par Sinoue » 04 Nov 2011, 17:18
Les minoritaires du NPA structurent un courant
LEMONDE.FR | 04.11.11 | 16h46 • Mis à jour le 04.11.11 | 16h47
Le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) s'enfonce dans la crise. Alors que l'organisation révolutionnaire tente très difficilement de rassembler les 500 signatures de maires nécessaires à la présentation de son candidat, Philippe Poutou, sa minorité se structur et publie un texte très critique sur les deux premières années d'existence du parti, depuis sa fondation en février 2009 jusqu'à la campagne à venir de M. Poutou
Emmenée à la fois par une équipe qui fut un temps le cercle le plus proche d'Olivier Besancenot et des cadres du mouvement se reconnaissant dans le courant dit "unitaire", ce courant – dit plateforme B –, qui a recueilli 40 % des voix lors de la dernière conférence nationale de juin 2011, a décidé de se constituer en tendance. C'est un pas de plus dans l'approfondissement de la crise de direction que connaît le NPA depuis un an.
Ecrit par une partie du noyau de cadres fondateurs – Pierre-François Grond, Myriam Martin, Ingrid Hayes, Guillaume Liégard, Anne Leclerc et Frédéric Borras – le texte de huit pages dresse un tableau sombre de l'état de l'organisation et surtout de la concrétisation de son projet.
"La situation du NPA est désormais extrêmement grave", attaquent d'emblée les auteurs. "Le succès, l'enthousiasme du processus fondateur est très loin derrière nous".
"LE PARTI DES ANONYMES" CONTRE "LA VIEILLE GAUCHE"
Détaillant les signes de cet affaiblissement – "organisation isolée et propagandiste, incapable d'une quelconque démarche unitaire" –, la note confronte cette image bien terne avec la situation du NPA lors de sa constitution, quand son leader était au sommet de sa gloire. "Olivier Besancenot et le NPA apparaissaient presque comme la seule force d'opposition", soulignent les auteurs.
Mais cette popularité politique a conduit à un comportement "triomphaliste" et, "passant de l'enthousiasme à l'arrogance", à ignorer les autres organisations de gauche, niant ainsi une réalité politique qui lui a ensuite éclaté à la figure.
Le NPA se pose dés le début comme la seule "vraie gauche", se targuant d'être le "parti des anonymes" contre la "vieille gauche", incluant dans ce vocable toute la gauche radicale d'alors, PCF comme Parti de gauche. "En arguant de l'impossibilité d'un accord au nom des désaccords à venir sur les élections régionales de l'année suivante, nous avons donné le sentiment que nous ne cherchions qu'un prétexte. Ce qui était de fait vrai", avouent les anciens amis d'Olivier Besancenot. La sanction a été immédiate : "un authentique échec" aux régionales, souligne le texte.
Le texte revient aussi sur un épisode tendu de ces deux ans passés : la présentation d'une candidate voilée dans le Vaucluse et ses conséquences internes. "Cette question a joué un rôle important dans la marginalisation électorale et politique du NPA", soulignent les cadres dissidents. Départs de militantes, incompréhension et distanciation des réseaux féministes et surtout "secondarisation" de la question du féminisme.
"CONSTRUIRE UN BLOC DE GAUCHE INDÉPENDANT DU PS"
Le fonctionnement interne ne trouve pas plus grace aux yeux de ces cadres militants. La tentative de créer une autre forme de parti, plus ouvert, plus large a elle aussi échoué, estiment-ils. En imposant les mêmes méthodes que l'ex-LCR, mais sans la même expérience, en attirant les groupuscules les plus sectaires, l'organisation s'est appauvrie : "C'est l'héritage même de ce courant marxiste ouvert issu de 68 qui s'est retrouvé morcelé."
Pour l'avenir, le nouveau courant veut parier sur une lassitude militante vis-à-vis d 'une ligne jugée sectaire pour la réorienter. Avec un objectif affiché : "commencer à regrouper les forces disponibles pour construire un bloc de gauche indépendant du PS", écrivent-ils.
Le NPA doit offrir une perspective à tous les déçus de la campagne Mélenchon, pour l'après-2012 : ces militants qui s'appelleront désormais "unitaires anticapitalistes" sont persuadés que l'arrivée de la gauche au pouvoir va entraîner une coupure à gauche entre ceux qui participeront à un gouvernement socialiste et les autres.
L'objectif de la réunion du week-end est donc d'acter d'une part le divorce opéré dans l'ancienne direction, et d'autre part de rassembler tous les déçus du NPA de la période florissante, du temps où il s'appelait le "parti d'Olivier". Et ils sont nombreux tant l'organisation a subi une hémorragie depuis les européennes de 2009 – avec près de deux tiers d'adhérents en moins.
"Nous sommes ouverts à tous ceux qui ont été au NPA depuis sa fondation, qu'ils y soient encore ou qu'ils s'en soient écartés", explique Pierre-François Grond, ex-bras droit d'Olivier Besancenot. "Nous voulons remettre tout ça en mouvement pour reconstruire", explique M. Grond. En tout cas, ils sont formels, pas question de quitter le NPA : "Ça n'a pas de sens de sortir, et nous n'avons pas envie de rejoindre le Front de gauche", affirme Guillaume Liégard.
Sylvia Zappi