Dans la LCR ...

Tout ce qui touche de près ou de loin à l'actualité politique en France

Message par emma-louise » 15 Sep 2003, 15:32

En débat.......
POINTS DE REPERE
POUR UNE ALTERNATIVE ANTICAPITALISTE


Avertissement : ce texte a été élaboré avec le souci de faire apparaître le plus clairement possible ce qui peut être considéré comme l’acquis commun de la gauche anticapitaliste au plan programmatique. Il est volontairement synthétique et naturellement incomplet. Il n’aborde pas les questions de stratégie et de tactique qui sont évidemment importantes, mais nous paraissent relever d’un autre niveau de discussion. Il ne traite pas non plus du « comment » réaliser pratiquement ce rassemblement de la gauche anticapitaliste que nous appelons de nos vœux. L’accord sur ces « points de repère » permettrait toutefois, selon nous, une avancée significative dans ce sens.

Plan du texte :

I/ De la convergence des mouvements sociaux à la nécessité d’une alternative anticapitaliste

II/ Un projet socialiste, démocratique et autogestionnaire

III/ Eléments pour un programme de lutte immédiat


I/ DE LA CONVERGENCE DES MOUVEMENTS SOCIAUX A LA NECESSITE D’UNE ALTERNATIVE ANTICAPITALISTE

Le printemps social, la profondeur et l’ampleur de la secousse socio-politique que viennent de connaître le pays, n’ont de comparables, dans la période récente, que Mai 68 et l’hiver 1995. Un mouvement, inédit à bien des égards, qui mobilise à la fois les lieux de travail, les petites communes rurales, les cités moyennes, les quartiers populaires, les grandes métropoles. Sommes-nous entrés dans un “Mai rampant”qui va s’inscrire dans la durée ? Ce qui est en tous cas probable, c’est que le mouvement social, appuyé par une majorité de la population, peut repartir à tout moment, connaître de nouvelles phases ascendantes, à la hauteur des attaques d’une droite dont le projet libéral est largement rejeté dans le pays.

Cette nouvelle révolte antilibérale, après celle de novembre-décembre 1995, est survenue après deux autres vagues de mobilisations dont elle s’est nourrie :

- la mobilisation anti Le Pen qui a suivie le “coup de tonnerre” du 21 avril 2002 pour rejeter, dans l’urgence, la “bête immonde” sortie de la crise sociale et politique qui couvait depuis des années. Une menace qui n’est repoussée que temporairement... Mai-juin 2003 est d’une certaine manière la réplique du 21 avril, sa réponse “lutte de classes”.

- la mobilisation contre la guerre en Irak (d’une importance jamais vue depuis l’époque du Viêt-nam) qui, si elle a épargné le gouvernement français du fait de la position “antiguerre” de Chirac, a permis un immense rassemblement contre l’intervention impérialiste US.

Le gouvernement Raffarin a engagé, dans la foulée, une vague de grandes réformes structurelles libérales, et notamment des plans ayant pour objectif le démantèlement-privatisation de l’éducation nationale ainsi que la destruction de notre système de retraites fondé sur la répartition, la solidarité entre générations. Il a fini par remporter une victoire en maintenant sa loi sur les retraites, mais le mouvement social n’est pas défait, il n’est pas brisé par l’offensive gouvernementale comme il avait pu l'être en GB sous les coups du gouvernement Thatcher. Le gouvernement a été contraint de passer en force, remportant une victoire “à la Pyrrhus” désavouée par l’opinion publique. Il a par ailleurs préféré retirer (acquis de la lutte) discrètement son projet sur l’autonomie des universités. Autre acquis de la lutte : démasqué comme étant l’instrument des plus riches et des grands patrons, l’avenir de ce gouvernement se trouve hypothéqué. A chaque fois qu’il voudra imposer une mesure libérale (que lui souffle le Medef), sa légitimité sera contestée par une majorité de la population et par les secteurs attaqués (exemple en cours des “intermittents du spectacle”). La force du mouvement rappelle à Chirac qu’il n’a recueilli que 13,75% des électeurs inscrits au 1er tour de la présidentielle, le plus bas score historique dans cette élection.

Il ne manquait pas grand-chose pour que le conflit se généralise, pour que la grève générale reconductible, construite démocratiquement à la base, s’étende à l’ensemble des salariés. Il manquait au rendez-vous des directions syndicales déterminées à aller jusqu’au bout, mais celles-ci n’ont à aucun moment cherché à généraliser un mouvement qui échappait à leur contrôle et qui aurait ouvert une crise politique majeure.

Les millions de grévistes et de manifestants ont aussi confirmé l’existence de deux gauches dans le pays. Une gauche d’accompagnement du libéralisme qui, dans le fond, a accepté la réforme des retraites, la soutenant même explicitement (déclarations en faveur du gouvernement de Rocard, Delors, Kouchner, etc…). Autant dire que l’effet “Congrès de Dijon” du PS, en plein mois de mai, a été aussitôt annulé. Ces mauvais bergers en mal de troupeau n'ont d’autre credo que le social-libéralisme ! La gauche anticapitaliste, celle qui avait déjà rassemblé 3 millions de voix à la présidentielle, a été omniprésente au coeur d’un mouvement pleinement conscient des choix de société qu’il exprimait, à savoir qu’un autre monde est possible et qu’il est temps de dire lequel.

Dans ce mouvement social, riche d’échanges et de créativité, sont nées des intersyndicales dynamiques et de nombreuses structures d’auto-organisation souvent appuyées sur des AGs quotidiennes. Des rencontres interprofessionnelles des secteurs en lutte se sont tenues à la base dans certains quartiers et localités. L’appréciation du mouvement et de sa dynamique, ses méthodes de luttes ont ouvert un débat qui n’est pas clos sur les rapports entre l’unité des travailleurs, l’unité syndicale et l’auto-organisation démocratique. Les questions de démocratie en particulier sont apparues comme déterminantes pour l’efficacité de la lutte.

Au fil de ces mobilisations, le mouvement altermondialiste s’est aussi révélé être un levier puissant pour les mouvements sociaux, permettant de penser le monde globalement tout en menant l’action localement. Des dizaines de milliers de manifestants mobilisés contre le G8 d’Evian étaient simultanément dans le soulèvement en France, appelant dans les rues d’Annemasse ou de Genève à la grève générale.

La formidable succession de luttes que nous connaissons depuis avril 2002 est en train d’ouvrir une nouvelle phase politique : celle de la contre-offensive populaire à la déferlante ultra-libérale que nous connaissons depuis vingt-cinq ans. Une nouvelle génération militante y fait l’expérience du combat quotidien contre les effets du système capitaliste et cherche une alternative radicale à l’ordre existant.

Dans cette nouvelle phase politique, il est aujourd’hui de notre responsabilité d’avancer résolument vers le rassemblement de la gauche anticapitaliste dans une nouvelle force politique, radicale, alternative, démocratique et adaptée à la période que nous vivons. Il est de notre responsabilité de proposer à toutes celles et à tous ceux qui ne se reconnaissent plus dans le monde tel qu’il est de confronter les points de vue, de dégager les convergences et d’avancer dans l’élaboration collective d’un projet anticapitaliste pour le XXIème siècle.

Le présent document est un premier résultat de cette démarche.


II. UN PROJET SOCIALISTE, DEMOCRATIQUE ET AUTOGESTIONNAIRE

Nous luttons pour un monde débarrassé de toute forme de domination, d’oppression ou d’exploitation entre les hommes. Cette lutte implique nécessairement une confrontation avec le système injuste qui régit aujourd’hui nos vies sociales, le système capitaliste. Désormais global et mondialisé, ce système capitaliste, qui a accentué tous ses traits, apparaît de plus en plus pour ce qu’il est, un système où la logique de l’accumulation financière privée s’impose à toutes les activités humaines et où la concentration de la richesse et du pouvoir entre les mains d’une minorité de possédants de plus en plus puissante et organisée a pour l’humanité et pour la planète toute entière des conséquences de plus en plus inacceptables : croissance vertigineuse des inégalités, chômage endémique et régression sociale au Nord, misère et famine au Sud, crises boursières et faillites financières, recrudescence des guerres et des menées impériales, atteintes irresponsables à l’environnement et catastrophes écologiques. Il s’appuie, en outre, sur un ensemble d’institutions internationales qui échappent chaque jour davantage au contrôle démocratique des citoyens : G8, OMC, FMI conspirent en silence dans l’intérêt des multinationales, tandis que, au niveau européen, l’actuel projet de constitution entend conforter à perpétuité leur domination.

