Voici donc, avant l'élection, un petit profil de l'industrie et des services dans la 8ème circonscription. Elle correspond à peu près au "pays" du Comminges, soit (dans son acception actuelle) la partie Sud du département de la Haute-Garonne, c'est-à-dire la partie pyrénéenne et une partie de son piémont.
La majorité des activités économiques, et notamment industrielles, est située dans la vallée de la Garonne, principal couloir de circulation, avec une autoroute qui mène au Nord-Est vers Muret et Toulouse et à l'Ouest vers les Hautes-Pyrénées (Lannemezan, Tarbes). Au Sud, plus en amont sur la Garonne ou ses affluents, les activités touristiques et thermales prédominent, en particulier dans la station de Bagnères-de-Luchon, alias "Luchon", et à Salies-du-Salat. Le candidat macroniste, ancien rugbyman, est d'ailleurs hôtelier à Luchon tandis que le candidat PS est maire de la toute petite station thermale d'Encausse-les-Thermes.
Saint-GaudensPrincipale commune de la circonscription (11.000 habitants), Saint-Gaudens est une ville populaire et industrielle, située à peu près au centre de la circonscription.
L'usine la plus visible (et la plus odorante) est
Fibre Excellence, qui fabrique de la pâte à papier (260 personnes et 2.500 emplois induits). Elle a plusieurs fois changé de propriétaire et de nom, l'ex-Cellulose d'Aquitaine démarrée en 1957 grâce au Plan Marshall, en dépôt de bilan en 1981, a été rapprochée de l'usine de Tarascon (Bouches-du-Rhône) dans la "Cellulose du Rhône et d'Aquitaine" au sein du groupe La Rochette-Cenpa, puis est devenue Pyrénécell en 1996 et a intégré le groupe canadien
Tembec en 2000. Celui-ci l'a vendue en 2010 à un groupe indonésien,
Paper Excellence, qui l'exploite désormais sous son nom actuel. Durant toutes ces années la capacité de pâte a augmenté mais les effectifs ont fondu (il y a eu jusqu'à 600 personnes). La pâte est produite à partir de bois de feuillus, de résineux ou d'eucalyptus et vendue principalement en France, Espagne et Italie. Cette usine utilise en abondance des produits chimiques dangereux, comme le dioxyde de chlore pour blanchir la pâte, et elle est classée Seveso II seuil haut. Elle est très polluante ; certains milieux écologistes mais aussi, certains riverains, sont régulièrement en conflit avec l'usine à cause de la pollution, de l'odeur ou du bruit.
Ici par exemple, la plaquette PPI (Plan Particulier d'Intervention) de l'usine :
http://www.stgo.fr/wp-content/uploads/2 ... te-PPI.pdfLa société
SERCEL située sur la commune de
Valentine est une filiale de la
CGG (Compagnie Générale de Géophysique) intervenant dans la production de matériels de prospection pour le pétrole et les mines, tels que les appareils d'échographie des sous-sols et des fonds marins. C'est un leader mondial dans son domaine. Son siège est situé près de Nantes, avec plusieurs sites dont celui de Saint-Gaudens qui emploie désormais 220 personnes après un plan de 10 suppressions d'emplois, bien que Saint-Gaudens ait récupéré l'activité de deux petits sites fermés (au total, 112 postes ont été supprimés sur plusieurs sites et au siège, sur 900 au total en France et 2.000 dans le monde). Le volume d'activité confié à la sous-traitance locale a été également réduit.
Les
A.S.C. (Ateliers Sous-traitance du Comminges), qui emploient 150 personnes réparties sur trois sites (2 à
Saint-Gaudens et 1 à
Boussens), réalisent différentes opérations de câblage électrique et électronique ou fabrication de pièces plastiques pour le compte de grands donneurs d'ordre de l'automobile, de l'électronique, du pétrole ou de l'aéronautique (SERCEL, ABB, General Electric, Continental Automotive, Airbus, Safran Turboméca, Latécoère...) Dans l'automobile, à travers le client Continental, les A.S.C. fabriquent des éléments homologués par PSA, Opel, Renault, BMW, Audi. Les A.S.C. semblent affectés par la baisse d'activité pour SERCEL.
Le groupe de BTP
Giuliani est basé à Valentine où ses différentes filiales emploient 90 personnes.
L'usine
SOFACAP, du groupe
Janson Capsules, emploie 75 personnes à la fabrication de capsules de surbouchage en métal ou en plastique pour les bouteilles de vin. Elle a diversifié ses productions et gagné des marchés, comme récemment le fameux "Rosé Canicule" vendu en grandes surfaces à grand renfort de dessins publicitaires du "Chat" de Geluck... Mais l'emploi semble s'être érodé.
