a écrit :Contribution au débat de la LCR
(rencontre nationale des collectifs pour des candidatures unitaires du 10 septembre 2006)
Les candidatures unitaires, une ambition qui mérite de lever les ambiguïtés stratégiques
En cette rentrée, le moment des choix est venu dans le même temps que l’évolution de la situation sociale et politique illustre les enjeux des batailles à venir. La Ligue communiste révolutionnaire a, chacun le sait, décidé en juin lors d’une conférence nationale d’annoncer la candidature d’Olivier Besancenot, comme candidat de la LCR, tout en continuant les discussions pour aboutir à des candidatures unitaires. Nous n’avons dit et le répétons : nous sommes prêts à retirer cette candidature si un accord se dégage sur le fond politique permettant la présentation d’une candidature unitaire rassemblant les forces politiques engagées dans la bataille du non. Les désaccords qui, à nos yeux, font obstacle à la mise en place des candidatures communes se concentrent sur une question clé : le refus de tout accord parlementaire ou gouvernemental avec le Parti socialiste. Dans notre contribution au débat de cette réunion nationale des collectifs, nous voudrions revenir sur cette question essentielle pour nous, mais que se posent aussi beaucoup de militants des collectifs, comme en attestent de nombreuses discussions ou la proposition d’amendement faite par les collectifs des Bouches-du-Rhône qui prouve que notre préoccupation est largement partagée. Cette question s’inscrit dans la discussion sur la perspective dans laquelle devraient se situer des candidatures unitaires antilibérales et anticapitalistes. Elle doit être éclaircie.
C’est pourquoi nous avons présenté trois amendements au texte soumis au débat « Ambition et stratégie », que nous voudrions ici argumenter.
« Stopper la logique capitaliste de destruction sociale »
Il nous semble important d’indiquer dès l’introduction du texte à la fois quelle est la logique d’ensemble qui fonde la cohérence des politiques libérales menées depuis près de 25 ans et le fait que nous rejetons ces politiques y compris lorsqu’elles ont été menées par des gouvernements se réclamant de la gauche, qui ont refusé de rompre avec le système dominant. Cela se voit de façon particulièrement démonstrative en cette rentrée. Villepin et Sarkozy se vantent de la croissance retrouvée, mais cette croissance, au demeurant bien modeste, a pour corollaire une pérennité du chômage de masse, une aggravation de la précarité, une baisse du pouvoir d’achat, une dégradation générale du niveau de vie comme des conditions de travail. Cette politique est aggravée par une politique de démantèlement des services publics menée au nom des contraintes budgétaires. Elle s’accompagne d’une poursuite des privatisations visant à offrir de nouvelles possibilités de profits pour les détenteurs de capitaux comme l’illustre la privatisation de GDF que le gouvernement se prépare à imposer y compris à sa propre majorité.
La droite veut accentuer cette offensive contre les salariés et leurs droits. Mais le parti socialiste, quel que soit demain son candidat, s’inscrit dans la même logique. Il refuse d’avancer une rupture avec le libéralisme qui est pourtant l’attente de la majorité de l’électorat de gauche, des millions de salariés et de jeunes qui se sont mobilisés depuis 2002, notamment en 2003 et 2006, contre les politiques libérales de la droite.
« Une sanction du social-libéralisme »
Le vote du 21 avril 2002 a été la sanction de cette gauche soumise au MEDEF qui entraîne le rejet des classes populaires. La victoire du Non, le 29 mai 2005, portée par les mobilisations et les luttes, a donné un nouvel élan, une nouvelle force au camp de la gauche antilibérale et anticapitaliste. Elle a encouragé l’expression du mécontentement, ouvert la voie à la mobilisation victorieuse de la jeunesse soutenue par les salariés contre le CPE.
C’est ce mécontentement, ce rejet, cette mobilisation nouvelle que les candidatures unitaires doivent porter, exprimer, développer, auxquels elles doivent offrir des perspectives. Et c’est au cœur de cette mobilisation que nous trouvons notre programme, celui de la rupture avec un ordre social injuste et inhumain.