Ce système capitaliste est fondamentalement inconciliable avec les aspirations humaines à l’égalité, à la solidarité, à la justice, il est incompatible avec la satisfaction des besoins sociaux, culturels, environnementaux du plus grand nombre. Si, au fil des années, les conquêtes sociales obtenues par les mobilisations populaires ont pu en atténuer certains effets, leur pérennisation suppose une remise en cause radicale de celui-ci. C’est pourquoi nous considérons que la lutte pour l’émancipation humaine passe par le renversement du capitalisme et la construction d’une société dont les finalités soient orientées par les aspirations et les besoins de l’immense majorité de la population et non plus par la recherche du profit privé.

Dans cette perspective, le projet de société que nous défendons est un projet socialiste, démocratique et autogestionnaire. Un projet socialiste parce qu’aucun changement de logique économique et sociale ne pourra advenir si les principaux moyens de production et d’échange restent entre les mains d’actionnaires ou de propriétaires privés et que leur appropriation publique (leur « socialisation ») est par conséquent une condition indispensable de ce changement. L’ampleur, les niveaux et les modalités de cette appropriation publique sont des questions à débattre, mais ce principe doit être clairement établi pour assurer le primat de l’intérêt général dans le fonctionnement de l’économie.

Un projet socialiste démocratique car l’histoire a démontré que le caractère non-démocratique des expériences « socialistes » engagées au XXème siècle a été un facteur déterminant de leur échec. Elle a démontré qu’une économie se fondant sur l’intérêt général ne pouvait se passer de règles démocratiques permettant précisément à cet intérêt général de s’exprimer. Le socialisme que nous voulons devra bannir tout autoritarisme et tout dirigisme bureaucratique ou technocratique. Loin de restreindre en quoi que ce soit les libertés démocratiques, il devra au contraire les développer et les élargir à un niveau sans précédent, il devra en faire des libertés bénéficiant à tous, de plus en plus directes, et concernant des sujets de plus en plus nombreux. De nouvelles institutions permettant de refléter l’ensemble des aspirations populaires devront être créées. Les diverses expériences de démocratie « participative » menées de par le monde, telle celle de Porto Alegre dans le sud du Brésil, constituent à cet égard de précieuses références.

Contrairement à ce qui s'est passé dans la plupart des expériences dites socialistes, les syndicats devront pouvoir occuper une place éminente comme organes de représentation et d’expression des travailleurs. Cette fonction décisive nécessitera que le syndicalisme se voit garantir son autonomie économique et son indépendance politique à l'égard de tous les pouvoirs. Cette proposition s'applique également aux autres formes d'auto-organisation démocratique que se donneront les travailleurs pour intervenir dans la vie économique et sociale. Il ne s'agit pas d'imposer ou de proposer un modèle au monde du travail, mais au contraire de considérer que l'auto-organisation est au coeur de tout projet émancipateur du salariat et de la société.

Un projet socialiste, démocratique et autogestionnaire car, à chaque niveau pertinent de la vie économique et sociale, les décisions devront être prises par les collectifs intéressés et non résulter d’un plan élaboré et décliné de haut en bas par l’administration étatique. Les citoyens pourront ainsi prendre eux-mêmes leurs affaires en main dans les milieux de travail et de vie à partir de leurs connaissances, de leurs savoirs et savoir-faire techniques. Cette extension du principe de la démocratie participative au domaine de la production permettra d’assurer le passage d’une simple appropriation publique des entreprises à une véritable appropriation sociale, mettant ainsi fin à la séparation entre les travailleurs et les moyens de production et d’échange. Les différents niveaux autogérés de la vie économique et sociale devront, selon des modalités à inventer, se coordonner et s’articuler dans une planification souple et démocratique permettant d’assurer la cohérence de l’ensemble.

Ce projet est aussi un projet éco-socialiste dont un des objectifs fondamentaux sera de concilier l’amélioration continue des conditions d’existence de la population avec les exigences d’un développement soutenable et durable : priorisation des énergies propres et renouvelables, économies d’énergies, recyclage maximal des déchets, minimisation des émissions polluantes, aménagement écologique des territoires et des villes, qualité de la production agro-alimentaire, maîtrise rigoureuse des bio-technologies, des risques technologiques, respect de l’éco-système et de la bio-diversité…

C’est enfin un projet d’égalité des conditions et des droits humains qui devra chercher à abolir les discriminations et les aliénations de toute nature. Il visera notamment à établir l’égalité complète entre les sexes, à faire que soit respecté le droit à une sexualité différente pour tout être humain, à éradiquer le racisme et la xénophobie.

Nous défendons ce projet à l’échelle nationale, mais cette bataille ne se limite pas aux frontières de notre pays. Elle doit immédiatement se déployer au niveau européen et de plus en plus au niveau mondial. Face à la mondialisation capitaliste et à une construction européenne toujours plus libérale, nous affirmons avec le mouvement altermondialiste que « le monde n’est pas une marchandise » et qu’ « un autre monde est possible ». Nous ajoutons que cet autre monde, possible mais surtout nécessaire, devra pour se libérer effectivement de la domination capitaliste s’orienter vers ce socialisme démocratique et autogestionnaire pour lequel nous luttons.


III. ELEMENTS POUR UN PROGRAMME DE LUTTE IMMEDIAT

Ces objectifs fondamentaux se traduisent ici et maintenant par des revendications, des orientations, des propositions immédiates que nous défendons ensemble dans notre action politique quotidienne.

1. Travail, emploi, protection sociale :

Au cours du XXème siècle, en France, la productivité du travail a été multipliée par 16 et la production de richesses a été multipliée par 10. Sous l’effet des luttes menées par les travailleurs, cette formidable croissance a permis une amélioration sans précédent des conditions d’existence de la population : division par 2 de la durée du travail, multiplication par 5 du niveau des salaires directs, instauration et développement d’un système de protection sociale. Mais, depuis un quart de siècle, les capitalistes ont engagé une offensive généralisée contre ces acquis sociaux pour relever le niveau de leurs profits. Le résultat de cette offensive, nous le constatons tous les jours, c’est le développement du chômage, de la précarité, la dégradation des conditions de travail, la stagnation des salaires, la mise en cause du système de retraite et d’assurance maladie. Pourtant, la productivité du travail continue de croître et permettrait aujourd’hui de maintenir et développer les acquis sociaux du XXème si nous sommes capables d’imposer une répartition des richesses favorable au monde du travail. C’est pourquoi nous nous battons pour :

Un emploi pour tous et toutes

- création massive de postes dans les services publics, notamment dans la santé et l’éducation,
- transformation des emplois précaires en emplois stables et garantis,
- interdiction du temps partiel imposé,
- véritable RTT à 35h/semaine maximum sans perte de salaire et sans flexibilité,
- interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des profits,
- pas de licenciement sans reclassement à salaire égal.

Les salaires avant les profits

- pas de salaire inférieur à 1350 euros,
- revalorisation des salaires de 250 euros pour tous
- indexation des salaires sur les prix,
- à travail égal, salaire égal,
- reconnaissance salariale des qualifications.

Améliorer et étendre la protection sociale

- retraite à 60 ans avec 75% du meilleur salaire pour 37,5 ans de cotisations public et privé,
- maintien du système par répartition et réponse au besoin de financement par la hausse des cotisations patronales et pas par la fiscalisation, rejet des fonds de pensions et abrogation des dispositifs allant dans ce sens,
- arrêt des exonérations de charges sociales,
- relèvement de tous les minima sociaux à 700 euros,
- allocation d’autonomie de 500 euros pour les jeunes entre 18 et 25 ans,
- développement d’un système de santé publique fondée sur les besoins de la population et non sur une logique financière,
- priorisation de la santé et de la sécurité au travail,
- gestion effective des organismes de sécurité sociale par les salariés.

2. Services publics :

- arrêt des privatisations totales ou partielles,
- retour au secteur public des grandes entreprises privatisées, en particulier du secteur financier,
- défense, extension et amélioration des services publics : le droit aux services publics doit devenir effectif pour tous, en particulier dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la culture, du logement, des transports, de l’action en justice, de l’énergie et de l’eau qui constituent des « biens communs » de la société, ou encore des télécommunications,
- redéploiement budgétaire vers les services publics à finalité sociale, réduction drastique du budget militaire,
- développement des services publics de proximité,
- mises en place de dispositifs de contrôle par les usagers et les salariés.

3. Fiscalité :

Avec les cotisations sociales, la politique fiscale peut et doit être le moyen privilégié pour organiser une répartition plus équitable des richesses créées. Nous agissons pour une fiscalité fortement redistributrice.