La principale zone commerciale de Saint-Gaudens, qui compte notamment un hypermarché
Leclerc et de nombreuses autres enseignes (Conforama, Kiabi, GiFi, Foir'fouille...) est située sur la commune
d'Estancarbon.
Saint-Gaudens possède un
hôpital et celui-ci a connu une forte mobilisation en 2012 contre la restructuration du bloc opératoire qui devait supprimer 2 postes, forçant la direction à renoncer. Au
collège Leclerc, les personnels et parents d'élèves ont protesté contre des fermetures de classe : sous prétexte de 13 élèves en moins, 3 classes fermées, ce qui ferait qu'en quelques années, ce collège aurait perdu 5 classes sur 17. Saint-Gaudens a perdu son antenne de la Banque de France, son Tribunal d'instance et a failli perdre son commissariat de police.
Cazères / Martres-Tolosane / BoussensCe secteur industrialisé correspond à un chapelet de petites communes en aval de Saint-Gaudens (en direction de Toulouse). La plus grosse est Cazères (4.900 habitants), devant Martres-Tolosane (2.300 habitants), Boussens (1.100), Saint-Martory (950) et quelques autres, au total un petit pôle de plus de 10.000 habitants, aussi important que Saint-Gaudens.
L'une des principales usines est
BASF Health & Care Products située à
Boussens. Elle est située sur une plateforme historique où plusieurs sociétés chimiques disparues se sont succédé ou côtoyé, laissant souvent sur place des pollutions importantes ; celles-ci, malgré les travaux de dépollution entrepris, continuent de relarguer des substances nocives dont le chrome, dans les eaux de la nappe phréatique. La partie toujours occupée par le chimiste BASF est l'héritière de la société
Sidobre-Sinnova, qui avait connu en 1989 une explosion ayant fait 4 morts suite à une fuite d'hydrogène ; cette société a ensuite été reprise par le lessivier allemand Henkel et sa filiale
Cognis, rachetée en 2010 par
BASF. L'usine fabrique à partir d'huiles végétales (palme, tournesol, colza, soja...) différents tensio-actifs à base d'alcools gras, qui entrent dans la composition des détergents, des cosmétiques, des peintures etc. Les effectifs n'ont cessé de baisser et sont tombés à 107 personnes, mais, comme toujours dans la chimie, il y a beaucoup d'emplois induits. Cette activité est toujours aussi salissante et dangereuse, mais, comme elle intervient sur des matières végétales, c'est désormais un champion de la "chimie verte" ; elle a récemment reçu la visite de Carole DELGA, présidente PS de la région Occitanie et ancienne élue de
Martres-Tolosane, qui a notamment déclaré : "
Je souhaitais mettre en avant par ma venue les acteurs de la chimie verte en Région Occitanie, une région qui compte de nombreux acteurs dans le domaine de la bio-économie et de l'industrie verte. Ces acteurs donnent une image positive de la chimie dans une région qui a été très marquée par l'accident de l'usine AZF en 2001". Un coup de peinture verte et tout va mieux...
Une autre usine bien visible dans le paysage est la cimenterie
Lafarge-Holcim située à
Martres-Tolosane. Elle emploie directement 110 personnes, ainsi que 30 sous-traitants permanents. En 2017, le groupe a annoncé un investissement de 100 millions d'euros, le plus gros qu'il ait réalisé en France depuis 40 ans. Il se traduira par la construction d'une nouvelle ligne de cuisson pour le clinker, composant principal du ciment, et par la diminution de la consommation énergétique, la baisse des émissions de CO2 et la possibilité de brûler des pneus. Il existe une "cité Lafarge" construite pour les employés de cette usine dans le village de
Roquefort-sur-Garonne.