Loin de participer d’une politique qui accompagne les luttes sociales pour les faire échouer sur le terrain électoral et institutionnel, les candidatures unitaires doivent ouvrir un nouvel espoir. Elles participent d’une volonté d’aider au développement de nouvelles mobilisations plus radicales et plus profondes, car nous savons tous ici que seules ces mobilisations, seul un mouvement d’ensemble des travailleurs et de la jeunesse, pourront changer le rapport de force et imposer nos exigences sociales et démocratiques.
C’est en s’appuyant sur l’intervention organisée des intéressé-e-s eux-mêmes qu’un gouvernement peut prétendre changer les choses en rupture avec la politique libérale, c’est-à-dire le capitalisme et ses institutions.
L’impossible union de toute la gauche
Notre stratégie ne saurait être une nouvelle union de la gauche, disons-nous dans notre troisième amendement. Chacun doit tirer le bilan des cinq années du gouvernement Jospin et surtout les enseignements. Il ne suffit pas de dire, aujourd’hui, que c’était une erreur de participer au gouvernement de la gauche plurielle. Le Parti communiste a payé cher cette erreur, mais les travailleurs bien plus.
Il n’est pas possible de dire, d’un côté, que l’on veut rompre avec le libéralisme et, de l’autre, que l’on veut, au final, une alliance avec le Parti socialiste sous couvert que, dans le cadre des institutions, il n’y aurait pas d’autre possibilité pour accéder au pouvoir. Mais qui accéderait au pouvoir par un tel accord gouvernemental et parlementaire ? Ni les antilibéraux, otages d’un tel gouvernement, ni les salariés. Agir ainsi serait recommencer une nouvelle union de la gauche, se préparer à décevoir une nouvelle fois, pour dire demain que le rapport de force ne nous a pas permis…
On ne peut pas dire dans les réunions unitaires que l’on veut rompre avec le social-libéralisme et, dans le même temps, demander une réunion de toute la gauche pour garder la possibilité d’un accord avec le Parti socialiste. Ou, à Bordeaux, refuser la proposition que nous avons faite d’un rassemblement des forces de la gauche du Non afin de préparer une candidature unitaire pour les élections municipales du retour de Juppé et appeler à une union de toute la gauche comme l’ont fait les responsables du Parti communiste.
Depuis 6 mois, la direction du PCF maintient une position intenable : proposer le rassemblement unitaire des antilibéraux et proposer un rassemblement « majoritaire » incluant la direction du PS, au nom de la nécessité de battre la droite.
Cette question représente l’obstacle majeur à la réalisation d’un accord politique. C’est par des déclarations claires, notamment de la direction du PCF, que la situation pourrait se débloquer et pas seulement par la recherche de formules rédactionnelles de compromis, dont l’ambiguïté non levée amènerait inévitablement à des divisions qui remettraient en cause la dynamique unitaire. Disons-nous clairement, oui ou non, qu’il n’y a pas d’alliance possible, gouvernementale ou parlementaire avec le Parti socialiste ? Et ne tournons pas autour du pot. Il s’agit bien du PS réellement existant, avec ses candidats et son programme, et non pas d’un PS imaginaire, produit supposé de ses militants et de son électorat populaire. Souvenons-nous que si une majorité des militants et de l’électorat PS ont voté non à la Constitution, son appareil et ses dirigeants ont fait le choix inverse.
Nous ne voulons pas, pour notre part, participer à une nouvelle synthèse de la gauche du oui et de la gauche du non. Notre ambition et notre stratégie pour les mobilisations sont en rupture avec le social-libéralisme.
Pour la paix, non à l'Europe libérale et impérialiste
Ensemble, durant la campagne pour le Non, nous avons mené un combat internationaliste pour une autre Europe, une Europe de la paix, contre l’Europe puissance, l’Europe libérale et impérialiste du projet constitutionnel.
