pas changer grand-chose à ce qu'est la politique du capitalisme financier et des grands trusts européens. Le principe de "concurrence libre et non faussée" est déjà généralisé à toute l'Europe. Est-ce que les capitalistes ont eu besoin de la Constitution pour cela ?

Pour nous, cette politique continuera s'il n'y a pas de luttes des travailleurs, et ce même si la Constitution européenne était repoussée.

Donc cela ne change rien de dire "non"?

Ce n'est pas vrai. Si les travailleurs ont envie de dire "non" parce qu'ils sont mécontents des attaques qu'ils subissent et que le "non" l'emporte, cela leur donnera une victoire morale. Mais cela ne nous exonérera pas des luttes à mener. Nous avons d'ailleurs décidé de ne démarrer notre campagne sur ce sujet que lorsque la date du référendum sera fixée. On ne fera pas campagne à l'avance. On a bien d'autres réponses, aujourd'hui, à apporter aux problèmes des chômeurs, des travailleurs et à tous ceux qui essaient de lutter. Ce n'est pas la préoccupation immédiate de la population ouvrière.

La LCR appelle à des initiatives unitaires ; le PCF à un rassemblement autour du "non" de gauche. LO pourrait-elle y participer ?

Cela reste ouvert. Tout dépend avec qui et sur quels thèmes.

Propos recueillis par Caroline Monnot

• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 11.12.04
alex
 
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Message par Crockette » 11 Déc 2004, 11:08

"Cela reste ouvert". Après ça on dira qu' Arlette est anti-démocrate ? Non, elle est bien pour la liberté de penser, elle n'est pas qqn de dogmatique bien au contraire.
Ses réactions dépendront des idées à avancer et du contexte. Bravo LO !!
La démocratie du peuple n'est pas la démocratie libérale. A tous les détraceturs de Lo, lisez bien ce communiqué, ça vous clouera le bec.
Crockette
 

Message par Barnabas » 11 Déc 2004, 11:41

a écrit :Donc cela ne change rien de dire "non"?

Ce n'est pas vrai. Si les travailleurs ont envie de dire "non" parce qu'ils sont mécontents des attaques qu'ils subissent et que le "non" l'emporte, cela leur donnera une victoire morale. Mais cela ne nous exonérera pas des luttes à mener. Nous avons d'ailleurs décidé de ne démarrer notre campagne sur ce sujet que lorsque la date du référendum sera fixée. On ne fera pas campagne à l'avance. On a bien d'autres réponses, aujourd'hui, à apporter aux problèmes des chômeurs, des travailleurs et à tous ceux qui essaient de lutter. Ce n'est pas la préoccupation immédiate de la population ouvrière.


Ca fait un peu campagne à reculons, non ?

Et puis le petit passage "Nous ne remettons rien en cause de l'Europe" :

a écrit :D'un côté, il y avait l'envie de ne pas apparaître anti-européen et d'affirmer que nous étions et sommes toujours pour la monnaie unique, comme nous sommes pour la suppression des frontières y compris, je le dis au passage, avec la Turquie. Nous ne sommes pas des souverainistes.


C'est pas comme ça qu'on va gagner...
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Message par Barikad » 11 Déc 2004, 12:09

gagner quoi ?
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Message par com_71 » 11 Déc 2004, 12:56

(Barnabas @ samedi 11 décembre 2004 à 11:41 a écrit :

Et puis le petit passage "Nous ne remettons rien en cause de l'Europe" :

a écrit :D'un côté, il y avait l'envie de ne pas apparaître anti-européen et d'affirmer que nous étions et sommes toujours pour la monnaie unique, comme nous sommes pour la suppression des frontières y compris, je le dis au passage, avec la Turquie. Nous ne sommes pas des souverainistes.


C'est pas comme ça qu'on va gagner...
C'est quand le congrès de fondation du CCS (Comité Communiste-Souverainiste) ?
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par Thomas » 11 Déc 2004, 13:09

Barnabas, comment peut on être communiste et souverainiste ?
A quand le meeting commun pour le NON avec Gluckstein , Chevènement , Le Pen....
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Message par Barnabas » 11 Déc 2004, 14:53

Que voulez-vous dire ? Lo est ou pas pour rompre avec l'Union Européenne ? Moi je lis en toute lettre que l'édifice européen sera respecté par LO, quel que soit le résultat du référendum, alors qu'il est clair que le "non" représnterai la volonté de rompre avec tous les traités précédents (maastricht, barcelone, nice...).