- diminution drastique de la fiscalité indirecte (TVA, TIPP) au profit de la fiscalité directe, fortement progressive selon les revenus,
- relèvement substantiel des impôts sur les bénéfices des sociétés, sur les grandes fortunes et sur les revenus financiers,
- suppression des zones franches ainsi que des différents avantages fiscaux et subventions accordées aux entreprises.

4. Démocratie, citoyenneté, égalité des droits :

- élections de toutes les assemblées à la proportionnelle,
- droit de vote pour les étrangers résidant sur le territoire national depuis plus de 2 ans,
- développement de la démocratie participative par la mise en place d’institutions populaires de gestion et de décision directe (conseils d’entreprise, conseils de quartier, etc…),
- stricte limitation du cumul des mandats électifs dans l’espace et le temps,
- abrogation de la constitution antidémocratique de la Vème République,
- suppression de la fonction présidentielle, du Sénat et des institutions non élues (Conseil constitutionnel, Conseil d’Etat, Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, Conseil Supérieur de la Magistrature…),
- refus de toute discrimination, lutte contre le racisme, le sexisme et l’homophobie,
- égalité des droits hommes/femmes,
- régularisation des sans papiers,
- droit au regroupement familial pour les immigrés,
- respect et extension des libertés et des droits syndicaux,
- reconnaissance et respect des identités et des cultures régionales.

5. Ecologie/environnement :

- promotion d’une logique de développement durable et d’aménagement équilibré du territoire,
- maintien du moratoire sur les OGM,
- refus de la brevetabilité du vivant,
- plan de sortie du tout-nucléaire et meilleur contrôle du retraitement des déchets,
- diversification des sources d’énergie et programme conséquent d’économie d’énergie,
- suppression du marché des droits à polluer,
- contrôle des industries à risques par les salariés et les populations avoisinantes,
- contrôle du transport maritime (avec notamment le respect des droits sociaux),
- substitution maximale du ferroutage au transport routier,
- développement des transports en commun à bas prix, voire gratuits.

6. Solidarité/coopération internationale :

- soutien et participation au mouvement altermondialiste,
- lutte contre la libéralisation croissante des relations internationales (OMC, AGCS, Maastricht…),
- maîtrise et régulation des échanges commerciaux en fonction des besoins intérieurs, des choix de coopération, ainsi que de critères sociaux et environnementaux,
- abrogation de la dette des pays du tiers monde,
- aide conséquente et coopérative au développement des pays les plus pauvres,
- refus des politiques d’austérité monétaristes imposées par le FMI et la Banque Mondiale au profit des multinationales,
- liberté de circulation des hommes et droit reconnu à l’immigration,
- droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (autodétermination),
- lutte pour la paix et contre les interventions militaires impérialistes,
- désarmement nucléaire immédiat et lutte pour la démilitarisation,
- lutte pour le retrait des troupes françaises du continent africain,
- solidarité avec les luttes pour les droits nationaux, les droits sociaux et les libertés démocratiques partout dans le monde,
- réforme de l’ONU assurant l’égalité effective des nations, suppression du Conseil de Sécurité,
- refus du projet de constitution de l’Union Européenne qui consacre la suprématie de l’ordre néo-libéral,
- pour une construction européenne fondée sur la primauté des droits des travailleurs et des peuples.


"Rouge jasmin et sauvageonne églantine"

Bearbeitet von EMMA-LOUISE am lundi 15 septembre 2003, 17:08

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Rouge c'est la vie ...claire et rebelle...!
emma-louise
 
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Message par Screw » 21 Sep 2003, 10:33

Qui participe à cette rencontre/forum?
Screw
 
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Message par emma-louise » 22 Sep 2003, 15:39

CITATION (Screw @ dimanche 21 septembre 2003, 12:33)Qui participe à cette rencontre/forum?           Des membres des sections PACA ( Marseille Toulon Nice... en particulier) de la LCR (+)  et des militant-e-s venant des crises succe
sives du PCF et des Alternatifs (résumé)[/quote]
réponse trop rapide ...à suivre... (+ ) note: la majorité d'ailleurs favorables à l'accord électroral LO/LCR... :wavey:
emma-louise
 
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Message par emma-louise » 24 Sep 2003, 20:27

Encore du nouveau dans la boite aux lettres_AVERTISSEMENT : membre de la FD 83 de la LCR , défendant la position de la PF1 , je transmets pour débat ou info tout ce qui est sur le net venant de camarades qqe soit mon avis , par contre aucun texte de BI de la LCR ne peut se trouver sur le net , sauf si un ou une camarade le défend et l'assume ... Bien amicalement "RACHEL " LCR Toulon ARGUMENTS POUR LE SOCIALISME
Transformer la LCR, transformer le mouvement ouvrier pour changer le monde
Bulletin édité par des militants de la LCR Numéro 0 - 20 septembre 2003




SOMMAIRE

-Éditorial
-Pourquoi ce Bulletin ?
-Avertissement
-Brésil
-Contact



EDITORIAL


Le choix de voter pour Chirac (ou “ contre Le Pen ” selon la formule officielle) lors du second tour des présidentielles de 2002 était une erreur politique. S’aligner même timidement sur les positions des appareils réformistes (PS, PC, Verts) et réactionnaires (UMP, UDF) dans un “ front républicain moral ” conduisait inévitablement à une défaite stratégique pour la démocratie et les salariés. 

Se battre pour l’auto-émancipation des travailleurs requiert en permanence une politique vigilante d’indépendance de classe : lier l’avenir du monde du travail aux atermoiements médiatiques, aux émotions fabriquées, aux pressions irrationnelles, aux institutions de la Cinquième République, revient toujours à se livrer pieds et poings liés à nos ennemis d’hier et de demain. Le formidable mouvement de masse de l’entre deux tours était une occasion sans précédent de faire basculer le régime de la Cinquième République (“ ni facho, ni escroc ”), et de créer les conditions d’une constituante démocratique pour une nouvelle république. “ L’élection ” de Chirac, la mise en place du gouvernement Raffarin (Démocratie Libérale), la victoire de la droite aux législatives de juin ont assommé et muselé momentanément le “ peuple de gauche ” tout en donnant à l’UMP et au MEDEF l’occasion de prendre leur revanche contre le mouvement ouvrier et les grandes grèves de décembre 95. L’offensive du gouvernement sur les retraites et la décentralisation pour preuve.

Un an après, la résistance sociale et politique a été impressionnante, malgré les agissements des bureaucraties politiques et syndicales. Les salariés(es) du public et du privé ont fait la démonstration d’une détermination inégalée. Des millions de travailleurs et de travailleuses se sont retrouvés dans la rue et dans la lutte, par-dessus les clivages syndicaux et politiques, dans un même objectif : Défaire ce gouvernement illégitime mandaté pour satisfaire les exigences du MEDEF. Les mobilisations de ce printemps comme celles de cet été (avec les intermittents du spectacle, Larzac 2003) eurent en conséquence un caractère éminemment politique.

Si toutes les directions syndicales (CFDT, FO, CGT, FSU) ont freiné à un moment ou à un autre la dynamique de la confrontation en refusant la grève générale, nous (la “ gauche révolutionnaire ”) n’avons pas été capables d’affirmer une ligne politique claire capable de définir la voie d’une alternative victorieuse. La grève générale n’a jamais été pour les révolutionnaires une fin en soi, sous peine de se retourner contre ceux qui ont contribué à sa réussite, mais bien une arme stratégique visant à assurer la victoire de la majorité populaire contre la brutalité des forces patronales et réactionnaires. Il aurait fallu systématiquement avancer un profil unitaire, avec des mots d’ordre simples, des propositions claires sur les objectifs d’une telle grève, car pour gagner la bataille économique il faut gagner la bataille politique.

Le seul débouché politique réel pour le mouvement était de chasser Chirac-Raffarin et avec eux la Cinquième République, pour des élections anticipées et la convocation d’une constituante. La seule alternative politique était dans le mouvement des masses, dans l’unité d’action syndicale (les comités de grèves, les interpros, les coordinations...), car l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes. Ce profil est inconciliable avec le cadre de la théorie des deux gauches, théorie illustrant l’incapacité de l’actuelle direction à penser la question du pouvoir et le renversement de la domination de classe par une poussée politique de la majorité ouvrière et populaire.