Les dramatiques événements de la guerre contre les populations arabes de Palestine et du Liban donne à ce combat toute son actualité, son urgence. Il doit être au coeur de notre ambition comme de notre action quotidienne.
Aujourd’hui, au nom de la paix, Chirac et Prodi se disputent la direction de la force multinationale envoyée au Sud Liban, à l’initiative des USA et sous la houlette de l’ONU. Nous dénonçons cette aventure militaire qui n’a d’autre objectif que de perpétuer la domination des grandes puissances, de leur allié, Israël, et de permettre aux intérêts économiques et diplomatiques français de préserver leur place.
Loin d’apporter le moindre soutien à la politique de Chirac, ceux qui militent pour l’unité antilibérale et anticapitaliste combattent la politique internationale du gouvernement. La paix ne peut être l’œuvre que de l’intervention des peuples pour construire leur coopération.
L’offensive de Bush et ses amis contre les peuples est le corollaire de leur offensive contre les travailleurs.
Ne pas décevoir, ouvrir une perspective unitaire
Ces questions devraient pouvoir se résoudre simplement tant les réponses à leur apporter sont en cohérence avec les idées essentielles qu’ensemble nous avons défendues durant la campagne pour le Non : rupture avec le libéralisme, rupture avec la société de « la concurrence libre et non faussée », rupture avec le social-libéralisme, pour une Europe de la paix et du progrès, de la démocratie, c'est-à-dire du droit des travailleurs et des peuples à décider de leur destin, à le prendre en main.
La bataille du 29 mai est pour nous un engagement vis-à-vis de ceux qui ont retrouvé l’espoir. Nous n’entendons pas le sacrifier à des combinaisons parlementaires et gouvernementales avec le social-libéralisme.
Avec chacun, nous souhaitons construire l’unité nécessaire, en cohérence avec cet engagement, dans la clarté politique.
Propositions LCR
05/09/2006
3 amendements de la LCR sur le texte « Ambition et Stratégie »
Les propositions LCR sont en gras
Amendement n° 1
Cela fait trop longtemps que durent le chômage de masse, la précarité, le démantèlement social, la dégradation générale de notre écosystème, les atteintes aux libertés, les inégalités en particulier entre les hommes et les femmes, les discriminations de toutes sortes. Il y a urgence à stopper la logique capitaliste de destruction sociale, les politiques libérales menées depuis vingt cinq ans par des gouvernements de droite comme de gauche.
Amendement n° 2
Un tel changement en profondeur de la donne politique, et du rapport de force à gauche est possible. Le libéralisme est rejeté dans les luttes, les urnes et les sondages : depuis 1981, les majorités législatives sortantes ont été systématiquement sanctionnées. De nombreuses luttes de résistance ont eu lieu notamment en novembre-décembre 95 (plan Juppé), les luttes du printemps 2003 (retraites), du printemps 2006 (CPE), les révoltes des quartiers populaires, ont affirmé le besoin d’une remise en cause radicale du système dominant. Le vote du 21 avril est une sanction du social-libéralisme. Le vote du 29 mai a confirmé ces rejets et exprimé une espérance qu’il ne faut pas dévoyer dans une nouvelle mouture de la gauche plurielle. Pour ne pas décevoir, une nouvelle fois, une politique de gauche doit rompre avec le libéralisme sous toutes ses formes.
Amendement n° 3
Notre objectif est une politique de gauche rompant avec le libéralisme des gouvernements du dernier quart de siècle. Les conditions d’une union de toute la gauche sur des bases anti-libérales conséquentes sont impossibles à réunir. Notre programme diffère profondément dans ses mesures particulières comme dans sa cohérence des choix stratégiques qui ont conduit la direction du PS au vote oui du 29 mai et qui ont abouti à son programme actuel. C’est pourquoi nous considérons qu’il ne peut pas être question de s’engager dans une coalition gouvernementale et parlementaire avec le PS. De même, il est hors de question d’accepter l’idée proposée par le PS d’une « fédération de la gauche » autour d’une telle orientation.
Et supprimer toute formulation sur le 2éme tour ...