Chacun sa boussole, la tienne est centrée sur tes désaccords avec les organisateurs et la mienne sur les revendications des manifestants. Tu ne veux pas cautionner les dirigeants et mois je veux être avec ceux qui manifestent.
Si on était centrés sur les désaccords avec les organisateurs, on n'appellerait pas non plus pour le 12 septembre !
Mais, sans être d'accord avec toi, je comprends très bien ta position, elle se défend et d'ailleurs à chaque fois ça se discute de participer ou pas à une manifestation. Notre boussole à LO n'est pas centrée sur les désaccords avec les organisateurs, mais sur ce que l'on ressent à travers nos trop peu nombreuses (mais néanmoins efficaces) racines (ou antennes) dans les usines et les bureaux : quel est l'état d'esprit des travailleurs à un moment donné (les travailleurs au sens large, pas seulement le milieu étroit des militants), voilà ce qui nous importe ; est-ce que des secteurs plus larges de la classe ouvrière se posent la question d'entrer en lutte ou pas ? Parce que ça sera indispensable pour vaincre.
Dans d'autres circonstances on pourrait appeler à des manifestations avec les mêmes organisateurs et les mêmes désaccords. D'ailleurs, ça nous est déjà arrivé de le faire. Il n'y a pas de recette valable une fois pour toutes, ni de vérité absolue à ce sujet.
http://www.cnewsmatin.fr/politique/2013 ... che-619186
Enfin, quand je critique les organisateurs, ce n'est pas pour avoir organisé la manifestation ! C'est pour leur politique, qui est telle que, si demain, des millions de travailleurs entraient en lutte en se mettant à la remorque d'un Mélenchon (ou aussi bien de la CGT ou du PCF ou d'un avatar du PS) au lieu de se doter de leurs propres organes de décision, alors le mouvement courrait un grand risque de se fourvoyer dans une impasse électorale ou de se voir trahi d'une autre manière, comme en juin 36, comme en mai 68. Typiquement, Mélenchon tape davantage sur les politiciens que sur le patronat (qu'il se contente de dénoncer), parce que son véritable objectif ce n'est pas de faire tomber la loi travail et encore moins d'enlever son pouvoir au patronat, c'est de faire un gouvernement de rechange... ce qui ne solutionnerait aucun problème de fond pour les travailleurs et n'économiserait aucun km de manifestation, les patrons étant toujours là, seule la couleur de la façade aurait changé. Donc, si demain les travailleurs suivent cela, eh bien ce sera comme le taureau qui fonce dans la muleta et pas dans le toreador... beaucoup d'énergie perdue, une énergie pourtant vitale dans le combat contre la classe capitaliste. Et, un peu plus tard, une vague supplémentaire de démoralisation, comme s'il n'y en avait pas déjà assez (j'ai beau me désoler que le camarade Gaby soit si pessimiste, force est de reconnaître que nos petites "antennes" remontent un paysage qui ressemble davantage à ce qu'il décrit qu'à une remontée des luttes, et le frémissement que nous avions senti lors du mouvement contre la loi El Khomri est vite retombé).
J'espère avoir été plus clair (il ne s'agit pas de "leçons", mais d'explication de la position LO, et encore, je ne suis pas "mandaté" par LO pour cela, donc c'est ce que je comprends moi de notre position). C'est vrai que ça n'est pas toujours évident à piger parce que, pour quelqu'un qui n'est pas de LO, les raisonnements de LO sont la plupart du temps interprétés à l'aune de ce qui se pratique dans d'autres organisations ou partis. Or, dans son mode de raisonnement, LO est une organisation radicalement différente qui tient toujours compte des sentiments de la classe ouvrière dans son ensemble pour définir la politique à mener dans le détail (je ne parle pas de l'axe politique général, mais de sa déclinaison à l'instant t). Et que je sache, aucune autre organisation ne procède comme cela...