Non, il n’y a pas deux gauches. Non il n’y a pas une échelle de la traîtrise au sein d’une gauche (vrais traîtres, demi-traites, quarts de traîtres…) dont nous serions les censeurs immaculés. Continuer cette rhétorique triomphaliste, après l’échec de nos forums est une impasse stratégique. La LCR n’est pas “ LE Parti Anti-Capitaliste ”. La LCR n’a pas vocation à être ce Parti à elle toute seule. Au lieu de diviser, de segmenter, de sectariser, de fractionner, nous devrions plutôt unifier, rassembler tous les secteurs du salariat autour d’un programme posant clairement la question du pouvoir et des institutions, posant clairement la question de l’unité syndicale contre le front uni de la bourgeoisie (pour une Centrale Unifiée des Travailleurs). Voilà le rôle que doit tenir la Ligue Communiste Révolutionnaire, un rôle offensif et ouvert, répondant aux besoins immédiats des salarié(es). Dresser les travailleurs les uns contre les autres ne sert en rien les objectifs pour lesquels nous luttons. Les seuls clivages qui comptent sont les clivages de classes (37,5 annuités contre mourrir au travail ou dans la misère), les clivages entre appareils et masses (sauver Chirac-Raffarin ou les sortir) et le clivage démocratique (pour ou contre la 5ème "République" bonapartiste), non pas une division artificielle entre la “ vraie gauche ” et la “ fausse gauche ” qui relève plus de la séparation kabbalistique que d’une interprétation judicieuse du mouvement ouvrier. Cette théorie des “ deux gauches ” ne sert, en dernière comme en première instance, qu’à justifier un repli politique sans précédent, une prostration stratégique surréaliste, dont la seule issue est “ l’alliance ” électoraliste avec le groupe de Barcia-Laguiller, Lutte Ouvrière. Drôle de débouché aux luttes…

Ce dont a besoin le salariat ce n’est surtout pas d’un mauvais “ remake ” de “ l’alliance des révolutionnaires ”, d’un rabibochage de circonstance entre deux “ fractions marxistes ”, ni d’une délimitation sectaire des frontières politiques de notre organisation. Ce dont a besoin le salariat c’est d’une force politique capable de populariser des mots d’ordre unitaires et démocratiques, une force politique sans concession sur l’indépendance de classe, une force politique capable de mettre à l’ordre du jour la nécessité d’une représentation politique de “ ceux d’en bas ”, par “ ceux d’en bas ”, pour “ ceux d’en bas ”. Une force politique qui ne se la joue pas gros bras et grosse tête, qui soit capable de poser aujourd’hui et maintenant la question du pouvoir. Le reste n’est que mirage et poudre de perlimpinpin aux effets strictement limités aux élections qui arrivent.

Contre les sirénes gauchistes et électoralistes, contre les trompettes triomphalistes, contre les tentations de repli sectariste, le congrès de la LCR devra trancher de manière décisive. Nous soutiendrons toute motion allant dans le sens du maintien de l'ouverture de nos prochaines campagnes électorales à toutes les forces nationales (dont LO bien sur ! ) comme aux regroupements locaux ou aux militants avec lesquels nous pouvons établir un dialogue et une action communes à partir de la plate-forme de base que la LCR se doit de mettre en discussion publiquement (le congrés serait productif si le contenu d'une telle plate-forme était l'objet du débat parmi les militants de la LCR).


POURQUOI CE BULLETIN ?


• Changer le monde

…Et vite ! Pollutions en tout genre, guerres impérialistes, catastrophes humaines… Le capitalisme continue à générer les oppressions les plus brutales, à perpétuer l'exploitation des travailleurs(euses) et des plus faibles… La vie sur Terre est aujourd’hui menacée, le capitalisme nous entraîne brutalement vers les abîmes de la barbarie sociale et du désastre écologique. Pour la survie de l'humanité, comme pour la satisfaction des besoins humains, l’objectif est d'instaurer le pouvoir de l'immense majorité, celle des salariés et du peuple travailleur : la démocratie par en bas. Il deviendra alors possible de changer le monde, de mettre nos vies avant leur profit.

• Transformer le mouvement ouvrier

Le marxisme enseigne que le capitalisme, dans son développement, crée ses propres fossoyeurs : le salariat et toutes les couches sociales qui s'y rattachent. Ce salariat, aujourd’hui mondialisé, dispose d'organisations immédiates, notamment les syndicats, nées des nécessités de la lutte immédiate et quotidienne. Mais cela ne suffit pas pour aller à la racine du mal, pour remettre en cause durablement le système. Le mouvement ouvrier est effectivement dominé depuis des décennies par des courants et des directions politiques, social-démocrate, ex- ou post- ou toujours staliniens, nationalistes de gauche, qui empêchent les luttes de "ceux d'en bas" de déboucher sur l'établissement du pouvoir des travailleurs.

Pourtant, quelque chose a changé avec la chute du Mur de Berlin en 1989, le principal verrou contre-révolutionnaire depuis la 2ème guerre mondiale, le rival et le complice de l'impérialisme, le stalinisme, s'est effondré, libérant ainsi le mouvement ouvrier d'une entrave paralysante et mortelle.

Les opposants historiques du stalinisme, c’est-à-dire les trotskistes, ont une responsabilité décuplée, celle de mettre en oeuvre les acquis programmatiques, politiques, la mémoire et l'expérience de plus de 150 ans de luttes du mouvement ouvrier international. Cela veut dire concrètement transformer le mouvement ouvrier pour en faire le fossoyeur du système, l'accoucheur du nouveau monde.

Construire le parti révolutionnaire aujourd'hui, ce n'est pas construire une secte auto-proclamée, isolée de la masse ou gérer un capital électoral dans une marge ou une niche institutionnelle convenue. C'est : agir pour les idées du marxisme, du socialisme, du communisme, pénétrent et transforment le mouvement ouvrier. Agir pour que les salariés deviennent le facteur révolutionnaire : l'émancipation des salarié(e)s, des opprimé(e)s et des exploité(e)s ne peut être que l'oeuvre des salarié(e)s, des opprimé(e)s et des exploité(e)s eux-même !


• Transformer la LCR

Les militants de la LCR qui lancent ce bulletin estiment que leur organisation doit mieux s'adapter à ce nouveau contexte politique :
1) en assurant, d'une part, la compréhension, l'actualisation et l'approfondissement des acquis de la tradition marxiste qui court du Manifeste communiste de 1848 au Programme de transition de 1938,
2) et, d'autre part, en les mettant en oeuvre à l'époque du capitalisme globalisé.
Cela signifie la préparation des salariés, des jeunes et de tous les opprimés(e)s à la lutte pour le pouvoir, à partir des luttes immédiates, partielles ou généralisées. Cette perspective de lutte pour le pouvoir de la majorité a une actualité brûlante. De Paris à Buenos-Aires, en passant par Brasilia, des conjonctures particulières se présentent, pouvant influer sur la trajectoire d'autres secteurs du mouvement ouvrier international, notamment en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. Le mouvement ouvrier saura-t-il saisir ce moment ? Les militants, les organisations, nourris des acquis du marxisme et disposant de ces outils, sauront-ils influer positivement sur les événements ? Le sort du prochain demi-siècle en dépend.

Avertissement :
Nous considérons que la tradition bolchévique, léniniste est aux antipodes des moeurs et des normes du zinonievisme et du parti-fraction, reflet des pressions du stalinisme et de la société bourgeosie sur les organisations révolutionnaires. C'est la liberté de discussion publique des problémes et des divergences, sans entrave aux actions décidées majoritairement.

Nous entendons nous comporter loyalement au sein de l'organisation. Dans les prochains numéros, nous expliciterons nos propositions pour le prochain congrés. Notre projet éditorial s'entend sur le long terme. Il ne s'oppose pas à la collaboration, ponctuelle ou durable, avec tout militant(e) ou courant de l'organisation, ni à la participation aux taches courantes de celle-ci.


BRESIL

Introduction
Les militants affiliés à la Quatrième Internationale ou se réclamant du marxisme révolutionnaire ne peuvent rester indifférents ou muets à ce qui se passe au Brésil depuis l'arrivée de Lula au pouvoir. Non seulement le gouvernement mis en place respecte l'ordre bourgeois, mais en plus la participation en son sein de ministres issus du courant DS (Démocratie Socialiste, orga soeur de la LCR) du PT soulève un probléme politique de fond.