Une usine plus discrète mais qui emploie directement davantage de monde (220 personnes), est celle de
Continental Automotive à
Boussens. Cette filiale du groupe allemand
Schaeffler / Continental (qui détient les pneus du même nom) est spécialisée dans la fabrication d'éléments électroniques embarqués pour l'automobile ; elle a trois usines en France : Toulouse, de loin la plus grande, Foix en Ariège et enfin Boussens. Issues d'un vieux partenariat entre Renault et Bendix (Rénix), elles sont devenues Siemens Automotive et enfin Continental Automotive. Boussens est spécialisé dans les capteurs de pression des pneumatiques. Les trois usines ont un passé commun, y compris en matière de luttes. En 2010, le plan surnommé "Pépé" (Productivité-Pérennité) visant à réduire de 8 % la masse salariale, a conduit à une levée de boucliers du personnel et des syndicats CGT et CFDT et, malgré le bluff de la direction (qui disait entre autres qu'en cas de non-acceptation, 1.000 emplois seraient supprimés, Boussens et Foix fermeraient), elle a dû reculer. En 2013, les syndicats de ces usines ont aussi participé à une plateforme commune de revendications à l'initiative du comité de lutte de l'usine de pneus Continental de Clairoix, regroupant 7 usines françaises et permettant d'obtenir la hausse de diverses primes que la direction voulait rogner un peu partout (mais elle est repassée à l'attaque en 2014). A noter que le camarade candidat LO suppléant à ces partielles, Olivier GRIMOUX, est technicien de mesures du site de Toulouse et a largement participé à l'organisation de ces luttes.
Autour de
Cazères on trouve également un barrage et une centrale hydroélectriques
d'EDF, sur la Garonne.
Vallée du SalatLe Salat est un affluent de la Garonne qui la rejoint en face de Boussens. Dans la vallée du Salat, l'activité est largement touristique et centrée sur la santé autour de la petite station thermale de
Salies-du-Salat (1.800 habitants), avec son casino, ses thermes, son antenne de l'hôpital de Toulouse... mais il y a une tradition industrielle à
Mazères-sur-Salat, village sinistré par la disparition des fameuses papeteries
L. Lacroix & Fils qui fabriquaient le papier à cigarettes surfin "Riz.la +" (Riz-la-croix). Après des décennies d'existence, en 2002, le propriétaire, le groupe britannique
Imperial Tobacco, décidait la fermeture des dernières installations et le licenciement des 67 derniers travailleurs. Depuis, les autorités locales tentent de ranimer les vieilles friches de la papeterie en y installant toutes sortes d'entreprises dans des locaux devenus sinistres.
Une entreprise déjà implantée localement en a bénéficié :
Cuno Filtration est présent depuis longtemps à
Cassagne, sur la rive droite du Salat, face à Mazères. Elle est spécialisée dans les systèmes de filtration pour l'agroalimentaire, la pharmacie et les biotechnologies. Dès 2004, elle a installé certaines activités dans la friche Lacroix à
Mazères, en bénéficiant d'aides de la municipalité et de la région, en spécialisant ses deux usines : Cassagne sur la fabrication des papiers filtrants et Mazères sur la fabrication des pièces de filtres (injection, moulage) et le montage final. Rachetée en 2005 par le riche groupe américain
3M, la société, qui s'appelle désormais
3M Purification, emploie environ 65 personnes réparties entre les deux unités.
MontréjeauA l'Ouest de Saint-Gaudens,
Montréjeau (2.900 habitants) est une petite ville surtout touristique et commerçante, quoiqu'assez proche de la ville (encore) industrielle de Lannemezan dans les Hautes-Pyrénées voisines. La population tend à augmenter. Montréjeau accueille deux EHPAD, dont l'un, la Résidence du Mont Royal, qui était parvenu à un niveau de vétusté important, a été reconstruit dans le cadre d'un montage financier qui, de fait, se traduit par son passage dans le giron du groupe
Icade, la municipalité n'ayant pas les moyens d'une reconstruction. Icade devient propriétaire par bail emphytéotique de 35 ans.
Saint-Béat / MarignacCes villages à tradition industrielle sont situés au Sud de Montréjeau, en amont, au confluent de la Garonne et de la Pique. Ils ont été sinistrés par la fermeture, en 2002, de l'usine
Péchiney Electro-Métallurgie (PEM) de
Marignac qui fabriquait du magnésium et employait 250 personnes (plus 400 emplois induits). Cette usine avait des conditions de travail particulièrement difficile et avait connu de nombreux accidents (13 morts en 27 ans). La fermeture a vraiment été prise pour ce qu'elle était, une déclaration de guerre, et elle a suscité de très puissantes réactions des travailleurs et de la population locale, avec des rassemblements jusqu'à 2.500 personnes dans le village, et le soutien affiché de divers élus, notamment du PCF. Arlette Laguiller y a également fait un passage en soutien lors de la campagne présidentielle. Il y a eu aussi des manifestations à Saint-Gaudens, parfois communes avec celles de la papeterie Riz.la + qui fermait au même moment, des manifestations à Toulouse, la séquestration d'un directeur, une montée à Paris pour faire annuler un CCE, des mots d'ordre tels que l'interdiction des licenciements ou bien "Rodier, fumier, le pouvoir aux salariés" (Rodier = le PDG)...