En effet c'est quoi la "constitution européenne" sauf un ramassi de tous les traités et leurs interprétations gravés dans le marbre ?
Dire d'entrée que l'organisation maintiendra sa politique dans le cadre de l'Union Européenne (comme c'est fait par A.L.), c'est se coucher, il me semble.

Le PT ne limite pas sa politique dans le cadre UE, c'est un fait, il propose des mesures immédiates, très large, pour aller vers l'abrogation du traité de mastricht. Pour cela certaines personnes le traite de chauvin.

Mais si rester sur la ligne de la rupture avec l'Union Européenne et ce pas seulement en France, mais dans tous les pays d'Europe, doit nous amener de telles assimilations, c'est pas ça qui fait peur, :trotsky: :lenine: :marx: , les marxistes (LO connaît ça) se font calomnier en permanence.
Barnabas
 
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Message par othar » 11 Déc 2004, 15:08

Barnabas, ça veut dire quoi exactement "rompre avec l'Union européenne"? :annieleid:

tu aimes bien utiliser des formules et la signification de certaines est parfois très ambigüe...
othar
 
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Message par com_71 » 11 Déc 2004, 15:14

(Barnabas @ samedi 11 décembre 2004 à 14:53 a écrit : Le PT ne limite pas sa politique dans le cadre UE, c'est un fait, il propose des mesures immédiates, très larges, pour aller vers l'abrogation du traité de Maastricht. Pour cela certaines personnes le traitent de chauvin.


Qualifier cette argumentation de réactionnaire n'a rien d'une calomnie. Quant au chauvinisme, disons simplement qu'elle lui trace une voie royale. Présenter la "France indépendante" comme un progrès a sa logique en termes d'alliances et cette logique conduit à l'extérieur du mouvement ouvrier.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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Message par com_71 » 11 Déc 2004, 15:16

Comment LO pose cette question (dans Lutte de Classe)
a écrit : L'avenir, c'est une Europe sans frontières
Pour notre part, nous sommes contre le projet de Constitution européenne non pas parce que la Constitution est européenne, mais parce qu'elle se place sur le terrain de la société bourgeoise. Nous ne sommes en revanche pas contre l'Europe, pas même contre cette Union européenne, quand bien même elle répond essentiellement aux exigences du grand patronat et des grands groupes industriels et financiers. L'Union européenne n'est pas pire sur ce terrain qu'aucun des États, qu'aucune des sociétés qui la composent.
Les nécessités de leur propre économie contraignent les différentes bourgeoisies d'Europe à essayer de surmonter lentement et très partiellement les conséquences du caractère national de leur domination étatique. C'est une banalité de dire aujourd'hui que la vie économique moderne comme la vie sociale ou culturelle sont inconcevables dans le cadre étriqué des États nationaux. Et c'est bien l'expression du caractère anachronique du règne de la bourgeoisie sur la société qu'il ait fallu deux guerres mondiales et un retard de l'ordre d'un siècle pour commencer à surmonter le morcellement en États nationaux.
Ce qui est à critiquer sur ce plan n'est certainement pas que cela se fasse trop vite, mais que cela aille avec trop de lenteur et que, même aujourd'hui, l'Union européenne soit plus une juxtaposition d'États nationaux qu'une entité unifiée ne fût-ce que sous la forme d'une fédération; que les institutions européennes soient surtout des arènes de confrontations « d'intérêts nationaux », c'est-à-dire d'intérêts des différentes bourgeoisies nationales.
Les puissantes forces souterraines de l'économie finiront, peut-être, par pousser à une unification plus complète de l'Europe, même sous l'égide de la bourgeoisie si, par malheur, son règne est appelé à se prolonger longtemps. Incapable par exemple d'unifier dans la première partie du XIXe siècle, par voie révolutionnaire, une Allemagne alors morcelée en mini-États, la bourgeoisie allemande a fini par recevoir le cadeau de l'unification par en haut, de la part d'un hobereau prussien, Bismarck, et d'un roi de Prusse qui en profita pour se faire consacrer empereur d'Allemagne. Mais que de temps perdu, à l'époque, pour l'Allemagne! Que de temps perdu, plus encore, pour l'Europe!
L'unification complète, réelle, de l'Europe, une unification fondée sur les intérêts des peuples et des classes laborieuses, exige de profondes transformations sociales. Mais il serait vain de les attendre du tripatouillage d'un texte constitutionnel, réalisé par une caste politique au service de la classe capitaliste.
L’intérêt ne pense pas, il calcule. Les motifs sont ses chiffres. K. Marx, « Débats sur la loi relative au vol de bois » 1842.
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