On ne peut clamer sans cesse à Paris que "jamais on ne s'alliera avec le PS" tout en se taisant sur ce qui se passe à Brasilia. Il est plus que temps que la LCR prenne publiquement position sur ces faits. La vraie solidarité avec des camarades qui font un faux-pas, c'est de faire fi de toute hypocrisie diplomatique et de dire franchement ce qui doit être dit. Par sa participation à l'actuel gouvernement Lula, en votant au Parlement les projets de loi qui constituent des attaques contre les travailleurs du Brésil (ex: les retraites des fonctionnaires), le courant DS ne sert pas les intérets des travailleurs, commet une faute politique et se rapproche du Rubicon au-delà duquel on se range dans le camp adverse.

Curieusement, la situation au Brésil a été absente du débat interne dans la Section Française de la Quatrième Internationale au moment du congrés mondial l'hiver dernier. Une occasion de débat n'a pas été saisie. L'heure d'un affrontement entre un secteur du mouvement ouvrier ou populaire (notamment les sans-terre ) et le gouvernement est proche. La LCR, en faisant jouer son poids politique dans le Secrétariat Unifié de la Quatrième Internationale, peut influer à son échelle sur des événements qui pourraient se révéler dramatiques et néfastes pour tout le mouvement ouvrier brésilien et latino-américain.

A notre modeste échelle, en guise de solidarité avec tous les militants ouvriers qui font face à la bourgeoisie brésilienne et à un gouvernement élu grace aux suffrages du peuple travailleur, nous publions en guise de document l'article du camarade Ernesto Herrera paru dans la revue suisse A l'encontre. Cette publication n'engage en rien le camarade vis-à-vis de notre bulletin. Le prochain congrés de la LCR en novembre 2003 se doit de discuter et prendre position sur le Brésil.

En plus du site de la revue A l'encontre, on pourra se reporter aux informations parues en langue française sur les sites web des bulletins Avanti , Carré Rouge et FUR. A partir de ces sites, il est possible de pointer sur de nombreux sites hispanophones ou lusophones.

Document
Tiré de A l'Encontre en date du 5 septembre 2003

Dilemme dans la gauche du PT : Mal à l'intérieur. Plus mal à l’extérieur?
Ernesto Herrera*

La “prudence” a cédé le pas à la “perplexité”... jusqu'à se heurter, aujourd'hui, à une donnée incontestable. L'orientation du gouvernement Lula ne relève pas d'un “faux pas social-libéral”, mais d'une option irréversible.

• Feuille de route néolibérale

Le sociologue et économiste André Gunder Frank[1] a été, en la matière, encore plus loin: il a comparé Lula à l'ancien dirigeant de Solidarnosc, Lech Walesa, qui, après avoir conquis la présidence de la Pologne, a mis en oeuvre une politique économique plus conservatrice que celle de ses prédécesseurs. A. Gunder Frank exagère-t-il ? En prenant ses fonctions, le 1er janvier 2003, le président Luiz Inacio da Silva, dit Lula, promit la récupération de l'“endettement social séculaire de ce pays”, et de commencer à surmonter l'“héritage maudit” laissé par Fernando Henrique Cardoso et les gouvernements néolibéraux qui l'ont précédé. Mais rien de cela ne se profile à l'horizon. Au contraire, le changement a fait place à la continuité la plus stricte.Le gouvernement Lula a finalement accepté les règles du jeu du capital transnational. Il a donné son accord à une surveillance de la part du FMI, des banquiers et des principaux actionnaires de l'Etat brésilien privatisé. Il a imposé “la réforme” de la prévoyance vieillesse au bénéfice des fonds de pension privés. Il est en train de mettre un point final à la “réforme fiscale”, ordonnée par Washington.

En poursuivant sa feuille de route néolibérale, le gouvernement Lula prépare la flexibilisation de la législation du travail (exigée par les organisations patronales et le FMI). Sa politique aboutit à l'accroissement de la dette publique par rapport au PIB. Il a assuré “l'autonomie” de la banque centrale qui, en réalité, représente le bras local de la Fed (Réserve fédérale) nord-américaine.

Tout continue comme avant.., ou même empire. Le chômage se situe à hauteur de 20% de la population active dans les grandes villes. Le revenu moyen des familles a chuté de 16% entre juillet 2002 et juillet 2003 ; la consommation a baissé de 1% au cours du premier trimestre 2003. Plus de 50% de ceux et celles qui travaillent ne disposent d'aucune sécurité sociale. Entre-temps, le plan “Faim Zéro” ne touche qu'à peine 350'000 personnes. Autrement dit, il est paralysé. Et, en ce qui concerne son financement, il dépend, plus que jamais, de l'inclusion, lors des prochaines négociations avec le FMI, d'une “clause sociale” et d'un abaissement de “l'excédent budgétaire primaire” [excédent budgétaire avant paiement des intérêts de la dette] ; et, en plus, de la “compréhension” que manifestera la Banque mondiale, ainsi que des “donations” de transnationales telles que Coca-Cola ou Nestlé.

La réforme agraire que les sans-terre exigent est dévoyée par les exigences d'un modèle d'agriculture exportatrice et répond de la sorte aux intérêts des transnationales du secteur agroalimentaire. La récente destitution du président de l'INCRA, Institut national de la colonisation et de la réforme agraire, Marcelo Resende (lié à la Commission pastorale de la terre), représente un coup mortel porté aux espoirs de millions de paysans. Et l'annonce que seules 7000 familles seront installées sur des terres cette année - alors que le chiffre de 60.000 avait été promis - indique que le gouvernement a choisi de céder aux pressions des grands propriétaires fonciers représentés par le ministre de l'Agriculture, Roberto Rogrigues.

Dans ce contexte, le rôle du ministre du Développement agraire, Miguel Rossetto, est chaque jour plus subordonné. Entre-temps, la guerre dans les campagnes s'exacerbe : les hommes de main des grands propriétaires fonciers (latifundistes) ont assassiné plus de 30 sans-terre depuis le début de l'année... Ce qui n'empêche pas que les seules personnes faites prisonnières soient des dirigeants du MST parmi lesquels José Rainha et Felinto Procopio dos Santos.

Enfin, le projet de budget 2004 présenté au Congrès [Chambre des députés et Sénat fédéral] réduit toutes les sommes ayant trait aux rubriques budgétaires d'ordre social; et cela bien que le paiement des intérêts de la dette extérieure ne soit en aucune mesure remis en question.

• Des engagements inconciliables

Tentons d'expliquer cette trajectoire. Avant d'arriver au gouvernement, Lula et la fraction dirigeante du PT (Parti des travailleurs) ont passé une alliance avec des secteurs décisifs de la classe dominante brésilienne pour “développer le marché interne”, le “capitalisme productif” et pour procéder à une “redistribution équitable du produit national”, promesse faite avec force publicité. Lula et la fraction dirigeante du PT ont passé un accord avec les marchés financiers.
Cela impliquait de prendre des engagements inconciliables. Le changement (revendiqué par la population pauvre et laborieuse), d'une part, et, d'autre part, le respect des contrats et accords avec le FMI, les banquiers et, en définitive, avec les grands capitalistes.

Evidemment, presque personne ne s'attendait à l'ouverture d'un scénario de “transition au socialisme” dans la mesure où la fraction dirigeante du PT - Lula et le courant “articulation” - allait soumettre tout programme de changement au respect du système institutionnel capitaliste. En s'adaptant politiquement et matériellement à l'appareil d'Etat, la fraction dirigeante du PT s'est coupée de manière irréversible de la lutte révolutionnaire. De la même manière, étaient peu nombreux ceux qui croyaient en la possibilité d'initier un processus de “rupture démocratique”, voire même à une extension de l'expérience du “budget participatif”, dont le centre de gravité reste toujours circonscrit à Porto Alegre.

La fraction dirigeante du PT s'est transformée en un élément de soutien de l'ordre bourgeois... même si elle s'est comportée comme opposition face aux divers gouvernements néolibéraux, en adaptant la tonalité de son discours à l'intensité des luttes sociales. L'assimilation idéologique et l'intégration de la thèse sur “la neutralité” des institutions démocratiques bourgeoises ont non seulement fait s'éclipser toute perspective classiste [de classe] et anticapitaliste, mais aussi une timide option anti-néolibérale. La couche de bureaucrates ayant des aspirations “d'hommes d'Etat”, qui a été raffermie par de nombreuses années d'électoralisme, de prébendes parlementaires et de pratiques entrepreneuriales et gestionnaires (dans les Etats de la République fédérale et dans les municipalités), a abouti à réaffirmer, de manière définitive, la stratégie d'accession au Planalto [Palais gouvernemental à Brasilia] comme “une alternance de changement sans rupture” pour assurer une “gouvernabilité démocratique”[2]. Pour cela, il faut éviter à tout prix le “chaos social” et une situation d'“ingouvernabilité” engendrés par un “excès de revendications” et “l'incapacité de les satisfaire”. Que cela implique d'user de troupes de choc, de faire appel aux opportunistes prêts à “défendre le gouvernement” en lieu et place des intérêts des travailleurs ou d'expulser du PT les “radicaux” qui ne renoncent pas à la tradition de lutte et à l'engagement du parti auprès de ceux d'en-bas, tout cela ne fera pas vibrer le pouls du gouvernement et du lulisme.