Deux articles de LO de l'époque :
https://journal.lutte-ouvriere.org/2001 ... _3015.htmlhttps://journal.lutte-ouvriere.org/2001 ... _3827.htmlMalgré cela, l'usine a quand même fermé, excepté un atelier de fonderie de 30 personnes dénommé
Thermo-Magnésium, repris à Péchiney par un voyou complice qui a, en 2008, licencié les élus du personnel, puis licencié 19 personnes sous prétexte d'avoir fait grève en soutien aux délégués, après avoir exploité l'entreprise dans des conditions grandissantes d'insécurité pour le personnel et l'environnement, jusqu'à sa liquidation en 2009. Ensuite, reprise, pour seulement 720.000 euros, de l'usine et de 15 personnes par la société allemande
Almamet qui promet d'investir et de dépolluer ; rapidement, des explosions surviennent qui conduisent le préfet à suspendre l'exploitation pour plusieurs semaines, puis l'entreprise redémarre. Mais l'effectif tombe à 4 personnes... et en 2013, c'est la fermeture. Une usine de granulés de bois,
Pyrénées Bois Energies, s'est installée à la place, avec 10 personnes et la promesse de monter jusqu'à 20. Elle a démarré en 2016.
Le secteur ne comprend plus qu'une autre usine un peu significative :
OMG, alias
Onyx et Marbres Granulés, à
Saint-Béat, couplée à une carrière souterraine. Elle produit des marbres reconstitués, avec environ 20 travailleurs. Le groupe dont elle dépend compte 6 usines et 10 carrières et en 2009, il est même entré dans le classement des 100 entreprises les plus rentables de France...
LuchonLa ville de
Bagnères-de-Luchon (2.300 habitants mais bien plus pendant les saisons touristiques) est un centre dédié au tourisme (avec la station de ski Luchon-Superbagnères), au thermalisme (avec y compris un hôpital thermal), au bien-être, au commerce, à la santé (deux EHPAD)... Il y a très peu d'industries hormis la petite usine d'embouteillage de la
Société des Eaux Minérales de Luchon qui emploie 25 personnes.
Boulogne-sur-GesseAu Nord-Ouest de la circonscription,
Boulogne-sur-Gesse (1.600 habitants) est très à l'écart des principaux axes de communication. Ce gros village compte entre autres un EHPAD et, à quelques km au Nord, sur la commune de
Péguilhan, l'usine
Arbonis / Satob Construction Bois qui est en fait une filiale de
Vinci participant aux constructions pour des marchés publics ; elle emploie environ 110 personnes et produit des murs à ossature bois et des charpentes, souvent pour de grands projets.
A travers la circonscriptionEn divers points de la circonscription, le secteur public est largement affecté par les politiques d'économies du gouvernement et de ses représentants.
En septembre-octobre 2017, il y a eu une grève à La Poste, dans le village
d'Aspet, qui s'est ensuite étendue au site de
Saint-Gaudens, contre les réorganisations en cours qui conduisent à aggraver la charge de travail des postiers ; la grève a permis de limiter la casse et de maintenir l'ouverture quotidienne du bureau d'Aspet. Au Trésor public, trois trésoreries ont fermé à
L'Isle-en-Dodon,
Aspet et
Aurignac, sur les 10 que compte le secteur, suscitant des protestations (à noter que le candidat de la France Insoumise est contrôleur des finances). A la "
5C" (Communauté de communes dont fait partie Saint-Gaudens), l'austérité gouvernementale se traduit à la fois par des suppressions d'emplois, des remises en cause d'avantages divers du personnel de la 5C, et par une augmentation des impôts pour les habitants. La circonscription a été touchée par la récente mobilisation des EHPAD (publics ou privés), et l'EHPAD de
Barbazan avait déjà connu des luttes en 2017.
* * * * *
Le premier tour de l'élection partielle aura donc lieu le 11 mars 2018, dans une circonscription où il y a eu plusieurs luttes importantes, où les syndicats sont présents et nombreux, et où la gauche au complet est bien représentée et a des militants (PCF, FI, PS...) La présidente PS de la région Occitanie y a une implantation historique, y fait souvent parler d'elle et c'est un renfort de poids pour le candidat PS. Mélenchon est venu avec Ruffin pour soutenir le candidat LFI. Le PCF a sa propre candidate... LO n'a pas de personnalité locale connue, mais a certainement un milieu de sympathisants et le journal relate depuis très longtemps déjà les événements locaux.