Huit mois après l'accession du PT au gouvernement, deux rubriques figurent dans la “colonne positive” du bilan.

D'une part, une politique extérieure dépeinte comme “indépendante” et “progressiste” où se mêlent des exhortations critiques face à la mondialisation à l'occasion de forums internationaux et la condamnation du “terrorisme”, des initiatives afin de renforcer le Mercosur [zone de libre-échange créée en 1991 dont les pays membres sont le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et le Paraguay et les pays associés la Bolivie, le Chili et le Pérou] et “l'alliance stratégique” avec l'Argentine ; des accords commerciaux avec le Venezuela et la Communauté andine et le pari d'une ZLEA [Zone de libre-échange des Amériques - ALCA] light, dans l'illusion futile que négocier avec Bush (et tout ce qu'il représente) pourrait conduire à obtenir quelque concession.

D'autre part, les enquêtes “ d'opinion publique ”, ce mécanisme de manipulation des “ citoyens ” qui a déplacé l'axe de fonctionnement du parti et prend le pas sur toute autre instance de démocratie participative. Le 23 août, l'action du président Lula était considérée “ très satisfaisante [en espagnol: optima] par 45 % des sondés ”, trois points de plus qu'en juillet; 42 % la considéraient “assez satisfaisante” [regular] et 10 % seulement “non satisfaisante” [mala][3]. Applaudissements à la tribune. Dans cette logique de pur marketing politique, le fait que, dès le mois d'avril, 38 % des sondés considéraient le président Lula comme étant du “ centre ” ou du “ centre droit ” devient anecdotique. Cela tend à confirmer les paroles mêmes du président qui, lors de sa récente visite au Venezuela, déclara : “De toute ma vie, je n'ai jamais aimé être considéré de gauche”.

• Début d'une rupture

Selon les propos de la sénatrice Heloísa Helena[4], ceux qui ont voté la contre-réforme [sur le thème de la prévoyance vieillesse] ne peuvent être qualifiés que de “ pusillanimes et couards ”. Quant au Congrès, elle l'a défini comme “ une honteuse foire commerciale ”[5]. Heloísa Helena est une opposante intransigeante au cours néolibéral du gouvernement Lula et l'une des principales figures de la gauche révolutionnaire et des mouvements sociaux qui résistent, entre autres raisons parce qu'elle s'est refusée à approuver la désignation de Henrique Meirelles [ancien président international de Bank of Boston de 1996 à août 2002] comme président de la Banque centrale. Elle est actuellement suspendue du groupe parlementaire du PT.

Le vote sur la prévoyance sociale marque un tournant. Avec ce vote favorable[6], le gouvernement Lula obtient une double victoire politique : il émet un signal tout à fait rassurant en direction du FMI et des investisseurs étrangers des fonds de pension et de placement, en réaffirmant sa conversion au marché. Simultanément, il obtient la capitulation d'un secteur de députés fédéraux dudit “ camp de gauche ”.

Avec cette reddition, le “ camp de gauche ”, qui a voté les contre-réformes, se neutralise lui-même en tant que pôle de résistance à la politique du gouvernement et de la fraction dirigeante du PT... à moins qu'il ne change radicalement de stratégie et rompe avec son confort institutionnalisé. Conjointement, le gouvernement utilise ce reniement pour mettre un terme à la préoccupation de secteurs de la bourgeoisie - et des médias nationaux et internationaux - portant sur la configuration des courants politiques internes au PT : les “ radicaux ” étaient censés disposer de 30 % des mandats au sein du parti comme de représentation parlementaire.

Cependant, cette première victoire du gouvernement Lula (il manque encore le vote au Sénat, même si la seule parmi les élus à avoir annoncé qu'elle voteraît contre la réforme de la prévoyance vieillesse est Heloísa Helena) n'a pas été obtenue sans frais. Les 60'000 manifestants à Brasilia, la grève massive des salariés de la fonction publique, la croissance d'une opposition de classe à la bureaucratie de la CUT, tout comme la condamnation de la fraction dirigeante du PT par de larges secteurs d'activistes du mouvement social et de militants politique, marquent le début d'un processus de rupture politique. Processus qui s'accélère dans la mesure où un large secteur de la résistance politique active et des mouvements sociaux “ font l'expérience ” de la pratique du gouvernement Lula.

Comme l'illustrent les milliers d'étudiants qui se rebellent à Salvador [ville de quelque 2,5 millions d'habitants], en protestant contre l'augmentation du prix des transports. Il s'agit donc de l'achèvement de la trajectoire politico-stratégique du PT. Un processus de décantation est en cours, qui - le souligner est quasiment superflu - sera marqué par des attentes, des rythmes et des expériences différenciés.

Des dizaines de milliers d'activistes du mouvement social et de militants “pétistes” se refusent à se faire complices. Ils manifestent leur indignation et s'insurgent face à ce qu'ils considèrent comme une capitulation inconditionnelle du gouvernement Lula et du PT. Des tracts, des affiches placardées dans les rues, des manifestations de masse, des assemblées syndicales et des congrès étudiants, ainsi que des séminaires et des débats publics dans différentes villes accusent déjà de “ trahison ” le gouvernement... et les députés fédéraux qui ont voté la contre-réforme des retraites.

Les sans-terre et les sans-toit sont las des promesses ministérielles et sont passés à l'action directe en occupant des latifundia et des bâtiments publics et privés. De nombreux intellectuels et économistes du parti critiquent sans pitié l'orientation économique néolibérale qui s'inscrit dans le droit fil des F.H.C. La “ lune de miel ” entre les secteurs les plus conscients et politisés du mouvement populaire et le gouvernement commence à prendre fin. S'ouvre une phase d'instabilité, d'expériences et d'affrontements accélérés avec le présent régime politique de domination. Dans ce cadre, une nouvelle avant-garde sociale détachée ou se détachant du passé pétiste se réorganise en vue de trouver un nouveau pôle politique de référence.

Cependant, “ si une telle référence ne se construit pas dans la prochaine période, nous connaîtrons un processus de dispersion et la déception envers le gouvernement débouchera sur une désorganisation et un recul. L'espace ouvert à gauche ne le restera pas comme tel très longtemps. ”[7]

Pendant ce temps, les mouvements sociaux s'ordonnent autour de l'élaboration d'un programme alternatif visant à “ organiser l'espoir ” et à “ répondre à la nécessité d'unifier les activités des mouvements sociaux dans le nouveau contexte que connaît le pays après la victoire de Lula, en cherchant à définir une plate-forme commune de propositions et à organiser des actions communes, dans l'objectif de renforcer le camp des changements, du développement et de la valorisation du travail ”[8].

L'idée que le cours du gouvernement est encore “ en discussion” [n'est pas fixé, est l'objet de batailles] soit s'estompe, soit perdure comme alibi tactique afin d'“ éviter l'isolement ”.Le rapport de forces entre les conservateurs et les “ niches progressistes ” a été et est écrasant en faveur des premiers. Il n'y a pas affrontement entre deux projets antagoniques. La fraction dirigeante du PT et ses nouveaux alliés (banquiers, entrepreneurs, grands propriétaires terriens, politiciens corrompus du PMDB - Parti du mouvement démocratique du Brésil - tels que Sarney et d'autres transfuges) tiennent la barre du navire... depuis le début de la traversée.

Pour la gauche révolutionnaire, il n'y a aucun doute quant au programme économique dans ses aspects fondamentaux. Luciana Genro le précise : “ La voie qui a été choisie est extrêmement claire dans le sens de l'approfondissement du modèle néolibéral. Il n'y a aucun signe de forces internes au gouvernement qui prétendraient exécuter un virage. D'un autre côté, les alliances imposent des limites à la volonté de certains secteurs du gouvernement (...). Vous ne pouvez pas dire "j'ai gagné la confiance des marchés et maintenant je fais ce que je veux", parce que cette confiance, il faut la gagner tous les jours. Le PT a clairement choisi de continuer à payer la dette extérieure, et il est impossible de réaliser des changements sans opérer des ruptures. ”[9]

Il pourra y avoir des louvoiements plus ou moins au centre ou, plus ou moins à gauche, et y compris des grimaces voulant exprimer un retour à une sensibilité sociale. Mais le cercle se ferme. Dans ce sens, tant la participation au gouvernement que la tactique de cohabitation critique avec la fraction dirigeante du parti sont incompatibles avec une politique d'accumulation révolutionnaire et socialiste.

• Nouvelle alternative

L'intoxication médiatique de la droite monte son cirque : “ les radicaux du PT discutent de la création d'un nouveau parti de gauche ”[10] , ou encore “ les radicaux du PT annoncent un nouveau parti ”[11] . La fraction dirigeante du parti et le président Lula lui-même déprécient, dénigrent ce phénomène politique : “ j'ai appris qu'il y a un certain type de gens qu'il est préférable d'avoir contre soi qu'avec soi ”[12] . Quant aux alliés opportunistes du lulisme, ils les ridiculisent en les réduisant à une petite minorité de nostalgiques d'un autre âge : “ Je veux prévenir les plus mal
informés que le choix fait par certains de développer les tensions jusqu'aux ultimes conséquences fait partie d'une stratégie politique. Ils veulent être expulsés du PT. Ils croient que l'heure est venue de construire un nouveau parti, qui celui-ci soit véritablement révolutionnaire. Dans le fond, ils sont prisonniers d'un vieux schéma : celui de la révolution russe de 1917. ”[13]

D'autres agitent auprès de leurs militants déconcertés et mécontents le danger que le processus de rupture et de réorganisation finisse dans un regroupement “ des trotskysmes ” doctrinaires. Les uns et les autres mènent une opération trompeuse destinée à réduire la signification de la rupture à une poignée de militants. Et à trois députés et une sénatrice. Ils se refusent à reconnaître qu'à la base du parti, dans les universités, les entreprises, les usines et les mouvements populaires, ils sont déjà des dizaines de milliers à prendre conscience et à tirer des conclusions politiques. Ils se refusent à digérer le fait que la colonne vertébrale du mouvement ouvrier, paysan et populaire n'a pas contracté un mariage indissoluble avec le lulisme.

La construction d'une nouvelle alternative de gauche est posée... Et elle est inévitable. Est-ce un gauchisme fébrile ? L'économiste et dirigeant reconnu du parti Plinio Arruda Sampaio Jr, qui impulse un document signé par plus de 2000 militants[14], a également été catégorique quant au diagnostic : “ Nous vivons une nouvelle vague néolibérale. Et l'ironie de l'histoire, c'est que c'est un ouvrier qui dirige cette nouvelle vague néolibérale. Nous faisons face à un moment très grave. Le parti que nous avons mis 25 ans à construire est en train de se déliter. ”[15]

De son côté, Waldemar Rossi, ancien dirigeant syndical métallurgiste et membre de la Pastorale ouvrière, affirme que “ la fidélité au parti est donc relative. Elle n'est valable que si elle est au service de la justice sociale et si elle poursuit une voie juste pour sa mise en pratique. ”[16]

C'est dans ces nouvelles conditions politiques qu'ont pris corps aussi bien le débat que le mouvement pour la construction d'une alternative de gauche disposant d'un profil programmatique défini. Un premier pas a été l'initiative lancée par les députés Luciana Genro, Joao Bautista Babá et Joao Fontes. “ Il est de notre responsabilité d'organiser la résistance et la construction d'une nouvelle alternative avec ces milliers d'activistes qui disent Non au New PT. Tout d'abord, nous discuterons à fond de l'alternative dont nous avons besoin avec les militants pétistes, les dirigeants syndicaux combatifs et celles et ceux actifs dans les mouvements sociaux. Nous déciderons avec eux et avec la sénatrice Heloísa Helena des voies à emprunter. Il n'est pas superflu de souligner que l'opinion d'Heloísa Helena a pour nous une énorme importance. Nous la soutiendrons et l'accompagnerons si elle décide de disputer la mairie de Maceió [capitale de l'Etat d'Alagoas, dont elle est sénatrice] et serons à ses côtés pour exiger la démocratie dans le parti, tant que nous serons en condition de défendre cette exigence. Sur ce point, notre expulsion est notre limite, comme c'est la limite des milliers de pétistes qui ont signé le "Manifeste d'urgence contre la faim, la misère et le chômage" (...). Nous allons maintenir et développer nos liens avec ces milliers de militants qui n'ont pas changé de camp. Nous allons appeler à la construction d'un nouvel outil politique, un parti anticapitaliste, anti-impérialiste, démocratique, de lutte et de classe, qui inclue la pluralité de la gauche socialiste en incorporant tous les secteurs du PT souhaitant y participer, de même que les camarades du PST-U qui ont déjà appelé à la construction du nouveau parti. ”[17]

Le PST-U (Parti socialiste des travailleurs - unifié)[18] avait appelé à construire “ un mouvement pour un nouveau parti qui unisse tous les militants, radicaux du PT, PST-U, activistes des mouvements sociaux, pour que nous puissions lutter en faveur d'une alternative militante et de masse pour les travailleurs brésiliens ”[19] . Il a cependant mis le pied sur le frein et considère aujourd'hui que la création d'un nouveau parti est prématurée. Il propose de discuter un projet qui ne soit pas “ un accord de sommets ” et offre son statut de parti légalement enregistré pour permettre la participation de non-membres du PST-U aux élections municipales d'octobre 2004[20].

Par-delà ce type de contorsions et les allées et venues tactiques (qui recouvrent des différences politiques légitimes, des myopies sectaires et/ou des prétentions hégémonistes), ce qui est certain, c'est que le temps pour une alternative de gauche est venu. Comme le dit Valerio Arcary, un premier défi se présente : “ Construire un mouvement unitaire, à partir de ce moment dramatique que vit la gauche brésilienne. Un mouvement qui incorpore toutes les forces vives venant de la lutte de classes dans la construction d'une nouvelle alternative politique. ”[21] Un mouvement qui, en définitive, “ combine rénovation et radicalité ”[22].

Tous les courants internes de la gauche pétiste (où, indiscutablement, se concentre la plus forte accumulation politique, marxiste et révolutionnaire) sont traversés par ce dilemme stratégique. Il en va de même dans le PST-U, où des divergences existent. Des tensions, des réorientations, des ruptures avec la routine institutionnelle seront à l'ordre du jour. Toutefois, ce qui est décisif réside dans le lien que peuvent établir ces courants avec la vivacité des mouvements sociaux et avec le processus d'extension ainsi que de radicalisation des luttes de résistance. C'est sur ce terrain que se joue l'issue de la bataille qui s'est ouverte.

• Répercussions extérieures

Le “ PT des origines ” se (dé)construit comme parti de classe, comme option réelle de changement, comme expression de masse de la résistance anti-néolibérale et anti-impérialiste. Sa défaite est dans ce sens un fait d'une importance fondamentale. Si pour les forces populaires qui ont animé une résistance farouche au néolibéralisme et qui ont conduit d'innombrables protestations, rébellions et soulèvements révolutionnaires comme l'argentinazo, si pour le mouvement “altermondialiste” qui se bat contre l'offensive prédatrice et guerrière de l'impérialisme, si pour la gauche socialiste qui se construit dans la chaleur des luttes et de la radicalisation des masses, le PT et le gouvernement Lula étaient “ un laboratoire social et politique d'expériences ” de dimensions internationales, alors, ce “ moment très grave ” ne l'est pas seulement pour la gauche brésilienne.

La transformation de la nature du PT et le cours irréversible du gouvernement Lula renforcent toutes les tendances “ social-libérales ” d'un secteur de la gauche latino-américaine imprégnée d'une “ culture de gouvernement ”. Ils confortent aussi l'idée conservatrice selon laquelle les rapports de forces défavorables et l'héritage tragique du néolibéralisme empêcheraient même de s'enganger sur la voie de “ réformes structurelles ” qui viseraient à la satisfaction des besoins sociaux élémentaires les plus urgents. Dans un contexte de recolonisation impérialiste accentuée (Plan Colombie, offensive déstabilisatrice contre Chávez, blocus et agression conte Cuba, Plan Puebla-Panama, ALCA, ajustements de type FMI, dette extérieure et règles draconiennes imposées par l'OMC), la capitulation inconditionnelle du gouvernement Lula et de la fraction dirigeante du PT se transforme en un lourd boulet difficile à tirer. Son évolution à droite et son échec introduisent une forte dose de confusion, de désorientation et de désespoir, précisément au moment où la crise de légitimité du “ modèle ” néolibéral fait face à un processus d'organisation, de mobilisation et de radicalisation d'une gauche sociale à l'échelle continentale.

Dans ce cadre, le défi est double pour les forces marxistes révolutionnaires.

D'un côté, recomposer une perspective politique transitoire à partir des luttes sociales ; une perspective rénovatrice et radicale. De l'autre, relancer dans la pratique - sans calcul mesquin ou “ organique ” [organisationnel] d'aucun type - une stratégie de regroupement de la gauche anticapitaliste et socialiste à l'échelle nationale, régionale et internationale, avec des campagnes, des initiatives et des tâches communes, qui aillent au-delà des congrès autoproclamatoires, des forums académiques et des séminaires type ONG aux discussions plus ou moins érudites.

Evidemment, il y a un premier point de rencontre incontournable : le soutien et la solidarité politique avec la lutte de la gauche et des mouvements sociaux du Brésil, qui engagent avec toutes les difficultés imaginables - et sans échéancier prédéterminé - la (re)construction d'une alternative révolutionnaire.

C'est la seule voie vers la récupération de ce “ mandat populaire ” que Pachakutik et le mouvement indigène équatorien revendiquent, en ayant romptu avec le gouvernement néolibéral de Lucio Gutiérrez.
- 5 septembre 2003

* Membre de la direction nationale du Courant de Gauche (CI), regroupement radical au sein du Frente Amplio (Front Large) d'Uruguay. Il a été pendant de nombreuses années membre de la direction de la Quatrième Internationale - Secrétariat Unifié, et jusqu'en février 2003 coordinateur du travail latino-américain. Entre juillet 1999 et septembre 2003, il a été le responsable du Courrier de presse de la Quatrième Internationale (bulletin électronique pour l'Amérique latine et la Caraïbe). Il collabore régulièrement avec des revues telles que Desde los Cuatro Puntos (Mexico) et Inprecor (France). Récemment, il a participé au Brésil à diverses activités organisées par le MES (Mouvement de la gauche socialiste - tendance du PT) et par des mouvements sociaux.

Notes
[1]. Folha de Sao Paulo, 24/08/03. Gunder Frank a été l'un des principaux invités du séminaire “ Hégémonie et contre-hégémonie : impasse de la globalisation et les processus de régionalisation ” (Rio de Janeiro, août 2003).
[2]. Selon Marco Aurelio Garcia, l'un des promoteurs de la social-démocratisation du PT, conseiller de Lula pour la politique extérieure, colloque “ Système de partis et rôle des partis politiques dans le système démocratique ” (Montevideo, juin 2003).
[3]. Enquête Dadafolha, Folha de Sao Paulo, 31/08/03.
[4]. Sénatrice pour l'Etat d'Alagoas et militante de Démocratie socialiste (DS). Sa position politique est en totale contradiction avec l'orientation de la DS, qui participe au gouvernement de Lula, avec Miguel Rossetto comme ministre du développement agraire.
[5]. Courrier de presse de la Quatrième Internationale (bulletin électronique pour l'Amérique latine et la Caraïbe), n° 855 du 7 août 2003.
[6]. Les seuls à avoir voté contre la “ réforme ” sont les députés Luciana Genro, Etat du Rio Grande do Sul, militante du Mouvement de la gauche socialiste (MES) ; Joao Bautista Babá, Etat de Pará, militant du Courant socialiste des travailleurs (CST) ; et Joao Fontes, Etat de Sergipe, qui n'est affilié à aucune des tendances internes du PT. La majorité des députés fédéraux du PT ont voté pour. De même que la majorité des députés de la DS et d'Articulation de Gauche qui l'ont fait, bien qu'avec diverses critiques, par “ discipline de parti ”. Huit députés, dont deux de la DS, se sont abstenus lors du vote en première lecture. Lors de la seconde lecture, le député Walter Pinheiro (DS, Etat de Bahía) a également voté contre.
[7]. Infor-MES, 12/08/03, Document MES sur la conjoncture nationale et l'orientation politique.
[8]. Coordination des Mouvements Sociaux. Y participent notamment le MST, la CUT, l'UNE (Union nationale des étudiants), la Pastorale ouvrière. Cinq rencontres régionales se sont tenues durant le mois d'août. Le document peut être lu sur Rebelión du 21 août 2003, http://www.rebelion.org.
[9]. “ Lula est la continuité de Cardoso ”, interview dans l'hebdomadaire Brecha, Montevideo, 22/08/03.
[10]. Folha de Sao Paulo, 30/08/03.
[11]. Folha de Sao Paulo, 02/09/03.
[12]. Je joue mon histoire dans ce mandat. Entretien dans la revue Veja, Sao Paulo, 20/08/03.
[13]. Lindberg Farias, député fédéral, Rio de Janeiro. “ Ce qu'il ne faut pas faire ? ”, Folha de Sao Paulo, 16/08/03.
[14]. “ Récupérer le PT ”, document présenté publiquement à Sao Paulo, qui propose de reprendre des thèmes historiques du PT tels que la défense des retraites. Les promoteurs de ce document ne posent pas la question de la construction d'une nouvelle alternative de gauche.
[15]. Communication au séminaire international “ Un autre monde est possible. La construction d'une gauche anticapitaliste ” organisé par le MES, le 15 août 2003 à Porto Alegre.
[16]. Infor-MES, Porto Alegre, août 2003.
[17]. “ Note publique aux militants du PT ”, divulguée lors d'un meeting tenu à Rio de Janeiro le 1er septembre 2003. Son texte intégral en castillan se trouve sur le site d'Espacio Alternativo (Etat espagnol),
http://www.espacioalternativo.org/
[18]. Le PST-U est la principale force trotskyste au Brésil. Disposant d'une importante implantation syndicale, universitaire et jeune, il compte plus de 2000 militants fortement organisés. Il est en dehors du PT depuis 10 ans. Lors des élections présidentielles de 2002, son candidat et président national José María de Almeida (Zé María) a obtenu 400.000 voix. Il n'a pas de représentation parlementaire. Il considère le gouvernement Lula comme “ un front populaire, de collaboration de classes, donc un gouvernement bourgeois anormal, dans le sens où la majorité de la bourgeoisie, si c'était possible, préférerait et aurait davantage confiance en un gouvernement qui soit directement le sien ” (Marxismo Vivo n° 6, novembre 2002).
[19]. Opiñao Socialista n° 156, 08/08/03.
[20]. La légalité est une question importante, la loi électorale brésilienne ne permettant pas de présenter des candidatures à ces élections si l'on n'a pas été affilié à un parti avant le 2 octobre 2003. On peut prendre connaissance des 8 points de la nouvelle proposition du PST-U sur son site, http://www.pstu.org.br/
[21]. Dirigeant du PST-U et membre de l'Institut d'études socialistes, qui édite la revue Outubro (Octobre). Communication au séminaire “ Un autre monde est possible. La construction d'une gauche anticapitaliste ”, 15 août
2003, Porto Alegre.
[22]. Ricardo Antunes, sociologue, spécialiste de l'organisation du travail, militant du PT, membre du conseil de rédaction de l'hebdomadaire du MSP Brasil do Fato, éditeur de la revue Margen Izquierdo. Ibidem.

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Message par Barikad » 25 Sep 2003, 07:41

CITATION (wolf @ mercredi 24 septembre 2003, 23:10)Ce bulletin semble être une pure et simple projection au sein de la lcr de la lettre de "liaisons", éditée depuis plusieurs années par V.Présumey, membre du PS, dirigeant local FSU et même membre du conseil économique et social de la région auvergne. O.Delbeke est au comité de rédaction de cette lettre qui défend la même ligne ("assemblée constituante") et d'ailleurs ne manque pas d'intérêt. Mais la même chose en double...[/quote]
Oui, c'est les meme, sauf que là c'est réalisé uniquement par des liguard, à destination des liguard....
Je trouve ça un peu "néolambertiste" :ph34r:
Barikad
 
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Message par tk2003 » 25 Sep 2003, 10:05

ouaip, wolf a raison : j'ai fait parti un temps du comité de rédac de liaisons, avant de m'en séparé l'an dernier.
avouons qu'au moins, il parle du vote chirac et du Brésil ,c'est quand même courageux. Certains n'osent même pas en discuter!
tk2003
 
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Message par tristana » 25 Sep 2003, 11:34

Dis, Emma Louise, il faut donc voter pour la PF1?
Tu en es sûr?
tristana
 
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Message par emma-louise » 25 Sep 2003, 14:50

8)
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